La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2023 | FRANCE | N°21TL01257

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 01 juin 2023, 21TL01257


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais (ASPAHR) a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a approuvé la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé de Perpignan.

Par un jugement n° 2000152 rendu le 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de cette association.

Procédure devant la c

our :

Par une requête enregistrée le 23 mars 2021 sous le n° 21MA01257 au greffe de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais (ASPAHR) a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a approuvé la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé de Perpignan.

Par un jugement n° 2000152 rendu le 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de cette association.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mars 2021 sous le n° 21MA01257 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL01257 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, puis des mémoires enregistrés le 25 octobre 2022 et le 12 décembre 2022, l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais (ASPAHR), représentée par Me Catry, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 janvier 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 4 juillet 2019 ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit une visite des lieux en application de l'article R. 622-1 du code de justice administrative ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2019 en tant qu'il intègre des orientations d'aménagement et de programmation ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens de sa demande tirés, d'une part, de la méconnaissance de la loi dite " Malraux " du 4 août 1962 et de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme qui est en issu, d'autre part, des erreurs de fait commises dans les documents constituant le plan de sauvegarde et de mise en valeur et, enfin, de l'erreur d'appréciation dans la mise en œuvre des " séquences urbaines " par le plan révisé ;

- les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé les réponses qu'ils ont apportées aux moyens tirés, d'une part, de l'irrégularité des modalités de la concertation préalable et, d'autre part, de l'illégalité des orientations d'aménagement et de programmation ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

- les modalités de concertation étaient irrégulières et insuffisantes au regard de l'article L. 103-4 du code de l'urbanisme et de l'article 6 de la convention d'Aarhus ;

- la procédure d'enquête publique est viciée en raison de l'insuffisance du contenu du rapport d'enquête et de la partialité du commissaire enquêteur pendant l'enquête ;

- le rapport de présentation du plan de sauvegarde et de mise en valeur est insuffisant s'agissant de la mise en œuvre des " séquences urbaines " et de la complémentarité entre le règlement et les orientations d'aménagement et de programmation ;

- la mise en place d'orientations d'aménagement et de programmation poursuivant des buts autres que la seule protection du patrimoine est dépourvue de toute base légale ; à titre subsidiaire, par la voie de l'exception, les articles R. 313-2 et R. 313-5 du code de l'urbanisme sont illégaux au regard des dispositions de l'article L. 313-1 du même code ;

- les orientations d'aménagement et de programmation sont en contradiction avec le règlement du plan de sauvegarde et de mise en valeur dès lors que les premières reposent sur une logique par îlot alors que le second se fonde sur une approche par immeuble ;

- l'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 et les classements retenus pour les immeubles inclus dans son périmètre sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation et sont incompatibles avec les objectifs visés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- l'orientation d'aménagement et de programmation n° 4 et les classements retenus pour les îlots AD 10 et AE 12 sont contradictoires, entachés d'erreur manifeste d'appréciation et incompatibles avec les objectifs visés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- l'orientation d'aménagement et de programmation n° 5 et les classements retenus pour les îlots AK 08, AK 12 et AK 30 sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation s'agissant du premier îlot et entachés de contradiction s'agissant des deux autres îlots ;

- l'orientation d'aménagement et de programmation n° 6 et le classement retenu pour la parcelle cadastrée AC 75 sont contradictoires, entachés d'erreur manifeste d'appréciation et incompatibles avec les objectifs visés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- les documents issus de la procédure de révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur sont entachés de multiples erreurs de fait et erreurs manifestes d'appréciation outre celles relevées ci-avant s'agissant des orientations d'aménagement et de programmation ;

- les auteurs du plan de sauvegarde et de mise en valeur ont commis une erreur manifeste d'appréciation dans la mise en œuvre des " séquences urbaines " ;

- le cas échéant, la cour ordonnera, au titre de ses pouvoirs généraux d'instruction, l'organisation d'une visite des lieux ou l'audition d'une personne compétente.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 octobre 2021 et le 10 novembre 2022, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en observations, enregistré le 26 octobre 2022, la commune de Perpignan, représentée par la société d'avocats inter-barreaux Sanguinède Di Frenna et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association requérante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance était irrecevable car tardive, dès lors que le trésorier de l'association n'avait pas qualité pour introduire les recours gracieux et hiérarchique, lesquels n'ont donc pas prorogé le délai de recours contentieux.

