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20/10/2022 | FRANCE | N°20TL04717

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 20 octobre 2022, 20TL04717


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2020 sous le n° 20MA04717 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 20TL04717 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et des mémoires, enregistrés le 8 septembre 2021, le 11 octobre 2021, les 11, 12 et 14 novembre 2021, le 16 décembre 2021 et le 20 janvier 2022, l'association Aide à l'initiative dans le respect de l'environnement (AIRE) et l'association Avenir d'Alet, représentées par la SCP Cabinet Darribère, demandent à la cour :

1°) d'annuler l

'arrêté du 9 juin 2020 par lequel la préfète de l'Aude a édicté des prescr...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2020 sous le n° 20MA04717 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 20TL04717 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et des mémoires, enregistrés le 8 septembre 2021, le 11 octobre 2021, les 11, 12 et 14 novembre 2021, le 16 décembre 2021 et le 20 janvier 2022, l'association Aide à l'initiative dans le respect de l'environnement (AIRE) et l'association Avenir d'Alet, représentées par la SCP Cabinet Darribère, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 9 juin 2020 par lequel la préfète de l'Aude a édicté des prescriptions complémentaires pour l'exploitation, par la société Saint-Polycarpe Energies, d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comportant cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Saint-Polycarpe ;

2°) à titre principal, d'enjoindre à la société Saint-Polycarpe Energies de déposer une demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et à la préfète de l'Aude de réexaminer le dossier en fonction de la suite donnée à cette demande ;

3°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à la préfète de l'Aude de déterminer des mesures permettant d'éviter, réduire et compenser les atteintes portées par le projet à l'environnement et à la biodiversité, à la suite d'une étude d'incidence à la charge de la société exploitante ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'intitulé de l'arrêté attaqué n'est pas adapté à son contenu, cette omission a induit le public en erreur ;

- l'étude d'incidence n'est pas valide s'agissant de la protection des espèces animales et la réalisation d'une étude complémentaire était nécessaire sur ce point ;

- l'arrêté devait prévoir une procédure de demande de dérogation aux mesures de protection des espèces animales en application des articles R. 411-6 et suivants du code de l'environnement ;

- en raison de l'insuffisance des prescriptions relatives au suivi et à la protection de l'avifaune et des chiroptères, l'administration a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en prenant cet arrêté ;

- le montant des garanties financières fixé par l'arrêté ne correspond pas aux frais réels de démantèlement des installations et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- en outre, les écritures de la société Saint-Polycarpe Energies sont irrecevables en l'absence de preuve de la qualité pour agir de son représentant légal ;

- elles justifient d'un intérêt à obtenir l'annulation de l'arrêté attaqué ;

- si le montant des garanties financières a été déterminé par référence à l'arrêté ministériel du 26 août 2011 modifié, cet arrêté est lui-même entaché d'illégalité dès lors qu'il présente une erreur manifeste d'appréciation ;

- en outre, le montant fixé par l'arrêté est erroné dès lors que les éoliennes ont une puissance de 2,3 MW et non pas de 2 MW ;

- une expertise complémentaire devait être demandée par l'administration sur le fondement de l'article L. 181-13 du code de l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 juillet 2021, le 10 novembre 2021 et le 16 décembre 2021, la société Saint-Polycarpe Energies, représentée par Me Elfassi, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à la réformation du montant des garanties financières au titre des pouvoirs de plein contentieux du juge des installations classées ;

3°) à titre infiniment subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

4°) à ce que soit mise à la charge des associations requérantes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable en raison de sa tardiveté ;

- la requête est irrecevable en l'absence de qualité et d'intérêt pour agir des requérantes ;

- le moyen invoqué au titre de l'article L. 181-13 du code de l'environnement est irrecevable dès lors qu'il a été présenté après la date de cristallisation des moyens ;

- les autres moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

Elle soutient que les moyens soulevés par les associations requérantes ne sont pas fondés.

La clôture d'instruction a effet immédiat a été prononcée par une ordonnance du 21 janvier 2022 en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Les associations AIRE et Avenir d'Alet, représentées par la SCP Cabinet Darribère, ont produit un mémoire enregistré le 2 octobre 2022 après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'environnement ;

- le code de procédure civile ;

- l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Darribère, représentant les associations requérantes.

Les associations AIRE et Avenir d'Alet, représentées par la SCP Cabinet Darribère, ont produit une note en délibéré enregistrée le 18 octobre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 18 décembre 2008, le préfet de l'Aude a délivré à la société Saint-Polycarpe Energies un permis de construire pour la création d'un parc éolien composé de cinq aérogénérateurs sur un terrain situé au lieu-dit " Le Plantidou " sur le territoire de la commune de Saint-Polycarpe. Par une décision du 14 août 2012, la même autorité a accordé à ladite société le bénéfice des droits acquis pour ce parc éolien relevant désormais de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. Par arrêté du 20 septembre 2018, l'autorité préfectorale a prorogé le délai de mise en service de ce parc. Enfin, par un arrêté du 9 juin 2020, la préfète de l'Aude a édicté des prescriptions complémentaires applicables à cette installation. Par la présente requête, l'association Aide à l'initiative dans le respect de l'environnement (AIRE) et l'association Avenir d'Alet demandent à la cour de prononcer l'annulation de cet arrêté.

