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02/02/2023 | FRANCE | N°20TL03575

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 02 février 2023, 20TL03575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2018 par lequel le maire de Tresserre ne s'est pas opposé à la déclaration de travaux déposés par la société anonyme (SA) Orange pour l'installation d'une antenne-relais de téléphonie mobile sur un terrain situé au lieu-dit " Sarrat d'en Calcine ".

Par un jugement avant-dire-droit du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a, sur le fondement de l'article L. 600-5-

1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur les conclusions de la requête n° 19...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2018 par lequel le maire de Tresserre ne s'est pas opposé à la déclaration de travaux déposés par la société anonyme (SA) Orange pour l'installation d'une antenne-relais de téléphonie mobile sur un terrain situé au lieu-dit " Sarrat d'en Calcine ".

Par un jugement avant-dire-droit du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur les conclusions de la requête n° 1902002 de M. et Mme C... tendant à l'annulation de cet arrêté du 7 décembre 2018 du maire de Tresserre.

Par un second jugement n° 1902002 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Montpellier, après avoir constaté que le vice affectant l'arrêté initial du 7 décembre 2018 avait été régularisé par un arrêté du 17 décembre 2019 par lequel le maire de Tresserre ne s'est pas opposé à la déclaration préalable modificative déposée par la société Orange, a rejeté la demande des époux C....

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 15 et 30 septembre 2020 et un mémoire en réplique enregistré le 16 décembre 2020 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 20MA03575 puis, au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL03575, M. et Mme C..., représentés par Me Bonnet, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement avant dire droit du 22 octobre 2019 et le jugement du 15 juillet 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Tresserre de non-opposition à la déclaration préalable en date du 7 décembre 2018 et l'arrêté modificatif de non-opposition en date du 17 décembre 2019 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Tresserre une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- sur le jugement avant dire droit :

- le moyen tenant à la méconnaissance des articles L. 113-1 et L. 113-2 du code de l'urbanisme aurait dû être accueilli par le tribunal ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de la méconnaissance de des articles R. 111-27 du code de l'urbanisme et N2 et N11 du plan local d'urbanisme :

- c'est à tort qu'ils ont appliqué l'exception à la règle d'inconstructibilité prévue à l'article UE10 du plan local d'urbanisme ;

- sur le jugement du 15 juillet 2020 :

- la régularisation étant intervenue postérieurement à l'expiration du délai fixé par le jugement avant dire droit, les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et l'autorité de la chose jugée par leur jugement ;

- au titre de l'effet dévolutif :

- leur requête est recevable au regard du délai de recours contentieux, de leur qualité pour agir et de leur intérêt à agir en leur qualité de voisins immédiats du projet ;

- l'arrêté du 7 décembre 2018 est entaché d'un vice de procédure tiré du défaut de qualité du pétitionnaire pour déposer la déclaration préalable, constitutif d'une fraude et d'un détournement de procédure, compte tenu de la servitude d'inconstructibilité grevant la parcelle ;

- il est entaché d'un défaut de motivation ;

- il méconnaît la législation relative aux espaces boisés classés en vertu de l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation au regard de l'article N11 du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté méconnaît l'article N10 du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2020, la commune de Tresserre, représentée par Me Renaudin, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de M. et Mme C... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête devant le tribunal était tardive ;

- les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 décembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 18 janvier 2021.

Un mémoire en défense présenté par la SA Orange, représentée par Me Gentilhomme a été enregistré le 11 octobre 2022, non communiqué.

Les parties ont été informées le 11 janvier 2023, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que les conclusions dirigées contre le jugement n°1902002 du 22 octobre 2019 en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont irrecevables comme dépourvues d'objet, à la date d'introduction de la requête d'appel, du fait de l'intervention d'une décision de régularisation du 17 décembre 2019.

Par un mémoire enregistré le 12 janvier 2023, la société Orange, représentée par Me Gentilhomme, a présenté des observations en réponse à la communication du moyen relevé d'office.

