Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 mai 2019 par lequel le maire de Toulouse a décidé qu'elle ne bénéficierait plus de la nouvelle bonification indiciaire de 15 points majorés à compter du 1er avril 2019.
Par un jugement n° 1906698 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la commune de Toulouse, représentée par Me Carrère, demande :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 décembre 2020 ;
2°) de rejeter la demande de Mme B... ;
3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont omis de répondre à sa demande de substitution de motif ;
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont outrepassé leur office de juge de la légalité en considérant, sans même tenir compte de la substitution de motif sollicitée, que Mme B... pouvait, en tout état de cause, bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire dès lors qu'elle exerçait des fonctions de direction d'établissements et de services d'accueil de la petite enfance ; il n'appartenait pas aux premiers juges de rechercher si Mme B... pouvait continuer à bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire sur un autre fondement du décret du 3 juillet 2016 ;
- le motif dont elle a demandé la substitution est fondé et elle aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; l'octroi de la nouvelle bonification indiciaire en raison de l'encadrement de proximité d'une équipe à vocation technique d'au moins cinq agents concerne essentiellement les agents de la filière technique ; tel n'est pas le cas de Mme B..., qui assure l'encadrement d'une équipe composée de onze agents qui exercent des missions de nature sociale et d'animation ;
- en tout état de cause, Mme B... n'assure pas la direction d'établissements et de service d'accueil de la petite enfance et ne peut donc bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire sur le fondement du point 8 de l'annexe au décret du 3 juillet 2006.
Par une ordonnance du 30 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 31 janvier 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 93-863 du 18 juin 1993 ;
- le décret n° °2006-779 du 3 juillet 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère,
- les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique
- et les observations de Me Hubert-Hugoud, représentant la commune de Toulouse.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., adjointe territoriale d'animation principale de 2ème classe, affectée au sein des services de la commune de Toulouse à un poste de direction d'un accueil collectif à caractère éducatif de mineurs de niveau maternel, a bénéficié, à compter du 1er septembre 2017, de la nouvelle bonification indiciaire de quinze points au titre de l'encadrement de proximité d'une équipe à vocation technique d'au moins cinq agents. Par un arrêté du 29 mai 2019, le maire de la commune de Toulouse a décidé de ne plus lui octroyer le bénéfice de cette bonification à compter du 1er avril 2019. La commune de Toulouse relève appel du jugement du 4 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Les premiers juges, qui ont considéré au point 6 de leur jugement qu'il n'y avait pas lieu de procéder à la substitution de motif demandée, n'ont pas omis de répondre à cette demande de la commune de Toulouse.
3. Pour annuler l'arrêté du 29 mai 2019, les premiers juges se sont exclusivement fondés sur le point 8 de l'annexe au décret du 3 juillet 2006 prévoyant le versement de la nouvelle bonification indiciaire aux fonctionnaires territoriaux exerçant des fonctions de direction d'établissements et de service d'accueil de la petite enfance. Ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, n'avait toutefois pas été invoqué par Mme B..., qui s'était placée sur le seul terrain du point 19 de l'annexe à ce décret prévoyant l'attribution d'une bonification indiciaire aux fonctionnaires territoriaux exerçant des fonctions d'encadrement de proximité d'une équipe à vocation technique d'au moins cinq agents. En soulevant d'office un tel moyen qui n'est pas d'ordre public et en fondant leur jugement sur lui, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité.
4. Dès lors, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2019.
Sur les conclusions en annulation :
5. D'une part, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
6. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale : " Une nouvelle bonification indiciaire, prise en compte pour le calcul de la retraite, est versée mensuellement aux fonctionnaires territoriaux exerçant une des fonctions figurant en annexe (non reproduite voir fac-similé) au présent décret. "
7. Il résulte de ces dispositions que l'attribution d'une nouvelle bonification indiciaire ne résulte pas des missions susceptibles d'être statutairement confiées à un agent mais des seules caractéristiques des fonctions exercées.
8. A son point 19, l'annexe au décret précité prévoit que les fonctions d'" Encadrement de proximité d'une équipe à vocation technique d'au moins cinq agents " donnent droit à l'attribution d'une bonification de quinze points d'indice majoré. Ces fonctions supposent que les agents encadrés exercent des tâches techniques, ce qui est notamment le cas lorsque ces agents exercent leurs fonctions au sein des services techniques de la collectivité qui les emploie.
9. L'arrêté attaqué par lequel le maire de Toulouse a décidé de cesser le versement à Mme B... de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er avril 2019 est fondé sur le motif qu'elle n'exerçait plus les fonctions d'encadrement de proximité d'une équipe à vocation technique. Il est toutefois constant que cette dernière n'avait pas changé de fonctions. Ainsi, le motif retenu dans l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de fait.
10. Toutefois, la commune de Toulouse invoque un autre motif tiré de ce que l'intimée n'a jamais encadré une équipe à vocation technique d'au moins cinq agents. Or, il résulte de l'instruction que si Mme B... assure l'encadrement d'une équipe composée de onze agents, ces derniers exercent des missions de nature sociale et d'animation et non des missions à vocation technique. Dans ces conditions, il y a lieu de procéder à la substitution de motif demandée par la commune de Toulouse, qui ne prive Mme B... d'aucune garantie.
11. La commune de Toulouse est donc fondée à demander le rejet de la demande de Mme B... en annulation de l'arrêté du 29 mai 2019.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 décembre 2020 est annulé.
Article 2 : La demande de Mme B... devant le tribunal administratif est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Toulouse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Toulouse.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2023.
La rapporteure,
K. Beltrami
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21TL20369