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06/06/2023 | FRANCE | N°21TL01656

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 06 juin 2023, 21TL01656


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 de la rectrice de la région académique Occitanie prononçant à son encontre la sanction disciplinaire de déplacement d'office, ainsi que l'arrêté du 5 mars 2019 de la rectrice de la région académique Occitanie l'affectant à titre définitif sur la zone de remplacement de Nîmes, et la rattachant administrativement à compter du 12 février 2019 à la section d'enseignement général et professionnel adapté

du collège ..., d'enjoindre à la rectrice de la région académique Occitanie de la r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 de la rectrice de la région académique Occitanie prononçant à son encontre la sanction disciplinaire de déplacement d'office, ainsi que l'arrêté du 5 mars 2019 de la rectrice de la région académique Occitanie l'affectant à titre définitif sur la zone de remplacement de Nîmes, et la rattachant administrativement à compter du 12 février 2019 à la section d'enseignement général et professionnel adapté du collège ..., d'enjoindre à la rectrice de la région académique Occitanie de la replacer dans l'emploi qu'elle occupait précédemment et de reprendre rétroactivement les mesures nécessaires pour la placer dans une position régulière à la date de sa mutation et de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1901109 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, et des mémoires, enregistrés les 3 et 21 mai 2021, 25 octobre 2021, et le 21 décembre 2021 ainsi qu'un dépôt de pièces enregistré le 26 octobre 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 21MA01656 puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL01656, Mme C..., représentée par Me Belaïche, demande à la cour :

1°) d'infirmer le jugement du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 de la rectrice de la région académique Occitanie prononçant à son encontre la sanction disciplinaire de déplacement d'office, ainsi que l'arrêté du 5 mars 2019 de la rectrice de la région académique Occitanie l'affectant à titre définitif sur la zone de remplacement de Nîmes, et la rattachant administrativement à compter du 12 février 2019 à la section d'enseignement général et professionnel adapté du collège ... ;

3°) d'enjoindre à la rectrice de la région académique Occitanie, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de la replacer dans l'emploi qu'elle occupait précédemment et de reprendre rétroactivement les mesures nécessaires pour la placer dans une position régulière à la date de sa mutation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de l'arrêté du 24 janvier 2019 :

- l'arrêté attaqué est signé par une autorité incompétente, la délégation de signature ne fixant pas les actes pour lesquels elle a été accordée ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé, en l'absence de précision sur le contenu de l'avis de la commission administrative paritaire ;

- l'avis de cette commission est irrégulier dès lors qu'il est fondé sur une motivation erronée et défaillante ;

- elle a été privée de la possibilité de saisir la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique d'Etat ;

- l'arrêté attaqué est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ; le rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire est dépourvu de signature et d'en-tête ; elle n'a pas eu la possibilité de lire ses observations écrites en séance ; elle n'a pas été invitée à présenter ses ultimes observations avant que la commission administrative paritaire ne délibère ;

- la composition de la commission administrative paritaire n'est pas conforme à l'article 6 du décret du 28 mai 1982 ; aucune mention au procès-verbal de la réunion ne justifie l'empêchement de la rectrice ; deux secrétaires adjoints de séance ont été désignés en méconnaissance de l'article 29 du décret précité ; un seul procès-verbal a été établi alors qu'il y a eu deux séances ; l'un des secrétaires adjoints n'a pas été mis à même de signer ce procès-verbal, lequel, en outre, n'est pas une version aboutie ; rien n'établit que ce document a été soumis à l'approbation des membres de la commission lors de la séance suivante, cette irrégularité étant substantielle ; le procès-verbal ne permet pas davantage de savoir qui est titulaire et qui est suppléant parmi les votants, cette irrégularité affectant l'issue du vote ;

- les sources de tension avec certains professeurs de la section d'enseignement professionnel du lycée se situent dans un conflit de nature syndicale et dans ses difficultés en tant que travailleur handicapé à s'intégrer dans un collectif qui n'est pas suffisamment sensibilisé à la condition des personnes handicapées ; les faits reprochés n'ont pas la nature d'une insuffisance professionnelle ;

- le caractère fautif des faits reprochés n'est pas démontré ;

- la sanction présente un caractère disproportionné ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un détournement de pouvoir ;

S'agissant de l'arrêté du 5 mars 2019 :

- il est illégal par voie de conséquence de l'illégalité de l'arrêté du 24 janvier 2019 ;

- il est également entaché d'incompétence de son auteur.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 23 septembre et 29 novembre 2021, la rectrice de la région académique Occitanie conclut au rejet de la requête de Mme C....

