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07/03/2024 | FRANCE | N°22TL00390

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 07 mars 2024, 22TL00390


Vu la procédure suivante :



Par une requête enregistrée le 30 janvier 2022, sous le n° 22MA00390 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 22TL00390 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société par actions simplifiée CSF, représentée par Me Jourdan, demande à la cour :



1°) d'annuler le permis de construire n° PC 84089 20 H00078 du 30 novembre 2021 délivré par le maire de Pertuis à la société en nom collectif (SNC) Lidl valant autorisation d'exploitation commerciale pour la constr

uction d'un bâtiment en R+2 à usage de surface commerciale alimentaire à l'enseigne " Lid...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2022, sous le n° 22MA00390 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 22TL00390 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société par actions simplifiée CSF, représentée par Me Jourdan, demande à la cour :

1°) d'annuler le permis de construire n° PC 84089 20 H00078 du 30 novembre 2021 délivré par le maire de Pertuis à la société en nom collectif (SNC) Lidl valant autorisation d'exploitation commerciale pour la construction d'un bâtiment en R+2 à usage de surface commerciale alimentaire à l'enseigne " Lidl " d'une surface de plancher de 2 394,19 m² ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Pertuis une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt à agir en tant qu'exploitante d'un magasin à l'enseigne " Carrefour market " sur le territoire de la commune de Pertuis à 200 mètres du projet autorisé ;

- le permis de construire attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- le projet n'est pas compatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Pays d'Aix ;

- les critères de l'article L. 752-6 du code de commerce n'ont pas été respectés en ce qui concerne l'aménagement du territoire, s'agissant de ses effets sur l'animation de la vie urbaine ainsi que sur les flux de circulation et les transports collectifs ;

- les critères de l'article L. 752-6 du code de commerce n'ont pas été respectés en ce qui concerne le développement durable, au vu de l'absence de qualité architecturale et paysagère ;

- les critères de l'article L. 752-6 du code de commerce n'ont pas été respectés en ce qui concerne la protection du consommateur.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2022, la société Lidl, représentée par la SELARL Leonem, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société requérante une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2023, la commune de Pertuis, représentée par Me Xoual, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 24 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 7 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le décret n° 2019-331 du 17 avril 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Clauzade, substituant Me Xoual, représentant la commune de Pertuis ;

- et les observations de Me Maetz, représentant la société Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. La société Lidl a déposé le 29 mars 2021 auprès des services de la commune de Pertuis (Vaucluse) une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la reconstruction d'un magasin Lidl de 299 m² de surface de vente exploité depuis vingt ans dans la principale zone commerciale au sud de Pertuis dite " ZAC Saint Martin ", et dont la surface de vente sera portée à 1 277 m² de vente, soit 978 m² de vente supplémentaires. Le projet s'accompagne d'une modification de l'exploitation, avec une surface de vente reconstruite en R+1, et un parc de stationnement en grande majorité couvert sous le magasin. Le 18 mai 2021, la commission départementale d'aménagement commercial de Vaucluse a émis un avis favorable au projet. Le 14 octobre 2021, sur recours de la société CSF, qui exploite un commerce concurrent, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis également favorable au projet. Par un arrêté n° PC 84089 20 H00078 du 30 novembre 2021, le maire de Pertuis a délivré à la société Lidl le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale sollicité. Par la présente requête, la société CSF demande l'annulation de cet arrêté en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne le vice d'incompétence de l'arrêté en litige :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., signataire de la décision attaquée, a reçu délégation, par un arrêté du maire de Pertuis du 16 octobre 2020 transmis en préfecture le 21 octobre 2020 et régulièrement affiché en mairie, en sa qualité d'adjoint au maire, à l'effet notamment de signer les décisions intervenant en matière d'urbanisme et comprenant les permis de construire. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire attaqué serait illégal faute pour la commune de justifier d'une délégation régulière de son signataire doit être écarté.

En ce qui concerne la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale du Pays d'Aix :

3. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I. - L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. (...) ".

