Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société en nom collectif Sarzi, M. C... A..., l'entreprise individuelle à responsabilité limitée Patricia Vals et la société en nom collectif Tabac journaux du stade Pinier ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 28 mars 2019 par laquelle le maire d'Albi a autorisé Mme B... à déplacer son débit de tabac du ... ainsi que le contrat de gérance conclu entre la société MMVP et les services de l'État .
Par un jugement n° 1902919 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mai 2022 et le 15 mai 2023, M. A..., l'EIRL Patricia Vals et la SNC Tabac journaux du stade Pinier, représentés par Me Montazeau, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2022 du tribunal administratif de Toulouse :
2°) d'annuler la décision du 28 mars 2019 par laquelle le maire d'Albi a autorisé Mme B... à déplacer son débit de tabac du ... ainsi que le contrat de gérance conclu entre la société MMVP et les services de l'État ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Albi la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le déplacement autorisé a pour effet, au regard de l'article 9 du décret du 28 juin 2010 relatif à l'exercice du monopole de la vente au détail des tabacs manufacturés, de déséquilibrer le réseau local existant des débits de tabac ;
- par ailleurs les chiffres d'affaires dont il a été tenu compte ont été faussés par le fait qu'ils portaient sur la période de crise sanitaire au cours de laquelle les débitants de tabac, ont connu une augmentation de leurs chiffres d'affaires ;
- c'est, en outre, à tort que les premiers juges ont considéré que le ..., lieu dans lequel le déplacement a été autorisé, ne pouvait être regardé au sens de l'article 11 du décret du 28 juin 2010 comme l'adresse d'un centre commercial, lieu dans lequel les déplacements de débit de tabac sont interdits.
Par des mémoires, enregistrés le 12 décembre 2022 et le 30 mai 2023, le ministre chargé des comptes publics conclu au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 21 décembre 2022, la commune d'Albi représentée par Me Fernandez-Begault, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2023, la SNC MMVP, représentée par Me Gil, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des appelants la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que d'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 2 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 5 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009
- le décret n° 2010-720 du 28 juin 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bentolila,
- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique
- et les observations de Me Montazeau, pour M. A..., l'EIRL Patricia Vals et la SNC Tabac journaux du stade Pinier et de Me Denilauler, pour la commune d'Albi
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 28 mars 2019, la maire d'Albi, agissant au nom de l'État, a autorisé Mme B... à déplacer le débit de tabac qu'elle exploite du .... Les sociétés Sarzi et Tabac Journaux du stade Pinier, M. A... et l'entreprise Vals, en leur qualité d'exploitants de débits de tabac à Albi, ont demandé l'annulation de cette décision au tribunal administratif de Toulouse.
2. La société Tabac Journaux du stade Pinier, M. A... et l'entreprise Vals relèvent appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article 13 du décret du 28 juin 2010 relatif à l'exercice du monopole de la vente au détail des tabacs manufacturés : " Un débit de tabac ordinaire permanent peut être déplacé à l'intérieur d'une même commune dans les conditions prévues à l'article 70 de la loi du 12 mai 2009 susvisée ". Aux termes de l'article 70 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 : " Le déplacement, dans la même commune, d'un débit de tabac ordinaire permanent est autorisé par le maire, après avis du directeur régional des douanes et de l'organisation professionnelle représentative sur le plan national des débitants de tabac (...) ".
4, En premier lieu, aux termes de l'article 9 du décret précité du 28 juin 2010 : " L'implantation d'un débit de tabac ne doit pas avoir pour effet de déséquilibrer le réseau local existant de vente au détail des tabacs ". Les circonstances invoquées par les appelants selon lesquelles la direction régionale des douanes et droits indirects de Toulouse et la Confédération des buralistes ont donné des avis défavorables à ce déplacement, respectivement les 5 et 15 février 2019, n'établissent pas en elles-mêmes l'existence d'un déséquilibre sur le réseau local, qui aurait été créé par la décision litigieuse. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, et notamment des données produites par l'administration des comptes publics, qu'entre 2018 et 2019 les appelants ont vu leurs chiffres d'affaires augmenter. En conséquence, ils ne sont pas fondés à soutenir que cette autorisation aurait eu pour effet de déséquilibrer le réseau local existant de vente au détail des tabacs.
5. En second lieu aux termes de l'article 11 du décret précité : " Les implantations de débits de tabac sont interdites : / 1° Dans les galeries marchandes attenantes à un établissement de vente au détail en libre-service qui réalise plus du tiers de son chiffre d'affaires dans la vente de produits alimentaires et dont la surface de vente est supérieure ou égale à 1 000 mètres carrés ; / 2° Dans les centres commerciaux, hormis ceux constitués exclusivement de commerces de proximité desservant principalement ou en totalité les résidents d'une commune ou de l'un de ses quartiers ; / (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que l'implantation du débit de tabac déplacé se situe en bordure de la route départementale 999 au sein de la zone industrielle et commerciale " Montplaisir " dans la partie Est de la ville d'Albi. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le bâtiment d'implantation, de ce débit de tabac, accessible directement depuis la voie publique, est situé au sein d'un pôle de petits commerces et de services, qui comprend également le magasin exploité sous l'enseigne RAGT, dont l'activité essentielle est la vente de produits pour le jardin, la maison et les loisirs de plein air. Dans ces conditions, en l'absence de lien fonctionnel entre le bâtiment d'implantation du débit de tabac et les autres commerces, notamment le magasin RAGT, et en admettant même que, comme le font valoir les appelants, ce magasin aurait une surface de plus de 1 000 m², entraînant la soumission à autorisation d'exploitation commerciale conformément à l'article L. 752-1 du code de commerce, l'implantation du débit de tabac déplacé ne peut être regardée au sens des dispositions précitées de l'article 11 du décret du 28 juin 2010 comme s'opérant dans une galerie marchande ou dans un centre commercial. Le moyen tiré du manquement à ces dispositions doit donc être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A..., l'entreprise Patricia Vals et la société Tabac Journaux du stade Pinier ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Albi, qui n'est en tout état de cause pas perdante dans ce litige, la somme que demandent les appelants sur le fondement de ces dispositions. Par ailleurs les conclusions présentées par la commune d'Albi sur ce fondement ne peuvent être que rejetées faute pour la commune d'Albi d'avoir la qualité de partie, dès lors que la décision en litige a été prise par le maire au nom de l'État. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. C... A..., de l'entreprise Patricia Vals, de la SNC Tabac Journaux du stade Pinier, pour chacun d'entre eux la somme de 500 euros au profit de la SNC MMVP, venant aux droits de Mme B....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A..., de l'entreprise Patricia Vals, et de la SNC Tabac Journaux du stade Pinier est rejetée.
Article 2 : M. C... A..., l'entreprise Patricia Vals, la SNC Tabac Journaux du stade Pinier, verseront, chacun, la somme de 500 euros au profit de la SNC MMVP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à l'entreprise Patricia Vals, à la SNC Tabac Journaux du stade Pinier, à la SNC MMVP, à la commune d'Albi, à Mme D... B... et au ministre chargé des comptes publics. Copie en sera adressée au préfet du Tarn.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2024 à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2024.
Le rapporteur
P. Bentolila
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre chargé des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22TL21249 2