Sur la portée de l'arrêté de la préfète de l'Aude du 9 juin 2020 :

2. L'article L. 181-14 du code de l'environnement dispose que : " Toute modification substantielle des activités, installations, ouvrages ou travaux qui relèvent de l'autorisation environnementale est soumise à la délivrance d'une nouvelle autorisation, qu'elle intervienne avant la réalisation du projet ou lors de sa mise en œuvre ou de son exploitation. / En dehors des modifications substantielles, toute modification notable intervenant dans les mêmes circonstances est portée à la connaissance de l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation environnementale dans les conditions définies par le décret prévu à l'article L. 181-32. / L'autorité administrative peut imposer toute prescription complémentaire nécessaire au respect des dispositions des articles L. 181-3 et L. 181-4 à l'occasion de ces modifications, mais aussi à tout moment s'il apparaît que le respect de ces dispositions n'est pas assuré par l'exécution des prescriptions préalablement édictées. ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 181-45 du même code : " Les prescriptions complémentaires prévues par le dernier alinéa de l'article L. 181-14 sont fixées par des arrêtés complémentaires du préfet, après avoir procédé, lorsqu'elles sont nécessaires, à celles des consultations prévues par les articles R. 181-18 et R. 181-22 à R. 181-32. / (...) / Ces arrêtés peuvent imposer les mesures additionnelles que le respect des dispositions des articles L. 181-3 et L. 181-4 rend nécessaire ou atténuer les prescriptions initiales dont le maintien en l'état n'est plus justifié. / (...) ".

3. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté préfectoral complémentaire attaqué qu'il a pour objet de modifier l'emplacement de l'aérogénérateur E 13, d'actualiser les coordonnées des éoliennes E 13 et E 14, de prévoir les conditions d'un défrichement complémentaire nécessité par la modification de l'implantation de l'aérogénérateur E 13 et de déterminer le montant des garanties financières à la charge de la société Saint-Polycarpe Energies. Il comporte aussi des prescriptions nouvelles imposant à l'exploitant des obligations spécifiques envers les services de la direction générale de l'aviation civile lors du levage des éoliennes.

4. Si l'article 6 de cet arrêté mentionne également un certain nombre de mesures relatives à la réalisation d'un diagnostic archéologique, à la mise en place d'un suivi de l'avifaune, à l'inscription dans la documentation aéronautique, au balisage diurne et nocturne des machines, à la prise en compte de la législation relative à la défense des forêts contre les incendies, à la réalisation de mesures des émergences sonores ainsi qu'au recueil de l'avis préalable d'un homme de l'art en cas d'affouillement en raison de la proximité de la mine du Puy Merle, il résulte de l'instruction que les indications portées sur ces différents points ne constituent que la reprise des prescriptions déjà imposées par l'arrêté du 18 décembre 2008 portant octroi du permis de construire à la société Saint-Polycarpe Energies. En se bornant à rappeler de manière superfétatoire les mesures prévues dans le permis initial sans en modifier les termes et alors que ce parc éolien n'est pas entré en fonctionnement, la préfète de l'Aude n'a fixé aucune prescription additionnelle autre que celles mentionnées au point précédent et doit être regardée comme ayant entendu récapituler, dans un arrêté unique, l'ensemble des mesures mises à la charge de la société en vue de l'exploitation à venir du parc éolien.

Sur la fin de non-recevoir opposée aux écritures de la société Saint-Polycarpe Energies :

5. La présentation d'une action par un mandataire habilité ne dispense pas la cour de s'assurer, le cas échéant, lorsque la partie est une personne morale, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour engager cette action. Une telle vérification n'est toutefois normalement pas nécessaire lorsque la personne morale est dotée, par des dispositions législatives ou réglementaires, de représentants légaux ayant de plein droit qualité pour agir en justice en son nom. En vertu de l'article L. 223-18 du code de commerce régissant les sociétés à responsabilité limitée, le gérant est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société et pour la représenter dans ses rapports avec les tiers. Il en résulte que cette personne a de plein droit qualité pour agir en justice au nom de la société. En l'espèce, les mémoires présentés pour la société Saint-Polycarpe Energies ont été signés par l'avocat mandaté par le représentant légal de cette société. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par les associations requérantes aux écritures en défense ne peut qu'être écartée.

