Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, d'annuler l'arrêté du 28 septembre 2020 par lequel le président de Perpignan Méditerranée Métropole a prononcé son licenciement pour inaptitude physique, d'enjoindre à cette autorité de prononcer sa réintégration à la date du jugement à intervenir et de le rétablir dans ses droits sociaux et dans ses droits à pension dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ainsi que de mettre à la charge de Perpignan Méditerranée Métropole une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par un jugement n°2005335 du 28 septembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes ainsi que les conclusions présentées par la communauté urbaine de Perpignan Méditerranée Métropole au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2021, sous le n°21MA04634 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL04634, et un mémoire, enregistré le 6 septembre 2022, M. B..., représenté par Me Nivet, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°2005335 du tribunal administratif de Montpellier du 28 septembre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 septembre 2020 par lequel le président de Perpignan Méditerranée Métropole a prononcé son licenciement pour inaptitude physique ;
3°) d'enjoindre à cette autorité de prononcer sa réintégration à la date de l'arrêt à intervenir et de le rétablir dans ses droits sociaux et dans ses droits à pension dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de Perpignan Méditerranée Métropole une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
5°) de rejeter les demandes de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole.
Il soutient que :
- son recours est recevable ;
- le jugement doit être annulé ; le tribunal a insuffisamment motivé sa décision et dénaturé les pièces du dossier en considérant que Perpignan Méditerranée Métropole a suffisamment motivé en fait l'arrêté litigieux ; il a également commis une erreur d'appréciation et dénaturé les pièces du dossier en l'estimant inapte définitivement, sans tenir compte des éléments versés au dossier démontrant le contraire, soit un contrat de travail justifiant de son activité, et en remettant en cause la valeur probante de ce contrat ;
- l'arrête contesté est dépourvu de motivation en fait ;
- il est entaché d'une erreur de droit, du fait de la méconnaissance des dispositions des articles 81 et 85-1 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985 et de l'obligation de l'administration d'envisager son reclassement qui a été méconnue ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'est pas inapte à tout poste.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 29 août et 14 novembre 2022, et un dépôt des pièces, enregistré le 4 mai 2023, qui n'a pas été communiqué, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Pons-Serradeil, conclut à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête et à ce que les dépens et une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative soient mis à la charge de M. B....
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 15 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 décembre 2022.
Un mémoire, présenté pour M. B... a été enregistré le 9 février 2023, postérieurement à la clôture de l'instruction et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°85-1054 du 30 septembre 1985 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique
- et les observations de Me Ruel, substituant Me Pons-Serradeil, représentant la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui a intégré les effectifs de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole en 2006 en tant qu'adjoint technique territorial de deuxième classe, a souhaité travailler au sein de la société ... dont son frère est le gérant et a été placé à sa demande en disponibilité pour convenance personnelle à compter du 1er décembre 2007. Ayant été victime d'une agression en octobre 2013 et souffrant d'un état de stress post-traumatique grave et chronique, la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales lui a reconnu une invalidité de catégorie 2. M. B... a cessé de travailler au sein de l'entreprise gérée par son frère en mai 2017. Par lettre du 4 septembre 2017, le directeur général des services de Perpignan Méditerranée Métropole l'a informé de ce qu'il avait épuisé ses droits statutaires en ce qui concerne le bénéfice d'une disponibilité pour convenances personnelles à compter du 1er décembre 2016. M. B... a alors sollicité sa réintégration. Cependant, par un arrêté du 28 septembre 2020, le président de la communauté urbaine a prononcé son licenciement pour inaptitude physique. Par un jugement du 28 septembre 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes à fin d'annulation de l'arrêté pris le 28 septembre 2020 et à fin qu'il soit enjoint sous astreinte au président de la communauté urbaine de prononcer sa réintégration et de le rétablir dans ses droits sociaux et à pension.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements doivent être motivés. ". Pour écarter le moyen tiré du défaut de motivation en fait de l'arrêté litigieux, le tribunal a relevé, au point 6 de son jugement que " la décision en litige comporte les considérations de fait qui en constituent le fondement ". Contrairement à ce qui est allégué, les premiers juges n'ont pas insuffisamment motivé le jugement sur ce point.
