La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/02/2023 | FRANCE | N°21TL22497

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 21 février 2023, 21TL22497


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel le président de Toulouse Métropole a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie.

Par un jugement Nos 1902983-1902507 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 13 juin 2019 refusant de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie et enjoint à Toulouse Métropole de prendre en charge ses arrêts de travail ainsi que ses frais méd

icaux au titre de la maladie imputable au service, enjoint à cet établissement public...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel le président de Toulouse Métropole a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie.

Par un jugement Nos 1902983-1902507 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 13 juin 2019 refusant de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie et enjoint à Toulouse Métropole de prendre en charge ses arrêts de travail ainsi que ses frais médicaux au titre de la maladie imputable au service, enjoint à cet établissement public de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juin 2021 devant la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 11 avril 2022, devant la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 14 octobre 2022, Toulouse Métropole, représentée en dernier lieu par Me Kaczmarczyk, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 avril 2021 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a annulé l'arrêté du 13 juin 2019 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de M. B... ;

2°) de rejeter la demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2019 ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal s'est fondé, pour annuler l'arrêté du 13 juin 2019 refusant de reconnaître le caractère professionnel de la maladie développée par M. B..., sur l'erreur d'appréciation entachant cette décision alors, d'une part, que l'imputabilité au service de cette pathologie devait être appréciée au regard des seules dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, entrées en vigueur le 21 janvier 2017, lesquelles ne permettaient pas, en l'état du droit alors applicable, de reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie en l'absence d'entrée en vigueur du décret d'application relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale et en l'absence d'incapacité permanente au moins égale à 25 %, d'autre part, que la pathologie anxio-dépressive de l'intéressé, qui n'a pas été exposé à des conditions de travail pathogènes, n'est pas en lien direct, certain et essentiel avec ses fonctions et, enfin, que le comportement de M. B..., lequel s'est opposé à la suppression de son poste dans le cadre de la nouvelle réorganisation du service et a fait obstacle à sa réaffectation sur de nouvelles fonctions, doit être regardé comme un fait personnel de nature à détacher la survenance de sa maladie du service ;

- M. B... n'évoluait pas dans des conditions de travail dégradées dès lors qu'il bénéficiait de bonnes appréciations sur sa manière de servir dans le cadre de son entretien professionnel et qu'il a été promu au grade d'agent de maîtrise principal le 1er juillet 2017 ;

- l'intéressé est, par son comportement, à l'origine de ses troubles anxio-dépressifs dès lors, d'une part, qu'il n'a pas souhaité se positionner sur le nouvel organigramme du service, d'autre part, qu'il n'a pas sollicité d'affectation alors que son poste allait être supprimé dans le cadre de la réorganisation de son service, enfin, qu'il a décliné les propositions qui lui ont été faites pour occuper les postes de responsable propreté du territoire et de surveillant de l'espace public tandis qu'il a refusé de continuer à occuper le poste de surveillant coordination et travaux au mois d'octobre 2017 après avoir accepté ce poste au mois de juin 2017 ;

- en tout état de cause, si le caractère professionnel de la pathologie de l'appelant devait être confirmé par la cour, la période de prise en charge de ses arrêts de travail doit être limitée du 28 mars au 1er juillet 2017, cette dernière date correspondant à celle à laquelle il a été déclaré apte à reprendre ses fonctions tandis que l'intéressé n'a pas présenté de demande d'imputabilité au service des arrêts de travail ultérieurs dans le cadre d'une " rechute ".

Par des mémoires en défense, enregistrés le 15 septembre 2021 et le 4 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Lapuelle, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, d'une part, à l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué en tant que le tribunal a omis de préciser les périodes de congé de maladie à prendre en charge au titre de la maladie professionnelle et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à Toulouse Métropole de reconnaître l'imputabilité au service des différents arrêts de travail compris entre le 28 mars 2017 et le 6 février 2019 au titre de la maladie professionnelle et, à titre subsidiaire, au titre de l'accident de service ainsi qu'à requalifier la période de disponibilité d'office pour raison de santé comprise entre le 7 février et le 26 juin 2019 en congé de maladie imputable au service, dès la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) à ce que Toulouse Métropole lui verse une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit en appliquant l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- à supposer que sa situation relevât des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il y aurait lieu, pour la cour, de substituer ces dispositions à celles de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précitée sans qu'il y ait lieu de faire application, de manière rétroactive, du taux d'incapacité permanente de 25 % servant de seuil pour la reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie non désignée dans un tableau de maladies professionnelles en application de l'article 37-8 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

