Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... G... et Mme H... C... épouse G... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2020 par lequel le maire de Séguret a refusé de leur délivrer un permis de construire ainsi que la décision rejetant le recours gracieux qu'ils ont formé le 2 juin 2020.
Par un jugement n° 2002158 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 14 mai 2022, 24 avril 2023, 2 mai 2023 et 14 mai 2023, M. et Mme G..., représentés par Me Hequet, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2020 du maire de Séguret et la décision rejetant le recours gracieux formé le 2 juin 2020 ;
3°) d'enjoindre au maire de Séguret de réinstruire leur demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Séguret une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'avis conforme du préfet de Vaucluse est entaché d'un vice d'incompétence ;
- en application des dispositions de l'article R. 423-59 du code de l'urbanisme, l'avis du préfet de Vaucluse, devait être considéré comme étant " réputé favorable " puisque si l'avis est daté du 10 janvier 2020 il n'est pas parvenu en mairie avant l'expiration du délai d'un mois, soit avant le 12 janvier 2020 ;
- il est entaché d'erreur de fait et d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L. 111-3 et L. 111-4 du code de l'urbanisme ; le terrain est situé dans les parties urbanisées de la commune ; du seul fait de sa localisation le projet n'a pas pour effet d'étendre la partie urbanisée ; le terrain d'assiette du projet est localisé dans un secteur où sont déjà regroupées plusieurs habitations desservies par des voies d'accès et où sont présents des réseaux d'eau, d'assainissement et d'électricité ; il est dans un espace en contiguïté de ces parcelles bâties et il est desservi par les équipements publics ;
- la décision portant refus de permis de construire est insuffisamment motivée ;
- le maire s'est estimé à tort en situation de compétence liée ;
- la décision portant refus de permis de construire ayant repris in extenso l'avis défavorable conforme du préfet de Vaucluse, il est entaché des mêmes vices et erreurs de fait et manifeste d'appréciation.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 23 février 2023 et 5 mai 2023, la commune de Séguret, représentée par Me Clauzade, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme G... une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme G... sont infondés ou inopérants.
Par ordonnance du 24 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- et les observations de Me Clauzade, représentant la commune de Séguret.
Une note en délibéré, présentée par M. et Mme G..., représentés par Me Nicolas Hequet, a été enregistrée le 28 février 2024.
Considérant ce qui suit :
1. M et Mme G... ont déposé une demande de permis de construire en vue de la réalisation d'une maison individuelle avec garage et abri voiture attenants, pour une surface de plancher de 137,80 m², sur un terrain situé au lieudit " Le Clos ", sur le territoire de la commune de Séguret (Vaucluse). Par un arrêté du 28 janvier 2020, le maire de Séguret a refusé de leur délivrer un permis de construire. M et Mme G... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi que de la décision rejetant le recours gracieux qu'ils ont formé le 2 juin 2020.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne les règles d'urbanisme applicables :
2. Aux termes de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu ; (...) ". L'article L. 174-3 du même code dispose que : " Lorsqu'une procédure de révision du plan d'occupation des sols a été engagée avant le 31 décembre 2015, cette procédure peut être menée à terme en application des articles L. 123-1 et suivants, dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, sous réserve d'être achevée au plus tard le 26 mars 2017 ou, dans les communes d'outre-mer, le 26 septembre 2018. Les dispositions du plan d'occupation des sols restent en vigueur jusqu'à l'approbation du plan local d'urbanisme et au plus tard jusqu'à cette dernière date. ".
3. En application de l'article L. 174-3 précité du code de l'urbanisme, le plan d'occupation des sols de la commune de Séguret est devenu caduc le 27 mars 2017 et les règles d'urbanisme issues du règlement national d'urbanisme s'appliquent désormais sur ce territoire communal. Conformément aux dispositions précitées de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, l'avis conforme du préfet de Vaucluse a été recueilli le 10 janvier 2020.