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 26 octobre 2021, le syndicat Action et Démocratie, représenté par la SELARL Olivier Trilles Victor Font, agissant par Me Font, demande que son intervention volontaire soit admise et s'associe aux conclusions à fin d'annulation et d'injonction de la requérante.

Il soutient que son intervention est recevable, que l'instance disciplinaire a manqué au principe d'impartialité et que les difficultés rencontrées ne peuvent justifier une sanction, sauf à constituer une discrimination syndicale à l'égard de Mme C....

Par une ordonnance du 2 décembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

- le décret n°84-914 du 10 octobre 1984 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- le décret n° 87-495 du 3 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Belaïche, représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., professeure de lycée professionnel ..., affectée au lycée ... de Nîmes au sein de la section d'enseignement professionnel " métiers de la mode ", a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2019 par lequel la rectrice de la région académique Occitanie a prononcé à son encontre la sanction de déplacement d'office, ainsi que de l'arrêté du 5 mars 2019 l'affectant à compter du 12 février 2019 sur la zone de remplacement de Nîmes, rattachée administrativement au ... (Gard). Elle a également demandé au tribunal d'enjoindre à la rectrice de la région académique Occitanie de la replacer dans l'emploi qu'elle occupait précédemment et de reprendre rétroactivement les mesures nécessaires pour la placer dans une position régulière à la date de sa mutation. Par un jugement du 30 mars 2021, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Sur l'intervention du syndicat Action et Démocratie :

2. Le syndicat Action et Démocratie, qui a pour objet la défense des intérêts moraux et matériels de tous les personnels de l'éducation nationale, justifie d'un intérêt à intervenir au soutien des conclusions de Mme C.... Par suite, son intervention doit être admise.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le moyen commun aux arrêtés attaqués :

3. Aux termes de l'article R 222-19-2 du code de l'éducation : " Sous l'autorité du recteur, le secrétaire général d'académie est chargé de l'administration de l'académie. Il supplée le recteur en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci. (...) ". Aux termes de l'article D. 222-20 du même code : " Le recteur est autorisé à déléguer sa signature au secrétaire général de l'académie et, en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci, à l'adjoint au secrétaire général d'académie et aux chefs de division du rectorat, dans la limite de leurs attributions. (...). Les délégations mentionnées aux alinéas précédents fixent les actes pour lesquels elles ont été accordées. (...) ".

4. Les arrêtés attaqués ont été signés par M. D..., secrétaire général de l'académie de Montpellier qui disposait, aux termes d'un arrêté du 10 septembre 2018, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Occitanie du 12 septembre 2018, d'une délégation de signature régulièrement consentie par la rectrice de la région académique Occitanie, en cas d'absence ou d'empêchement de celle-ci. Si Mme C... relève que cet arrêté ne précisait pas les actes pour lesquels la délégation a été accordée en méconnaissance des dispositions précitées de l'article D.222-20 du code de l'éducation, il résulte toutefois des dispositions de l'article R. 222-19-2 du même code que le secrétaire général d'académie supplée le recteur en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci et prend en conséquence dans ce cadre des décisions dans tous les domaines relevant des attributions du recteur. Dans ces conditions, il doit être considéré que M. A... bénéficiait, au terme de l'arrêté du 10 septembre 2018, d'une délégation de signature de portée générale de la rectrice, lui permettant de signer les actes attaqués. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés querellés doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 24 janvier 2019 :

S'agissant de la régularité de la procédure :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial (...) ".

