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10/11/2022 | FRANCE | N°20TL22806

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 10 novembre 2022, 20TL22806


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les amis du vieux Caussade et de son pays a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté n° PC 08203717N0012 du 15 septembre 2017 par lequel le maire de Caussade a délivré à la commune un permis de construire une halle de marché et les aménagements des espaces publics autour de celle-ci, pour une surface de plancher créée de 438 m², sur un terrain situé place du Fil, place Notre-Dame à Caussade, ainsi que la décision du 9 novembre 2017 de rejet explicite de son recou

rs gracieux.

Par un jugement n° 1800098 du 29 juin 2020, le tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les amis du vieux Caussade et de son pays a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté n° PC 08203717N0012 du 15 septembre 2017 par lequel le maire de Caussade a délivré à la commune un permis de construire une halle de marché et les aménagements des espaces publics autour de celle-ci, pour une surface de plancher créée de 438 m², sur un terrain situé place du Fil, place Notre-Dame à Caussade, ainsi que la décision du 9 novembre 2017 de rejet explicite de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1800098 du 29 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du maire de Caussade du 15 septembre 2017.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 août 2020 sous le numéro 20BX02806 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis sous le numéro 20TL022806 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire en réplique enregistré le 16 février 2022, la commune de Caussade, représentée par le cabinet Goutal, Alibert et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de première instance de l'association, le cas échéant après avoir mis en œuvre les dispositions de l'article L 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

3°) de mettre à la charge de l'association intimée une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier au regard de l'exigence de motivation ;

- le jugement est irrégulier au regard du principe du caractère contradictoire en l'absence de communication du mémoire en réplique enregistré le 4 septembre 2018 ;

- le jugement est irrégulier au regard des prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, en l'absence de signature du président de la formation de jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

- c'est à tort que la méconnaissance de l'article R. 431-16 f) du code de l'urbanisme a été retenue ;

- la réalisation de l'étude visée à l'article R. 431-16 f) du code de l'urbanisme n'est prescrite, en application des dispositions de l'article I-1-1 du plan de prévention des risques naturels prévisibles de retrait gonflement des argiles applicable sur le territoire de la commune, que lorsque des " bâtiments collectifs et permis regroupés " sont projetés ;

- en raison de la composition de la halle, qui est donc ouverte, la définition donnée par le lexique national d'urbanisme faisait obstacle à la qualification de " bâtiment " et, a fortiori, à celle de " bâtiment collectif " évoquée à l'article I-1-1 du plan de prévention des risques naturels applicable sur le territoire de la commune ;

- en outre, deux études géotechniques ont été réalisées, en 2014 et 2017, sur l'emprise du projet autorisé par le permis de construire querellé ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme, alors que les précisions fournies par le pétitionnaire dans la notice descriptive sur les vestiges du mur de l'immeuble étaient suffisantes ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu la méconnaissance des dispositions de l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme ;

- en évoquant, à défaut de plus amples informations à sa disposition, la période du " Moyen-âge " la commune ne pouvait qu'être regardée comme ayant répondu à ces prescriptions ;

- en outre, le dossier de permis de construire comprenait bien des photographies des deux pans de mur à démolir, ainsi d'ailleurs que des plans permettant de les localiser ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu la méconnaissance des dispositions de l'article R 451-4 du code de l'urbanisme, en l'absence d'atteinte aux monuments " la Taverne " et " la Tour d'Arles " et compte tenu des dispositions techniques prévues pour ne pas mettre en péril les constructions avoisinantes ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'existence d'une fraude sur la seule base des insuffisances relevées dans la notice explicative et le formulaire de demande de permis de construire et en l'absence d'une volonté d'induire en erreur le service instructeur dans le but de faire échapper la construction aux règles d'urbanisme applicables ;

- dans l'hypothèse où la cour ne censurerait que le motif d'annulation tiré de l'existence d'une fraude de la commune, confirmant ainsi le bien-fondé de l'un ou des motifs d'annulation relatifs à l'incomplétude du dossier de permis de construire, elle devrait alors, dès lors que ces motifs sont susceptibles d'être régularisables faire usage des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre à la commune de régulariser les points litigieux ;

- elle s'en rapporte à ses écritures de première instance pour le rejet de la demande adverse de première instance et des moyens à nouveau présentés en appel.

