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11/04/2023 | FRANCE | N°22TL21185

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 11 avril 2023, 22TL21185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté en date du 30 décembre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, de lui délivrer un titre de s

éjour " salarié " et, durant l'établissement de ce titre de séjour, une autorisation...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté en date du 30 décembre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour " salarié " et, durant l'établissement de ce titre de séjour, une autorisation provisoire de séjour et de travail de six mois, et à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail de six mois et de lui notifier une nouvelle décision ainsi que de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à payer à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n°2200427 du 13 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 30 décembre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit, a enjoint au préfet des Pyrénées-Orientales de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour en qualité de salarié de M. A..., dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2022, sous le n°22TL21185, et deux dépôts de pièces, enregistrés les 7 novembre et 9 décembre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le préfet des Pyrénées-Orientales demande à la cour d'annuler le jugement du 13 mai 2022 du tribunal administratif de Montpellier.

Il soutient que le tribunal a annulé à tort son arrêté du 30 décembre 2021, dès lors que, quel que soit le titre sollicité par M. A..., notamment en qualité de salarié dans le cadre d'un changement de statut et eu égard au fait que l'intéressé représente une menace à l'ordre public, sa décision aurait été similaire sur le fondement des dispositions des articles L. 412-5 et L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré 2 novembre 2022, et un dépôt de pièces, enregistré le 6 décembre 2022, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Sergent, demande à la cour avant de dire droit d'enjoindre sous astreinte au préfet des Pyrénées-Orientales, de produire l'intégralité de la page n°1 du formulaire de demande de titre de séjour qu'il a déposé, conclut au rejet la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il fait valoir que le préfet n'a pas examiné son droit au séjour en qualité de salarié de sorte qu'il ne peut dès lors tenter d'en proposer une base légale et qu'il ne démontre pas que sa présence constitue une menace à l'ordre public.

Par une décision du 23 septembre 2022, M. A... n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Par ordonnance du 3 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 7 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain, né le 30 août 1992, qui a épousé à Perpignan, le 27 mars 2017, une ressortissante française, est entré en France le 26 juin 2017 sous couvert d'un visa " vie privée et familiale " à entrées multiples. Il a bénéficié d'un premier titre de séjour " vie privée et familiale ", valable jusqu'au 31 août 2018, renouvelé jusqu'au 31 août 2019, puis d'une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 31 août 2021. Il a sollicité, le 9 août 2021, la délivrance d'une carte de résident portant la mention " salarié ". Par arrêté du 30 décembre 2021, le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Le préfet relève appel du jugement en date du 13 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 30 décembre 2021.

Sur la demande de M. A... tendant à ce que soit ordonnée la communication de la première page du formulaire de demande de titre de séjour :

2. Le préfet des Pyrénées-Orientales a produit, le 7 novembre 2022, le formulaire complet de demande de titre de séjour de M. A.... Par suite, la demande de l'intéressé tendant à ce que soit ordonnée la communication de la première page de ce document est devenue sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, (...), reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / (...). ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / (...). ".

4. Il résulte de ces stipulations que l'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en œuvre. Il en va notamment ainsi pour le titre de séjour " salarié ", mentionné à l'article 3 cité ci-dessus, délivré sur présentation d'un contrat de travail " visé par les autorités compétentes ", des dispositions du code du travail, qui précisent les modalités selon lesquelles et les éléments d'appréciation en vertu desquels le préfet se prononce, au vu notamment du contrat de travail, pour accorder ou refuser une autorisation de travail.

5. Par ailleurs, aux termes des dispositions de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui s'était vu délivrer des titres de séjour en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, a présenté, le 9 août 2021, une demande de changement de statut, en vue d'obtenir un titre de séjour en qualité de salarié. Il est constant qu'il a présenté à l'appui de sa demande un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'agent intérimaire de fabrication polyvalent en industrie au sein de l'entreprise Manpower à compter de janvier 2020 ainsi qu'un avis favorable à son autorisation de travail pour l'emploi en cause à compter du 1er septembre 2021.

7. Si à l'appui de sa demande d'annulation du jugement contesté, le préfet soutient qu'il aurait pris la même décision de rejet, notamment sur le fondement des dispositions citées au point 5 de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, quel que soit le titre sollicité par M. A..., en qualité de salarié dans le cadre d'un changement de statut eu égard à la menace à l'ordre public que ce ressortissant représente, il ressort des pièces du dossier que le préfet s'est mépris sur la portée de la demande du 9 août 2021 et il ne conteste pas ne pas avoir procédé à l'examen du droit au séjour de M. A... en qualité de salarié. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'arrêté contesté était entaché d'un défaut d'examen de sa demande en qualité de salarié et la circonstance avancée par le préfet selon laquelle il aurait pu prendre la même décision de rejet en se fondant sur le motif tiré de la menace à l'ordre public est par elle-même sans incidence sur le vice affectant la légalité de son acte retenu par le tribunal.

8. Il résulte de ce qui précède que le préfet des Pyrénées-Orientales n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 30 décembre 2021.

9. M. A... n'ayant pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, ses conclusions tendant au versement de la somme de 2 000 euros à Me Sergent en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de M. A... tendant à la communication de la première page du formulaire de demande de titre de séjour.

Article 2 : La requête du préfet des Pyrénées-Orientales est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2023.

Le rapporteur,

T. Teulière

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22TL21185 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21185
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: M. Thierry TEULIÈRE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SERGENT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-04-11;22tl21185 ?
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