Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Brouilla à lui verser la somme de 240 153,78 euros en réparation des préjudices subis à l'occasion d'un incendie d'habitation survenu le 13 février 2015.
Par un jugement n° 1804981 du 17 juin 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 août 2020 sous le n° 20MA02930 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 20TL02930 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire complémentaire, enregistré le 16 avril 2021, la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France, représentée par Me Escalé, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner la commune de Brouilla à lui verser la somme de 240 153,78 euros ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Brouilla la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête critique expressément le jugement ;
- le jugement attaqué n'est pas signé ;
- la commune de Brouilla a commis une faute en n'installant pas une borne à incendie à proximité du lieu où est survenu l'incendie ;
- l'absence d'hydrant à moins de 1,4 kilomètre a constitué un facteur aggravant ;
- la commune est responsable à hauteur du tiers des préjudices subis, qui s'élèvent à la somme totale de 690 111,45 euros, et doit supporter la charge des frais d'expertise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2020, la commune de Brouilla, représentée par Me D'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête ne contient pas de moyens de nature à critiquer le jugement contesté et peut être rejetée par ordonnance ;
- les conditions d'engagement de sa responsabilité ne sont pas réunies.
Par ordonnance du 16 avril 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 14 mai 2021.
Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des assurances ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Torelli, rapporteure publique,
- et les observations de Me Bellamy pour la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France.
Considérant ce qui suit :
1. La société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France fait appel du jugement du 17 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Brouilla à lui verser la somme de 240 153,78 euros en réparation du tiers des préjudices subis à l'occasion d'un incendie survenu le 13 février 2015, qui a entièrement détruit la maison d'habitation et une grange attenante, appartenant à un couple d'assurés, aux droits desquels elle est subrogée.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". La minute du jugement contesté a été signée par la présidente de la formation de jugement, la rapporteure ainsi que la greffière d'audience. Par suite, le moyen tiré du caractère irrégulier du jugement contesté, faute de signature de la minute, manque en fait et doit être écarté.
Sur la responsabilité de la commune de Brouilla :
3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, que le point d'eau incendie le plus proche du lieu du sinistre, qui est survenu sur le territoire de la commune de Brouilla, se situait à une distance de plus de 1,4 kilomètre, compromettant son utilisation par les services de secours lors de l'intervention du 13 février 2015. Il ressort également du rapport d'expertise que les sapeurs-pompiers ont engagé la manœuvre d'extinction de l'incendie à 20 heures 36 au moyen d'un fourgon pompe tonne secours routier, dont la capacité de 3 500 litres d'eau a été épuisée aux alentours de 20 heures 45, et que les porteurs d'eau de grande capacité sont arrivés sur place à partir de 20 heures 49. Toutefois, aucun élément du dossier ne permet de considérer que l'utilisation d'une borne à incendie, conjuguée à l'action réalisée à partir de ces camions citernes, aurait permis de lutter plus efficacement contre le feu. Il s'en déduit que l'absence d'hydrant n'a été à l'origine que d'une brève rupture d'alimentation en eau. Il ne résulte pas de l'instruction, dès lors qu'au moment de cette rupture, l'incendie, qui était particulièrement avancé et virulent, s'était propagé à l'ensemble des bâtiments qui ont été détruits, que cette destruction aurait pu être évitée si l'alimentation en eau n'avait pas fait l'objet de cette courte interruption. Dans ces conditions, il n'est pas établi que l'absence d'hydrant installé à proximité du site par la commune de Brouilla, à la supposer fautive, aurait été à l'origine directe, même pour partie, des préjudices invoqués, liés à la destruction de la maison d'habitation et de la grange attenante. Par suite, la responsabilité de la commune de Brouilla ne peut être engagée pour assurer la réparation partielle de ces préjudices.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Brouilla, que la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande et a mis à sa charge les frais et honoraires d'expertise.
Sur les frais liés au litige :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Brouilla, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France le versement à la commune de Brouilla de la somme de 2 000 euros en application de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France est rejetée.
Article 2 : La société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France versera à la commune de Brouilla la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Mutuelle Assurances des Instituteurs de France et à la commune de Brouilla.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2022.
Le rapporteur,
N. A...
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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