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21/11/2023 | FRANCE | N°22TL22049

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 21 novembre 2023, 22TL22049


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2020, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100701 du 7 janvier 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

ête enregistrée le 29 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Laspalles, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2020, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100701 du 7 janvier 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Laspalles, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 janvier 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à tout le moins, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ;

- cette décision est intervenue sur une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- son droit à être entendu, garanti par les principes généraux du droit communautaire, a été méconnu ;

- le refus de séjour est entaché d'un défaut d'examen sérieux et personnel de sa situation, le préfet n'ayant pas usé de son pouvoir de régularisation, qu'il peut exercer en toute opportunité ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée au regard du fait qu'elle ne disposait pas d'un visa de long séjour ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur d'appréciation quant à la question de la réalité et du sérieux de ses études ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ; elle méconnait également le droit à être entendu prévu par les principes généraux du droit communautaire.

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes raisons que celles exposées concernant le refus de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant à un mois le délai de départ volontaire est entachée d'un défaut de motivation en ce qu'elle n'indique pas, au regard notamment de la directive " retour ", les raisons pour lesquelles il ne lui a pas été accordé un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

-cette décision est dépourvue de base légale et entachée d'une erreur de droit faute pour le préfet d'avoir examiné sa situation au regard de l'ensemble des critères applicables et notamment de ceux de la directive " retour " ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation, le préfet s'étant estimé en situation de compétence liée ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement est entachée d'un défaut de motivation quant à l'existence des risques encourus dans le pays d'origine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du 16 décembre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a admis Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/UE du 16 décembre 2008 ;

- la convention franco-ivoirienne relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Abidjan le 21 septembre 1992 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bentolila, président-assesseur a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante ivoirienne, née le 9 mai 1994, est entrée en France le 3 octobre 2015 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour " étudiant " valant titre de séjour valable du 1er octobre 2015 au 1er octobre 2016. Elle a bénéficié d'une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " étudiant " régulièrement renouvelée jusqu'au 1er octobre 2019. Le 26 septembre 2019, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour " étudiant ". Il n'a pas été donné suite à cette demande en raison de son caractère incomplet. Le 3 novembre 2020, elle a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiante. Par un arrêté du 23 novembre 2020, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui attribuer le titre demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Mme A... relève appel du jugement du 7 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Et aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Haute-Garonne a visé les articles, et notamment son article 9, de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 et les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a entendu faire application. Il mentionne en outre les conditions de l'entrée en France de façon régulière, de l'intéressée, rappelle les différents titres de séjour obtenus par elle en qualité d'étudiante, ainsi que les éléments afférents à son cursus universitaire à raison desquels le préfet a estimé que la condition tenant au caractère réel et sérieux des études suivies par Mme A... n'était pas justifiée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". La décision de refus de séjour ayant été prise à la suite d'une demande présentée par Mme A..., cette dernière ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.

5. Le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il implique que le préfet, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision défavorable à ses intérêts, mette l'intéressé à même de présenter ses observations, de sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure avant qu'elle n'intervienne. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il présente cette demande et à produire tous éléments susceptibles de venir à son soutien. Il lui appartient, lors du dépôt de sa demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs même pas soutenu que l'appelante aurait été empêchée de porter à la connaissance des services préfectoraux toutes les informations pertinentes susceptibles de venir au soutien de sa demande. Par suite, le droit de l'intéressée d'être entendu a bien été satisfait avant que n'intervienne le refus litigieux.

6. En troisième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code applicable au litige, " sous réserve des conventions internationales ". Aux termes de l'article 9 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre État doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. Ces dispositions ne font pas obstacle à la possibilité d'effectuer dans l'autre État d'autres types d'études ou de stages de formation dans les conditions prévues par la législation applicable ". Aux termes de l'article 14 de la même convention : " Les points non traités par la convention en matière d'entrée et de séjour des étrangers sont régis par les législations respectives des deux États ".

7. Il ressort des stipulations précitées de l'article 14 de la convention franco-ivoirienne que l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas applicable aux ressortissants ivoiriens désireux de poursuivre leurs études en France, dès lors que leur situation est entièrement régie par l'article 9 de cet accord.

8. Pour l'application des stipulations de l'article 9 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour présentée en qualité d'étudiant, d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies en tenant compte de l'assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.

9. À cet égard, il ressort des pièces du dossier qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Mme A... s'est inscrite, au cours des années universitaires 2015-2016 à 2018-2019, en master I " droit notarial immobilier et du patrimoine ", à l'université Jean-François Champollion d'Albi et les trois années suivantes à l'université Toulouse 1 Capitole, sans réussir à valider une première année de master et qu'elle s'est prévalue à l'appui de sa demande de titre de séjour, à une date à laquelle elle était au demeurant en situation irrégulière et donc soumise, ainsi que lui oppose le préfet par la décision attaquée, à la présentation d'un visa de long séjour, d'une cinquième inscription dans un établissement d'enseignement supérieur, en première année de master " manager de l'assurance. Si, comme en première instance, Mme A... attribue la cause de ses échecs à des problèmes de santé, elle ne produit à cet égard qu'un certificat médical diagnostiquant le 25 janvier 2016, une maladie tuberculeuse, mais sans pour autant alléguer ni à fortiori justifier de l'importance du caractère invalidant de cette affection, alors qu'elle produit un grand nombre de fiches de paie et d'attestations d'emploi sur la période au cours de laquelle elle était autorisée à travailler en qualité d'étudiante, dont certaines remontent à l'année 2016 . Si par ailleurs, elle fait état de difficultés financières qui auraient notamment pour cause, le chantage dont elle aurait été victime de la part d'un proche, elle ne justifie ni des difficultés financières ni du chantage allégués. L'appelante se prévaut par ailleurs des résultats qu'elle a obtenus au titre de l'année universitaire 2021-2022, mais un tel moyen est inopérant dès lors que ces résultats ont été obtenus postérieurement à la décision attaquée.