6. Lorsque la commission administrative paritaire siégeant en formation disciplinaire est appelée à connaître de l'éventualité d'infliger une sanction disciplinaire, elle ne dispose d'aucun pouvoir de décision et se borne à émettre un avis à l'autorité compétente. Ainsi, cette commission ne constitue ni une juridiction, ni un tribunal au sens du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté comme inopérant.

7. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose un dépaysement de la commission administrative paritaire, au motif que l'agent concerné est membre de cette commission. Il ne ressort pas, en tout état de cause, du procès-verbal de la réunion de ladite commission que ses membres auraient fait preuve de partialité. La longueur de la séance du 8 novembre 2018, qui s'est déroulée de 9 heures 20 à 21 heures, n'est pas, en elle-même, de nature à révéler un manquement au principe d'impartialité. La production d'un courriel d'un adhérent du syndicat intervenant, également membre et secrétaire adjoint de la commission, ne suffit pas à établir que des consignes de vote auraient été données ou des pressions exercées par le secrétaire général de l'académie dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait fait preuve de parti-pris dans la conduite des débats. Enfin, il n'est pas davantage établi que la teneur de l'avis de la commission ne serait que le reflet de la position de son président ou que le procès-verbal de réunion, parce qu'il n'a pas été ultérieurement approuvé, ne serait pas fidèle au contenu des échanges. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'impartialité de la commission administrative paritaire doit être écarté.

8. En deuxième lieu, les règles relatives à la composition de la commission administrative paritaire académique des professeurs de lycée professionnel étant fixées par les dispositions du décret du 10 octobre 1984, Mme C... ne peut utilement invoquer l'article 6 du décret du 28 mai 1982 pour contester la régularité de cette composition.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 27 du décret susvisé du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires : " Les commissions administratives paritaires sont présidées par le directeur général, directeur ou chef de service auprès duquel elles sont placées. / En cas d'empêchement, le président désigne, pour le remplacer, un autre représentant de l'administration, membre de la commission administrative paritaire. Il en est fait mention au procès-verbal de la réunion. ".

10. Ni Mme C..., ni le syndicat intervenant n'établissent l'absence d'empêchement de la rectrice de la région académique Occitanie pour présider les séances de la commission. Dès lors, conformément aux dispositions citées au point précédent, le secrétaire général d'académie a pu assurer cette présidence. La circonstance que le procès-verbal de la réunion ne fasse pas mention de l'empêchement de la rectrice n'est pas, par elle-même, susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision attaquée et n'a pas non plus privé la requérante d'une garantie.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 29 du décret susvisé du 28 mai 1982 : " (...)/ Le secrétariat est assuré par un représentant de l'administration qui peut n'être pas membre de la commission./Un représentant du personnel est désigné par la commission en son sein pour exercer les fonctions de secrétaire adjoint./ Un procès-verbal est établi après chaque séance. Il est signé par le président et contresigné par le secrétaire et le secrétaire adjoint et transmis, dans le délai d'un mois, aux membres de la commission. Ce procès-verbal est soumis à l'approbation des membres de la commission lors de la séance suivante. ".

12. Les circonstances que deux représentants du personnel ont été désignés pour exercer les fonctions de secrétaire adjoint, qu'un seul procès-verbal a été établi pour les deux séances tenues et que ce procès-verbal n'a pas été approuvé lors d'une séance ultérieure, ne sont pas davantage, par elles-mêmes, susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision attaquée et n'ont pas non plus privé la requérante d'une garantie et le procès-verbal établi a été signé par un des secrétaires adjoints. Par ailleurs, l'arrêté attaqué du 24 janvier 2019 est intervenu après que la commission administrative paritaire a régulièrement émis son avis lors des séances des 8 et 23 novembre 2018. La circonstance qu'un membre de la commission ait ultérieurement refusé d'approuver le procès-verbal de ces séances est, par elle-même, sans influence sur la régularité de la procédure.

13. En cinquième lieu, l'absence de précision du procès-verbal de réunion quant à la qualité de titulaire ou de suppléant des votants n'est pas de nature à avoir affecté la régularité du vote effectué dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que, conformément aux dispositions de l'article 31 du décret susvisé du 28 mai 1982, les suppléants qui ont, en l'espèce, eu voix délibérative remplaçaient effectivement des titulaires absents.