Par des mémoires en défense, enregistré le 3 février 2022 et le 15 septembre 2022, l'association Les amis du vieux Caussade et de son pays, représentée par la SCP Bouyssou et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Caussade la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est régulier ;

- aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé ;

- au titre de l'effet dévolutif, le permis de construire méconnaît les dispositions de l'article UA2 du plan local d'urbanisme de la commune de Caussade, compte tenu de la création par le projet de 74 places de stationnement en contrariété avec les objectifs de développement de la zone UA ;

- le permis de construire méconnaît les dispositions de l'article UA7 du plan local d'urbanisme, dès lors que la construction projetée est implantée à seulement 3 mètres des limites de la parcelle 408 sur laquelle se situe l'église Notre-Dame ;

- le permis de construire méconnaît les dispositions de l'article UA11 du plan local d'urbanisme en l'absence de recours aux matériaux préconisés rendant le projet incompatible avec le caractère et l'intérêt architectural et paysager ;

- le permis de construire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme, en ce que la construction projetée nécessite la démolition des murs visibles du château de Caussade ainsi que de ses éléments bâtis situés en sous-sol compromettant irrémédiablement toute réalisation de fouilles, et alors que le permis n'est pas assorti de prescriptions évitant de les voir disparaître définitivement ;

- le permis de construire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, en ce que la construction projetée de la halle, par ses caractéristiques architecturales et par les matériaux employés ne respecte pas le bâti du centre-ville de Caussade et y porte atteinte.

Par une ordonnance du 31 août 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 septembre 2022, à 12 h 00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code du patrimoine ;

-le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Petit Dit A... représentant la commune appelante.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Caussade (Tarn-et-Garonne) a, par un arrêté n° PC 08203717N0012 du 15 septembre 2017, délivré à la commune un permis de construire une halle de marché avec ses aménagements publics autour de la halle à Caussade, sur les parcelles cadastrées section AT nos 389, 388, 385, 384, 383, 386, 387, 409, 410, 411, 412, 413, 414, 260 et 277 - soit l'îlot de sept parcelles situé place du Fil et huit parcelles présentes autour de la place. Par un courrier du 25 octobre 2017, l'association Les amis du vieux Caussade et de son pays a formé un recours gracieux contre cet arrêté, qui a fait l'objet d'une décision explicite de rejet du 9 novembre 2017. Par un jugement n° 1800098 du 29 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 15 septembre 2017 valant également permis de démolir notamment " les vestiges du mur de l'immeuble démoli au Moyen-Age " ainsi que la décision du 9 novembre 2017. Par la présente requête, la commune de Caussade interjette appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". Pour l'application de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, lorsque le tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, et d'apprécier si l'un au moins de ces motifs justifie la solution d'annulation.

En ce qui concerne les motifs d'annulation retenus par les premiers juges :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ;(...) ". La circonstance tirée de ce que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice descriptive, que le dossier de permis de construire mentionne la localisation du projet " sur la place du Fil [où] perdurent les vestiges d'un ancien îlot démoli il y a quelques années " alors que ces vestiges sont susceptibles de faire partie de constructions datant du Moyen-Age central appartenant au château de Caussade, ainsi que l'a relevé le rapport de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) en date de novembre 2012, réalisé dans le cadre d'un diagnostic archéologique. Toutefois, si le dossier de demande ne précise pas la possible appartenance de ces vestiges à l'ancien château médiéval de Caussade, une telle imprécision de la notice peut être regardée comme ayant été compensée par ledit rapport qui a été pris en considération par le service instructeur de la commune, ainsi que les autres documents composant le dossier de demande de permis de construire, notamment le formulaire de demande Cerfa et le plan de masse de l'état des lieux. Par suite, eu égard aux informations relatives à ces vestiges patrimoniaux et archéologiques, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'autorité administrative n'a pas été mise en mesure, au vu de l'ensemble des pièces produites de porter une appréciation sur la conformité du projet à la réglementation applicable et ont retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme.

5. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 431-16 du code de de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / (...) f) Lorsque la construction projetée est subordonnée par un plan de prévention des risques naturels prévisibles ou un plan de prévention des risques miniers approuvés, ou rendus immédiatement opposables en application de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, ou par un plan de prévention des risques technologiques approuvé, à la réalisation d'une étude préalable permettant d'en déterminer les conditions de réalisation, d'utilisation ou d'exploitation, une attestation établie par l'architecte du projet ou par un expert certifiant la réalisation de cette étude et constatant que le projet prend en compte ces conditions au stade de la conception ; (...) ". Aux termes des dispositions de l'article UA 2.1.3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caussade, applicables à la zone concernée par le projet : " cette zone est concernée par un Plan de Prévention des Risques Naturels concernant les mouvements différentiels de sols liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles dans le département de Tarn-et-Garonne. Les constructions ou installations touchées par ce risque doivent se conformer au règlement du PPRN joint dans le dossier de servitudes d'utilités publiques du présent Plan Local d'Urbanisme ".

