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20/10/2022 | FRANCE | N°22TL20817

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 20 octobre 2022, 22TL20817


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2021 E... lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

E... un jugement n° 2105552 du 1er décembre 2021, le magistrat désigné E... le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

E...

une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mars 2022 et le 21 septembre 2022, M. A... C..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2021 E... lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

E... un jugement n° 2105552 du 1er décembre 2021, le magistrat désigné E... le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

E... une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mars 2022 et le 21 septembre 2022, M. A... C..., représenté E... Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2021 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'ordonner au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros E... jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 contre renonciation à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- en confirmant le caractère suffisamment motivé de l'arrêté en litige, le jugement n'est pas suffisamment motivé et n'a pas été rendu au terme d'un examen particulier de sa situation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- La décision n'est pas suffisamment motivée et sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ;

- l'arrêté attaqué porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales ; le préfet, ainsi que le tribunal, ont commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- il n'a pas été tenu compte de l'intérêt supérieur de son enfant mineur qui est en troisième année de scolarité en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision refusant un délai de départ volontaire :

- sa situation personnelle et familiale justifiait l'octroi d'un délai de départ volontaire ;

- au regard de l'article L. 612-3 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'est fondé sur son intention de ne pas vouloir retourner en Géorgie et il appartient à l'autorité administrative de produire son audition ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- en raison des liens qu'il a créés en France, cette décision viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est dépourvue de base légale ;

- la durée d'un an fixée E... le préfet de l'Hérault est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France.

E... un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2022, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête en faisant valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale E... une décision du 21 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chabert, président.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité géorgienne né le 10 juillet 1961, relève appel du jugement n° 2105552 du 1er décembre 2021 E... lequel le magistrat désigné E... le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2021 E... lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter sans délai de territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Sur la régularité du jugement :

2. Le magistrat désigné, après avoir rappelé au point 1 de son jugement les conditions d'interpellation du requérant, a statué au point 3 du même jugement sur le moyen tiré de la motivation insuffisante de l'arrêté en litige et a relevé que cet arrêté vise les textes dont il a été fait application et indique avec précision les raisons pour lesquelles le préfet a obligé M. C... à quitter le territoire français au regard de son. Contrairement à ce que soutient le requérant, ce jugement se trouve suffisamment motivé.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise les textes dont il a été fait application, en particulier la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Contrairement à ce que soutient le requérant, cet arrêté vise également la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Le représentant de l'Etat a également précisé les éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale, notamment son mariage avec Mme D... et leurs enfants à charge. E... suite, la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre du requérant est suffisamment motivée en droit et en fait et cette motivation démontre que sa situation a fait l'objet d'un examen particulier.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue E... la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., entré en France dans le courant de l'année 2019, a vu sa demande d'asile être rejetée E... l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 24 octobre 2019. Si son épouse a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour délivrée le 30 octobre 2019 et valable jusqu'au 24 avril 2020, le couple se trouve en situation irrégulière en France. Il ressort également des pièces du dossier que si leur fils aîné souffre de problèmes de santé pour lesquels il a bénéficié de l'allocation éducation de l'enfant handicapé et d'une carte mobilité inclusion mention invalidité, cet enfant, né le 28 novembre 2002, est majeur à la date de l'arrêté attaqué. Enfin, au regard de la faible durée et des conditions du séjour en France du requérant, la circonstance tenant à la scolarité en France de son fils B... né le 26 décembre 2012 ne suffit pas à faire regarder la mesure d'éloignement en litige comme portant au droit au requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. E... suite, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. En troisième lieu, M. C... fait état, y compris dans ses dernières écritures, de la nécessité pour son fils aîné de suivre un traitement médical en France en raison de différentes pathologies. S'il est vrai que l'épouse du requérant a pu bénéficier d'une autorisation provisoire de séjour, le fils de couple est désormais majeur ainsi qu'il a été indiqué et le seul certificat médical établi le 31 décembre 2021, soit postérieurement à l'arrêté en litige, du centre hospitalier universitaire de Montpellier faisant état des pathologies dont souffre cet enfant majeur ne permet pas d'établir la nécessité de la présence du requérant auprès de lui. Dans ces conditions, l'obligation de quitter le territoire français ne peut être regardée comme ayant sur la situation personnelle et familiale de M. C... des conséquences d'une exceptionnelle gravité. E... suite, cette mesure d'éloignement n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

8. M. C... et son épouse sont en situation irrégulière et la seule scolarisation en France de leur enfant mineur ne permet pas d'établir que l'obligation de quitter le territoire français aurait méconnu l'intérêt supérieur de cet enfant en l'absence de tout élément de nature à faire obstacle à ce que cette scolarité se poursuive en Géorgie où cet enfant a vécu jusqu'à l'âge de six ans. E... suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur la décision refusant un délai de départ volontaire :

9. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " E... dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) ".

10. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. C..., après avoir vu sa demande d'asile être rejetée E... l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, n'a pas sollicité de titre de séjour. D'autre part, il ressort du procès-verbal d'audition de M. C... E... les services de gendarmerie, produit E... le préfet de l'Hérault devant le tribunal, que l'intéressé a déclaré lors de son audition ne pas vouloir retourner dans son pays et que sa femme et ses enfants sont présents en France et ont besoin de lui. Alors que le requérant n'a pas été en mesure de produire des documents d'identité lors du contrôle routier au cours duquel il a été interpellé, le préfet de l'Hérault a pu légalement se fonder sur l'existence d'un risque de fuite pour refuser de lui accorder un délai de départ volontaire. D'autre part, la seule circonstance tenant à la scolarité de son enfant mineur ne peut suffire à établir que sa situation justifiait que lui soit accordé un tel délai.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

11. L'obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée des illégalités alléguées, M. C... n'est pas fondé à s'en prévaloir E... la voie de l'exception à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

12. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée E... l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". L'article L. 612-10 du même code dispose que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".

13. M. C... se prévaut de l'ancienneté de sa présence en France avec son épouse et leurs enfants dont l'aîné a besoin d'un suivi médical en France et le second suit une scolarité en France. Toutefois, alors que le séjour en France remonte à 2019 et que le couple se trouve en situation irrégulière, la circonstance tenant au suivi médical dont bénéficie l'enfant majeur du couple ne suffit à établir qu'en prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois, le préfet de l'Hérault aurait méconnu les dispositions citées ci-dessus.

Sur la décision fixant le pays de destination :

14. L'obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée des illégalités alléguées, M. C... n'est pas fondé à s'en prévaloir E... la voie de l'exception à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

15. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les mêmes termes contre la décision fixant le pays de destination.

16. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, E... le jugement attaqué, le magistrat désigné E... le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

17. Doivent être rejetées, E... voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me Ruffel et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, où siégeaient :

M. Chabert, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public E... mise à disposition au greffe le 20 octobre 2022.

Le président-rapporteur,

D. Chabert

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le greffier,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL20817


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20817
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Denis CHABERT
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-10-20;22tl20817 ?
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