Par une ordonnance du 5 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention sur l'accès à l'information, la participation du public et l'accès à la justice en matière d'environnement signée à Aarhus le 25 juin 1998 ;

- le code de l'environnement ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 62-903 du 4 août 1962 ;

- la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Catry, représentant l'association requérante, et de Me Dahrour, représentant la commune de Perpignan.

Considérant ce qui suit :

1. Le secteur sauvegardé de la commune de Perpignan a été créé et délimité par arrêté interministériel le 13 septembre 1995. Il recouvre le centre historique de cette commune sur une superficie d'environ 100 hectares. Par arrêté du 13 juillet 2007, le préfet des Pyrénées-Orientales a approuvé le plan de sauvegarde et de mise en valeur applicable dans ce secteur sauvegardé. Le 5 février 2014, le conseil municipal de Perpignan a proposé la mise en œuvre d'une procédure de révision de ce plan. Par arrêté du 1er avril 2014, le préfet des Pyrénées-Orientales a prescrit la mise en révision ainsi proposée. Le secteur sauvegardé de Perpignan est devenu site patrimonial remarquable par l'effet des dispositions de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine. Par délibérations des 7 et 15 février 2018, le conseil municipal de Perpignan et le conseil de la communauté urbaine de Perpignan Méditerranée Métropole, laquelle était devenue compétente en matière de document d'urbanisme, ont tiré le bilan de la concertation et donné leur avis sur le projet de révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur. La commission nationale du patrimoine et de l'architecture a été consultée sur ce projet de révision les 17 mai 2018 et 13 septembre 2018. L'enquête publique a été organisée du 11 mars au 12 avril 2019 et le commissaire enquêteur a remis son rapport et ses conclusions le 19 mai 2019. Par délibérations des 26 et 28 juin 2019, le conseil municipal de Perpignan et le conseil de la communauté urbaine ont émis leur avis sur le projet modifié consécutivement à l'enquête publique et, par arrêté du 4 juillet 2019, le préfet des Pyrénées-Orientales a approuvé la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur du site patrimonial remarquable de Perpignan. Par la présente requête, l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais (ASPAHR) relève appel du jugement du 26 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort de la motivation du jugement litigieux que, contrairement à ce que soutient l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais, le tribunal administratif de Montpellier a répondu, aux points 14 à 17, au moyen tiré de ce que le plan de sauvegarde et de mise en valeur issu de la révision litigieuse méconnaissait les dispositions de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme. Il a notamment relevé que le législateur n'avait interdit ni de prévoir des orientations d'aménagement et de programmation au sein d'un tel plan, ni d'y intégrer des enjeux liés au renouvellement urbain ou à la lutte contre l'insalubrité, ni encore d'y planifier des actions portant sur des groupes d'immeubles constituant des îlots urbains. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché de l'omission invoquée sur ce premier point.

3. Il ressort également des termes du jugement contesté que les premiers juges se sont prononcés, au point 22, sur le moyen tiré de ce que les documents constituant le plan de sauvegarde et de mise en valeur étaient entachés de " nombreuses erreurs de fait ", puis, au point 25, sur le moyen tiré de ce que les auteurs de ce plan avaient commis des erreurs dans la mise en œuvre des " séquences urbaines ". Dès lors, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait omis de répondre aux moyens soulevés sur ces points.

4. Il ressort enfin de la motivation du jugement attaqué que le tribunal administratif de Montpellier a répondu avec une précision suffisante, d'une part, au point 3, au moyen tiré de l'irrégularité des modalités de concertation et, d'autre part, aux points 14 à 17 et 26 à 29, à l'ensemble des moyens portant sur les orientations d'aménagement et de programmation. Ainsi, le jugement critiqué n'est pas entaché d'une insuffisance de motivation sur ces points.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la procédure de concertation préalable :

5. L'article 6 de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998, stipule que : " (...) / 2. Lorsqu'un processus décisionnel touchant l'environnement est engagé, le public concerné est informé comme il convient, de manière efficace et en temps voulu, par un avis au public ou individuellement, selon le cas, au début du processus. (...) / 3. Pour les différentes étapes de la procédure de participation du public, il est prévu des délais raisonnables laissant assez de temps pour informer le public conformément au paragraphe 2 ci-dessus et pour que le public se prépare et participe effectivement aux travaux tout au long du processus décisionnel en matière d'environnement. / 4. Chaque Partie prend des dispositions pour que la participation du public commence au début de la procédure, c'est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles et que le public peut exercer une réelle influence. / (...) ".