En ce qui concerne l'avis conforme du préfet de Vaucluse du 10 janvier 2020 :
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis a été émis pour le préfet de Vaucluse par le directeur départemental adjoint des territoires de Vaucluse, M. F... B.... Par arrêté du 4 juin 2018, régulièrement publié le 4 juin 2018 au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture n° 030, le préfet de Vaucluse a, contrairement à ce que soutiennent les requérants, donné délégation de signature à Mme D... E..., directrice départementale des territoires à l'effet de signer notamment les avis conformes du représentant de l'État prévus par l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme. Par arrêté en date du 6 juin 2018, régulièrement publié le 7 juin 2018 au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture n° 033, la directrice départementale des territoires de Vaucluse, a donné subdélégation de signature à M. B... à l'effet de signer ces avis. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis conforme du préfet manque en fait et doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-59 du code de l'urbanisme : " Sous réserve des dispositions des articles L. 752-4, L. 752-14 et L. 752-17 du code de commerce et des exceptions prévues aux articles R*423-60 à R*423-71-1, les collectivités territoriales, services, autorités ou commissions qui n'ont pas fait parvenir à l'autorité compétente leur réponse motivée dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande d'avis sont réputés avoir émis un avis favorable ".
6. Ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, le préfet de Vaucluse a émis un avis défavorable le 10 janvier 2020, reçu le 13 janvier suivant en mairie. Si les appelants allèguent qu'un avis favorable tacite est né à défaut de réception d'un avis explicite dans le délai d'un mois suivant la saisine du préfet intervenue le 10 décembre 2019 sur le fondement de l'article R. 423-59 du code de l'urbanisme, soit le 10 janvier 2020, l'avis défavorable du préfet reçu le 13 janvier 2020 en mairie est venu nécessairement se substituer à cet avis tacite favorable. Par suite, le maire de la commune, dont il n'est pas allégué qu'il n'avait pas reçu l'avis défavorable avant de refuser de délivrer le permis de construire litigieux, n'a pas commis d'erreur de droit en estimant se trouver en situation de compétence liée et en refusant de délivrer l'autorisation d'urbanisme demandée.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ". Aux termes de l'article L.111-4 du même code : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : / 1°) L'adaptation, le changement de destination, la réfection, l'extension des constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d'habitation à l'intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d'une ancienne exploitation agricole , dans le respect des traditions architecturales locales ; / 2° les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole (...) ".
8. Ces dispositions interdisent en principe, en l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions implantées " en dehors des parties urbanisées de la commune ", c'est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Il en résulte qu'en dehors du cas où elles relèvent des exceptions expressément et limitativement prévues par l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, les constructions ne peuvent être autorisées dès lors que leur réalisation a pour effet d'étendre la partie urbanisée de la commune. Pour apprécier si un projet a pour effet d'étendre une partie urbanisée de la commune, il est notamment tenu compte de la géographie des lieux, de la desserte par des voies d'accès, de la proximité avec les constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune, du nombre et de la densité des constructions projetées, du sens du développement de l'urbanisation, ainsi que de l'existence de coupures d'urbanisation, qu'elles soient naturelles ou artificielles.
9. Au soutien du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, les requérants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément nouveau par rapport à leur argumentation soulevée en première instance. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le tribunal au point 12 du jugement attaqué.
En ce qui concerne les autres moyens invoqués à l'encontre du refus de permis de construire du 28 janvier 2020 :
10. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que les appelants ne sont pas fondés à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de l'avis défavorable du 10 janvier 2020 du préfet de Vaucluse.
11. En second lieu, ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, le maire de Séguret était en situation de compétence liée pour rejeter la demande de M. et Mme G... compte tenu de l'avis défavorable conforme régulièrement émis par le préfet de Vaucluse. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté est inopérant et ne peut qu'être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Séguret, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que M. et Mme G... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. et Mme G... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Séguret sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme G... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme G... verseront à la commune de Séguret une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G... et Mme H... C... épouse G... et à la commune de Séguret.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 15 février 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2024.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
D. ChabertLa greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL21156