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12/10/2023 | FRANCE | N°21TL04712

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 12 octobre 2023, 21TL04712


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Le Centenaire a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1902554 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2021 sous le n° 21MA04712 au greffe de la c

our administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL04712 au greffe de la cour administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Le Centenaire a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1902554 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2021 sous le n° 21MA04712 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL04712 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, l'association Le Centenaire, représentée par Me Forestier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dépenses en litige constituaient des charges exceptionnelles déductibles de son bénéfice dès lors qu'elles ne correspondaient pas à la construction d'un nouvel établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, dont elle n'est pas propriétaire ;

- en application de l'article L. 123-20 du code de commerce et de l'article 513-4 du plan comptable général, elle devait tenir compte de la revente du terrain d'assiette du projet et du transfert du marché, qui sont intervenus antérieurement à l'arrêt des comptes du 14 mars 2016 ;

- les dépenses en cause n'entrent pas dans le champ de la définition de l'actif par l'article 211-1 du plan comptable général ;

- les dépenses d'honoraires d'études et de contrôle constituent nécessairement des dépenses déductibles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'association requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon,

- les conclusions de M. Clen, rapporteur public,

- et les observations de Me Forestier pour l'association Le Centenaire.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Le Centenaire, qui exploite un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes à Malaucène (Vaucluse), fait appel du jugement du 15 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015. Ces impositions procèdent de la réintégration dans son résultat imposable, à l'issue d'une vérification de comptabilité, de dépenses, comptabilisées comme charges déductibles, supportées pour la réalisation de travaux préparatoires à la construction d'un nouvel établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Sur les conclusions en décharge :

2. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". L'article 38 quater de l'annexe III au même code dispose que : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ". Selon l'article 211-1 du plan comptable général : " Un actif est un élément identifiable du patrimoine ayant une valeur économique positive pour l'entité, c'est-à-dire un élément générant une ressource que l'entité contrôle du fait d'évènements passés et dont elle attend des avantages économiques futurs ". Aux termes enfin de l'article 211-2 du même plan : " L'avantage économique futur représentatif d'un actif est le potentiel qu'a cet actif de contribuer, directement ou indirectement, à des flux nets de trésorerie au bénéfice de l'entité. / Le potentiel de services attendus de l'utilisation d'un actif par une association ou une entité relevant du secteur public est fonction de l'utilité sociale correspondant à son objet ou à sa mission ".

3. Il résulte de l'instruction que l'association Le Centenaire, titulaire d'un permis de construire un nouvel établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes à Malaucène et propriétaire du terrain d'assiette du projet, a acquitté, au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2015 et dans le cadre d'un marché de conception-réalisation signé le 10 juin 2014, des frais de prestations de services et de travaux préparatoires à la construction, y compris de réalisation de fondations, pour un montant total de 810 417 euros hors taxes. Par acte authentique du 8 janvier 2016, l'association a vendu à la société Axentia le terrain et les constructions en cours, au prix auquel elle avait acheté les trois parcelles correspondantes. L'article 7 de l'avenant du 15 mars 2016 par lequel l'association a transféré à la société Axentia le marché de conception-réalisation de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes projeté, qu'elle avait conclu le 10 juin 2014, a confirmé que les frais qu'elle avait assumés restaient définitivement à sa charge. Enfin, l'association Le Centenaire a comptabilisé, au titre de son exercice clos en 2015, le montant de 810 417 euros dans la catégorie des " charges exceptionnelles sur futur projet ".

4. En premier lieu, il résulte de la chronologie des opérations évoquée au point 3 que les travaux financés par l'association Le Centenaire ont concouru à la construction du nouveau bâtiment, ensuite finalisée par la société Axentia, associée au projet depuis l'acquisition du terrain d'assiette. Les dépenses correspondantes ont eu pour conséquence de faire entrer le bien immobilier en cours de construction, dès lors que la cession du 8 janvier 2016 n'était pas intervenue, dans le patrimoine de l'association Le Centenaire. Cette dernière, qui savait que ces dépenses ne lui seraient jamais restituées, ainsi que le stipulait le marché du 10 juin 2014, en attendait nécessairement des avantages économiques futurs, tirés de la possibilité de poursuivre son activité en dépit de l'état de vétusté du bâtiment accueillant initialement l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ainsi que d'une diminution du prix de la redevance qu'elle devait ensuite verser à la société Axentia pour l'occupation du nouvel établissement en vertu de l'article 7 de la convention de location de longue durée du 27 novembre 2015. Ce bien figurait ainsi parmi les actifs de l'association à la date de la clôture de l'exercice 2015. Enfin, les frais d'études et de contrôle, dès lors qu'ils étaient rattachables aux constructions en cause, devaient être pris en compte pour la valorisation de cet actif. Dans ces conditions, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que l'ensemble des dépenses en cause, qui ont fait entrer de nouveaux éléments dans son actif immobilisé, constituaient une charge déductible de son bénéfice en application de l'article 39 du code général des impôts pour l'exercice clos le 31 décembre 2015.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 123-20 du code de commerce : " Les comptes annuels doivent respecter le principe de prudence. (...) / Il doit être tenu compte des passifs qui ont pris naissance au cours de l'exercice ou d'un exercice antérieur, même s'ils sont connus entre la date de la clôture de l'exercice et celle de l'établissement des comptes ". Selon l'article 513-4 du plan comptable général, dans sa version applicable au présent litige : " Le résultat tient compte des risques et des pertes qui ont pris naissance au cours de l'exercice ou d'un exercice antérieur même s'ils sont connus entre la date de clôture de l'exercice et celle de l'établissement des comptes annuels ".

6. Ni le principe de prudence énoncé par les dispositions précitées du code de commerce, ni l'article 513-4 du plan comptable général n'autorisaient l'association Le Centenaire à prendre en compte, au titre de son exercice 2015, la vente du terrain à la société Axentia et le transfert du marché de conception-réalisation, qui, opérés respectivement le 8 janvier 2016 et le 15 mars 2016, n'étaient pas encore intervenus au 31 décembre 2015, date de la clôture de cet exercice, et alors même qu'ils auraient été connus avant l'arrêt de ses comptes annuels par son conseil d'administration le 14 mars 2016.

7. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration fiscale a réintégré le montant de 810 417 euros dans le résultat imposable de l'exercice clos le 31 décembre 2015 de l'association Le Centenaire. Cette dernière n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par l'association Le Centenaire est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Le Centenaire et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2023, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2023.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21TL04712
Date de la décision : 12/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Évaluation de l'actif - Théorie du bilan - Actif social.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Charges diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Nicolas LAFON
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-10-12;21tl04712 ?
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