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12/04/2022 | FRANCE | N°20TL20079

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 12 avril 2022, 20TL20079


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 juin 2017 par lequel le maire de la commune de A... a procédé à son licenciement en cours de stage ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté, d'enjoindre à la commune de procéder à sa réintégration sur un poste d'adjoint administratif stagiaire, dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de

la condamner à lui verser la somme totale de 6 532,17 euros en remboursement des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 juin 2017 par lequel le maire de la commune de A... a procédé à son licenciement en cours de stage ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté, d'enjoindre à la commune de procéder à sa réintégration sur un poste d'adjoint administratif stagiaire, dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de la condamner à lui verser la somme totale de 6 532,17 euros en remboursement des congés annuels non pris, des frais de déplacement et des indemnités dues ainsi que la somme de 15 000 euros au titre de la perte abusive d'emploi et de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1705637 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 janvier 2020 sous le n°20BX00079 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL20079, Mme B..., représentée par Me Bellinzona, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 novembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 juin 2017 par lequel le maire de la commune de A... a procédé à son licenciement en cours de stage ;

3°) de condamner la commune de A... à lui verser la somme totale de 6 532,17 euros en remboursement des congés annuels non pris, des frais de déplacement et des indemnités dues ainsi que la somme de 15 000 euros au titre de la perte abusive d'emploi ;

4°) de mettre à la charge de la commune une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable ;

- la décision par laquelle le maire l'a licenciée est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'une procédure disciplinaire ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ;

- la décision est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- elle a droit à d'obtenir le versement d'une indemnité correspondant à ses congés annuels non pris, ses frais de déplacement, une partie de son régime indemnitaire et de son indemnité de régisseur ;

- elle a également droit au paiement d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte abusive d'emploi.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 avril 2020, la commune de A..., représentée par Me Cayssials, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les conclusions tendant au versement d'une somme de 3 410,13 euros en exécution du contrat d'accompagnement dans l'emploi se rattachent à un litige né de l'exécution d'un contrat de droit privé qui relève du juge judiciaire et que les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de Mme B....

Par une ordonnance du 7 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 25 février 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Oum, substituant Me Cayssials, représentant la commune de A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée par la commune de A... (Tarn-et-Garonne) à compter du 8 juin 2015 jusqu'au 7 juin 2016 dans le cadre d'un " contrat unique d'insertion-contrat d'accompagnement dans l'emploi ", puis à compter du 8 décembre 2016 en qualité d'adjoint administratif de deuxième classe stagiaire. Par un arrêté du 23 juin 2017, le maire l'a licenciée pour insuffisance professionnelle et radiée des effectifs de commune de A.... Mme B... a formé un recours gracieux contre cet arrêté, reçu le 11 aout 2017 par la collectivité, par lequel elle sollicitait également le paiement de diverses sommes qu'elle estimait lui être dues. Mme B... relève appel du jugement du 7 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 23 juin 2017 et sollicitant le versement de sommes qu'elle estimait lui être dues en exécution de son contrat ainsi que l'indemnisation de la perte abusive d'emploi.

Sur l'exception d'incompétence :

2. En vertu de l'article L. 5134-24 du code du travail, le contrat d'accompagnement dans l'emploi est un contrat de travail de droit privé. En conséquence, il appartient en principe à l'autorité judiciaire de se prononcer sur les litiges nés de la conclusion, de l'exécution et de la rupture d'un tel contrat, même si l'employeur est une personne publique gérant un service public à caractère administratif. Toutefois, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la décision de l'autorité administrative compétente accordant l'aide à l'insertion professionnelle au titre du contrat d'accompagnement dans l'emploi ainsi que pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci n'entre en réalité pas dans le champ des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés visées par le code du travail, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire.

