Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association Les Amis du Pic du Gar a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a autorisé la société Pyrénées Bois Energies à exploiter une usine de production de briquettes et de granulés bois à Marignac.
Par jugement n° 1705985 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 22 juillet 2020 sous le n° 20BX02258 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux puis sous le n° 20TL22258 au greffe de la la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 3 mars 2021, la société Pyrénées Bois Energies, représentée par Me Larrouy-Castera, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par l'association Les Amis du Pic du Gar devant le tribunal administratif de Toulouse ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner la régularisation de la procédure d'autorisation ;
4°) de mettre une somme de 3 500 euros à la charge de l'association Les Amis du Pic de Gar au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal ne pouvait admettre la recevabilité de la demande de première instance contestée en défense alors que ce n'est que par une note en délibéré produite après la clôture de l'instruction que l'association Les Amis du Pic du Gar a justifié de la qualité pour agir de son président ;
- les motifs d'annulation retenus par le jugement attaqué ne sont pas fondés :
. l'avis émis par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement l'a été par une autorité devant être regardée comme bénéficiant d'une autonomie suffisante par rapport au préfet de département compétent pour statuer sur l'autorisation qui n'est pas la même personne que le préfet de région ; à supposer que cette autonomie ne soit pas retenue, la cour devra ordonner la régularisation nécessaire en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;
. elle a suffisamment justifié des capacités financières nécessaires à l'exploitation et, in fine, à la remise en état du site, au regard notamment de l'évolution positive intervenue après l'été 2019 ;
- les autres moyens soulevés en première instance n'étaient pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 1er octobre 2020, l'association Les Amis du Pic de Gar, représentée par Me Lapuelle, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société Pyrénées Bois Energies ne sont pas fondés et maintient si nécessaire l'ensemble de ses moyens de première instance.
Par ordonnance du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la société Pyrénées Bois Energies.
La clôture de l'instruction a été fixée au 10 mars 2022 par ordonnance du 10 mars 2022.
Un mémoire produit pour la SELAS Egide, mandataire judiciaire chargé de la liquidation de la société Pyrénées Bois Energies, représenté par Me Larrouy-Castera, a été enregistré le 8 avril 2022.
Vu le jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabien, présidente assesseure ;
- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Beuscart pour la requérante.
Considérant ce qui suit :
1. La société Pyrénées Bois Energies demande l'annulation du jugement du 12 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 21 juillet 2017 l'autorisant à exploiter une usine de production de briquettes et de granulés bois à Marignac.
Sur la régularité du jugement :
2. Lorsqu'une partie est une personne morale, il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie. Tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen, l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier.
3. Pour écarter la fin de non-recevoir de la demande présentée par l'association Les Amis du Pic de Gar tirée de l'absence de capacité à agir de son président, le tribunal administratif de Toulouse ne s'est pas fondé sur la production par celle-ci d'une pièce après la clôture de l'instruction mais exclusivement sur la circonstance que cette qualité pour agir n'était pas sérieusement remise en cause et que son absence ne ressortait pas des pièces du dossier. Il ressort en effet des écritures de première instance que si la société a soutenu que le " défaut de capacité à agir de l'association est patent ", elle n'a assorti cette fin de non-recevoir d'aucune précision au contraire de ce qu'il en a été pour celle tirée du défaut d'intérêt à agir. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est irrégulièrement que le tribunal se serait fondé sur une pièce produite après la clôture de l'instruction pour écarter la fin de non-recevoir qu'elle avait opposée en première instance.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. L'article L. 181-27 du code de l'environnement dispose que : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ".
5. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code. Lorsque le juge se prononce après la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la réalité et le caractère suffisant des capacités financières et techniques du pétitionnaire ou, le cas échéant, de l'exploitant auquel il a transféré l'autorisation.
6. Il résulte de l'instruction que la société Pyrénées Bois Energies a connu des difficultés financières caractérisées par un résultat déficitaire et une dette importante et qui ont donné lieu à l'ouverture dès le 7 août 2017 d'une procédure de conciliation devant le tribunal de commerce de Toulouse ayant abouti à un protocole d'accord signé le 19 octobre 2017 et homologué par jugement du 21 novembre 2017 permettant une restructuration de l'endettement avec de nouveaux concours de 650 000 euros. Si elle a enregistré une forte augmentation de son résultat d'exploitation en 2019, celle-ci se rapportait cependant à une rétrocession d'impôt à caractère exceptionnel, son résultat net ne garantissant pas la capacité financière attendue. Elle se prévaut en appel d'une attestation du 1er mars 2021 de l'administrateur judiciaire indiquant que " confrontée à la nécessité de procéder à un nouveau réaménagement de ses engagements bancaires, la société a sollicité et obtenu l'ouverture d'une nouvelle procédure de conciliation le 11 février 2020 à l'issue de laquelle il a pu être procédé à la signature d'un avenant au protocole signé le 25 septembre 2020 permettant un nouveau réaménagement de l'endettement historique " et que " la crise sanitaire étant entre-temps intervenue ", elle a bénéficié d'un " prêt garanti par l'Etat de 520 000 euros ". Toutefois, ces circonstances nouvelles, qui confirment la poursuite de difficultés très importantes, ne sont pas, en l'absence de tout autre élément relatif à la situation financière actualisée de la société Pyrénées Bois Energie, et notamment de ses bilans pour les deux dernières années et d'éléments justifiant de sa capacité à honorer le remboursement des nouveaux emprunts ainsi contractés, de nature à établir qu'elle présenterait à la date du présent arrêt les capacités financières lui permettant de faire face aux exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation ou de la remise en état de l'exploitation.
7. Dès lors que le motif d'annulation tiré de l'absence de capacités financières suffisantes était de nature à lui seul à justifier l'annulation de l'arrêté d'autorisation sans qu'un sursis à statuer aux fins de régularisation puisse en tout état de cause être envisagé sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, il n'y a pas lieu de se prononcer sur le moyen tiré de ce que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a également retenu le vice de procédure tenant à l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale et, subsidiairement, qu'il n'a pas prononcé un sursis à statuer en vue de permettre la régularisation de ce vice.
8. Il résulte de ce qui précède que la société Pyrénées Bois Energie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 21 juillet 2017 l'autorisant à exploiter une usine de production de briquettes et de granulés bois à Marignac.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la société Pyrénées Bois Energie demande sur leur fondement soit mise à la charge de l'association Les Amis du Pic de Gar qui n'est pas partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante le versement à cette association d'une somme au titre des frais exposés à l'occasion du litige.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Pyrénées Bois Energie est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'association Les Amis du Pic de Gar au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAS Egide, à la ministre de la transition écologique et à l'association Les amis du Pic de Gar.
Délibéré après l'audience du 14 avril 2022, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président de chambre,
Mme Fabien, présidente assesseure,
Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mai 2022.
La rapporteure,
M. Fabien
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20TL22258