6. L'article L. 313-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " (...) / II. - (...) / Le plan de sauvegarde et de mise en valeur est élaboré conjointement par l'Etat et la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme. (...) / IV. - (...) / La révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur a lieu dans les formes prévues pour son établissement. / (...) ". Aux termes de l'article R. 313-7 du même code : " La procédure d'élaboration du plan de sauvegarde et de mise en valeur est conduite conjointement par le préfet et par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent. / (...) / Il définit dans les mêmes conditions les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation prévus au II de l'article L. 300-2. Le bilan de cette concertation est présenté devant le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, qui en délibère. / (...) ". Selon l'article R. 313-14 dudit code : " La révision d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur est prescrite par arrêté du préfet, sur proposition ou après accord du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent. / Elle a lieu dans les formes définies par les articles R. 313-7 à R. 313-13. ". Aux termes de l'article L. 300-2 du même code auquel il est ainsi renvoyé : " (...) / II. ' Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont précisés par : / 1° Le préfet lorsque la révision du document d'urbanisme ou l'opération sont à l'initiative de l'Etat ; / (...) / Les modalités de la concertation permettent, pendant une durée suffisante et selon des moyens adaptés au regard de l'importance et des caractéristiques du projet, au public d'accéder aux informations relatives au projet et aux avis requis par les dispositions législatives ou réglementaires applicables et de formuler des observations et propositions qui sont enregistrées et conservées par l'autorité compétente. / (...) / IV. ' Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux I, II et III bis ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies au présent article et par la décision ou la délibération prévue au II ont été respectées. (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que, par l'arrêté du 1er avril 2014 évoqué au point 1 du présent arrêt, le préfet des Pyrénées-Orientales a fixé les modalités de la concertation préalable à la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé de Perpignan en prévoyant que les études relatives à la procédure de révision seraient mises à disposition du public en mairie, qu'au moins une réunion publique serait organisée après avoir été annoncée au moins huit jours avant par un avis publié dans un journal local et qu'une page dédiée à la procédure serait mise en place sur le site internet de la commune. Par leurs délibérations des 7 et 15 février 2018, le conseil municipal de Perpignan et le conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole ont tiré le bilan de la concertation. Il ressort notamment des indications portées dans ces deux délibérations que les études relatives à la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur ont été mises à disposition dans les locaux de la commune et de l'établissement public de coopération intercommunale où des registres ont permis au public de présenter ses observations. L'association requérante ne précise pas quels sont les documents qui n'auraient pas été mis à disposition durant cette phase. Des panneaux d'information synthétisant la procédure et les orientations du projet ont par ailleurs été installés et une permanence a été assurée en mairie. Le site internet de la commune, puis celui de la communauté urbaine, ont été renseignés au fur et à mesure de l'avancement des études et deux articles ont été publiés dans le bulletin municipal. Il ressort également des pièces du dossier que deux réunions publiques se sont tenues le 2 février 2017 et le 27 juin suivant et que, si la première de ces réunions a été annoncée avec retard par rapport aux prévisions de l'arrêté du 1er avril 2014, une quarantaine de personnes y ont néanmoins assisté. Il ressort de ces mêmes pièces que deux permanences ont été assurées dans les quartiers concernés par la révision et que des réunions ont été organisées avec les conseils de quartier et les associations locales. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que les modalités de concertation déterminées par l'arrêté préfectoral du 1er avril 2014 ont été respectées par l'administration et qu'elles ont permis une information et une participation suffisantes de la population conformément aux exigences de l'article 6 de la convention d'Aarhus. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations et dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la procédure d'enquête publique :

8. L'article L. 313-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige, mentionne que : " (...) / II. ' (...) / Après avis du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale et de la Commission nationale des secteurs sauvegardés, le projet de plan de sauvegarde et de mise en valeur est mis à l'enquête par l'autorité administrative. / (...) ". Selon l'article R. 313-11 du même code : " Le projet de plan de sauvegarde et de mise en valeur est soumis à enquête publique par le préfet dans les formes prévues par les articles R. 123-2 à R. 123-27 du code de l'environnement. / (...) ".

9. D'une part, aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur a établi son rapport et ses conclusions sur le projet de révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur du site patrimonial remarquable le 19 mai 2019, à l'issue de l'enquête publique organisée du 11 mars au 12 avril 2019. Le rapport rappelle l'objet du projet de révision, précise le contenu du dossier et relate le déroulement de l'enquête. Le procès-verbal de synthèse, annexé au rapport, récapitule les observations du public et présente leur analyse par le commissaire enquêteur. Les réponses de l'administration aux observations du public étaient également jointes au rapport. Le document séparé consacré aux conclusions du commissaire enquêteur comporte l'avis personnel motivé de l'intéressé sur le projet de révision, ainsi que sur les quatre demandes de modification présentées par la commune de Perpignan avant le début de l'enquête publique. Par voie de conséquence, le moyen tiré de l'insuffisance du rapport du commissaire enquêteur doit être écarté.