Sur les fins de non-recevoir opposées par la société Saint-Polycarpe Energies :

6. En premier lieu, aux termes de l'article R. 181-50 du code de l'environnement : " Les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15 peuvent être déférées à la juridiction administrative : / (...) / 2° Par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3, dans un délai de quatre mois à compter de : / a) L'affichage en mairie dans les conditions prévues au 2° de l'article R. 181-44 ; / b) La publication de la décision sur le site internet de la préfecture prévue au 4° du même article. / Le délai court à compter de la dernière formalité accomplie. (...) / Les décisions mentionnées au premier alinéa peuvent faire l'objet d'un recours gracieux ou hiérarchique dans le délai de deux mois. Ce recours administratif prolonge de deux mois les délais mentionnés aux 1° et 2°. ".

7. Il ressort de l'attestation établie le 20 juillet 2020 par le maire de Saint-Polycarpe que l'arrêté attaqué a été affiché en mairie le 18 juin 2020 pendant une durée d'un mois. En l'absence de toute indication de la part des défendeurs quant à la date de publication de l'arrêté sur le site internet de la préfecture de l'Aude, le délai de recours contentieux a donc commencé à courir au plus tôt le 18 juin 2020 et ce pour une durée de six mois, dès lors qu'il a été prolongé de deux mois par le recours gracieux présenté par les requérantes le 11 août 2020. En application de l'article 642 du code de procédure civile, le délai expirant normalement un samedi, comme c'est le cas en l'espèce, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant. Dans ces conditions, la requête introduite par les associations AIRE et Avenir d'Alet le lundi 21 décembre 2020 n'est pas tardive. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée à ce titre ne peut qu'être écartée.

8. En deuxième lieu, par une délibération du 11 décembre 2020, prise conformément à l'article 4 de ses statuts, le conseil d'administration de l'association AIRE a décidé d'engager le présent recours contre l'arrêté du 9 juin 2020 et a mandaté sa présidente à cet effet. De même, par une délibération du 28 novembre 2020, adoptée en application de l'article 10 de ses statuts, le conseil d'administration de l'association Avenir d'Alet a décidé d'engager ledit recours et a mandaté son président pour ce faire. Par voie de conséquence, les fins de non-recevoir tirées de l'absence de qualité pour agir des représentants des associations doivent être écartées.

9. En dernier lieu, il résulte de l'article 2 de ses statuts que l'association AIRE a pour but d'œuvrer à la conservation à long terme du patrimoine naturel et culturel et d'exercer sa vigilance contre les nuisances à l'environnement dans le pays de la Haute Vallée de l'Aude, au sein duquel se trouve le site projeté pour l'implantation du parc éolien en litige. Par ailleurs, il résulte de l'article 2 de ses statuts que l'association Avenir d'Alet s'est notamment donnée pour but la défense de l'environnement et du cadre de vie et la protection des sites naturels sur le territoire de la commune d'Alet-les-Bains, située à environ 1,5 kilomètre de l'emplacement prévu pour les éoliennes. Par une modification des statuts intervenue avant l'introduction de la présente requête, ladite association est venue préciser qu'elle entendait également s'opposer aux atteintes à l'environnement et à la biodiversité provenant d'une autre commune. Eu égard à la portée de l'arrêté préfectoral complémentaire en litige, telle que rappelée au point 3 du présent arrêt, les deux associations requérantes justifient, compte tenu de l'objet social et de leur champ d'action, d'un intérêt suffisant pour en demander l'annulation. Par suite, les fins de non-recevoir soulevées par la société Saint-Polycarpe Energies sur ce point doivent également être écartées.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

10. En premier lieu, la circonstance que l'intitulé de l'arrêté du 9 juin 2020 mentionne seulement la mise en place des garanties financières et l'autorisation de défrichement, alors que ledit arrêté comporte également des mesures portant sur d'autres points, n'a aucune incidence sur sa légalité. Contrairement à ce que soutiennent les associations requérantes, cet intitulé de l'arrêté préfectoral complémentaire n'est pas de nature à induire le public en erreur. Dès lors, le moyen invoqué par les associations requérantes en ce sens doit être écarté.

11. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été indiqué aux points 3 et 4 du présent arrêt, l'arrêté contesté ne peut être regardé comme définissant des prescriptions complémentaires en matière de protection de l'avifaune et, plus largement, des espèces animales protégées. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas même allégué que les modifications apportées au projet par l'arrêté en cause engendreraient par elles-mêmes des dangers ou inconvénients supplémentaires, par rapport à ceux résultant de l'autorisation initiale, pour les intérêts mentionnés aux articles L. 181-3 et L. 181-4 du code de l'environnement. Par suite, les associations requérantes ne peuvent utilement invoquer, à l'encontre de l'arrêté préfectoral complémentaire attaqué, ni la nécessité d'une nouvelle étude d'incidence ou d'une tierce expertise en raison des insuffisances de l'étude d'impact initiale, ni l'insuffisance des prescriptions en matière de préservation de l'avifaune et des chiroptères, ni l'absence de présentation d'une demande de dérogation aux interdictions relatives aux espèces protégées. Les moyens soulevés en ce sens doivent donc être écartés comme inopérants.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 515-46 du code de l'environnement : " L'exploitant d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent ou, en cas de défaillance, la société mère est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site, dès qu'il est mis fin à l'exploitation, quel que soit le motif de la cessation de l'activité. Dès le début de la production, puis au titre des exercices comptables suivants, l'exploitant ou la société propriétaire constitue les garanties financières nécessaires. ". Selon l'article R. 515-101 du même code : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. / II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. / (...) ". L'article 30 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 dispose que : " Le montant des garanties financières mentionnées à l'article R. 515-101 du code de l'environnement est déterminé selon les dispositions de l'annexe I du présent arrêté. Ce montant est réactualisé par un nouveau calcul lors de leur première constitution avant la mise en service industrielle. ". Enfin, ladite annexe I prévoit, dans sa rédaction en vigueur à la date du présent arrêt, que : " I. - Le montant initial de la garantie financière d'une installation correspond à la somme du coût unitaire forfaitaire (Cu) de chaque aérogénérateur composant cette installation : / M = ' (A...) où : / - M est le montant initial de la garantie financière d'une installation ; / - Cu est le coût unitaire forfaitaire d'un aérogénérateur, calculé selon les dispositions du II de l'annexe I du présent arrêté. Il correspond aux opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation prévues à l'article R. 515-106 du code de l'environnement. / II. - Le coût unitaire forfaitaire d'un aérogénérateur (Cu) est fixé par les formules suivantes : / a) lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2,0 MW : / Cu = 50 000 / b) lorsque sa puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est supérieure à 2,0 MW : / Cu = 50 000 + 25 000 × (P-2) où : / - Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; / - P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW). / (...) ".

13. D'une part, le montant du coût unitaire forfaitaire fixé par l'arrêté ministériel du 26 août 2011 a été déterminé en prenant en compte les coûts effectifs de démantèlement des premiers parcs éoliens et intègre, notamment, les perspectives de valorisation d'une partie des matériaux de construction des éoliennes. En se bornant à se référer à des documents généraux relatifs au démantèlement des aérogénérateurs, les requérantes ne démontrent pas que l'arrêté ministériel dont s'agit serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur ce point.

14. D'autre part et en revanche, l'article 2 de l'arrêté du 9 juin 2020 mentionne que les machines projetées présenteraient une puissance unitaire de 2 mégawatts, alors que la société Saint-Polycarpe Energies confirme avoir prévu des éoliennes d'une puissance de 2,3 mégawatts. Dès lors et en application de l'annexe I précitée, le montant des garanties financières à constituer par l'exploitant doit être fixé à la somme de 57 500 euros par éolienne et non à la somme de 50 000 euros indiquée à l'article 7 de l'arrêté attaqué. Il s'ensuit que les associations requérantes sont fondées à soutenir que ledit arrêté est entaché d'erreur de droit dans cette mesure.

15. Eu égard à ce qui vient d'être exposé, il y a lieu pour la cour de mettre en œuvre les pouvoirs de pleine juridiction liés à son office de juge de l'autorisation environnementale, en modifiant l'article 2 de l'arrêté litigieux pour y mentionner que la puissance totale installée du parc éolien sera de " 11,5 MW " au lieu de " 10 MW ", ainsi que l'article 7 pour y indiquer que le montant des garanties financières à constituer sera de " 57 500 euros " par aérogénérateur au lieu de " 50 000 euros ", tant au point 7.1 que dans la formule de calcul au point 7.2.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les associations AIRE et Avenir d'Alet sont seulement fondées à demander la réformation des articles 2 et 7 de l'arrêté de la préfète de l'Aude du 9 juin 2020 conformément à ce qui est précisé au point 14 du présent arrêt.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Le présent arrêt, compte tenu de ses motifs qui tendent seulement à la réformation partielle de l'arrêté préfectoral complémentaire attaqué, n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les demandes d'injonction présentées par les associations requérantes doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

18. En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge des frais qu'elles ont pu exposer et qui ne sont pas compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 2 et 7 de l'arrêté de la préfète de l'Aude du 9 juin 2020 sont réformés ainsi qu'il est indiqué au point 15 du présent arrêt.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Saint-Polycarpe Energies sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association AIRE, à l'association Avenir d'Alet, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Saint-Polycarpe Energies.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2022.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20TL04717


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL04717
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Energie.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Florian JAZERON
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP CABINET DARRIBERE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-10-20;20tl04717 ?
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