Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière Minerva, M. et Mme A... D... et la société civile immobilière Ker Luber ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le maire de Ménerbes ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de division parcellaire déposée par Mme C... ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux.
Par un jugement n° 1702423, 1702437, 1702441 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°19MA00038 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°19TL00038 le 4 janvier 2019, le 18 décembre 2019, le 20 mars 2020, le 26 mai 2020, le 1er février 2022 et le 28 février 2022, Mme B... C..., représentée par Me Boulisset, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 novembre 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber devant le tribunal administratif de Nîmes ;
3°) de mettre à la charge de la société civile immobilière Minerva, de M. et Mme A... D... et de la société civile immobilière Ker Luber une somme de 2 000 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions combinées des articles 3, 3.1 et 7.1.2 du plan de prévention des risques d'incendie de forêt ;
- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article 7.1.1. du plan de prévention des risques d'incendie de forêt.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 mai 2019, le 9 janvier 2020, le 23 avril 2020, le 10 juin 2020 et le 14 février 2022, la société civile immobilière Minerva, M. et Mme A... D... et la société civile immobilière Ker Luber, représentés par la SCP Goujon-Maury-Chauvet, demandent à la cour :
1°) de rejeter la requête de Mme C... ;
2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler l'article 1er du jugement du 6 novembre 2018 en tant qu'il ne retient pas le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 7.1.1 du plan de prévention des risques d'incendie de forêt ;
3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article 7.1.1 du plan de prévention des risques d'incendie de forêt :
- les autres moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de Mme C....
La clôture de l'instruction a été fixée au 31 mai 2022 par ordonnance du même jour en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.
Les parties ont été informées le 29 septembre 2022, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que l'appel incident formé par la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber est irrecevable dès lors que le dispositif du jugement fait intégralement droit à leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le maire de Ménerbes ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de division parcellaire déposée par Mme C....
Par un mémoire, enregistré le 4 octobre 2022, la société civile immobilière Minerva, M. et Mme A... D... et la société civile immobilière Ker Luber, représentés par la SCP Goujon-Maury-Chauvet, ont répondu à ce moyen d'ordre public.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- et les observations de Me Goujon, représentant la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... a déposé le 13 janvier 2017, auprès des services de la commune de Ménerbes, une déclaration préalable portant sur la division en trois lots en vue de construire, d'un terrain lui appartenant situé en zone B1 du plan de prévention des risques d'incendies de forêt de la commune de Ménerbes. Par arrêté du 28 février 2017, le maire de Ménerbes n'a pas fait opposition à cette déclaration, assortissant toutefois sa décision de plusieurs prescriptions. Mme C... fait appel du jugement en date du 6 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté.
Sur la recevabilité de l'appel incident de la société civile immobilière Minerva et autres :
2. La société civile immobilière Minerva et autres demandent, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement attaqué en tant que celui-ci n'a pas retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 7.1.1. du plan de prévention des risques d'incendie de forêt de la commune de Ménerbes. Ainsi, ils se bornent à contester l'un des motifs du jugement du tribunal administratif et non le dispositif du jugement qui fait intégralement droit à leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le maire de Ménerbes ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de division parcellaire déposée par Mme C.... Dès lors, l'appel incident doit être rejeté comme irrecevable.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les moyens retenus par le tribunal administratif :
3. Aux termes du Titre 3 " Règles applicables dans la zone B1 " du règlement du plan de prévention des risques d'incendie de forêt de Ménerbes : " La zone B1 correspond à un secteur en aléa feu de forêt fort à très fort dans lequel le nombre de bâtiments préexistants à la date de référence est tel que leur défense en cas d'incendie peut être assurée dans des conditions techniques et économiques acceptables (...). On considère alors comme admissible le risque né d'une densification ou d'une extension limitée de l'urbanisation, une fois les équipements publics réalisés sur l'intégralité de la zone. ". Aux termes de son article 3.1 " Dispositions générales applicables dans la zone B1 " : " Sont interdits en zone B1 : / Tous travaux, ouvrages, aménagements, constructions ou installations de quelque nature qu'ils soient qui ne sont pas expressément autorisés par le présent titre. (...) Peuvent également être autorisés après réalisation des équipements publics de défense : / Les constructions nouvelles à usage d'habitations sous réserve du respect des dispositions suivantes : / - Les constructions ne peuvent être autorisées que si préalablement les terrains de l'intégralité de la zone sont desservis par des équipements publics tels que définis dans le titre 7. / - Les lotissements pourront être autorisés à