Par un mémoire enregistré le 16 janvier 2023, les époux C..., représentés par Me Bonnet, ont présenté des observations en réponse à la communication du moyen relevé d'office.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bonnet, représentant les appelants et les observations de Me Guranna représentant la société pétitionnaire intimée.

Considérant ce qui suit :

1. La société Orange a déposé le 9 novembre 2018 auprès des services de la commune de Tresserre (Pyrénées-Orientales) une déclaration préalable de travaux pour l'installation d'une antenne relais de radio téléphonie constituée d'un pylône treillis avec une armoire technique sur châssis et clôture bardage bois sur un terrain sis " Sarrat d'en Calcine " cadastré A0355 sur le territoire de cette commune. Par arrêté du 7 décembre 2018, le maire de Tresserre ne s'est pas opposé à la déclaration de travaux déposée par cette société. Par un jugement avant-dire-droit du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur les conclusions de la requête n° 1902002 de M. et Mme C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2018. Ce jugement, après avoir écarté les autres moyens de la requête, a relevé que le volet paysager du dossier de déclaration préalable ne comportait sur le plan de situation aucun document photographique permettant d'apprécier l'impact du projet, notamment en raison de sa hauteur, par rapport aux constructions avoisinantes du lotissement situé en bordure du terrain d'assiette du projet et a fixé à un mois le délai dans lequel la régularisation de l'arrêté devait être notifiée au tribunal. En exécution de ce jugement, par un arrêté du 17 décembre 2019, le maire de Tresserre ne s'est pas opposé à la déclaration préalable modificative déposée par la société Orange. Par la présente requête, M. et Mme C... relèvent appel du jugement avant dire droit du 22 octobre 2019 et du jugement en date du 15 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a mis à fin à l'instance en rejetant leur demande.

2. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".

3. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, a cependant retenu l'existence d'un vice entachant la légalité d'un arrêté de non-opposition à déclaration préalable, d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et a décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre ce jugement avant dire droit peut contester le jugement en tant qu'il a écarté comme non-fondés les moyens dirigés contre l'autorisation initiale d'urbanisme et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L 600-5-1. Par ailleurs, si à compter de la délivrance de l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable en vue de régulariser le vice relevé, dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet, il n'en va pas de même du surplus des conclusions dirigées contre ce premier jugement, qui conservent leur objet, même après la délivrance du permis de régularisation. En outre, les demandeurs sont recevables à présenter en appel des moyens nouveaux dirigés contre le jugement avant dire droit, dès lors qu'ils se rattachent à la même cause juridique que les moyens soulevés en première instance.

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre le jugement avant-dire droit du 22 octobre 2019 en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

4. Ainsi qu'il a été exposé au point 1, un arrêté modificatif a été délivré par le maire le 17 décembre 2019 en vue de régulariser le vice dont se trouvait entaché l'arrêté du 7 décembre 2018 et qu'avait retenu le jugement avant dire droit du 22 octobre 2019. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'à la date d'introduction de la présente requête, le 15 septembre 2020, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme étaient sans objet. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables.

Sur les conclusions en annulation des décisions de non-opposition :

En ce qui concerne la légalité de la décision initiale de non-opposition :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 431-35 du même code : " (...) / La déclaration préalable (...) comporte également l'attestation du ou des déclarants qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une déclaration préalable. (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'une déclaration préalable doit seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1, lui donnant qualité pour déposer cette demande, et qu'il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction de la déclaration, la validité de l'attestation ainsi établie par le pétitionnaire, sous réserve que cette attestation n'ait pas procédé d'une manœuvre de nature à induire l'administration en erreur et ait ainsi été obtenue par fraude.