6. Selon l'article I-1-1 du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles de mouvements différentiels de terrain liés au phénomène de retrait-gonflement des sols argileux de la commune de Caussade, la réalisation d'une étude sur les dispositions constructives nécessaires pour assurer la stabilité des constructions vis-à-vis de ce risque s'applique aux " bâtiments collectifs " et aux " permis groupés ". Une halle de marché, par ces spécifications de construction couverte de plein vent, ne pouvant être regardée comme un bâtiment collectif au sens de ces dispositions, la commune pétitionnaire n'était pas tenue à la réalisation de l'étude préalable prévue par le plan de prévention des risques naturels. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et ont annulé pour ce motif le permis de construire en litige.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de démolir précise : (...) / c) La date approximative à laquelle le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée ont été construits (...) ". Si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire valant permis de démolir requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés, notamment par les dispositions de l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard de ces dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées.

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 du présent arrêt que le dossier de demande de permis de construire en litige doit être regardé comme satisfaisant à l'exigence d'indication d'une date, même approximative, de construction des vestiges à démolir, et ayant permis au maire de Caussade de se prononcer en connaissance de cause sur la demande dont ses propres services l'avait saisi. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'arrêté municipal en litige méconnaissait les dispositions du c) de l'article 451-1 du code de l'urbanisme.

9. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 451-4 du même code : " Lorsque l'immeuble est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le dossier joint à la demande comprend en outre la description des moyens mis en œuvre dans la démolition pour éviter toute atteinte au patrimoine protégé. ".

10. Il est constant que le projet se situe dans les abords de monuments historiques, soit la maison dite de la " Taverne " et la " Tour d'Arles " respectivement à environ 40 et 72 mètres de la future halle du marché, et le clocher du 15ème siècle classé de l'église Notre-Dame de l'Assomption, à environ 54 mètres. Toutefois, alors que l'avis favorable de l'architecte des bâtiments de France en date du 1er juin 2017 ne comportait pas de prescription particulière relative aux travaux d'arasement des anciens vestiges, il ressort des pièces du dossier que la construction projetée n'est ni contiguë à ces monuments, ni située à proximité immédiate de ces derniers. Enfin, compte tenu de la faible ampleur et des distances séparant les travaux en cause, la circonstance que le dossier de demande ne comportait pas d'indication sur les moyens mis en œuvre dans la démolition, le cahier des clauses techniques particulières du marché de travaux conclu par la commune, ne pouvant à cet égard en tenir lieu par ses spécifications standards, n'a pas été de nature à avoir faussé l'appréciation de l'autorité administrative quant aux éventuels risques d'atteinte au patrimoine protégé. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme et ont annulé pour ce motif le permis de construire en litige.

11. En cinquième lieu, l'autorité administrative saisie d'une demande de permis de construire peut relever les inexactitudes entachant les éléments du dossier de demande relatifs au terrain d'assiette du projet, notamment sa surface ou l'emplacement de ses limites séparatives, et, de façon plus générale, relatifs à l'environnement du projet de construction, pour apprécier si ce dernier respecte les règles d'urbanisme qui s'imposent à lui. En revanche, le permis de construire n'ayant d'autre objet que d'autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, elle n'a à vérifier ni l'exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance du projet à moins qu'elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joints à la demande tels que limitativement définis par les dispositions des articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme, ni l'intention du demandeur de les respecter, sauf en présence d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date à laquelle l'administration se prononce sur la demande d'autorisation. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

12. Il ressort des pièces du dossier que la seule incomplétude du dossier tenant à l'insuffisance et à l'approximation sur l'existence et la datation des vestiges encore en place pouvant appartenir à l'ancien château de Caussade, à l'exclusion d'information erronée, n'est pas de nature à révéler l'existence d'une fraude ou à établir l'existence d'une manœuvre délibérée par la commune pétitionnaire destinée à induire le service instructeur de cette même commune, lequel a été saisi de l'ensemble des informations qui lui permettaient de procéder sans erreur à la qualification juridique de cette construction. En outre, l'association intimée ne démontre pas en quoi une difficulté s'agissant de sa qualification juridique aurait pu fausser l'appréciation portée par le service instructeur sur le respect, par le projet de la commune, de la réglementation applicable. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de ce que le permis de construire en litige aurait été obtenu par fraude.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens relatifs à la régularité du jugement, que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur ces motifs pour annuler l'arrêté du 15 septembre 2017 du maire de Caussade et la décision du 9 novembre 2017 de rejet du recours gracieux formé par l'association les amis du vieux Caussade.

14. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par l'association intimée.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés à l'encontre du permis en litige :

15. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été signé par l'adjoint délégué habilité par un arrêté du maire en date du 7 juillet 2016 et régulièrement publié au recueil des actes administratifs du troisième trimestre 2016. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué doit être écarté.