- ses conditions de travail dégradées à la suite de son éviction de son poste de coordonnateur propreté le 16 novembre 2016 suivie de son maintien sans emploi effectif sont à l'origine de son syndrome anxio-dépressif ;

- aucun fait personnel fautif détachable du service ne peut lui être imputé dès lors qu'il a toujours été favorablement évalué par sa hiérarchie et qu'il a accompli les rares tâches qui lui ont été confiées ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- à titre incident, les premiers juges n'ont pas répondu à l'ensemble des conclusions de sa demande en omettant de se prononcer sur l'imputabilité au service de l'ensemble des congés de maladie en lien avec sa maladie professionnelle intervenus au cours des années 2018-2019.

Par une ordonnance du 7 novembre 2022, la clôture d'instruction a été reportée, en dernier lieu, au 21 novembre 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme El Gani-Laclautre, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique ; les observations de Me Kaczmarczyk, représentant Toulouse Métropole, et de Me Foucard, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., agent de maîtrise territorial titulaire depuis le 1er janvier 2012 s'est trouvé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions en raison d'un " syndrome anxio-dépressif réactionnel en relation avec des difficultés professionnelles " ayant motivé son placement en congé de maladie du 28 mars au 1er juillet 2017, puis du 27 mars 2018 au 31 août 2018. Imputant le développement de ses troubles anxio-dépressifs à la suppression de son poste de coordonnateur propreté au sein du service travaux et propreté du pôle territorial " centre sud ", dans le cadre d'une réorganisation des services effective à compter du 1er janvier 2017, l'intéressé a demandé, le 3 avril 2018, à Toulouse Métropole de reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie dont la première constatation médicale remonte au 28 mars 2017. Par un arrêté du 13 juin 2019, le président de Toulouse Métropole a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. Toulouse Métropole relève appel du jugement du 16 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté et lui a enjoint de prendre en charge les congés de maladie de M. B... au titre de la maladie imputable au service ainsi que le remboursement de ses frais médicaux.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, entrée en vigueur le 21 janvier 2017 : " (...) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'État (...) ". L'article 37-8 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux dispose que : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux [de 25%] correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner. Il est déterminé par la commission de réforme compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ". Ces dernières dispositions, instituées par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, sont entrées en vigueur le 13 avril 2019.

3. Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. Les dispositions précitées du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, concernant les maladies professionnelles, ne sont, dès lors, pas applicables aux situations constituées avant l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, qui a été pris pour leur application.

4. À la date de la constatation du syndrome anxio-dépressif de M. B..., maladie qui n'est pas désignée dans les tableaux des maladies professionnelles, le décret auquel renvoient les dispositions du dernier alinéa du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 quant au taux d'incapacité permanente susceptible d'ouvrir droit à leur application n'avait pas été publié de sorte que ces dispositions n'étaient pas entrées en vigueur. Toutefois, l'arrêté en litige trouve son fondement légal dans les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale qu'il vise au demeurant expressément.

5. L'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° À des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. (...) / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est apprécié par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

6. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

7. Pour rejeter la demande d'imputabilité au service de la pathologie anxio-dépressive de M. Laveran, le président de Toulouse Métropole s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé n'apportait aucun élément permettant de justifier l'existence d'un lien direct entre sa pathologie et les circonstances professionnelles décrites dans sa déclaration de maladie professionnelle reçue le 17 avril 2018.

8. Compte tenu des principes rappelés aux points 3 et 6 du présent arrêt, la caractérisation d'un lien direct entre le développement de la pathologie en cause et l'exercice des fonctions suffit, en l'état du droit applicable au litige, à apprécier le caractère professionnel d'une maladie sans qu'il soit besoin de procéder à une substitution de base légale, ainsi que le demandent les parties.