4. A l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci, avec lesquels les autorisations délivrées par les commissions d'aménagement commercial doivent être compatibles, doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. En matière d'aménagement commercial, s'il ne leur appartient pas, sous réserve des dispositions applicables aux zones d'aménagement commercial, d'interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d'extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d'implantations préférentielles des activités commerciales, définis en considération des exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement ou de qualité de l'urbanisme. Si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent.

5. En premier lieu, il ne résulte ni des dispositions ci-dessus reproduites du code de commerce ni d'aucune autre disposition qu'une autorisation d'exploitation commerciale doive être compatible avec le projet d'aménagement et de développement durables du schéma de cohérence territoriale. La société requérante ne peut donc utilement soutenir que le projet en litige est incompatible avec les nécessités qu'il prévoit de " favoriser la revitalisation des centres-villes et villages et maîtriser le développement de zones périphériques ".

6. En second lieu, le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale du Pays d'Aix, dont le périmètre comprend la commune de Pertuis, prévoit d'organiser le développement commercial et expose que l'appareil commercial du territoire apparaît particulièrement développé et attractif. Il capte une importante clientèle métropolitaine et bénéficie d'opportunités offertes par une fréquentation touristique importante. Il se caractérise à la fois par une forte concentration de l'offre dans les grandes zones commerciales situées au Sud du Pays d'Aix, par une offre plus limitée dans les centres-villes à l'exception de celui d'Aix-en-Provence et par la présence de nombreuses polarités commerciales secondaires en tissu urbain ou en discontinuité des espaces urbanisés. Le schéma de cohérence territoriale vise à modifier ce mode de développement trop consommateur d'espace, ce qui permettra aussi de réduire les déplacements motorisés et de limiter l'impact sur l'environnement et le cadre de vie, tout en visant à une satisfaction optimale des consommateurs. Le document précise, au titre de l'orientation 2.1.1 " Promouvoir une utilisation économe de l'espace dans les sites économiques ", que " La réussite économique du Pays d'Aix est notamment liée à l'existence de nombreuses zones d'activités. Le maintien de sa performance nécessite la préservation d'une offre de ce type. Dans un souci de gestion économe de l'espace et des ressources, le développement économique se fera de manière prioritaire par des opérations d'optimisation des espaces existants. ". Dans ce cadre, la prescription P85 prévoit qu'" Il s'agit de privilégier la requalification et la densification des zones d'activités existantes en amont d'éventuelle extension ou création. L'ouverture à l'urbanisation est conditionnée à la justification de l'utilisation optimale des espaces urbanisés déjà existants situés sur la commune ou les communes limitrophes (densification, aménagement interne...). En particulier pour les sites de niveau métropolitain, l'ouverture à l'urbanisation est également conditionnée à la desserte par les transports collectifs. Les programmes devront prévoir des services aux entreprises et aux salariés. Les projets devront privilégier une haute qualité urbaine et architecturale. ". Au titre de l'orientation 3.2.1 " Orienter la localisation des commerces au travers de cinq niveaux d'offre ", le même document indique qu'" Afin de prendre en compte l'évolution des comportements d'achats et les exigences du territoire, le SCOT oriente la localisation préférentielle des commerces. Il s'agit notamment de veiller à réserver des zones dédiées à l'activité commerciale, de limiter la consommation d'espaces, de favoriser la revitalisation des centres-villes et le maintien de commerces de proximité, et de promouvoir un aménagement commercial durable. ". La prescription P132 prévoit que : " Afin d'affirmer une armature commerciale hiérarchisée, le développement commercial se répartit préférentiellement dans les espaces identifiés dans la carte n° 7 du DOO " et celle P133 indique que : " La localisation préférentielle des commerces doit tenir compte de la typologie des différents espaces (morphologie, accessibilité, enjeux associés...), de la fréquence et de la nature des achats à y effectuer selon le tableau n° 5 et la carte n° 7 du DOO. ". Enfin, au titre de l'orientation 3.2.4 " Favoriser la revitalisation du commerce de centre-ville et des village ", la prescription P139 dispose que : " Les espaces des centres-villes et des villages identifiés ci-dessous doivent pouvoir favoriser l'accueil des commerces de niveaux (détaillés dans le tableau n° 5 du DOO) : (...) • " 1 à 4 " pour Pertuis, Gardanne, Trets et Vitrolles (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Pertuis est identifiée par le schéma de cohérence territoriale du Pays d'Aix comme un espace de développement prioritaire de rayonnement associant économie, logements, transports, commerces, services et équipements. Le projet, qui consiste à étendre de 978 m² une surface de vente de près de 300 m² existante depuis vingt ans et portant démolition-reconstruction sur le même site, se situe dans la continuité du tissu urbain et de la zone commerciale existante de la zone d'aménagement concerté (ZAC) Saint Martin, principal pôle commercial de l'agglomération de Pertuis et du pays d'Aigues. Il ressort également des pièces du dossier que la zone de chalandise dans laquelle est implanté le projet en litige connaît une hausse de sa population de l'ordre de 10 % entre 2007 et 2018, tandis que la commune de Pertuis a connu une progression de 8,1 %. Ledit projet s'intègre dans une zone dont le niveau de l'offre est caractérisé par le tableau n° 5 du document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Pays d'Aix comme hebdomadaire correspondant notamment aux activités alimentaires généralistes, surgelés, alimentaires spécialisées, produits d'hygiène et d'entretien. Alors que le document d'orientation et d'objectifs vise à conforter les espaces commerciaux dans le tissu urbanisé pour assurer une fonction de proximité complémentaire de celle des centres-villes, le projet, qui répond à des besoins hebdomadaires, est ainsi compatible avec ces orientations du document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale. Enfin, il ressort des pièces du dossier que le projet révèle un effort d'amélioration de son insertion architecturale, de végétalisation des parkings en surfaces et d'aménagement de cheminements doux au regard des recommandations R74, R75 et R76 du document. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le moyen tiré du caractère incompatible du projet avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale doit être écarté.