7. Il ressort des pièces du dossier que la demande de déclaration préalable déposée par la société Orange comprend le formulaire Cerfa signé par le pétitionnaire qui constitue l'attestation prévue par les dispositions précitées, lesquelles n'imposent pas que cette attestation précise la qualité en vertu de laquelle le pétitionnaire dépose cette demande. La circonstance que le terrain d'assiette appartient à la commune à la suite d'un legs imposant une servitude non aedificandi est sans incidence sur l'application de ces dispositions en vertu desquelles le dossier de déclaration préalable peut, comme en l'espèce, être adressé par une personne attestant être autorisée par le propriétaire à exécuter les travaux. En outre, le service instructeur de la commune n'a pu avoir aucun doute sur la réalité de l'autorisation dont se prévalait la société pétitionnaire dès lors que la commune est propriétaire du terrain d'assiette du projet. Par suite, les moyens, nouvellement présentés en appel, tirés de ce que le dossier serait incomplet faute de comporter une attestation mentionnant la qualité du pétitionnaire et que cette demande serait entachée de fraude doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le détournement de procédure allégué n'est pas établi.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / (...) ". L'article L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Doivent également être motivées les décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement ".

9. D'une part, eu égard à son objet, l'arrêté en litige n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, relatif à la motivation des décisions relatives aux autorisation d'urbanisme défavorables. D'autre part, la décision de non-opposition contestée, qui n'est pas constitutive d'une dérogation aux dispositions du code de l'urbanisme, notamment de l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme, ou du plan local d'urbanisme de la commune de Tresserre, ne relève pas du champ de celui de l'article L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration qui impose la motivation des décisions qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation doit être écarté.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme applicable au litige : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. " Aux termes de l'article L. 113-2 du même code dans sa version applicable au présent litige : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. (...). ". Ces dispositions imposent à l'autorité administrative saisie d'une déclaration préalable de travaux portant sur un espace boisé classé, puis, au juge saisi de la légalité de la décision prise par cette autorité, d'apprécier si les travaux projetés sont de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements classés dans le plan local d'urbanisme.

11. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette du projet en litige, cadastrée section A n°355, se trouve dans un espace boisé classé mentionné comme tel sur le document graphique du plan local d'urbanisme de la commune de Tresserre. Ce projet, qui consiste, sur un terrain d'une superficie de 8 400 m² en la création d'une antenne-relais de radiotéléphonie créant une emprise au sol de 4,20 m², se situe dans la partie non arborée de l'espace boisé classé à proximité du sentier desservant le terrain. En outre, alors que la parcelle devant accueillir le projet n'est boisée qu'en limite de la parcelle mitoyenne, il n'est ni établi, ni même allégué que le projet impliquerait l'abattage d'arbres. Dans ces conditions, l'installation de cette antenne-relais n'est pas de nature à compromettre la conservation ou la protection des boisements existants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Aux termes de l'article N 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Tresserre : " Les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions, l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, ne doivent pas porter atteinte au caractère ni à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites aux paysages naturels, urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Aux termes de l'article N 2 du même plan : " En zone N, peuvent seules être autorisées : (...) les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. (...) " Dès lors que les dispositions de l'article N 11 du règlement du plan local d'urbanisme invoquées par les requérants ont le même objet que celles, également invoquées, de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme posant les règles nationales d'urbanisme et prévoient des exigences qui ne sont pas moindres, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité de la décision attaquée.

13. Si la parcelle d'assiette du projet supporte en partie des espaces boisés et ouvre au nord sur de vastes espaces à l'état de nature, elle jouxte toutefois au sud, à l'est et à l'ouest un secteur urbanisé ne présentant pas de cohérence architecturale particulière et au sein duquel sont implantés des pylônes électriques de grande hauteur. En outre, il ressort des pièces du dossier, notamment des photomontages et des photographies versées par les parties, que si l'antenne-relais en litige est visible depuis les alentours, du fait de sa hauteur, l'impact visuel de la construction projetée, bien que située dans une zone boisée, sera atténué par l'option d'un pylône de type treillis et d'une clôture constituée d'un bardage en bois. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le pylône ne s'insèrerait pas dans son environnement immédiat et porterait atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants ou aux paysages ou à leur sauvegarde ainsi qu'à celle des espaces naturels. Dans ces conditions, le maire de Tresserre ayant fait une exacte application des dispositions précitées, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions N2 et N11 du plan local d'urbanisme doit, dès lors, être écarté.