condition que les équipements du lotissement présentent au moins les caractéristiques figurant dans le titre 7 et que les travaux de V.R.D. du lotissement ne fassent pas l'objet d'un phasage. ". Enfin, aux termes de l'article 7.1 " Conditions relatives aux équipements publics ", du Titre 7 " Equipements " du règlement de ce plan : " (...) Article 7.1.2 Défense contre l'incendie / Les voies de desserte visées au 7.1.1 doivent être équipées de poteaux d'incendie séparés entre eux d'une distance inférieure ou égale à 300 mètres, le poteau desservant la construction la plus éloignée ne pouvant en être distant de plus de 150 m. / (...) / Les poteaux doivent être alimentés par des canalisations telles que le débit utilisable soit supérieur ou égal à 60m3/h pendant 2 heures. / A défaut, il peut être admis que la protection soit assurée par la présence d'une réserve d'eau publique de 120 m3, à condition que cette réserve soit située à moins de 150 mètres du groupe des bâtiments dont elle est destinée à assurer la protection, ce groupe ne devant pas excéder 5 bâtiments. L'accès à cette réserve doit être réalisé dans les conditions décrites au dernier paragraphe du 7.1.1 ci-dessus. / Il peut également être admis que la protection soit assurée : / --) Pour les constructions nouvelles autorisées sans équipement préalable généralisé dans les zones R, B1 ou B2, si le réseau a un débit compris entre 30 et 60 m3/h, et si les poteaux incendie sont implantés conformément aux caractéristiques décrites au premier alinéa du présent paragraphe 7.1.2, par une réserve d'eau publique de 30 m3 minimum située à moins de 50 mètres du bâtiment, l'accès à cette réserve étant conforme aux conditions décrites pour l'accès routier à la construction (§ 7.1.1 ci-dessus). (...) ". Il résulte de ces dispositions que les divisions parcellaires ne peuvent intervenir qu'après réalisation des équipements publics de défense extérieure contre l'incendie.
4. Il ressort des pièces des dossiers, et notamment du plan local d'urbanisme de la commune de Ménerbes et de ses annexes, que, à la date d'édiction de l'arrêté en litige, la citerne d'eau existante de 120 m3 sur le chemin de Gaujas assure la défense extérieure contre l'incendie de six habitations, le plan local d'urbanisme utilisant le rayon entre les habitations à protéger et le point d'eau pour calculer la distance de 150 mètres préconisée par les dispositions de l'article 7.1.2 du plan de prévention des risques d'incendie de forêt. Si la requérante se prévaut d'un constat d'huissier indiquant que cette citerne n'est susceptible de protéger que quatre habitations dont deux sont protégées par ailleurs par un poteau incendie, ce constat d'huissier qui apprécie la distance entre le point d'eau et les habitations à protéger par les voies carrossables ne permet pas de démontrer que seules quatre habitations seraient protégées par la citerne existante. En outre, la requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions des règlements national et départemental de défense extérieure contre l'incendie pour calculer la distance entre les points d'eau et les habitations à protéger, ces derniers n'ayant pas été rendus opposables par le plan local d'urbanisme de la commune de Ménerbes. Enfin, la circonstance qu'un poteau incendie ait été réceptionné le 27 septembre 2019 à moins de 150 mètres des parcelles faisant l'objet de la division parcellaire en litige est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 28 février 2017 dès lors que les divisions parcellaires ne peuvent intervenir qu'après réalisation des équipements publics de défense extérieure contre l'incendie. Dans ses conditions, le seul équipement public existant à la date de l'arrêté attaqué consistant en une citerne de 120 m3 ne pourra pas assurer la défense extérieure contre l'incendie des trois futurs lots déclarés par Mme C.... Par suite, et alors même qu'il comporte une prescription aux termes de laquelle " Les aménagements prévus pour la défense extérieure contre l'incendie (réserves publiques et citerne) doivent être réalisés. ", l'arrêté attaqué en date du 28 février 2017 méconnaît les dispositions de l'article 7.1.2 du règlement du plan de prévention des risques d'incendie de forêt de Ménerbes.
5. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le projet litigieux, qui a vocation à terme à accueillir trois nouvelles constructions à usage d'habitation est, en raison de sa situation en zone B1 du plan de prévention des risques d'incendie de forêt et de l'insuffisance des équipements de défense contre l'incendie prévus, de nature à porter atteinte à la sécurité publique. Par suite, l'arrêté attaqué en date du 28 février 2017 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en date du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le maire de Ménerbes ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de division parcellaire qu'elle avait déposée.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que demande Mme C... titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y e lieu de mettre à la charge de Mme C... une somme globale de 2 000 euros à verser à la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber en application de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera à la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la société civile immobilière Minerva, M. et Mme D... et la société civile immobilière Ker Luber est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme B... C..., à la société civile immobilière Minerva, à M. et Mme A... D..., à la société civile immobilière Ker Luber.
Copie en sera adressée à la commune de Ménerbes.
Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2022.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
D. Chabert La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°19TL00038