11. D'autre part, aux termes de l'article R. 123-4 du code de l'environnement : " Ne peuvent être désignés comme commissaire enquêteur ou membre d'une commission d'enquête les personnes intéressées au projet, plan ou programme soit à titre personnel, soit en raison des fonctions qu'elles exercent ou ont exercées depuis moins de cinq ans, notamment au sein de la collectivité, de l'organisme ou du service qui assure la maîtrise d'ouvrage, la maîtrise d'œuvre ou le contrôle du projet, plan ou programme soumis à enquête, ou au sein d'associations ou organismes directement concernés par cette opération. ". Il résulte des dispositions citées au point 9 ci-dessus qu'il appartient notamment au commissaire enquêteur de donner, dans ses conclusions, son avis personnel et motivé sur les avantages et les inconvénients du projet. Au regard du devoir d'impartialité qui s'impose au commissaire enquêteur, ses conclusions ne sauraient être dictées par un intérêt personnel, ni par un parti pris initial sur le projet.

12. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le commissaire enquêteur désigné pour le projet de révision en litige aurait exprimé un parti pris sur le contenu de ce projet dès le début de la procédure d'enquête publique. S'il apparaît que l'association requérante s'est montrée active pendant l'enquête et qu'elle a notamment perturbé la permanence du commissaire enquêteur le 12 avril 2019 en organisant un rassemblement en présence de la presse, ni le procès-verbal de synthèse ni le rapport d'enquête ne comportent de propos déplacés vis-à-vis des actions menées par l'association. Il ressort au contraire de ces mêmes pièces que le commissaire enquêteur a procédé à une analyse précise des observations émises par cette dernière et qu'il a présenté de manière objective et mesurée les arguments de l'ensemble des contributeurs avant d'exprimer son avis personnel favorable au projet, assorti de trois recommandations. Dans ces conditions, le moyen tiré de la partialité du commissaire enquêteur doit être également écarté.

En ce qui concerne le contenu du rapport de présentation :

13. L'article R. 313-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Le plan de sauvegarde et de mise en valeur comprend un rapport de présentation et un règlement ainsi que des documents graphiques. Il peut comporter en outre des orientations d'aménagement relatives à des quartiers ou à des secteurs, assorties le cas échéant de documents graphiques. / Il est accompagné d'annexes. ". L'article R. 313-3 du même code mentionne que : " Le rapport de présentation : / 1° Expose le diagnostic prévu au deuxième alinéa de l'article L. 151-4 ; / 2° Analyse l'état initial de l'environnement ; / 3° Explique les choix retenus pour établir le plan de sauvegarde et de mise en valeur et leur compatibilité avec le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme lorsqu'il en existe un et expose les motifs de la délimitation des zones, des règles qui y sont applicables et des orientations d'aménagement. (...). ".

14. D'une part, il est vrai que le rapport de présentation de la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur du site patrimonial remarquable de Perpignan n'expose pas les motifs ayant conduit à mettre en place des " séquences urbaines " dans les documents graphiques issus de la procédure de révision. Les raisons de l'identification de ces " séquences urbaines " sont toutefois explicitées à l'article 2.1.11 du règlement révisé, lequel précise qu'il s'agit de séquences de façades homogènes en élévation sur rue, pouvant correspondre à des immeubles de même typologie, à la répétition d'un modèle architectural ou à une campagne de constructions présentant des modénatures ou des décors particuliers constituant un paysage urbain cohérent. Le même article du règlement énonce que les interventions sur les façades des immeubles concernés par ces séquences urbaines sont possibles à condition qu'elles n'altèrent pas leur caractère et que les façades participent à une nouvelle séquence. Compte tenu des précisions ainsi apportées par le règlement du plan de sauvegarde et de mise en valeur, l'insuffisance du rapport de présentation sur ce point n'est pas de nature à entacher la légalité de l'arrêté en litige.