14. Aux termes de l'article N 10 du même règlement relatif à la hauteur maximale des constructions de ce règlement : " 1. Définition de la hauteur / La hauteur des constructions est mesurée à partir du sol naturel existant avant travaux définis par un plan altimétrique détaillé, jusqu'au sommet du bâtiment, ouvrages techniques, cheminées et autres superstructures exclus. (...) 3. Hauteur absolue / La hauteur des constructions (exception faite des ouvrages techniques publics), ne peut excéder hors-tout 8.00 mètres. Cette disposition entend ainsi régir la hauteur de toutes les constructions implantées dans la zone UE et non exclusivement celle des bâtiments. ".

15. Si les dispositions de l'article N 10 entendent régir la hauteur de toutes les constructions implantées dans la zone N, qu'il s'agisse ou non de bâtiments, elles prévoient une exception pour les ouvrages techniques publics. Eu égard à l'objet de la règlementation d'urbanisme, la notion d'ouvrage technique public est distincte de celle d'ouvrage public.

16. Il ressort des pièces du dossier que le pylône excède la hauteur maximale de 8 mètres prévue en zone N 10 par les dispositions précitées. Toutefois l'exclusion prévue par ces mêmes dispositions, eu égard à leur objet, doit être regardée comme s'appliquant aux antennes et aux pylônes installés par les opérateurs dans le cadre de l'exploitation d'un réseau de télécommunications, qui constituent des ouvrages techniques publics au sens de ce règlement, quand bien même ces installations ne revêtiraient pas le caractère d'ouvrages publics. Par conséquent, les appelants ne peuvent utilement soutenir que la hauteur du projet en litige méconnaîtrait les prescriptions de l'article N 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

17. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance, que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement avant-dire droit du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier n'a pas annulé l'arrêté en date du 7 décembre 2018 du maire de Tresserre.

En ce qui concerne la légalité de la décision modificative de non-opposition :

18. Il résulte des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme que, d'une part, si, à l'issue du délai qu'il a fixé dans sa décision avant dire droit pour que lui soient adressées la ou les mesures de régularisation du permis de construire attaqué, le juge peut à tout moment statuer sur la demande d'annulation de ce permis et, le cas échéant, y faire droit si aucune mesure de régularisation ne lui a été notifiée, il ne saurait se fonder sur la circonstance que ces mesures lui ont été adressées alors que le délai qu'il avait fixé dans sa décision avant dire droit était échu pour ne pas en tenir compte dans son appréciation de la légalité du permis attaqué.

19. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable modificative du 17 décembre 2019 a été délivré postérieurement à l'expiration du délai d'un mois imparti le 22 octobre 2019 par le tribunal administratif de Montpellier pour régulariser l'arrêté initial du 7 décembre 2018 est sans incidence et doit donc être écarté.

20. Enfin, il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté par les appelants, que le vice de légalité entachant l'arrêté du 7 décembre 2018 a été régularisé par l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable du 17 décembre 2019.

21. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 juillet 2020 mettant fin à l'instance n°1902002, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Tresserre qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que les appelants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de commune de Tresserre présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Tresserre présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et B... C..., à la commune de Tresserre et à la société anonyme Orange.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 février 2023.

Le président-assesseur,

X. HAÏLI

Le président de la cour,

J-F. MOUTTE

La greffière,

C. LANOUX

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°20TL03575 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL03575
Date de la décision : 02/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP HENRY-CHICHET-PAILLES-GARIDOU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-02-02;20tl03575 ?
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