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16/02/2023 | FRANCE | N°22TL21432

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 16 février 2023, 22TL21432


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 5 mai 2022 par lequel la préfète du Gard l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et prononcé une interdiction de retour d'un an et l'arrêté du même jour portant assignation à résidence.

Par un jugement n° 2201402 du 17 mai 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par

une requête et un mémoire enregistrés le 20 juin 2022 et le 28 décembre 2022, M. B..., représenté par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 5 mai 2022 par lequel la préfète du Gard l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et prononcé une interdiction de retour d'un an et l'arrêté du même jour portant assignation à résidence.

Par un jugement n° 2201402 du 17 mai 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 juin 2022 et le 28 décembre 2022, M. B..., représenté par Me Laurent-Neyrat, demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement ;

3°) d'annuler les arrêtés du 5 mai 2022 de la préfète du Gard ;

4°) d'enjoindre à la préfète du Gard de lui délivrer un titre de séjour mention salarié sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que le premier juge n'a pas mis en œuvre son pouvoir d'injonction pour obtenir l'entier dossier le concernant et qu'il a méconnu le droit au procès équitable protégé par l'article 6 de la de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté en litige est entaché d'un détournement de procédure en l'état d'une procédure juridictionnelle pendante concernant le refus de titre de séjour ;

- il a été pris en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de ce que le seul élément à charge dans ce dossier consiste en la mention d'usage de faux-documents, non étayée du policier, dans une question lors de son audition sur ses documents d'identité ;

- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte de l'existence d'une vie privée et familiale ancienne en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2022, la préfète du Gard conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé et renvoie à ses écritures de première instance.

Par ordonnance du 13 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli, président-assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 24 décembre 2002, a fait l'objet d'un arrêté en date du 5 mai 2022 par lequel la préfète du Gard l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et prononcé une interdiction de retour d'un an et d'un arrêté daté du même jour l'assignant à résidence dans le département. M. B... relève appel du jugement n° 2201402 du 17 mai 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de ces arrêtés.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ait déposé une demande d'aide juridictionnelle depuis l'introduction de sa requête. Par suite et en l'absence d'urgence, il n'y a pas lieu d'admettre l'intéressé au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 614-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin (...) la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. ".

4. La possibilité de solliciter des parties la production de pièces ou documents utiles à la solution du litige constitue l'un des pouvoirs propres du juge, qui n'est pas lié en cela par la demande des parties et qui décide ainsi souverainement de recourir à une telle mesure. En l'espèce, d'une part, il ressort des pièces du dossier soumis au magistrat désigné que l'affaire était en état d'être jugée et que le principe du contradictoire a été respecté. D'autre part, pour se prononcer sur la légalité des décisions du 5 mai 2022 par lesquelles la préfète du Gard a obligé M. B... à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi, a prononcé une interdiction de retour d'un an et l'a assigné à résidence dans le département, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes, qui disposait des pièces produites par les parties suffisantes pour lui permettre de trancher le litige, compte tenu tant des éléments produits par le requérant lui-même que des motifs de l'arrêté attaqué, a pu valablement statuer sur la demande de M. B... sans procéder à une mesure d'instruction pour se faire communiquer l'entier dossier détenu par l'administration. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement en raison de ce que le premier juge aurait statué en méconnaissance de son office, du principe du contradictoire et du droit au procès équitable, ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition établi par les services de police le 5 mai 2022, que M. B... a été informé de ce qu'il pouvait faire l'objet d'une décision d'éloignement assortie, éventuellement, d'une assignation à résidence. A cette occasion, l'intéressé a indiqué aux services de police qu'il souhaitait rester en France et ne pas avoir d'autres éléments à porter à la connaissance de la préfète autres que ceux mentionnés au cours de l'entretien. M. B... a eu, ainsi, la possibilité, au cours de cet entretien, de faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire doit être écarté.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été entendu par les services de police dans le cadre d'une procédure pour usage de faux documents auprès du conseil départemental sur instruction du procureur adjoint près le tribunal judiciaire de Nîmes du 7 janvier 2020, aux fins d'enquête et de saisie d'un extrait d'acte de naissance falsifié et que l'intéressé n'a pas été en mesure d'apporter des explications cohérentes et circonstanciées concernant ledit document d'état civil obtenu depuis l'Italie via les services postaux par l'intermédiaire d'un tiers résidant en Côte d'Ivoire. L'analyse en fraude documentaire de la police aux frontières du Gard lors de l'enquête diligentée en mai 2022 a révélé des anomalies, l'extrait d'acte de naissance falsifié comportant la mention " certifié " en lieu et place de la mention " certifie " utilisée par les autorités ivoiriennes sur ce type de document et les mentions de son audition libre par un agent assermenté, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, indiquent que les autorités ivoiriennes sollicitées dans ce cadre ont confirmé que ce document présentait des irrégularités. Enfin, l'appelant ne développe devant la cour aucune argumentation précise et éclairante au soutien des pièces qu'il verse, alors que ces dernières, notamment l'extrait d'acte de naissance, établi postérieurement à l'arrêté en litige, et la carte d'identité consulaire qui a pour vocation d'établir la preuve de résidence à l'étranger d'un ressortissant et n'est donc pas un document d'identité, ne sont pas de nature à combattre efficacement les suspicions d'inauthenticité nées de l'examen documentaire pratiqué par les services de police et de l'audition de l'intéressé. Par suite et dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de fait ou une erreur manifeste d'appréciation en écartant comme dépourvus de valeur probante les documents fournis.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Si M. B... se prévaut de sa durée de séjour en France et d'une vie privée et familiale ancienne en France, et de son intégration professionnelle et sociale, il n'assortit ces assertions d'aucune justification probante de nature à permettre à la cour d'apprécier le bien-fondé de ce moyen. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que l'appelant, célibataire, se maintient en situation irrégulière depuis 2019 sur le territoire français et qu'il y est dépourvu d'attaches familiales. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement pris à son encontre porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut donc qu'être écarté.

9. Enfin, ainsi que l'a relevé le premier juge, le recours juridictionnel dirigé contre un refus de titre de séjour étant dépourvu de caractère suspensif, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait légalement prendre une mesure d'éloignement à son encontre dans l'attente du jugement à intervenir sur la contestation de ce refus. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que l'arrêté en litige, ainsi légalement fondé en lui-même en droit comme en fait, aurait été pris dans un but autre que celui qui lui était assigné par la loi. Par suite, le moyen tiré du détournement de procédure doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Gard.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2023.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N°22TL21432


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21432
Date de la décision : 16/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : LAURENT-NEYRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-02-16;22tl21432 ?
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