15. D'autre part, le paragraphe C.4 du rapport de présentation justifie la cohérence de la classification règlementaire des constructions, ainsi que des orientations d'aménagement et de programmation, par rapport au projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de la commune de Perpignan, avec lequel le plan de sauvegarde et de mise en valeur doit être compatible en application du IV de l'article L. 313-3 du code de l'urbanisme. Le paragraphe J du rapport de présentation expose par ailleurs les objectifs visés par chacune des huit orientations d'aménagement et de programmation et justifie de l'absence de contradiction avec la classification règlementaire retenue pour les immeubles voués à être remplacés. Enfin, les huit fiches du cahier particulier relatif à ces orientations viennent compléter les indications du rapport de présentation, notamment en rapprochant les schémas d'aménagement et le document graphique révisé, ce qui permet de s'assurer de leur cohérence. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que le rapport de présentation serait insuffisant sur ce point.

En ce qui concerne les orientations d'aménagement et de programmation prises dans leur ensemble :

16. L'article L. 101-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : / 1° L'équilibre entre : / (...) / b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux, la lutte contre l'étalement urbain ; / (...) d) La sauvegarde des ensembles urbains et la protection, la conservation et la restauration du patrimoine culturel ; / e) Les besoins en matière de mobilité ; / (...) / 4° La sécurité et la salubrité publiques ; (...) ". Aux termes de l'article L. 153-1 du même code : " Le plan local d'urbanisme couvre l'intégralité du territoire : / 1° De l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme, de document d'urbanisme en tenant lieu et de carte communale ; / 2° De la commune, lorsqu'il est élaboré par une commune non membre d'un tel établissement public. / Sont toutefois exceptées du périmètre les parties de ces territoires couvertes par un plan de sauvegarde et de mise en valeur approuvé. ".

17. L'article L. 313-1 du code de l'urbanisme mentionne que : " (...) II. ' L'acte qui crée le secteur sauvegardé prescrit l'élaboration d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur et met en révision le plan local d'urbanisme lorsqu'il existe. (...) / III. ' Les dispositions applicables aux plans locaux d'urbanisme le sont également aux plans de sauvegarde et de mise en valeur à l'exception du 2° de l'article L. 113-3, de l'article L. 151-5 et des articles L. 153-8 à L. 153-60. / Le plan de sauvegarde et de mise en valeur peut en outre comporter l'indication des immeubles ou parties intérieures ou extérieures d'immeubles : / a) Dont la démolition, l'enlèvement ou l'altération sont interdits et dont la modification est soumise à des conditions spéciales ; / b) Dont la démolition ou la modification pourra être imposée par l'autorité administrative à l'occasion d'opérations d'aménagement publiques ou privées. (...) ".

18. Selon l'article R. 313-5 du même code : " Les orientations d'aménagement peuvent, par quartier ou par secteur, prévoir les actions et opérations d'aménagement mentionnées à l'article L. 151-7. ". Et aux termes de l'article L. 151-7 auquel il est ainsi renvoyé : " Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : / 1° Définir les actions et opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, notamment les continuités écologiques, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine, lutter contre l'insalubrité, permettre le renouvellement urbain et assurer le développement de la commune ; (...) ".

19.

En l'espèce, il ressort des termes de l'arrêté préfectoral du 1er avril 2014 prescrivant la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur que l'engagement de cette procédure a eu pour objectif principal de remédier aux obstacles résultant de la règlementation arrêtée en 2007 pour mener une action publique cohérente permettant l'évolution des tissus bâtis et en particulier les interventions par îlot, avec la volonté de préserver en priorité la trame urbaine et de prendre les mesures nécessaires à la sécurité publique au regard de l'état délabré de certains édifices dans le périmètre protégé, notamment dans les quartiers Saint-Jacques, Saint-Mathieu et La Réal. Le rapport de présentation du plan de sauvegarde et de mise en valeur révisé indique que le centre historique de Perpignan se caractérise par un bâti ancien nettement dégradé, avec un niveau important de logements insalubres, une proportion élevée de constructions " mono-orientées " privées d'éclairement naturel et de ventilation et un taux très significatif d'immeubles vacants, notamment dans les trois quartiers susmentionnés, identifiés comme prioritaires au titre de la politique de la ville. Dans ce contexte, le rapport de présentation précise qu'il a été procédé à une révision du classement règlementaire des immeubles prévu par le plan approuvé en 2007 en prenant en compte l'état du bâti et l'intérêt patrimonial réel de chacun d'eux. Il expose que le plan révisé comporte huit orientations d'aménagement et de programmation, lesquelles prévoient la mise en œuvre d'actions ou d'opérations de restructuration ou de réhabilitation de quartiers, de secteurs ou d'îlots visant à lutter contre l'insalubrité et à améliorer la cohésion sociale.