9. M. B... indique avoir été évincé de son poste de coordonnateur propreté au sein du service travaux et propreté du pôle territorial " centre sud " de manière vexatoire, sans se voir assigner de missions ni d'objectifs conformes à ses compétences ou à sa fiche de poste à l'exception de trois missions ponctuelles. Il précise, en outre, avoir été installé dans de nouveaux locaux dépourvus de matériel informatique et de moyens de communication, le 16 novembre 2016, alors que son successeur a repris sa messagerie, que sa manière de servir a toujours donné satisfaction et qu'il a obtenu, dans le cadre de son entretien professionnel établi le 28 septembre 2016, un avis favorable à sa promotion au grade d'agent de maîtrise principal mais que la dégradation de ses conditions de travail l'a mis dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions à compter du 28 mars 2017.

10. Il est constant qu'un redécoupage du territoire métropolitain de Toulouse Métropole en cinq pôles territoriaux, contre huit auparavant, se traduisant par la fusion du pôle " centre sud " avec le territorial " centre nord ", pour constituer un pôle territorial unique intitulé pôle " Toulouse centre ", a été mis en œuvre à compter du 1er janvier 2016. Compte tenu de cette fusion de services, une réflexion sur l'organisation de ce nouveau pôle a été engagée au cours de l'année 2016 afin, notamment, de rationaliser l'encadrement des équipes en charge de la propreté et de la surveillance de l'espace public désormais organisé autour de quatre niveaux hiérarchiques : le chef de service, un premier niveau composé de deux coordonnateurs cohérence et qualité, un niveau intermédiaire composé de cinq responsables propreté répartis en section et/ou cycles horaires et, enfin, un niveau de proximité composé de plusieurs postes de surveillants de l'espace public. Cette nouvelle organisation a eu pour effet d'emporter la suppression du poste de coordonnateur propreté alors occupé par M. B... à compter du 1er janvier 2017.

11. Il ressort des pièces du dossier, en particulier d'un courriel de son supérieur hiérarchique du 7 avril 2016, que M. B..., qui a été associé à la réflexion engagée sur cette nouvelle organisation, a été invité, à l'instar de l'ensemble des autres agents encadrants, à se projeter au sein de celle-ci, mais qu'il ne s'est pas positionné au sein du nouvel organigramme. Toulouse Métropole indique également, sans être sérieusement contestée sur ce point, avoir proposé à M. B... d'être affecté sur le poste de responsable propreté mais que l'intéressé a décliné cette proposition au mois d'avril 2016 au motif que ce poste comprenait de nombreuses tâches administratives pour lesquelles il ne s'estimait pas compétent tandis que l'intéressé a refusé d'être affecté sur un poste de surveillant de l'espace public qu'il jugeait sous-dimensionné au regard de ses qualifications. L'appelante soutient, en outre, que M. B... a exprimé le souhait de ne plus travailler au sein du service propreté et surveillance de l'espace public et qu'il a alors été convenu, d'un commun accord avec son supérieur hiérarchique, de lui assigner des missions temporaires à compter du 1er janvier 2017, dans l'attente de l'identification d'un poste adapté, ces missions ayant respectivement porté sur l'établissement d'un plan d'accès des écoles d'accessibilité des machines de balayage mécanisé, l'évaluation du fonctionnement des véhicules haute pression et, enfin, la réalisation d'un diagnostic de la propreté des entrées et sorties de rocades.

12. M. B..., qui ne s'est au demeurant pas opposé à l'exécution de ces missions ponctuelles dans l'attente de l'identification d'une affectation pérenne, ne s'est pas inscrit dans une démarche de mobilité tant interne qu'externe à son service, estimant qu'il appartenait à son employeur de lui adresser des propositions de poste. Sur ce point, il ressort d'un courriel du 19 juillet 2017, que l'intéressé, après avoir accepté le poste de surveillant coordination et travaux, sur lequel il a été affecté à compter du 3 juillet 2017, a demandé, avant la fin de la période d'essai initialement convenue de trois mois, à être affecté en dehors du pôle territorial " Toulouse centre ". Par la suite, à compter du mois d'octobre 2017, l'intéressé a bénéficié d'un accompagnement individualisé par le service orientation et parcours professionnels de la direction des ressources humaines en vue de définir un nouveau projet professionnel en dehors de son ancien service dont il ressort qu'il n'était pas disposé à s'engager de manière effective dans une démarche de mobilité.

13. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a opposé une attitude d'opposition à la mise en œuvre de la nouvelle organisation du service propreté et surveillance de l'espace public liée, selon le courriel adressé à la conseillère en charge de l'accompagnement des évolutions professionnelles le 26 mars 2019, à son souhait de " conserver [ses] acquis sociaux et financiers en termes de fonction, prime, grade échelon et évolution de carrière ", ce qui l'a conduit à décliner, de manière systématique, les propositions de poste, pourtant conformes aux missions statutairement dévolues aux fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des agents de maîtrise territoriaux, qui lui ont été successivement faites tandis que l'intéressé, certes titulaire de son grade mais non de son emploi, ne disposait d'aucun droit acquis à être maintenu sur son précédent poste au sein de la nouvelle organisation conduite dans l'intérêt du service.

14. Alors que son employeur a engagé de multiples démarches en vue de lui permettre de disposer d'une affectation conforme à son grade tant au sein de son pôle territorial qu'en externe et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il lui aurait été demandé d'accomplir des tâches ne correspondant pas aux missions statutairement dévolues aux agents relevant de son cadre d'emplois, M. B..., dont il est constant qu'il a exercé ses fonctions dans des conditions de travail tendues de nature à avoir suscité le développement de sa pathologie anxio-dépressive, doit toutefois être regardé comme ayant fait preuve d'une opposition à la nouvelle organisation constitutive d'un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service. À cet égard, la commission de réforme, réunie le 14 décembre 2018, a émis un avis défavorable à la reconnaissance d'une maladie professionnelle. De même, dans son rapport établi le 3 juillet 2018, l'expert psychiatre chargé de l'examiner, a estimé que M. B... a développé des troubles anxieux et dépressifs " de façon chronique sur fond de colère et de sentiment d'injustice vis-à-vis de la situation vécue au travail " mais que " bien que réactionnels à une situation professionnelle ", les troubles développés depuis 2016 ne remplissent pas les critères d'une maladie professionnelle.

15. Le comportement de l'intéressé pouvant, à lui-seul, justifier la décision litigieuse, le président de Toulouse Métropole n'a, dès lors, pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale en refusant de reconnaître l'imputabilité au service du syndrome anxio-dépressif développé par M. B....

16. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur le moyen tiré de l'erreur d'appréciation pour annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel le président de Toulouse Métropole a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. B....

17. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse.

18. L'arrêté du 13 juin 2019 en litige a été signé par M. A... de Lagoutine, conseiller délégué au personnel, qui disposait d'une délégation de signature accordée par le président de la métropole Toulouse Métropole par un arrêté du 9 juillet 2015, régulièrement affiché et transmis en préfecture le même jour, à l'effet de signer notamment tous les actes et décisions en matière de personnel. Les décisions relatives à l'imputabilité au service d'une maladie n'étant pas exceptées de cette délégation de signature, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et doit, dès lors, être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de procéder à la substitution de base légale demandée par les parties, Toulouse Métropole est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du président de l'établissement public du 13 juin 2019 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de M. B....

Sur les conclusions à fin d'injonction :

20. Le présent arrêt, qui entraîne le rejet de la demande de M. B... devant le tribunal administratif tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2019, n'implique aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B... doivent être rejetées.

Sur l'appel incident :

21. Le président de Toulouse Métropole n'ayant, ainsi qu'il a été dit précédemment, entaché sa décision d'aucune illégalité en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie qu'il a développée, M. B... n'est pas fondé à contester, par la voie de l'appel incident, la prise en charge de ses différents congés de maladie au titre de la maladie professionnelle.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Toulouse Métropole, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge M. B... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Toulouse Métropole et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1 : Les articles 1, 2 et 3 du jugement n° 1902983-1903507 du 16 avril 2021 du tribunal administratif de Toulouse sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation de l'arrêté du président de Toulouse métropole du 13 juin 2019 est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. B... présentées par la voie de l'appel incident et les conclusions qu'il a formulées en appel sont rejetées.

Article 4 : M. B... versera à Toulouse Métropole une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au président de Toulouse Métropole.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 février 2023.

La rapporteure,

N. El Gani-LaclautreLe président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL22497


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL22497
Date de la décision : 21/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: Mme Nadia EL GANI-LACLAUTRE
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : GOUTAL ALIBERT et Associés

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-02-21;21tl22497 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award