14. En sixième lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " L'organisme siégeant en Conseil de discipline lorsque sa consultation est nécessaire, en application du second alinéa de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou d'un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet. (...) ".

15. La circonstance que le rapport de saisine de la commission administrative paritaire, siégeant en conseil de discipline en vue de l'examen des faits reprochés à Mme C..., ait été dépourvu d'en-tête et de signature, alors que ni les dispositions précitées du décret du 25 octobre 1984, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ne prescrivent que ce rapport, qui constitue un simple document préparatoire à la décision de l'autorité disciplinaire, comporte un en-tête ou une signature, n'est pas, par elle-même, susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision attaquée. Cette circonstance n'a pas non plus privé la requérante, qui a été en mesure de se défendre sur l'ensemble des griefs formulés à son encontre, d'une garantie. Par suite, le moyen soulevé, tiré de l'irrégularité de ce rapport, doit être écarté.

16. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article 5 du décret du 25 octobre 1984 : " (...)/ Le rapport établi par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire (...) et les observations écrites éventuellement présentées par le fonctionnaire sont lus en séance./ (...) Le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défendeurs peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Ils doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer. ".

17. D'une part, les dispositions citées au point précédent n'imposent pas que les observations écrites de l'agent soient lues en séance par une autre personne que lui-même et il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... aurait été privée de la faculté de lire ses observations écrites en séance.

18. D'autre part, ainsi que l'a relevé le tribunal, le droit pour l'intéressé de présenter lui-même ou par l'intermédiaire de son défenseur d'ultimes observations immédiatement avant le début du délibéré du conseil de discipline, n'est pas méconnu du seul fait de l'absence d'information de l'intéressé ou de son défenseur, avant cette ultime intervention, de ce que le conseil délibèrerait immédiatement après. En l'espèce, le procès-verbal de la réunion de la commission administrative paritaire indique que " Mme C... n'a rien à ajouter " avant que le président ne l'invite avec ses conseils à quitter la salle. Ainsi, Mme C... a eu la possibilité de s'exprimer en dernier, avant que le conseil de discipline ne délibère.

S'agissant de la régularité de l'avis de la commission :

19. Aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " (...) Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté./ L'avis de cet organisme de même que la décision prononçant une sanction disciplinaire doivent être motivés. ".

20. L'avis émis par la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline sur la sanction à appliquer à Mme C... précise notamment, s'agissant des faits qui lui sont reprochés, que l'intéressée a eu une attitude conflictuelle et un positionnement inadéquat à l'égard de ses collègues et de sa hiérarchie propres à créer des troubles importants au sein de la section d'enseignement professionnel du ... et à mettre en difficulté son fonctionnement, et que ces faits sont incompatibles avec les exigences attendues d'un professeur et constituent des fautes professionnelles. Cet avis mentionne ensuite expressément que la commission s'est prononcée pour une " absence d'avis " et précise le résultat des votes des participants pour la sanction de déplacement d'office proposée par l'administration, puis pour les autres sanctions, et pour l'absence de sanction.

21. Si la commission n'a pas exprimé d'avis sur le choix de la sanction, la majorité de ses membres n'en a pas moins également désapprouvé l'absence de sanction à l'égard de l'agent. Dès lors, en relevant une attitude conflictuelle et un positionnement inadéquat de l'agent à l'égard de ses collègues et de sa hiérarchie de nature à constituer des fautes professionnelles, la commission n'a pas fondé son avis sur une motivation erronée. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission doit être écarté.

S'agissant de la motivation de l'arrêté contesté :

22. En relevant l'absence de précisions de l'arrêté contesté quant au contenu de l'avis de la commission administrative paritaire, la requérante ne conteste pas utilement la réponse apportée par les premiers juges pour écarter le moyen tiré de son insuffisance de motivation. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif aux points 22 et 23 du jugement attaqué.

