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10/10/2023 | FRANCE | N°21TL03723

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 10 octobre 2023, 21TL03723


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Leucate à lui verser une somme de 14 465,56 euros, avec intérêts à taux légal, dans un délai de dix jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1906493 du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure de

vant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 août 2021 sous le n°21MA03723 au gr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Leucate à lui verser une somme de 14 465,56 euros, avec intérêts à taux légal, dans un délai de dix jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1906493 du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 août 2021 sous le n°21MA03723 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL03723, et un mémoire récapitulatif enregistré le 13 février 2023, M. A... B..., représenté par la société d'avocats Interbarreaux Sanguinede di Frenna et Associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n°1906493 du 30 juin 2021 du tribunal administratif de Montpellier.

2°) d'annuler le rejet implicite de sa réclamation préalable en date du 5 août 2019 ;

3°) de condamner la commune de Leucate à lui verser une somme de 14 465,56 euros, avec intérêts à taux légal ;

4°) d'enjoindre à la commune de Leucate de procéder à la liquidation des sommes sollicitées dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jours de retard ;

5°) de rejeter toutes les demandes de la commune de Leucate ;

6°) de mettre à la charge de la commune de Leucate une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier pour être entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il remplit les conditions de santé fixées par la délibération du 4 avril 2012 pour que l'abattement des primes prévu après 15 jours d'arrêt de travail pour maladie ne lui soit pas appliqué ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il n'a pas reconnu qu'il avait droit de bénéficier de l'indemnité spéciale de fonction à un taux de 20% ;

- la commune de Leucate a commis une faute pour les raisons invoquées ci-dessus en ne versant pas l'indemnité de fonctions au taux de 20% pour la période comprise entre le 1er mai 2015 et le 21 novembre 2018 ;

- son préjudice financier s'établit à 14 465,56 euros, dont 1 640,05 euros pour la période courant du 1er mai 2015 au 21 mai 2016 et 12 825,51 euros pour la période courant du 22 mai 2016 au 20 novembre 2018 ; il s'agit d'un préjudice distinct de celui indemnisé au titre de l'instance n° 18MA5325.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 décembre 2021, la commune de Leucate représentée par Me Garridou, conclut à la confirmation du jugement du 30 juin 2021, au rejet des demandes de M. B... et demande qu'une somme de 2 000 euros lui soit versée en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 14 février 2023, la clôture de l'instruction a été reportée au 9 mars 2023 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n°96-1093 du 16 décembre 1996 ;

- le décret 97-702 du 31 mai 1997 modifié

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Dahrour représentant M. B... et celles de Me Paré représentant la commune de Leucate.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., brigadier de police municipale de la commune de Leucate, a demandé, par lettre du 5 août 2019, l'indemnisation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait du versement du 1er mai 2015 au 21 mai 2016 de l'indemnité spéciale de fonction à un taux réduit à 10% et de l'absence de versement de cette indemnité du 22 mai 2016 au 29 novembre 2018. Du silence gardé par l'administration sur sa demande indemnitaire préalable est née une décision implicite de rejet. M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Leucate à lui verser la somme totale de 14 465,56 euros en réparation de son préjudice financier. Par un jugement du 30 juin 2021 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.

3. Les moyens tirés de ce que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'une erreur de droit quant au taux de 10% retenu pour la période du 30 avril 2015 au 21 mai 2016 ainsi que celui tiré d'une erreur manifeste d'appréciation en estimant que les motifs des absences de M. B... n'entrent pas dans les exceptions à l'application de l'abattement prévues par la délibération du 4 avril 2012 de la commune pour la période du 21 mai 2016 au 20 novembre 2018 relèvent du bien-fondé du jugement et sont sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le taux de l'indemnité spéciale de fonction du 30 avril 2015 au 21 mai 2016 :

4. Aux termes de l'article 68 de la loi du 16 décembre 1996 alors applicable Par dérogation au premier alinéa de l'article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, les fonctionnaires des cadres d'emplois de police municipale (...) peuvent bénéficier d'un régime indemnitaire dont les modalités et les taux sont fixés par décret. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 31 mai 1997 relatif au régime indemnitaire des fonctionnaires du cadre d'emplois des agents de police municipale et du cadre d'emplois des gardes champêtres : " L'assemblée délibérante de la collectivité territoriale qui les emploie peut décider que les fonctionnaires du cadre d'emplois des agents de police municipale et ceux du cadre d'emplois des gardes champêtres perçoivent une indemnité spéciale mensuelle de fonctions déterminée en appliquant au montant mensuel du traitement soumis à retenue pour pension de l'agent concerné un taux individuel fixé dans la limite des taux maximums suivants : Cadre d'emplois des agents de police municipale : 20 % ; Cadre d'emplois des gardes champêtres : 20 % ". Il résulte de ces dispositions que l'indemnité de fonction des fonctionnaires du cadre d'emplois des agents de police municipale n'a pas de caractère forfaitaire et est liée à l'exercice effectif des fonctions.

