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09/11/2023 | FRANCE | N°23TL00805

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 09 novembre 2023, 23TL00805


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 août 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2205922 du 27 janvier 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête, enregistrée le 6 avril 2023, M. A..., représenté par Me Lafon, dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 août 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2205922 du 27 janvier 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 avril 2023, M. A..., représenté par Me Lafon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 août 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'une erreur de fait car il démontre sa présence effective en France depuis plus de dix ans ;

- il méconnaît les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mars 2023.

Par ordonnance du 16 août 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 18 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barthez a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 6 novembre 1977, a sollicité, le 21 octobre 2019, son admission au séjour au titre des stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 10 août 2022, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... fait appel du jugement du 27 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 août 2022.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ". Pour rejeter la demande de M. A..., les premiers juges ainsi que le préfet de l'Hérault ont considéré qu'il n'établissait pas le caractère habituel de sa présence en France pour les années 2014, 2015, 2020 et 2021.

3. Toutefois, M. A... produit, pour chacune des années 2014, 2015 et 2021, au moins une dizaine de pièces, principalement des documents médicaux, notamment des ordonnances émanant de différents médecins, mais également des courriers de renouvellement de l'aide médicale de l'Etat, une licence de la Ligue de football Languedoc-Roussillon du mois de septembre 2015 et quelques relevés bancaires. Concernant l'année 2020, M. A... a fait l'objet d'un arrêté, dont il est constant qu'il n'a pas été exécuté, du 11 mai 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis rejetant sa demande de titre de séjour présentée le 21 octobre 2019 et lui faisant notamment obligation de quitter le territoire français et il produit aussi des relevés bancaires, notamment pour le mois de septembre retraçant plusieurs opérations financières, ainsi qu'une facture du fournisseur de téléphone mobile du mois d'octobre. Ces éléments suffisamment probants, nombreux et répartis sur l'ensemble de l'année civile pour chacune de ces années, permettent d'établir la résidence habituelle de M. A... sur le territoire français en 2014, 2015, 2020 et 2021, seules années contestées. Ainsi, M. A..., qui produit d'ailleurs des pièces concernant les autres années à partir de 2012, établit sa présence habituelle en France, et notamment à Béziers, depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté et il est ainsi fondé à soutenir que le préfet de l'Hérault a méconnu les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 précitées.

4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ". L'article L. 911-3 du même code dispose que : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ".

6. Il y a lieu, au regard du motif d'annulation retenu dans le présent arrêt, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer à M. A... un titre de séjour portant mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

7. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Lafon, avocate de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 27 janvier 2023 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 10 août 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de titre de séjour de M. A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus de conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à Me Lafon une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Mathilde Lafon et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Barthez, président,

M. Bentollila, président-assesseur,

Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023.

Le président-rapporteur,

A. Barthez

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

P. Bentolila

Le greffier,

F. Kinach

Le République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°23TL00805 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00805
Date de la décision : 09/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : LAFON MATHILDE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-11-09;23tl00805 ?
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