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21/11/2023 | FRANCE | N°22TL21993

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 21 novembre 2023, 22TL21993


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 31 décembre 2020, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100702 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête, enregistrée le 19 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Laspalles, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 31 décembre 2020, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100702 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Laspalles, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 décembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 décembre 2020, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à tout le moins, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros toutes taxes comprises à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation en droit dès lors qu'elle se borne à se référer à l'article 5 de la convention franco-ivoirienne sans faire état des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à sa situation et notamment de son article L. 313-10 relatif à la demande de titre de séjour en qualité de salarié ;

- cette décision est intervenue sur une procédure irrégulière dans la mesure où elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît le droit à être entendu prévu par les principes généraux du droit communautaire ;

- le refus de séjour est entaché d'un défaut d'examen sérieux et personnel de sa situation, le préfet n'ayant pas usé de son pouvoir de régularisation, qu'il peut exercer en toute opportunité ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée au regard de l'avis du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur de droit pour méconnaissance du champ d'application de la loi dès lors qu'il ne se fonde que sur l'article 5 de la convention franco-ivoirienne alors que sa demande relève de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- c'est à tort que les premiers juges ont procédé à une substitution de base légale, en substituant aux stipulations de l'article 5 de la convention franco-ivoirienne sur lesquelles se fondait l'arrêté de refus de séjour, les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que cette substitution de base légale n'avait pas été demandée par le préfet ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur de droit et d'appréciation au regard de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et se trouve entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes raisons que celles exposées concernant le refus de séjour ;

-elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de sa concubine, au regard de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant à un mois le délai de départ volontaire est entachée d'un défaut de motivation en ce qu'elle n'indique pas les raisons pour lesquelles il ne lui a pas été accordé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- cette décision qui est dépourvue de base légale et entachée d'une erreur de droit faute d'avoir été prise sur le fondement des critères applicables et notamment ceux de la directive " retour " et d'un défaut d'examen particulier de sa situation, le préfet s'étant estimé en situation de compétence liée ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2022, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du 23 septembre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bentolila, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien, né le 23 décembre 1992, a sollicité le 22 août 2019 le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant puis, le 3 octobre 2019, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié. Par arrêté du 31 décembre 2020, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer les titres de séjour demandés, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure de la mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 16 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Et aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3.Il ressort des termes de l'arrêté de refus de séjour que le préfet de la Haute-Garonne a visé les articles de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 et des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a entendu faire application. Il mentionne, en outre, les conditions de l'entrée en France, de façon régulière, de l'intéressé, ainsi que les différents titres de séjour obtenus par lui depuis son entrée en France, l'avis défavorable émis le 6 février 2020 par le directeur régional des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, sur sa demande de titre de séjour en qualité de salarié, et sa situation familiale caractérisée par sa situation de concubinage en France, et par la présence dans son pays d'origine, à minima, de ses parents. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de séjour doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". La décision de refus de séjour ayant été prise à la suite d'une demande présentée par M. A..., ce dernier ne peut utilement se prévaloir, en tout état de cause, des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.

5. En troisième lieu, le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il implique que le préfet, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision défavorable à ses intérêts, mette l'intéressé à même de présenter ses observations, de sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure avant qu'elle n'intervienne. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il présente cette demande et à produire tous éléments susceptibles de venir à son soutien. Il lui appartient, lors du dépôt de sa demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs même pas soutenu que le requérant aurait été empêché de porter à la connaissance des services préfectoraux toutes les informations pertinentes susceptibles de venir au soutien de sa demande. Par suite, le droit de l'intéressé d'être entendu a bien été satisfait avant que n'intervienne le refus litigieux.

6. En vertu de l'article 5 de la convention franco-ivoirienne : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle salariée doivent en outre, pour être admis sur le territoire de cet État, justifier de la possession : / 1. D'un certificat de contrôle médical établi dans les deux mois précédant le départ et visé : - en ce qui concerne l'entrée en France, par le consulat de France compétent, après un examen subi sur le territoire de la Côte d'Ivoire devant un médecin agréé par le consulat, en accord avec les autorités ivoiriennes ; (...) / 2. D'un contrat de travail visé par l'autorité compétente dans les conditions prévues par la législation de l'État d'accueil ". Enfin, aux termes de l'article 10 de cette convention : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants ivoiriens doivent posséder un titre de séjour. / (...) / Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'État d'accueil ". Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux termes : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". (...) ". Et l'article R. 5221-20 du code du travail dispose : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule. / (...) / 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, dans la même branche professionnelle/ (...) ".

7. En premier lieu, contrairement à ce que soutient l'appelant, les premiers juges, qui ont invité les parties sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative à présenter des observations à cet égard, n'ont pas commis d'erreur de droit en substituant aux stipulations de l'article 5 de la convention franco-ivoirienne sur lesquelles se fondait l'arrêté de refus de séjour, qui sont seulement relatives aux conditions d'entrée sur le territoire de l'un des deux États de ceux des ressortissants de l'autre État qui souhaitent y exercer une activité salariée, les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables aux ressortissants ivoiriens sollicitant un titre de séjour en qualité de salarié.

Dans ces conditions, le moyen d'erreur de droit invoqué par l'appelant tiré de ce que la décision de refus de séjour se fondait à tort sur l'article 5 de la convention franco-ivoirienne, est inopérant et doit être écarté.

8. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient l'appelant, le préfet, qui n'a pas méconnu son pouvoir de régularisation, ne s'est pas placé en situation de compétence liée pour rejeter sa demande de titre de séjour en qualité de salarié, le préfet s'étant fondé sur le fait que M. A... travaillait sans autorisation de travail depuis le 20 mai 2019 à temps plein en dépassant la quotité horaire prévue par son titre de séjour en qualité d'étudiant et que par ailleurs, s'il avait signé un contrat de professionnalisation, il ne répondait pas à la condition d'âge posée par ce dispositif.

9. En troisième lieu, ainsi que l'ont considéré à bon droit les premiers juges, faute pour M. A... de contester utilement le motif du refus de séjour en qualité de salarié, tenant à la circonstance selon laquelle il ne répondait pas aux conditions d'âge exigées pour la signature du contrat de professionnalisation à raison duquel il a présenté une demande de titre de séjour, il n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour serait entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En quatrième lieu, en vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. La circonstance invoquée par M. A..., qui ne résidait à la date de la décision attaquée régulièrement en France que depuis trois ans, selon laquelle il vit en concubinage avec une ressortissante guinéenne bénéficiaire de la protection subsidiaire, est insuffisante pour établir que la décision de refus de séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que la vie commune n'est établie que depuis le mois de novembre 2019, soit depuis un an à la date de l'arrêté attaqué, et que le pacte civil de solidarité est antérieur de seulement deux mois à cet arrêté, alors que, par ailleurs, il ne justifie pas ainsi qu'il l'allègue, être impliqué dans l'entretien et dans l'éducation de la fille de sa concubine.

12. En cinquième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point précédent, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

13. En premier lieu, l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article L. 211-2. En l'espèce, ainsi qu'il est dit au point 3 du présent arrêt, l'arrêté préfectoral est motivé en ce qui concerne le refus de séjour. L'obligation de quitter le territoire français qui vise, notamment, le 3° du I de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est donc suffisamment motivée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit donc être écarté.

14. En deuxième lieu, il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur à la date de la décision attaquée que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédures administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, notamment celles des articles L. 121-1 et L. 122-1, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées, ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le délai de départ volontaire. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions du code des relations entre le public et l'administration, relative à la procédure contradictoire préalable, doit donc être écarté.

15. En troisième lieu, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, la décision portant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment à un refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement de cette décision de refus. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'autorité administrative ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite et compte tenu de ce qui a été exposé au sujet de la décision de refus de séjour, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.

16. En quatrième lieu, en l'absence d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.

17. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au sujet de la décision de refus de séjour, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

18. En sixième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants. En l'espèce, faute, ainsi qu'il est dit au point 11 du présent arrêt, pour l'appelant de justifier qu'il serait impliqué dans l'entretien et dans l'éducation de la fille de sa concubine, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

19. En septième et dernier lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées au sujet de la décision de refus de séjour, l'obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant à un mois le délai de départ volontaire :

20. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa codification applicable au litige : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. (...) ".

21. L'arrêté en litige vise les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique, dans son article 3, que le délai d'un mois qui est accordé est susceptible de faire l'objet d'une prolongation pour " tenir compte de circonstances propres à l'intéressé ". Si, tout d'abord, M. A... soutient que cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation en droit faute pour le préfet d'avoir examiné sa situation au regard des éléments afférents à sa situation personnelle qu'il devait prendre en compte au regard de la directive " retour ", il ne saurait utilement se prévaloir de la directive du 16 décembre 2008 sans contester sa correcte transposition en droit français. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, faute pour M. A... d'avoir sollicité l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à un mois ou d'avoir fait valoir des éléments particuliers, qui auraient justifié l'octroi à son profit d'un délai de départ volontaire supérieur à un mois, cette décision doit être regardée comme se trouvant suffisamment motivée.

22. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 14 du présent arrêt, M. A... ne peut utilement soutenir que la décision lui accordant un délai de départ volontaire d'un mois pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaît les dispositions du code des relations entre le public et l'administration relatives à la procédure contradictoire préalable.

23. En troisième lieu, compte tenu du rejet des conclusions tendant à l'annulation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire, le moyen invoqué par voie d'exception d'illégalité de ces deux décisions, à l'encontre de la décision de fixation du délai de départ volontaire doit être écarté.

24. En quatrième lieu, alors que le préfet de la Haute-Garonne a accordé à M. A... le délai de départ volontaire de trente jours prévu par les dispositions du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, il ne ressort ni des termes de la décision en litige, ni d'aucune des pièces du dossier que l'autorité administrative, alors que M. A... n'établit ni même n'allègue avoir présenté une demande au préfet tendant à ce que lui soit accordé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, aurait commis une erreur de droit notamment au regard de la directive du 16 décembre 2008 en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire supérieur à un mois et méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant tenue de fixer un tel délai et aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen préalable de la situation de l'intéressée.

25. En cinquième et dernier lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées au sujet de la décision portant obligation de quitter le territoire français, la décision qui accorde un délai de départ volontaire de trente jours à M. A... n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle

26. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Laspalles et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2023.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22TL21993

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21993
Date de la décision : 21/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : SELARL Sylvain LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-11-21;22tl21993 ?
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