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29/12/2022 | FRANCE | N°22TL21335

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 29 décembre 2022, 22TL21335


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2102603 du 18 mai 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de délivrer à Mme A... un titre de séjour dans un délai de de

ux mois à compter de la date de notification de ce jugement et a mis à la charge de l'E...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2102603 du 18 mai 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de délivrer à Mme A... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser au conseil de Mme A... en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I - Sous le n° 22TL21335, par une requête, enregistrée le 13 juin 2022 le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu qu'au regard de l'importance des troubles psychiatriques, du caractère installé dans le temps de la maladie et des conséquences que pourrait entraîner une rupture des soins, Mme A... établit que son état de santé nécessite des soins dont le défaut devrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, compte tenu notamment des documents versés par Mme A... en vue de justifier de son état de santé ;

- le tribunal a renversé la charge de la preuve concernant l'absence de traitement approprié dans le pays de renvoi pour écarter l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui précise que Mme A... pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ;

- Mme A... ne remplit pas les conditions requises à l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2022, Mme D... A..., représentée par Me Benhamida, conclut :

1°) à ce qu'elle soit admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) au rejet de la requête ;

3°) à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, dès lors qu'elle a été introduite par une autorité incompétente, faute pour son signataire de justifier d'une délégation ;

- le préfet n'apporte aucun élément nouveau de fait ou de droit en vue de contester le jugement ;

- les moyens soulevés par le préfet de la Haute-Garonne ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2022.

II - Sous le n° 22TL21336, par une requête, enregistrée le 13 juin 2022, le préfet de la Haute-Garonne demande le sursis à exécution du jugement n° 2102603 rendu le 18 mai 2022 par le tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que :

- il existe des moyens sérieux exposés dans sa requête au fond de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué, dès lors que Mme A... ne démontre pas d'une part, que cette décision pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et d'autre part, que des traitements et soins équivalents seraient indisponibles dans le pays de renvoi ;

- c'est à tort que le tribunal a renversé la charge de la preuve concernant l'absence de traitement approprié dans le pays de renvoi, et a écarté l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration précisant que Mme A... pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ;

- Mme A... ne remplit pas les conditions requises à l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2022, Mme A..., représentée par Me Benhamida, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'elle a été introduite par une autorité incompétente, faute pour son signataire de justifier d'une délégation ;

- les moyens soulevés par le préfet de la Haute-Garonne ne paraissent pas sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Chabert, président.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... A..., de nationalité camerounaise née le 16 mars 1960, a sollicité le 30 juin 2016 auprès des services de la préfecture de Haute-Garonne la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. L'arrêté du 28 décembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire français a été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille rendu le 14 mai 2020 enjoignant à l'administration de procéder à un nouvel examen de sa situation. Par un nouvel arrêté du 12 avril 2021, le préfet a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A..., l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par la requête enregistrée sous le n° 22TL21335, le préfet de la Haute-Garonne fait appel du jugement rendu le 18 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté. Par la requête enregistrée sous le n° 22TL1336, le représentant de l'Etat demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. Ces requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décisions du bureau d'aide juridictionnelle des 7 et 16 décembre 2022. Dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur ses demandes d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Toulouse :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre ".

4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. Il ressort des pièces du dossier que la décision du préfet de la Haute-Garonne refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme A... sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été prise après avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration rendu le 13 janvier 2021, versé au débat par le préfet devant les premiers juges et en cause d'appel, selon lequel si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour remettre en cause cet avis, Mme A..., qui a levé le secret médical, indique souffrir d'une symptomatologie dépressive chronique et produit en particulier un certificat médical établi le 7 janvier 2019 établi par un médecin du pôle de psychiatrie du centre hospitalier Gérard Marchant de Toulouse selon lequel " l'interruption du traitement peut engendrer des conséquences graves pour sa santé avec un risque de passage à l'acte ". Si un nouveau certificat daté du 27 avril 2021, soit postérieurement à l'arrêté en litige, indique que le défaut de prise en charge médicale régulière pourrait entraîner " une décompensation psychiatrique voire un suicide ", il ressort également des pièces du dossier que le rapport médical destiné au collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, produit par Mme A... devant les premiers juges, fait état d'un suivi médical depuis 2012 pour une dépression chronique avec des éléments psychotiques pour laquelle l'intéressée bénéficie de consultations psychiatriques spécialisées tous les deux à trois mois. S'il est vrai que l'intéressée a fait l'objet d'une hospitalisation en 2016 et produit un certificat médical du 14 avril 2016 d'un médecin du service universitaire de psychiatrie de l'hôpital La Grave de Toulouse selon lequel l'absence de soins comporterait des risques non négligeables de passage à l'acte suicidaire, dont les termes ont été confirmés par le même médecin le 21 mars 2019, le rapport médical précité à l'attention du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration relève " une hospitalisation en 2016 sans réelles velléités suicidaires ". Au regard de ces éléments, compte tenu du caractère ancien de l'hospitalisation dont a bénéficié Mme A... et eu égard au conditions de son suivi médical en France, le préfet de la Haute-Garonne a pu, en suivant l'avis du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, estimer que le défaut de prise en charge de l'intéressée ne devait pas entraîner des conséquences d'une gravité exceptionnelle. Dans ces conditions, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté en litige au motif de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif de Toulouse et devant la cour administrative d'appel.