En ce qui concerne le respect des objectifs et des critères de l'article L. 752-6 du code de commerce :

8. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa version alors applicable : " (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / (...) 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; (...) / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / (...) ".

S'agissant de l'aménagement du territoire :

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet de la société pétitionnaire consiste à étendre, en en augmentant la surface de vente, un magasin existant et s'insère dans un tissu commercial de la zone de chalandise présentant une réelle solidité, les centres-bourgs profitant du caractère patrimonial des villages du Sud Luberon, le commerce de périphérie étant bien positionné en entrée de ville de Pertuis pour rayonner sur l'ensemble du Pays d'Aigues et dans un contexte global d'attractivité grâce à la relative proximité du pôle urbain d'Aix-en-Provence. Si la société requérante fait valoir que le projet autorisé est de nature à fragiliser l'animation et l'offre commerciale du centre-ville de Pertuis, eu égard notamment au taux de vacance important, avec près de 18 % en 2020 des emplacements non occupés en son sein, il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que la vacance commerciale ne concerne pas les activités alimentaires, alors que le marché alimentaire du secteur de Pertuis ne présente pas de saturation avec une part de marché légèrement inférieure de la grande distribution alimentaire et connaît au demeurant un taux d'évasion relativement significatif de 10 %, en lien avec la proximité d'Aix, pôle commercial et d'emplois majeur. Ainsi, alors qu'il s'implante en lieu et place du magasin Lidl existant dans une zone d'activités, et que la délivrance de l'autorisation ne peut être subordonnée à l'absence de toute incidence négative sur les centres-villes, le projet autorisé ne peut être regardé comme conduisant à un déséquilibre du maillage commercial de Pertuis.

10. Il ressort également des pièces du dossier que le projet autorisé se situe dans une zone commerciale existante et qu'il sera accessible par les transports en commun, comptant notamment six lignes de bus, et desservi par des aménagements piétons et cyclables. En outre, si la société requérante, s'appuyant sur le rapport d'instruction de la direction départementale des territoires de Vaucluse, fait valoir que le projet aura un impact supplémentaire sur la congestion du trafic déjà observé sur l'axe de la route départementale 956 dite " Route d'Aix ", il n'est pas sérieusement contesté que le flux de circulations automobiles généré par le projet est évalué à environ 800 véhicules supplémentaires par jour, soit moins de 6 % du trafic actuel, et que le magasin existant exploité sous l'enseigne Lidl est déjà ancré dans les habitudes de consommation des habitants.

