Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 9 décembre 2020 par laquelle le maire d'Ayguatébia-Talau a refusé de faire procéder au déneigement des voiries desservant ses propriétés.
Par un jugement n° 2101552 du 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2022, et un mémoire, enregistré le 9 février 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Joubes, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 octobre 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler la décision du 9 décembre 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ayguatébia-Talau a refusé de procéder au déneigement des voiries desservant ses propriétés ;
3°) d'enjoindre au maire d'Ayguatébia-Talau de faire procéder au déneigement des voiries desservant ses propriétés ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Ayguatébia-Talau une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier faute pour la minute de comporter les signatures requises par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- la décision attaquée est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le maire doit assurer le déneigement des voies en application de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales et de l'article L. 141-8 du code de la voirie routière ;
- la décision attaquée crée une rupture d'égalité devant les charges publiques.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 juillet 2023, la commune d'Ayguatébia-Talau, représentée par Me Bonnet, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête de M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier était irrecevable en tant qu'elle ne tendait pas à l'annulation d'une décision défavorable ;
- le refus du maire n'avait pas à être motivé ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces de ce dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder,
- les conclusions de Françoise Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Diaz représentant M. B... et de Me Chatron substituant Me Bonnet, représentant la commune intimée.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courriel du 9 décembre 2020, M. B..., habitant de la commune d'Ayguatébia-Talau (Pyrénées-Orientales), a demandé au maire de cette commune qu'il fasse procéder au déneigement des voiries desservant ses propriétés. Par un courriel du même jour, il a été informé que le salage des parties ombragées du village avait été effectué par l'unique agent communal mais que les moyens dont disposait la commune ne lui permettaient pas d'accéder prioritairement à sa demande. Saisi par l'intéressé, le tribunal administratif de Montpellier a, par un jugement du 18 octobre 2022 dont il relève appel, rejeté sa requête tendant notamment à l'annulation de ce refus et à ce qu'il soit enjoint au maire de faire procéder aux travaux de déneigement sollicités.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement contesté a été signée par le président de la formation de jugement, la rapporteure ainsi que par la greffière d'audience. Par suite, le moyen tiré du caractère irrégulier du jugement contesté, faute de signature de la minute, manque en fait et doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.
À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". La décision par laquelle le maire refuse de prendre une mesure de police n'est pas au nombre des actes devant être motivés en vertu des dispositions précitées. Dès lors, M. B... ne peut utilement s'en prévaloir pour soutenir que le courriel du 9 décembre 2020 matérialisant le refus du maire de la commune d'Ayguatébia-Talau de faire procéder au déneigement des voies publiques jouxtant ses propriétés ne comporterait pas l'indication suffisante des motifs de droit et de fait sur lesquels il repose. Au demeurant et, comme l'ont retenu les premiers juges, ce courriel fait une référence expresse à l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, qui constitue la base légale de cette décision, et énonce les raisons pour lesquelles le maire n'a pas accédé à la demande qui lui était présentée. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a écarté ce moyen tiré du défaut de motivation de la décision litigieuse.
5. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine, l'interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants ou causer des exhalaisons nuisibles ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées (...) ".
6. Le refus opposé par un maire à une demande tendant à ce qu'il fasse usage des pouvoirs de police qui lui sont conférés par les dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales n'est entaché d'illégalité que dans le cas où, en raison de la gravité du péril résultant d'une situation particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité ou la salubrité publique, cette autorité, en n'ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser ce péril grave, méconnaît ses obligations légales. S'agissant des routes ou chemins enneigés, susceptibles par nature de présenter un péril grave pour leurs usagers, les mesures que l'autorité de police doit prendre en vue d'assurer le déneigement dépendent de l'importance et de la nature de la circulation publique sur les voies ainsi que des fonctions de desserte de celles-ci. Il appartient donc à l'autorité municipale de se déterminer au regard des risques propres engendrés pour la sécurité générale par la réalisation même des travaux de déneigement et, compte tenu de ces éléments, de décider de ne pas déneiger telle ou telle voie communale, sous réserve de respecter l'égalité des citoyens devant les charges publiques.
7. D'une part, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que le refus du maire d'accéder à la demande de M. B... est fondé sur l'insuffisance des moyens de la commune, qui compte seulement trente-sept habitants et n'est pourvue que d'un seul agent chargé de l'entretien de toutes les voiries communales. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier et notamment des constatations d'huissier réalisées à la demande de l'appelant que les parties de la voie publique concernées par la décision de refus litigieuse sont constituées d'une impasse piétonne qui débouche sur la propriété de l'appelant et qui, par principe, ne doit donc supporter le passage d'aucun véhicule. Dans ces conditions, et alors d'ailleurs qu'il est suffisamment établi par les pièces du dossier que les moyens humains et matériels à la disposition du maire sont prioritairement affectés au déneigement d'autres voies publiques plus empruntées, telle que la rue de l'église, qui relient les deux axes routiers principaux menant au centre bourg, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance par le maire d'Ayguatébia-Talau des dispositions précitées de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.
8. Par ailleurs, en se bornant à alléguer que les autres habitants de la commune bénéficieraient d'un déneigement et d'un salage des voies communales menant à leurs propriétés, sans que cet état de fait ressorte d'aucune des pièces du dossier et notamment pas des deux constats d'huissier dressés à sa demande, M. B... n'apporte pas davantage en appel qu'en première instance les éléments de nature à établir qu'une voie communale présentant des caractéristiques similaires à celle faisant l'objet de ses demandes donnerait lieu à un déneigement plus régulier, de sorte qu'il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a, aux termes du jugement attaqué, écarté le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Ayguatébia-Talau, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent également qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune d'Ayguatébia-Talau, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante. En revanche, il y a lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros.
DÉCIDE:
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera une somme de 1 500 euros à la commune d'Ayguatébia-Talau sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune d'Ayguatébia-Talau.
Délibéré après l'audience du 13 février 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président de chambre,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2024.
Le président-rapporteur,
É. Rey-Bèthbéder
Le président-assesseur,
P. BentolilaLa greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°22TL22571 2