16. En deuxième lieu, si le projet autorisé prévoit la création d'une aire de stationnement, celle-ci est au nombre des aménagements autorisés par l'article UA2 du règlement du plan local d'urbanisme sous la réserve d'être nécessaire à la vie de quartier. En se limitant à faire valoir que cette aire de stationnement est contraire aux objectifs de développement de la zone UA que constituent la sauvegarde de la qualité architecturale de la partie ancienne du bourg et la préservation de l'image des quartiers qui est celle de la ville ancienne, l'association Les amis du vieux Caussade et de son pays ne démontre pas que la création de cette aire, de nature à faciliter le stationnement du public fréquentant les halles, ne serait pas nécessaire à la vie de quartier au sens de ces dispositions.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article UA7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caussade : " Les constructions peuvent être implantées sur les limites séparatives, toutes ou parties. Dans le cas contraire, la distance à respecter par rapport à la limite séparative n'est jamais inférieure à 4 mètres. / Des adaptations pourront être admises dans les cas suivants : / (...) - Pour les installations de service public ou d'intérêt collectif. (...) ".

18. Si l'association intimée fait valoir que la construction projetée sera implantée à seulement trois mètres des limites de la parcelle 408 sur laquelle se situe l'église Notre-Dame au lieu des quatre mètres exigés par les dispositions de l'article UA7 du plan local d'urbanisme, ces mêmes dispositions permettent des adaptations à cette règle, notamment, pour les installations d'intérêt collectif. Il ressort des pièces du dossier que la halle de marché objet du permis contesté relève de cette catégorie. Par suite, et alors qu'une telle adaptation ne nécessite pas la consultation ni l'accord de l'architecte des bâtiments de France, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

19. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions doivent présenter un aspect extérieur compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, en harmonie avec leur environnement architectural et paysager. Il convient de préserver l'unité architecturale de la zone de référence au bâti ancien en maintenant et en mettant en valeur les éléments d'architecture existants caractéristiques. / Les constructions innovantes par leur architecture, par les techniques de construction employées, par la nature des matériaux utilisés doivent s'intégrer parfaitement à l'environnement immédiat, au quartier, au paysage et au site. / La totalité de la zone UA est située dans le périmètre d'intervention de l'Architecte des Bâtiments de France. L'aspect extérieur des constructions nouvelles ou restaurées devra être conforme à l'avis de celui-ci. (...) ". Dès lors que les dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme invoquées par les requérants ont le même objet que celles, également invoquées, de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme posant les règles nationales d'urbanisme et prévoient des exigences qui ne sont pas moindres, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité de la décision attaquée.

20. Il résulte des dispositions précitées que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente doit refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel ou urbain de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel ou urbain sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

21. Il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé par l'arrêté en litige prend place dans le centre historique de Caussade au sein duquel se trouvent des monuments historiques ou classés tels que la maison dite de la " Taverne " et la " Tour d'Arles ", ou encore le clocher de l'église Notre-Dame de l'Assomption, de sorte que le site dans lequel s'inscrit le terrain d'assiette du projet doit être regardé comme présentant un intérêt architectural particulier. Toutefois, nonobstant la présence de ces monuments qui rappellent le passé médiéval de la commune, il ressort des pièces du dossier que les bâtiments alentours, de type R+1 ou R+2 ne présentent pas des façades homogènes, reflétant ainsi l'évolution du quartier dans le temps. En outre, le projet autorisé présente une hauteur et des couleurs en harmonie avec le bâti environnant et l'architecte des bâtiments de France a d'ailleurs émis un avis favorable conforme en date du 1er juin 2017. Enfin, si la halle de marché projetée présente une architecture innovante, les dispositions de l'article UA11 du plan local d'urbanisme autorisent ce type d'architecture dès lors que, comme en l'espèce, cette construction s'intègre dans l'environnement hétérogène immédiat. Il s'ensuit que le permis de construire attaqué ne procède pas d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article UA 11 du plan local d'urbanisme.

22. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation et ses caractéristiques, à compromettre la conservation ou la mise en valeur d'un site ou de vestiges archéologiques ".

23. Si la construction projetée entraînera la démolition des vestiges restants de murs susceptibles d'être rattachés à l'ancien château de Caussade, il ressort des pièces du dossier que les campagnes de fouilles ont été réalisées et sont achevées et qu'il n'y avait pas lieu d'assurer une quelconque protection de ces murs au titre des monuments historiques, leur état de conservation, extrêmement lacunaire, les rendant trop peu significatifs. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le maire au regard des dispositions précitées ne peut être qu'écarté.

24. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Caussade est fondée à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 15 septembre 2017.

Sur les frais liés au litige :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune appelante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'association intimée demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Caussade présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1800098 du tribunal administratif de Toulouse du 29 juin 2020 est annulé.

Article 2 : La demande de l'association les amis du vieux Caussade et de son pays devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Caussade au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Caussade et à l'association les amis du vieux Caussade et de son pays.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président-assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 novembre 2022.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

Le greffier,

C. Lanoux

La République mande et ordonne à la préfète du Tarn-et-Garonne en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°20TL22806


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL22806
Date de la décision : 10/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-11-10;20tl22806 ?
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