3. D'autre part, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Pour demander l'annulation du jugement attaqué comme étant entaché d'irrégularité, M. B... ne peut donc utilement se prévaloir de la dénaturation des pièces du dossier ou d'erreurs d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges en ne tenant pas compte des éléments produits en ou écartant à tort les moyens soulevés devant eux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. En premier lieu, M. B... soutient que l'arrêté contesté n'est pas motivé en fait et que cette absence de motivation l'a privé de la possibilité de comprendre les raisons de son licenciement pour inaptitude physique. Toutefois, l'arrêté contesté vise l'avis du comité médical du 26 juin 2019 en précisant qu'il concluait à une inaptitude totale et définitive de M. B... à ses fonctions comme à toutes fonctions, justifiant une mise à la retraite pour invalidité, avec reclassement impossible ainsi que l'avis de la commission de réforme du 28 août 2019 en précisant qu'il concluait à une inaptitude totale et définitive de M. B... à ses fonctions comme à toutes fonctions. Il indique, dans son dernier considérant que " à l'expiration de ses droits à 10 ans de disponibilité pour convenances personnelles, M. B..., après un avis d'inaptitude physique d'un médecin agrée émis préalablement à l'examen d'une réintégration, puis avis susvisés du comité médical et de la commission de réforme et, en l'absence d'autre possibilité statutaire, a été déclaré inapte définitif à l'exercice de ses fonctions et à toutes fonctions, sans reclassement possible et sans pouvoir bénéficier d'une retraite pour invalidité, justifiant un licenciement pour inaptitude physique ". L'arrêté comporte ainsi, en lui-même, les considérations de fait qui en constituent le fondement et une telle motivation en fait est suffisante au regard de l'exigence de respect du secret médical. Par suite, le moyen tiré du défaut ou de l'insuffisance de motivation en fait manque en fait et doit être écarté.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le comité médical a considéré, dans un avis du 26 juin 2019, que M. B... était " inapte totalement et définitivement à ses fonctions comme à toute fonction " en relevant l'impossibilité d'un reclassement, et que la commission de réforme a rendu un avis le 28 août 2019, l'estimant pareillement inapte définitivement à toutes fonctions. M. B... soutient que l'arrêté de licenciement, qui repose sur ces avis, est entaché d'erreur d'appréciation dès lors qu'il ne serait pas inapte à tout poste et à toutes fonctions. Cependant, le certificat médical de son psychiatre en date du 9 novembre 2017 dont il se prévaut mentionne son " incapacité totale à travailler ". La fiche médicale, en date du 2 mars 2016, qui l'a déclaré apte avec aménagement du poste dans le cadre de l'emploi occupé au sein de la société gérée par son frère prévoyait de le revoir en juin 2016 et elle est antérieure au certificat médical précité. Ni cette fiche, ni le contrat de travail à temps partiel, à durée déterminée d'un mois couvrant la période du 1er au 30 septembre 2021, avec la société ... dirigée par son frère, qui n'est pas signé par les parties, ni l'attestation de suivi de la médecine du travail relative à une visite d'information et de prévention en date du 15 mars 2022 le concernant pour un poste de travail de préparateur automobile dans l'entreprise ... mais dont le résultat n'est pas indiqué, ne suffisent à remettre en cause l'avis du comité médical relatif à son état de santé en date du 26 juin 2019. M. B... n'établit, par ailleurs, par aucun élément, le caractère de complaisance de cet avis. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait entaché l'arrêté du 28 septembre 2020 ne peut qu'être écarté.
6. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 81 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, alors applicable : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". Selon l'article 85-1 de la même loi : " Le fonctionnaire à l'égard duquel une procédure tendant à reconnaître son inaptitude à l'exercice de ses fonctions a été engagée a droit à une période de préparation au reclassement avec traitement d'une durée maximale d'un an. Cette période est assimilée à une période de service effectif. Pendant son congé pour raison de santé, le fonctionnaire peut, sur la base du volontariat et avec l'accord de son médecin traitant, suivre une formation ou un bilan de compétences. Pendant cette période, l'agent peut également être mis à disposition du centre de gestion pour exercer une mission définie au deuxième alinéa de l'article 25 de la présente loi. ". Aux termes des dispositions de l'article 2 du décret susvisé du 30 septembre 1985 : " Lorsque l'état de santé d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du Centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, propose à l'intéressé une période de préparation au reclassement en application de l'article 85-1 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. L'agent est informé de son droit à une période de préparation au reclassement dès la réception de l'avis du comité médical, par l'autorité territoriale dont il relève./ (...) ".
7. M. B... invoque, sur le fondement des dispositions citées au point précédent, l'obligation de l'administration d'envisager un reclassement préalablement à toute procédure de licenciement en précisant qu'aucune proposition de reclassement ne lui a été soumise et qu'il n'a même pas été invité à présenter une demande de reclassement. Cependant, l'administration n'est pas tenue de rechercher un poste de reclassement pour un agent dont le reclassement est impossible. Or, ainsi qu'il a été dit, le comité médical ayant constaté l'inaptitude de M. B... à l'exercice de toutes fonctions, son reclassement était impossible. Le président de Perpignan Méditerranée Métropole n'était, en conséquence, pas tenu de l'inviter à présenter une demande de reclassement ou de lui adresser une proposition de reclassement avant de prendre la décision de licenciement en litige. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont l'arrêté contesté serait entaché ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions d'appel à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent également qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
10. En l'absence de dépens, les conclusions présentées par la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole au titre des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme au titre des frais exposés par la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole au titre des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole.
Délibéré après l'audience du 31 août 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 septembre 2023.
Le rapporteur,
T. Teulière
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21TL04634