20. D'une part, il résulte de la combinaison des dispositions mentionnées aux points 16 et 17 du présent arrêt que le plan de sauvegarde et de mise en valeur d'un site patrimonial remarquable constitue un document d'urbanisme qui tient lieu de plan local d'urbanisme et se substitue à ce dernier sur le périmètre qu'il recouvre. Il s'ensuit que le plan de sauvegarde et de mise en valeur doit, comme tout document d'urbanisme, s'inscrire dans les objectifs généraux de la politique d'urbanisme énoncés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme et rechercher, en particulier, le meilleur équilibre entre, d'une part, la sauvegarde des ensembles urbains et la protection, la conservation et la restauration du patrimoine culturel et, d'autre part, les enjeux relatifs au renouvellement urbain et à la restructuration des espaces urbanisés, ainsi qu'aux besoins de mobilité et à la sécurité et la salubrité publiques. Par suite et contrairement à ce que soutient l'association requérante, les auteurs de la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur de Perpignan ont pu légalement prévoir des dispositions visant des buts autres que la seule protection du patrimoine historique du centre-ville et prendre notamment en compte les enjeux liés au renouvellement urbain, à la mobilité ou à la sécurité et la salubrité publiques.

21. D'autre part, il résulte des dispositions du III de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme, rappelées au point 17 ci-dessus, que les dispositions du même code applicables aux plans locaux d'urbanisme le sont également aux plans de sauvegarde et de mise en valeur, à l'exception de celles de trois articles au nombre desquels ne figurent pas les articles L. 151-6 et L. 151-7 relatifs aux orientations d'aménagement et de programmation. Dès lors, l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais ne peut valablement soutenir que le législateur n'aurait pas entendu permettre l'introduction de telles orientations au sein d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur et que, par voie de conséquence, les auteurs de la révision en litige auraient méconnu les dispositions législatives en vigueur en mettant en place huit orientations de cette nature. En outre et pour les mêmes motifs, l'association requérante n'est pas non plus fondée à soutenir qu'en autorisant les auteurs d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur à y intégrer des orientations d'aménagement, les articles R. 313-2 et R. 313-5 précités du code de l'urbanisme seraient contraires à l'article L. 313-1 du même code.

22. Enfin, il résulte de ce qui vient d'être exposé que le plan de sauvegarde et de mise en valeur du site patrimonial remarquable de Perpignan a pu légalement prévoir, à travers les orientations d'aménagement et de programmation, la mise en œuvre d'actions à l'échelle de secteurs ou de quartiers particuliers et ce y compris, au sein de ces derniers, à l'échelle d'îlots regroupant plusieurs immeubles. Il résulte par ailleurs du III de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme que le règlement du plan litigieux a pu légalement classer les immeubles ou les parties d'immeubles en plusieurs catégories au regard de leur intérêt patrimonial et identifier notamment les immeubles dont la démolition, l'enlèvement ou l'altération sont interdits et dont la modification est soumise à conditions spéciales et ceux dont la démolition ou la modification pourra être imposée par l'administration à l'occasion d'opérations d'aménagement. Dès lors que l'association requérante n'établit pas que la réalisation des actions envisagées par les auteurs du plan dans les orientations d'aménagement et de programmation pourrait se trouver obérée par les classements retenus pour les immeubles inclus dans le périmètre des orientations en cause, le moyen tiré de la contradiction entre le règlement et ces orientations doit être écarté.

En ce qui concerne les orientations d'aménagement et de programmation nos 1, 4, 5 et 6 et le classement des immeubles situés dans leur périmètre :

S'agissant de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 :

23. L'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 envisage notamment la réalisation d'un espace végétalisé d'une superficie de 4 000 m2 dans le triangle constitué par les rues Carola, des Carmes et des Potiers. La mise en œuvre de cet aménagement implique la suppression de plusieurs immeubles implantés en particulier en bordure de la rue des Carmes, lesquels ont été classés par le nouveau document graphique en catégorie 7 correspondant aux immeubles dont la démolition pourra être imposée. L'orientation en litige prévoit également la suppression des immeubles adossés au chevet de l'église des Carmes, lesquels ont été aussi identifiés en catégorie 7, pour les remplacer par des échoppes. La création d'un vaste espace public végétalisé au sud du quartier Saint-Jacques s'inscrit dans les objectifs retenus par les auteurs de la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur en matière d'amélioration de l'habitat et d'aménagement d'espaces libres. L'îlot bâti dont la démolition est prévue ne présente pas une forme urbaine typique cohérente et l'association requérante n'établit pas que cet îlot intègrerait des immeubles revêtant un caractère remarquable, alors que le document consacré à l'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 mentionne que deux bâtiments se sont récemment effondrés et que les deux constructions précédemment protégées en catégorie 5 bis n'incluent aucun élément patrimonial particulier. Le même document précise en outre que les immeubles situés sur les contreforts de l'église des Carmes ne sont pas propices à l'habitat en raison de leur faible surface de plancher et de la saturation de leurs murs en eau. L'association requérante ne conteste pas le caractère insalubre de ces constructions, dont la disparition est de nature à mettre en valeur le chevet de l'église et ses vestiges archéologiques. Par conséquent, l'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 et les classements retenus pour les immeubles situés dans son périmètre ne sont ni entachés d'erreur manifeste d'appréciation, ni incompatibles avec le principe d'équilibre visé à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme.

