Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 août 2022 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, l'a assigné à résidence et a prononcé à son endroit une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n°2204292 du 4 octobre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2022, M. B... A..., représenté par Me Nivet, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 4 octobre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2022 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, l'a assigné à résidence et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'erreur de droit et de dénaturation ;
- le signataire de l'arrêté attaqué n'était pas compétent ;
- la décision refusant un délai de départ volontaire est entachée d'erreur d'appréciation, en l'absence de justification d'une situation d'urgence ;
- la décision portant assignation à résidence est sans justification et disproportionnée.
Une mise en demeure a été adressée le 24 février 2023 au préfet des Pyrénées-Orientales.
Par une ordonnance du 14 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant colombien, né le 7 octobre 2003, entré sur le territoire français en 2017 et y séjournant irrégulièrement, a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 août 2022 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, l'a assigné à résidence et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois. Par un jugement du 4 octobre 2022, dont M. B... A... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par M. D..., adjoint au directeur de la citoyenneté et de la migration. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté n° 2021229-0001 du 17 août 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture et accessible au juge comme aux parties, le préfet des Pyrénées-Orientales a délégué sa signature à M. E... C..., directeur de la citoyenneté et de la migration, pour la mise en œuvre des mesures d'éloignement concernant les ressortissants étrangers en situation irrégulière et, par son article 3, en cas d'absence ou d'empêchement de ce directeur, du secrétaire général et du directeur de cabinet, à MM. Domingo et D..., en leur qualité d'adjoints au directeur de la citoyenneté et de la migration. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : /(...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;(...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... A... a déclaré, lors de son audition le 16 août 2022 par les services de la police aux frontières de Perpignan, s'opposer à une mesure d'éloignement qui serait prise à son endroit. Par suite, en estimant qu'il existait un risque de soustraction à la décision d'éloignement, le préfet des Pyrénées-Orientales n'a pas commis d'erreur d'appréciation. Pour contester la légalité de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, M. B... A... invoque l'absence d'urgence. Toutefois, il ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devenu l'article L. 251-3 de ce code, qui ne sont pas applicables à sa situation d'étranger provenant d'un pays tiers à l'Union européenne.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut autoriser l'étranger qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne pouvoir ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, à se maintenir provisoirement sur le territoire en l'assignant à résidence jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ".
6. En assignant à résidence M. B... A... dans la commune de Perpignan pour une durée de six mois, renouvelable une fois, et en l'obligeant à se présenter aux services de la police aux frontières de cette commune tous les mardis à compter du 23 août 2022, alors que l'intéressé était domicilié avec sa mère à Paris à une adresse notamment connue du lycée parisien ... où il était scolarisé et que, titulaire d'un baccalauréat général, il était admis et devait débuter, dès le mois de septembre 2022, une formation de BTS services et commerce international au sein de ce même lycée, le préfet des Pyrénées-Orientales a pris à son encontre une mesure disproportionnée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 août 2022 en tant qu'il porte assignation à résidence.
Sur les frais liés au litige :
8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à M. B... A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n°2204292 du 4 octobre 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il statue sur la décision, comprise dans l'arrêté querellé, portant assignation à résidence de M. B... A....
Article 2 : L'arrêté du 17 août 2022 du préfet des Pyrénées-Orientales est annulé en tant qu'il porte assignation à résidence de M. B... A... sur la commune de Perpignan.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2023.
Le rapporteur,
T. Teulière
La présidente,
A. Geslan-Demaret La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°22TL22198
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