5. En application des dispositions citées au point 4, le conseil municipal de Leucate, par délibération du 6 décembre 2006, a institué une indemnité spéciale de fonction au bénéfice des personnels de police municipale avec un taux individuel maximum de 20% pour le cadre d'emploi des agents de police municipale. M. B... a perçu l'indemnité spéciale de fonctions à un taux de 10% du 30 avril 2015 au 21 mai 2016. S'il soutient que les missions qui lui ont été confiées n'ont pas été modifiées, il résulte de l'instruction que l'intéressé a été affecté à compter du 9 juin 2015 à des fonctions d'accueil au service de l'environnement et de l'urbanisme de la commune, de sorte que les contraintes particulières attachées à l'exercice de ses fonctions ont été réduites. Le maire de Leucate pouvait dès lors légalement, pour ce motif, fixer le taux individuel de l'indemnité de M B... en dessous du taux maximal de 20 %, alors même qu'aucune décision l'en informant n'a été notifiée à l'intéressé.

En ce qui concerne le versement de l'indemnité spéciale de fonction du 21 mai 2016 au 20 novembre 2018 :

6. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires applicable à l'espèce : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. S'y ajoutent les prestations familiales obligatoires. Le montant du traitement est fixé en fonction du grade de l'agent et de l'échelon auquel il est parvenu, ou de l'emploi auquel il a été nommé ". Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale applicable à l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans (...). Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un fonctionnaire territorial en congé de longue maladie ou en congé de longue durée conserve, outre son traitement ou son demi-traitement, l'indemnité de résidence et le supplément familial de traitement, le bénéfice de la totalité ou de la moitié des indemnités accessoires qu'il recevait avant sa mise en congé, à l'exclusion de celles qui sont attachées à l'exercice des fonctions ou qui ont le caractère de remboursement de frais.

7. Si les dispositions de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, lesquelles doivent être interprétées conformément au principe de parité entre les agents relevant de diverses fonctions publiques, ne confèrent pas aux fonctionnaires territoriaux le droit au maintien du bénéfice des primes ou indemnités liées à l'exercice effectif des fonctions lorsqu'ils sont placés en congé de maladie, elles ne font pas obstacle à ce que l'administration communale puisse légalement, si des circonstances particulières lui paraissent le justifier, procéder règlementairement à un tel maintien. Toutefois, si elle en décide ainsi, et sauf motif d'intérêt général, il lui appartient alors, pour respecter le principe d'égalité, d'en faire également bénéficier, sans préférence ni faveur, tous les fonctionnaires se trouvant dans une situation analogue.

8. Le conseil municipal de la commune de Leucate a adopté, le 13 août 2009, une délibération instituant un abattement sur le régime indemnitaire des agents de la collectivité et toutes les primes s'y rattachant calculé en fonction de la durée des absences pour maladie ordinaire. Cette délibération a été complétée par une autre du 4 avril 2012, modifiant les modalités de calcul de l'abattement et définissant des situations d'absence n'entrant pas dans le décompte, au nombre lesquelles figurent les hospitalisations ainsi que tout accident ou maladie nécessitant une immobilisation de l'agent. Toutefois, M. B..., en congé de longue maladie, n'entre pas dans les prévisions de ce dispositif qui vise les absences pour congés de maladie ordinaire. Par suite, alors que l'intéressé n'avait pas droit au maintien de l'indemnité liée à l'exercice effectif des fonctions, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit, en tout état de cause, être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Leucate, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. B... la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Leucate au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la commune de Leucate une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-14 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Leucate.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

M. Teulière, premier conseiller,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2023.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de l'Aude en ce qui le concerne ou à tous commissaire de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21TL03723


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL03723
Date de la décision : 10/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIÉ
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS SANGUINEDE - DI FRENNA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-10-10;21tl03723 ?
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