S'agissant de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 4 :

24. L'orientation d'aménagement et de programmation n° 4 vise à accompagner le projet de réimplantation des activités universitaires en centre-ville, à proximité du bâtiment de l'ancienne université perpignanaise datant du XVIIIème siècle. Elle prévoit la création d'une place-parvis devant le bâtiment universitaire, ce qui suppose la démolition de dix immeubles au sein de l'îlot AD 10, lesquels ont été classés en catégorie 6 correspondant aux immeubles non protégés pouvant être conservés, améliorés ou remplacés. L'orientation n° 4 envisage également l'aménagement d'une esplanade végétalisée devant l'Hôtel Pams, monument historique classé, impliquant la suppression de cinq immeubles implantés au sein de l'îlot AE 12, lesquels ont été identifiés en catégorie 7 permettant d'imposer leur démolition. Le projet est en cohérence avec l'objectif de réinstallation de l'université en centre-ville, qui est l'un des axes majeurs de la politique de renouvellement urbain décrite dans le rapport de présentation. Il contribue à la requalification d'un secteur situé à la limite des quartiers Saint-Jacques et La Réal et permet la mise en valeur des monuments historiques que sont l'ancienne université, l'Hôtel Pams et l'ancien couvent Saint-Sauveur. Si l'îlot AD 10 comportait précédemment trois immeubles relevant de la catégorie 5 bis, il ressort des pièces du dossier que le premier d'entre eux est en voie d'effondrement, que le deuxième ne présente pas un intérêt patrimonial justifiant le maintien d'un tel classement et que le troisième ne sera pas impacté par l'opération. Il est par ailleurs prévu de récupérer les éléments de décor, notamment sur le bâtiment nommé " Moulin Pariès ", pour les réemployer dans des bâtiments municipaux. Enfin, si l'îlot AE 12 comptait auparavant deux immeubles classés en catégorie 5 bis, le document relatif à l'orientation en litige mentionne que la visite des lieux n'a révélé aucun élément patrimonial méritant un réemploi et l'association requérante n'apporte aucun début de preuve en sens contraire. Dans ces conditions, l'orientation d'aménagement et de programmation n° 4 et les classements retenus pour les immeubles situés au sein des îlots AD 10 et AE 12 ne sont pas contradictoires et ne procèdent pas d'une appréciation manifestement erronée. Pour les mêmes raisons, les dispositions en cause ne méconnaissent pas les objectifs visés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme.

S'agissant de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 5 :

25. L'orientation d'aménagement et de programmation n° 5 a pour objet d'améliorer l'accessibilité du quartier Saint-Mathieu depuis le quartier des Baléares situé en surplomb. Elle se décline en trois actions distinctes, dont les deux dernières sont susceptibles d'impliquer la suppression d'immeubles classés en catégorie 6 dans le document graphique. L'action n° 1 porte sur la mise en place d'un ascenseur mécanique entre les deux quartiers. L'action n° 2 envisage l'aménagement d'une " ouverture " de type jardin à travers les îlots AK 12 et 30. Le document relatif à l'orientation en litige précise que les actions nos 1 et 2 pourront être mises en œuvre de manière " alternative " et n'impose donc pas nécessairement la démolition des immeubles dont s'agit, laquelle n'est pas davantage exigée par le règlement qui les classe en catégorie 6 et non pas en catégorie 7. Par suite et contrairement à ce que soutient l'association requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'orientation n° 5 serait contradictoire avec le maintien de la servitude de " front bâti imposé " le long des deux îlots concernés. Par ailleurs, l'action n° 3 prévoit la création d'un passage reliant la rue Dugommier et la place du cimetière Saint-Mathieu par percement de l'îlot AK 08 au niveau des parcelles 253 et 254, lesquelles sont toutes deux identifiées en catégorie 6 dans le plan révisé, alors que la première se trouvait en catégorie 5 bis avant la révision. Le document relatif à l'orientation n° 5 indique cependant que le bâti de la parcelle 253 ne présente plus les qualités requises pour rester en catégorie 5 bis et l'association requérante n'apporte aucun élément de preuve contraire. Par ailleurs, si l'association appelante souligne que le projet entraînerait une rupture du front bâti continu sur la place du cimetière Saint-Mathieu, la photographie produite n'est pas suffisante pour estimer que l'atteinte portée à l'alignement existant caractériserait par elle-même une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 6 :