Sur les moyens autres moyens soulevés par Mme A... :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

7. Mme C... B..., directrice des migrations et de l'intégration de la préfecture de la Haute-Garonne et signataire de l'arrêté contesté, a bénéficié, par un arrêté du 15 décembre 2020 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture, d'une délégation de signature à l'effet de signer les décisions de refus d'admission au séjour et les mesures d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.

8. Il ne ressort ni des termes de l'arrêté en litige ni des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne se serait estimé tenu de suivre l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 13 janvier 2021 en refusant l'admission au séjour de Mme A... en qualité d'étranger malade. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision de refus de séjour sur ce point ne peut qu'être écarté.

9. Le préfet de la Haute-Garonne a produit, ainsi qu'il a été exposé au point 5 du présent arrêt, l'avis émis le 13 janvier 2021 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Cet avis comporte les mentions utiles permettant d'identifier le collège de médecins qui l'a rendu et indique que l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine. Il ressort des termes de cet avis, et notamment de son bordereau de transmission à la préfecture, que le médecin qui a établi le rapport médical a transmis son rapport au collège des médecins le 11 janvier 2021et qu'il n'a pas siégé au sein du collège de médecins qui a rendu l'avis en cause. Dans ces conditions, le moyen tiré du caractère irrégulier de cet avis pour avoir été rendu notamment sur la base d'un rapport médical incomplet doit être écarté.

10. Compte tenu de ce qui est exposé au point 5 du présent arrêt, Mme A... ne justifie pas être en situation d'obtenir la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable. Le moyen tiré de la méconnaissance par la décision portant refus de séjour ne peut qu'être écarté.

11. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

12. Mme A... indique être entrée pour la dernière fois en France le 2 février 2007 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa long séjour. Le 14 février 2007, l'intéressée s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " régulièrement renouvelée jusqu'au 13 février 2010. Le 10 novembre 2011, une décision de refus de séjour portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et lui interdisant le retour en France pour une période de trois ans a été prise à son encontre, et confirmée par le tribunal administratif de Toulouse. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est veuve, son époux étant décédé le 16 mai 2016, et sans aucune charge de famille en France. Ses trois enfants, de nationalité camerounaise, vivent au Cameroun et aux Etats-Unis. Par ailleurs, elle n'établit pas avoir tissé des liens d'une particulière intensité en France. Dans ces conditions, eu égard à ses conditions de séjour, le refus opposé à sa demande d'admission au séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. Mme A... n'ayant pas démontré l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, elle ne peut utilement soutenir que la mesure d'éloignement prononcée à son encontre serait dépourvue de base légale.

14. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

15. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre méconnaît les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

16. Pour les mêmes motifs qui ceux exposés au point 12 du présent arrêt, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

17. La décision fixant le pays de destination comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle se réfère notamment à l'absence de justification par l'intéressée de l'existence d'une exposition à des peines ou traitements réels et actuels contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée.

18. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

19. Si Mme A... fait état de risques en cas de retour dans son pays d'origine en raison de l'impossibilité pour elle de bénéficier d'un suivi médical et d'un traitement adapté à son état de santé, il résulte de ce qui a été exposé au point 5 du présent arrêt que le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une gravité exceptionnelle alors en outre que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé dans son avis du 13 janvier 2021 qu'elle pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine. Par suite le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui prohibe les traitements inhumains et dégradants ne peut qu'être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 12 avril 2021, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mme A... et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur les conclusions tendant au sursis à exécution :

21. La cour statuant au fond par le présent arrêt sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 mai 2022, les conclusions de la requête n° 22TL21336 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement deviennent sans objet.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser au conseil de Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2102603 du 18 mai 2022 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins de sursis à exécution de la requête n° 22TL21336 du préfet de la Haute-Garonne.

Article 3 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à Mme D... A... et à Me Benhamida.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2022.

Le président-rapporteur,

D. Chabert

L'assesseur le plus ancien,

X. Haïli

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 22TL21335, 22TL21336


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21335
Date de la décision : 29/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Denis CHABERT
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : BENHAMIDA;BENHAMIDA;BENHAMIDA

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-12-29;22tl21335 ?
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