S'agissant de la privation de la possibilité de saisir la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat :

23. Il résulte des dispositions de l'article 10 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat que la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut être saisie notamment par tout fonctionnaire faisant l'objet d'un déplacement d'office, alors que le conseil de discipline a proposé une sanction moins sévère ou qu'aucune des propositions soumises à ce conseil n'a recueilli l'approbation d'une majorité de ses membres, et que l'administration, chargée de notifier au fonctionnaire poursuivi la sanction dont il a fait l'objet, doit communiquer à l'intéressé les informations de nature à lui permettre de déterminer si les conditions de saisine de ladite commission sont réunies. La méconnaissance de ces dispositions par l'administration lorsqu'elle s'abstient de communiquer de telles informations lors de la notification de la décision attaquée est sans incidence sur la légalité de celle-ci. Par suite, le moyen soulevé par Mme C... tiré de ce qu'elle aurait été privée de la possibilité de saisir la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat doit être écarté comme inopérant.

S'agissant de la légalité interne :

24. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, alors applicable : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ". L'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes./ (...) Deuxième groupe :/ (...) - le déplacement d'office./ (...) ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

25. Aux termes de la décision attaquée, la rectrice de la région académique Occitanie a reproché à Mme C... d'avoir durablement fait preuve d'une attitude conflictuelle et d'un positionnement inadapté à l'égard de ses collègues et de sa hiérarchie, de nature à créer des troubles importants au sein de la section d'enseignement professionnel du ... et à mettre en difficulté son fonctionnement.

26. En exposant que les sources de tension avec certains professeurs de la section d'enseignement professionnel du lycée trouvent leur origine dans un conflit de nature syndicale et dans ses difficultés en tant que travailleur handicapé à s'intégrer dans un collectif insuffisamment sensibilisé à la condition des personnes handicapées, la requérante ne conteste pas utilement la réponse apportée par les premiers juges pour écarter le moyen tiré de l'absence de caractère fautif des faits reprochés. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges au point 28 du jugement attaqué.

27. De même, il y a également lieu d'écarter le moyen tiré de l'absence de caractère proportionné de la sanction par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 29 du jugement attaqué.

28. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée à l'intéressée repose sur les propres difficultés de comportement de l'intéressée, sa posture et son positionnement inadéquats qui ont eu pour conséquence d'occasionner des troubles au sein de la section d'enseignement professionnel et de nuire à son fonctionnement. Contrairement à ce qui est soutenu, ces difficultés personnelles relationnelles et de comportement à l'origine de la sanction, qui sont apparues dès l'année 2012, soit bien antérieurement au conflit syndical dont Mme C... fait état, sont ainsi dépourvues de lien avec son appartenance syndicale et il n'est, par ailleurs, pas établi que la sanction en litige reposerait sur l'existence d'une discrimination syndicale ou d'un règlement de compte syndical dont l'intéressée aurait fait l'objet. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que les difficultés relevées auraient pour origine sa situation de travailleur handicapé ou l'insuffisante sensibilisation de l'administration et de ses collègues à cette situation. Enfin, si Mme C... persiste en appel à soutenir qu'elle a été victime d'actes d'intimidation de la part de ses collègues, soutenus par le proviseur qui aurait, selon ses dires et ceux de son syndicat, pris parti contre elle, les pièces produites n'établissent pas la réalité de ces allégations. La circonstance qu'elle aurait été agressée verbalement par un collègue, à la supposer établie, n'est pas de nature à faire regarder la mesure de déplacement d'office contestée comme entachée de détournement de pouvoir. Par suite et pour ces motifs, le moyen tiré de l'existence d'un tel détournement doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 5 mars 2019 :

29. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué du 5 mars 2019 serait dépourvu de base légale, du fait de l'illégalité de l'arrêté du 24 janvier 2019, doit être écarté.

30. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent également qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

31. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention du syndicat Action et Démocratie est admise.

Article 2 : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au syndicat Action et Démocratie et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée à la rectrice de la région académique Occitanie.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juin 2023.

Le rapporteur,

T. Teulière

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°21TL01656


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL01656
Date de la décision : 06/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: M. Thierry TEULIÈRE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : BELAICHE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-06-06;21tl01656 ?
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