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23/02/2023 | FRANCE | N°20TL04602

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 23 février 2023, 20TL04602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête et une réclamation soumise d'office par le directeur départemental des finances publiques de l'Aude en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales et valant requête introductive d'instance, M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.

Par un jugement

n° 1900116-1902602 du 2 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête et une réclamation soumise d'office par le directeur départemental des finances publiques de l'Aude en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales et valant requête introductive d'instance, M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1900116-1902602 du 2 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B... a été assujetti au titre de l'année 2015, à concurrence d'une plus-value immobilière ramenée de 85 433 euros à 7 514 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2020 sous le n° 20MA04602 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 20TL04602 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rétablir les cotisations en litige dont la réduction a été accordée à tort par les premiers juges.

Il soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, invoqué en défense, tiré de ce que le prix de cession du terrain à bâtir, fixé à 100 000 euros par M. B..., ne procédait pas d'une erreur involontaire ;

- la valeur réelle du terrain à bâtir au moment du retrait n'était pas de 22 100 euros et M. B... n'a pas démontré le caractère exagéré de l'imposition résultant de la déclaration, souscrite le 1er mars 2016, d'une plus-value d'un montant de 85 414 euros ;

- la comptabilisation d'un prix de cession de 100 000 euros, qui ne procède pas d'une erreur mais d'une décision revêtant un caractère délibéré, est opposable à M. B... et ne lui ouvre pas droit à une correction.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2021, M. C... B..., représenté par Me Castilla-Rouanet, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 octobre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a déclaré, dans sa liasse fiscale souscrite au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015, une plus-value à long terme d'un montant de 85 433 euros réalisée lors du transfert dans son patrimoine privé, à l'occasion de la cessation de son activité professionnelle, d'un terrain à bâtir situé sur le territoire de la commune de Palaja (Aude), cadastré section ..., acquis dans le cadre de son entreprise individuelle d'artisan-maçon les 7 et 8 décembre 2006 au prix de 14 586 euros. A l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a remis en cause l'exonération de la plus-value dont M. B... s'était prévalu sur le fondement de l'article 151 septies A du code général des impôts, a pris en compte le montant de la plus-value déclarée et a, en conséquence, assujetti l'intéressé au titre de l'année 2015 à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sociales, ainsi qu'à des pénalités. Par un jugement du 2 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé la réduction de ces cotisations, en droits et pénalités, à concurrence d'une plus-value immobilière ramenée de 85 433 euros à 7 514 euros. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique fait appel de ce jugement.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ". Le III de l'article 151 septies A du même code dispose que : " Sont imposées dans les conditions de droit commun les plus-values portant sur : 1° Des biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou des droits ou parts de sociétés dont l'actif est principalement constitué de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits ou parts de sociétés dont l'actif est principalement constitué des mêmes biens, droits ou parts (...) ".

4. Pour demander la réduction des cotisations supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 2015, établies conformément au prix de cession du terrain à bâtir mentionné dans sa déclaration à hauteur de 100 000 euros, M. B... a sollicité la prise en compte, pour la détermination de la plus-value réalisée, d'un prix évalué à 22 100 euros. Il résulte de l'instruction que ce terrain d'une superficie de 1 122 mètres carrés est partiellement situé en zone Ri 3 d'inondation par crue torrentielle du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation sur la commune de Palaja, dans laquelle toute construction est interdite. Toutefois, aucun élément du dossier ne permet d'établir que la surface constructible au sein du terrain en cause serait limitée à 225 mètres carrés, comme l'affirme M. B..., et que cette parcelle ne pourrait accueillir que des constructions à destination professionnelle, l'intéressé ayant d'ailleurs obtenu, le 27 novembre 2017, l'autorisation d'y construire un logement de 108 mètres carrés et un entrepôt de 91 mètres carrés. L'acte d'acquisition du terrain précise en outre qu'il demeure affecté d'une surface hors œuvre nette maximum constructible de 709 mètres carrés. Enfin, il n'est pas établi qu'il serait inclus dans le périmètre d'une zone artisanale. Bien que situé à proximité immédiate d'une telle zone, il peut être regardé comme implanté dans une zone résidentielle dès lors qu'il constitue l'un des quatre lots d'un lotissement viabilisé et qu'il est entouré de maisons d'habitation.

5. Dans les conditions énoncées au point 4 ci-dessus, M. B... ne peut valablement se prévaloir de la moyenne des évaluations établies en 2017 et 2018 par deux agences immobilières et un expert judiciaire à raison d'une surface constructible de 225 mètres carrés et d'un terrain situé au sein d'une zone artisanale. En outre, plusieurs éléments de comparaison retenus ne présentent pas une superficie ou une localisation pertinente et les valeurs utilisées reposent sur des tarifs de terrains proposés à la vente et non sur des prix de transaction effectivement conclues. Enfin, ces évaluations, d'ailleurs établies deux ans environ après le 31 décembre 2015 et bien que confirmées par le même expert judiciaire en 2021, ne comportent aucune explication étayée du prix au mètre carré retenu pour la parcelle en cause.

6. L'administration fait valoir qu'il ressort des douze ventes de terrains à bâtir de superficies comparables, enregistrées par le service de la publicité foncière de Carcassonne pour la commune de Palaja au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, un prix moyen de 76,71 euros au mètre carré et un prix médian de 78,29 euros au mètre carré, proches de la valeur initialement déclarée par M. B.... Elle relève également que deux parcelles de terrain à bâtir d'une contenance de 400 mètres carrés, situées à moins de 50 mètres du terrain en cause, ont été cédées en 2017 à un prix moyen supérieur à 100 euros au mètre carré. Dans l'ensemble de ces conditions, alors même qu'il n'est pas justifié que ces termes de comparaison présenteraient des caractéristiques exactement similaires à celles de la parcelle cadastrée section ..., notamment du point de vue de l'exposition au risque d'inondation, M. B..., qui a la charge de la preuve en vertu de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, ne démontre pas que la valeur de 100 000 euros, retenue au 31 décembre 2015 conformément à sa déclaration, soit 89 euros au mètre carré, aurait été exagérée. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a retenu une plus-value immobilière de 85 433 euros.

7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a accueilli le moyen tiré de ce que la plus-value litigieuse doit prendre en compte un prix de cession de 22 100 euros.

8. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif et devant la cour.

9. La circonstance que M. B... avait le droit de corriger la valeur du terrain en cause, déclarée selon lui par erreur et en toute bonne foi, alors qu'il n'a perçu aucune liquidité dans le cadre du transfert réalisé le 31 décembre 2015, est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition contestée.

10. M. B... n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-BASE-40-10 n° 20, qui est relative à la possibilité pour le contribuable de rectifier les erreurs constatées dans chacun des bilans clos durant la période soumise au droit de vérification de l'administration, lorsqu'elles ont joué à son détriment, et qui ne comporte aucune interprétation différente de celle qui résulte de la loi fiscale dont il a été fait application.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, y compris celui relatif à la régularité du jugement, que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé la réduction des suppléments d'impositions et pénalités en litige et à demander à ce qu'ils soient remis à la charge de M. B....

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1900116-1902602 du tribunal administratif de Montpellier du 2 novembre 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et les pénalités correspondantes au titre de l'année 2015, dont les premiers juges ont prononcé la réduction, sont remises à la charge de M. B....

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. C... B....

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 9 février 2023, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2023.

Le rapporteur,

N. A...

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°20TL04602 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20TL04602
Date de la décision : 23/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Nicolas LAFON
Rapporteur public ?: Mme CHERRIER
Avocat(s) : CLN CONSULT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-02-23;20tl04602 ?
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