Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 25 février 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n° 21BX00805 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL20805, et des mémoires enregistrés le 4 janvier 2023 et le 20 janvier 2023, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association Nature en Occitanie et l'association Ligue pour la Protection des Oiseaux, représentées par Me Galinon, demandent à la cour :
1°) d'annuler la décision implicite du 26 décembre 2020 par laquelle la préfète du Tarn a rejeté leur demande du 22 octobre 2020 tendant, sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, d'une part, à suspendre le fonctionnement du parc éolien A... situé sur la commune d'Assac ou de prescrire toutes mesures conservatoires proportionnées de nature à assurer le respect des intérêts protégés au titre de l'article L. 411-1 du code de l'environnement et, d'autre part, à mettre en demeure la société par actions simplifiée (SAS) ferme éolienne A... de régulariser sa situation en déposant une demande d'autorisation exceptionnelle sur le fondement de l'article L. 411-2 du même code ;
2°) d'enjoindre au préfet du Tarn de suspendre le fonctionnement des éoliennes ou de prescrire toutes mesures conservatoires proportionnées de nature à assurer le respect des intérêts protégés au titre de l'article L 411-1 du code de l'environnement dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt ;
3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de mettre en demeure la société ferme éolienne A... de régulariser sa situation en déposant une demande d'autorisation exceptionnelle au titre de l'article L. 411-1 du code de l'environnement dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- elles ont intérêt à agir ;
- leur requête n'est pas tardive ;
- les mesures imposées par la préfète du Tarn à la société ferme éolienne A... par arrêtés de prescriptions complémentaires des 10 et 23 septembre 2021 ne sont ni adaptées ni suffisamment efficaces pour que le risque d'atteinte à l'avifaune et aux chiroptères relevant des " espèces protégées " apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé ; la société aurait donc dû déposer une demande de dérogation au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ; la préfète, qui était en situation de compétence liée, a méconnu les articles L. 171-7, L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement en refusant de mettre en demeure la société de déposer cette demande de dérogation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, de l'association Nature en Occitanie et de l'association Ligue pour la Protection des Oiseaux.
Par ordonnance du 10 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 24 janvier 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du préfet du Tarn portant permis de construire du 15 mai 2007, devenu autorisation environnementale au 1er mars 2017, la société ferme éolienne Puech Al Lun a été autorisée à exploiter un parc éolien dit A... " comportant cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune d'Assac. Par arrêté du 18 septembre 2020, la préfète du Tarn a imposé à l'exploitant, sur le fondement de l'article L. 181-14 du code de l'environnement, des prescriptions complémentaires pour assurer la protection de l'avifaune et des chiroptères à la suite du constat de plusieurs cas de mortalité parmi ces espèces protégées au titre du code de l'environnement. Par courrier du 22 octobre 2020, reçu en préfecture le 26 octobre suivant, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association Nature en Occitanie et l'association Ligue pour la Protection des Oiseaux ont demandé à la préfète du Tarn de faire usage des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement en suspendant le fonctionnement des éoliennes ou en prescrivant toutes mesures conservatoires proportionnées de nature à assurer le respect des intérêts protégés au titre des dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, ceci au titre des mesures conservatoires et en mettant en demeure la société ferme éolienne A... de régulariser sa situation en déposant une demande de dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces protégées au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Par la présente requête, ces associations demandent l'annulation de la décision implicite de rejet de leur demande née le 26 décembre 2020.
Sur les conclusions en annulation :
2. Aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement : " Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application des dispositions du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine. / Elle peut édicter des mesures conservatoires et suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages ou la poursuite des travaux, opérations ou activités jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que la société ferme éolienne A... bénéficie d'un permis de construire en date du 15 mai 2007 devenue autorisation environnementale au 1er mars 2017 lui permettant d'exploiter le parc éolien dit A... ". Il est constant que cette autorisation, qui est dépourvue de la dérogation au régime de protection des espèces protégées, est devenue définitive. Dans ces conditions, et dès lors que ce parc éolien n'est pas exploité sans autorisation au sens des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, la préfète du Tarn ne pouvait légalement faire droit à la demande des associations requérantes tendant à ce qu'elle mette en œuvre les pouvoirs qu'elle détient au titre de ces dispositions et ce alors même que les mesures d'évitement et de réduction prévues dans les arrêtés du préfet du Tarn des 10 et 23 septembre 2021 portant prescriptions complémentaires ne présenteraient pas des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé.
4. Il résulte de ce qui précède que l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association Nature en Occitanie et l'association Ligue pour la Protection des Oiseaux ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision implicite née le 26 décembre 2020 par laquelle la préfète du Tarn a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions en injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que les associations requérantes demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, de l'association Nature en Occitanie et de l'association Ligue pour la Protection des Oiseaux est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, première dénommée pour l'ensemble des requérants, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société par actions simplifiée ferme éolienne A....
Copie en sera adressée au préfet du Tarn.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2023.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
D. Chabert
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°21TL20805