10. Par ailleurs, à supposer que l'appelante ait entendu invoquer, au regard de la question de la réalité et du sérieux de ses études, la circulaire du 7 octobre 2008 du ministre de l'intérieur, elle ne peut utilement se prévaloir des orientations générales contenues dans cette circulaire, qui est dépourvue de valeur réglementaire.

11. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'en l'absence de progression notable de nature à démontrer le caractère réel et sérieux de ses études, le préfet de la Haute-Garonne aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiante.

12. En quatrième lieu, en vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

13. En l'espèce, ainsi que l'ont considéré à bon droit les premiers juges, le préfet de la Haute-Garonne s'étant exclusivement fondé, pour rejeter la demande de renouvellement du titre de séjour de Mme A..., sur l'absence de caractère réel et sérieux de ses études, et ne lui ayant opposé l'absence d'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée qu'à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, le moyen tiré de la violation de ces stipulations est inopérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour.

14. En cinquième et dernier lieu, contrairement à ce que soutient l'appelante, le refus de séjour n'est pas entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, compte tenu de sa qualité, à la date de la décision attaquée de célibataire sans enfant et du fait qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Côte d'Ivoire .

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

15. En premier lieu, l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article L. 211-2. En l'espèce, ainsi qu'il est dit au point 3 du présent arrêt, l'arrêté préfectoral est motivé en ce qui concerne le refus de séjour. L'obligation de quitter le territoire français qui vise, notamment, le 3°du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est donc suffisamment motivée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit donc être écarté.

16. En deuxième lieu, il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur à la date de la décision attaquée que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédures administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, notamment celles des articles L. 121-1 et L. 122-1, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées, ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le délai de départ volontaire. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions du code des relations entre le public et l'administration, relative à la procédure contradictoire préalable, doit donc être écarté.

17. En troisième lieu, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, la décision portant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment à un refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement de cette décision de refus. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'autorité administrative ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite et compte tenu de ce qui a été exposé au point 5 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.

18. En quatrième lieu, dès lors que par le présent arrêt, les conclusions en annulation du refus de séjour sont rejetées, le moyen invoqué à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, par voie d'exception d'illégalité du refus de séjour, doit être écarté.

19. En cinquième lieu, compte tenu de la qualité de célibataire sans enfant de Mme A... à la date de la décision attaquée, et du fait qu'elle ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, de l'absence d'attaches familiales dans son pays d'origine, l'obligation de quitter le territoire ne peut être regardée comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé .Pour les mêmes raisons, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant à un mois le délai de départ volontaire :

20. En premier lieu et aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa codification applicable au litige : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. (...) ".

21. L'arrêté en litige vise les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique dans son article 3, que le délai d'un mois qui est accordé est susceptible de faire l'objet d'une prolongation pour " tenir compte de circonstances propres à l'intéressé ". Si Mme A... soutient que cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation en droit faute pour le préfet d'avoir examiné sa situation au regard des éléments afférents à sa situation personnelle qu'il devait prendre en compte au regard de la directive " retour ", elle ne saurait utilement se prévaloir de la directive du 16 décembre 2008 sans contester sa correcte transposition en droit français. En outre, faute pour Mme A... d'avoir sollicité l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à un mois ou d'avoir fait valoir des éléments particuliers qui auraient justifié l'octroi à son profit d'un délai de départ volontaire supérieur à un mois, cette décision doit être regardée comme se trouvant suffisamment motivée.

22. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, Mme A... ne peut utilement soutenir que la décision lui accordant un délai de départ volontaire d'un mois pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaît les dispositions du code des relations entre le public et l'administration relatives à la procédure contradictoire préalable.

23. En deuxième lieu, compte tenu du rejet des conclusions tendant à l'annulation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire, le moyen invoqué par voie d'exception d'illégalité de ces deux décisions à l'encontre de la décision de fixation du délai de départ volontaire doit être écarté.

24. En troisième lieu, alors que le préfet de la Haute-Garonne a accordé à Mme A... le délai de départ volontaire de trente jours prévu par les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, il ne ressort ni des termes de la décision en litige, ni d'aucune des pièces du dossier que l'autorité administrative, alors que Mme A... n'établit ni même n'allègue avoir présenté une demande au préfet tendant à ce que lui soit accordé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, aurait commis une erreur de droit, notamment au regard de la directive du 16 décembre 2008, en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire supérieur à un mois et méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant tenue de fixer un tel délai, et aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen préalable de la situation de l'intéressée.

25. En quatrième et dernier lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment au sujet de la décision portant obligation de quitter le territoire français, la décision qui accorde un délai de départ volontaire de trente jours à Mme A... n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision de fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement :

26. La décision fixant le pays de destination, contrairement à ce que soutient Mme A..., est suffisamment motivée, ainsi que l'ont estimé les premiers juges.

27. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1 : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à Me Laspalles et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne ;

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2023.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22TL22049

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22049
Date de la décision : 21/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : SELARL Sylvain LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-11-21;22tl22049 ?
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