3. En sollicitant la condamnation de la commune de A... à lui verser une indemnité au titre des congés annuels non pris en 2016 et au titre des frais de déplacement de 2015 et 2016 pour un montant total de 1 409,13 euros, Mme B... demande la réparation d'un préjudice qu'elle estime avoir subi en lien avec son contrat d'accompagnement dans l'emploi et non celui des conséquences de la rupture de la relation de travail par l'arrêté du maire du 23 juin 2017. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les conclusions tendant au paiement de ces indemnités comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, l'arrêté contesté du 23 juin 2017 vise en particulier la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et le décret n°92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale et indique qu'il est procédé au licenciement de Mme B... pour insuffisance professionnelle au motif de fortes altercations avec une collègue de travail, de nombreux rappels à l'ordre, des relations conflictuelles qui portent atteinte à l'image et au bon fonctionnement du service, à l'incapacité à intégrer une équipe ainsi que plusieurs manquements dans le respect des procédures administratives. Ces considérations sont suffisamment développées pour permettre à l'intéressée de connaître précisément les griefs qui lui sont reprochés. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort des termes de l'arrêté contesté que, pour caractériser l'insuffisance professionnelle de Mme B..., le maire a d'abord retenu que l'intéressée n'avait pas réussi à s'intégrer dans l'équipe au sein de laquelle elle était appelée à exercer ses fonctions, et que son attitude vis-à-vis de l'une de ses collègues avait créé des tensions et perturbé le bon déroulement du service. Si Mme B... conteste la matérialité des difficultés relationnelles et des altercations avec sa collègue, elle ne la remet pas sérieusement en cause en soutenant que les attestations produites au dossier sont postérieures à l'arrêté contesté, ce qui n'est pas en soi de nature à leur ôter leur caractère probant, ou en indiquant qu'elle n'a pas été destinataire de la demande de changement d'affectation de sa collègue du 25 avril 2017. Le maire a également retenu que la manière de servir de Mme B... était insatisfaisante en raison de plusieurs manquements aux règles de procédures administratives notamment des retards dans les déclarations du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA), dans le mandatement de certaines factures et l'absence de réalisation de demandes de subvention. Si Mme B... conteste la matérialité des retards qui lui sont reprochés dans le traitement des mandatements et des demandes de subventions mais admet ne pas avoir traité la demande de remboursement du FCTVA, celle-ci est toutefois établie par les pièces du dossier, en particulier le bordereau de mandat n°40 établi au mois de juin 2017 par la remplaçante et la demande de subvention pour l'opération de mise aux normes du terrain de rugby également constitué au mois d'octobre 2017 par la remplaçante. Par ailleurs, si Mme B... fait valoir que les retards ou les omissions qui lui sont reprochés sont dus à une surcharge de travail associé au fait que sa collègue chargée de la seconder n'avait pas les compétences administratives nécessaires, il est constant que l'agent qui a été recruté et qui occupe le même poste que celui de l'intéressée à temps partiel, a rattrapé le retard cumulé, et que l'agent exerçant désormais ces fonctions n'accuse, pour sa part, pas de retard alors qu'il exerce les mêmes missions. Il résulte de ce qui vient d'être dit que d'une part Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision reposerait sur des faits matériellement inexacts et d'autre part que le maire de la commune de A... a pu, sans erreur d'appréciation, licencier l'intéressée pour insuffisance professionnelle.

6. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision ait été motivée par la volonté du maire de libérer le poste occupé par Mme B... à d'autre fins, ou que ce dernier ait eu l'intention de sanctionner disciplinairement son comportement. Par voie de conséquence, alors que l'intéressée a été informée de son droit d'obtenir la communication de son dossier administratif, de se faire assister par un défenseur de son choix et de formuler des observations orales ou écrites, le moyen tiré de ce que la décision n'a pas été précédée d'une procédure disciplinaire ne peut qu'être écarté. Mme B... ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer le caractère abusif du recours par la commune aux contrats d'accompagnement à l'emploi, sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.

7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2017 ne peuvent qu'être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, de ses conclusions à fin d'injonction et, en l'absence d'illégalité fautive, de celles tendant à l'indemnisation du préjudice lié à sa perte d'emploi.

8. Enfin, pas plus en appel que devant le juge de première instance, Mme B... n'apporte de justificatif de nature à établir que la commune, qui le conteste en défense, resterait redevable à son endroit du paiement de congés non pris, de frais de déplacement, d'heures supplémentaires et d'une partie de la prime du régime indemnitaire " fonctions, sujétions, expertise, engagement professionnel " depuis son recrutement en qualité d'adjoint administratif.

9. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 7 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme B... D... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée par la commune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de A... sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à la commune de A....

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de Tarn-et-Garonne, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20TL20079


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL20079
Date de la décision : 12/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-06-01 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Licenciement. - Stagiaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : CAYSSIALS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-04-12;20tl20079 ?
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