26. L'orientation d'aménagement et de programmation n° 6 a été introduite dans le périmètre d'étude de la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur en 2015, à la suite de la démolition, pour raisons de sécurité, de l'ancien presbytère de la cathédrale Saint-Jean. Depuis la suppression de ce bâtiment, il subsiste sur la parcelle AC 75 un immeuble du XIXème siècle isolé entre la place Gambetta et l'ancien cimetière médiéval du Campo Santo. Trois experts en architecture et en urbanisme ont été missionnés par l'administration pour proposer un projet sur l'espace laissé vacant et l'orientation n° 6 reprend leur recommandation tendant à reconstituer l'îlot que constituait l'ancien presbytère avec cet immeuble. L'association requérante conteste la pertinence du classement en catégorie 5 bis retenu pour l'immeuble en cause en soutenant qu'il justifierait un régime plus protecteur, mais elle n'apporte aucun élément de nature à étayer sa position, alors que, selon le document relatif à l'orientation en litige, l'intérêt patrimonial de ce bâtiment ne tient qu'au bon aspect de ses façades. Dès lors que le classement en catégorie 5 bis impose de maintenir la typologie et le volume de l'immeuble, le choix des auteurs du plan de sauvegarde et de mise en valeur n'est donc pas entaché de l'erreur manifeste d'appréciation invoquée. En outre et contrairement à ce que soutient l'association appelante, les experts n'ont pas conclu à la nécessité de la conservation de cet immeuble, puisqu'ils n'ont pas écarté son remplacement par une construction neuve. La contradiction alléguée entre le diagnostic et les prévisions de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 6 n'est donc pas établie. Le projet envisagé dans cette orientation étant par ailleurs conçu pour mettre en valeur l'ensemble architectural constitué par la cathédrale, la chapelle attenante et le Campo Santo autour de la place Gambetta, l'association ne saurait sérieusement soutenir qu'il méconnaîtrait l'objectif de protection du patrimoine mentionné à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne les autres moyens de la requête :

27. Il a été exposé au point 14 ci-dessus que les auteurs de la révision en litige avaient institué des " séquences urbaines " en vue de protéger des ensembles présentant des façades homogènes en élévation sur rue. En se bornant à soutenir que le plan de sauvegarde et de mise en valeur n'identifierait aucune séquence urbaine dans le quartier Saint-Jacques et dans sept autres secteurs du centre ville, alors que l'analyse du plan de zonage montre que tel n'est pas le cas, l'association requérante n'établit pas que les auteurs de la révision auraient mis en œuvre ces nouvelles servitudes dans des conditions traduisant une erreur manifeste d'appréciation.

28. Enfin, en se bornant à renvoyer à l'annexe V jointe à sa demande de première instance, à la pièce intitulée " illustrations à l'appui du mémoire en réponse " et à un dossier spécifique concernant la situation de l'immeuble situé n° 21 rue des Augustins, l'association requérante n'assortit pas de précisions suffisantes son moyen tiré de ce que la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur serait entachée de " multiples erreurs de fait et erreurs manifestes d'appréciation " et ne permet donc pas à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

29. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Perpignan à la demande de première instance, ni de procéder à une visite des lieux ou à l'audition d'une personne compétente, que l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 4 juillet 2019.

Sur les frais liés au litige :

30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par l'association requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Elles s'opposent également à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce même titre par la commune de Perpignan, laquelle n'a pas la qualité de partie, mais celle de simple observatrice, dans le cadre de la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais (ASPAHR) est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Perpignan sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour la sauvegarde du patrimoine artistique et historique roussillonnais (ASPAHR), à la ministre de la culture, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la commune de Perpignan.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne à la ministre de la culture, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL01257


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL01257
Date de la décision : 01/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Procédures d'intervention foncière. - Amélioration des quartiers anciens. - Secteurs sauvegardés.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Florian JAZERON
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : CATRY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-06-01;21tl01257 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award