11. Ainsi, il n'apparaît pas que le projet méconnaîtrait les exigences d'aménagement du territoire définies par l'article L. 752-6 du code de commerce apprécié notamment au regard des critères d'animation de la vie urbaine et des flux de transport.

S'agissant du développement durable :

12. Il ressort des pièces du dossier que le projet est implanté dans un site caractérisé par des constructions disparates affectées aux activités économiques, dépourvues d'intérêt architectural, et où ce site est entièrement artificialisé. Il ressort également des pièces du dossier que le projet présente une architecture contemporaine habituelle pour ce type d'activité, avec de nombreuses surfaces vitrées et des façades constituées de panneaux en béton revêtus pour le soubassement d'un enduit gratté de teinte grise et, pour le reste, d'un enduit gratté de teinte blanche, similaire à celle des constructions environnantes. Si la société requérante soutient que l'architecture du bâtiment est standardisée, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur l'objectif d'insertion du projet dans le paysage dès lors que le site dans lequel il est destiné à être implanté, situé dans une zone commerciale, ne présente pas d'enjeux environnementaux ou architecturaux particuliers. Par suite, alors que le magasin Lidl s'insère dans la continuité des autres bâtiments d'activité et que sa hauteur n'est pas supérieure à celle des magasins voisins, le projet ne peut être regardé comme créant une discordance par rapport à son environnement immédiat, en particulier au regard des caractéristiques propres, s'agissant de l'aspect des constructions, à la zone UE définie par le règlement du plan local d'urbanisme de Pertuis comme une zone destinée à accueillir " des activités économiques de nature variée ". Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la société requérante, la surface dédiée aux espaces verts passera de 348,88 m² à 682,06 m² après travaux, entraînant une diminution significative de l'imperméabilisation du site. Enfin, le projet comprend 69 places de stationnement, dont 58 places situées sous le magasin et 11 places extérieures en pavés drainants, contre 102 places actuellement, entièrement imperméabilisées et situées en extérieur. Le projet prévoit en outre la plantation de 8 arbres de haute tige persistant au niveau du parking extérieur et de haies bocagères et la conservation de 2 arbres existants. Il résulte de ce qui précède que le projet ne compromet pas les objectifs de développement durable visés par l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de la protection des consommateurs :

13. Il ressort des pièces du dossier que le projet a notamment pour but d'améliorer le confort d'achat des consommateurs en modernisant la structure du supermarché, vétuste et exigu. La société requérante reprend au titre de la protection des consommateurs ses arguments déjà analysés ci-dessus, notamment sur l'absence d'accessibilité du projet, situé à 17 minutes à pied du centre-ville de la commune, et de revitalisation du tissu commercial. Alors que la circonstance que la majorité de la clientèle se rendra au magasin en voiture ne suffit pas à compromettre l'objectif d'accessibilité fixé par le législateur, il résulte de ce qui précède que lesdits arguments ne sont pas de nature à démontrer que le projet compromettrait les objectifs de protection des consommateurs mentionnés par la loi.

14. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société CSF n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire délivré le 30 novembre 2021 par le maire de Pertuis à la société Lidl en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée par la société requérante au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion de cette instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Pertuis et une somme de 2 000 euros à la société Lidl au titre des frais exposés par elles dans cette instance sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société CSF est rejetée.

Article 2 : La société CSF versera à la commune de Pertuis une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La société CSF versera à la société Lidl une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée CSF, à la commune de Pertuis, à la société en nom collectif Lidl et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 15 février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2024.

Le rapporteur,

X. HaïliLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL00390


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL00390
Date de la décision : 07/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-043 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : XOUAL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-07;22tl00390 ?
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