Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Sète à lui verser une somme de 650 557,34 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation de ses préjudices et de mettre à la charge de cette commune une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1704489 du 18 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête et l'a condamné à verser à la commune de Sète une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 décembre 2019, sous le n°19MA05572 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 19TL05572, M. A..., représenté par la SCP Vinsonneau-Palies Noy Gauer et associés, agissant par Me Moreau, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 octobre 2019 ;
2°) de condamner la commune de Sète à lui verser une somme de 650 557,34 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Sète une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'illégalité de la décision de licenciement du 7 septembre 2015 pour défaut de motivation a été reconnue par un jugement devenu définitif et est de nature à engager la responsabilité de la commune ;
- ce défaut de motivation a porté atteinte à ses droits de la défense ;
- la décision de le licencier au motif de son insuffisance professionnelle est entachée d'une erreur d'appréciation ;
- son licenciement illégal est à l'origine d'un préjudice financier et d'un préjudice moral ;
- la décision a en réalité été prise en raison des relations conflictuelles entretenues avec la commune.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2020, la commune de Sète, représentée par la SCP SVA, agissant par Me Jeanjean, conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que le montant des prétentions de M. A... soit ramené à de plus justes propositions et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Par une ordonnance du 15 novembre 2021, la clôture d'instruction a été prononcée avec effet immédiat en application des article R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance en date du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°86-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- les observations de Me Moreau représentant M. A... et celles de Me Gimenez représentant la commune de Sète.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., recruté en 2003 par la commune de Sète (Hérault), en tant qu'agent non titulaire pour assurer des fonctions de formateur aux métiers de la boucherie au sein du centre de formation des apprentis Nicolas Albano relevant de cette commune, a été licencié par décision du 7 septembre 2015 du maire pour insuffisance professionnelle. Cette décision a été annulée par un jugement n°1505894 du 9 novembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier devenu définitif. Il a formé, le 19 juillet 2017, une réclamation préalable visant à l'indemnisation de ses préjudices du fait de son licenciement illégal. Sa réclamation ayant été implicitement rejetée, M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Sète à lui verser une somme totale de 650 557,34 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. Par un jugement n° 1704489 du 18 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la responsabilité de la commune de Sète :
2. Si en principe, l'intervention d'une décision illégale constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la collectivité au nom de laquelle cette décision a été prise, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise et pour autant qu'il ne résulte pas spécifiquement de l'irrégularité en cause un préjudice direct et certain pour la personne qui s'estime lésée.
3. D'autre part, le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public contractuel ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé. Une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ces fonctions peut, alors, être de nature à justifier légalement son licenciement.
4. Il est constant que la décision du 7 septembre 2015 par laquelle la commune de Sète a licencié M. A... pour insuffisance professionnelle était entachée d'une insuffisance de motivation et a été annulée pour ce motif par un jugement n° 1505894 du 9 novembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier devenu définitif.
5. Mais il résulte par ailleurs de l'instruction que l'inspectrice de l'éducation nationale en économie gestion a relevé plusieurs insuffisances de nature pédagogique lors de l'inspection qu'elle a réalisée le 25 novembre 2014 au cours d'une séance de commercialisation et de communication assurée par M. A..., devant une classe d'apprentis en deuxième année de certificat d'aptitude professionnelle de boucher. En particulier, l'intervention de M. A... n'a pas été de nature à permettre aux élèves l'acquisition du lexique de la spécialité, ni à les encourager à communiquer de façon professionnelle. Elle était dépourvue de toutes démarches pédagogiques et M. A... ne connaissait pas les compétences et savoir associés au contenu de l'épreuve " préparation à la vente, commercialisation ". La séance était par ailleurs dépourvue de toute préparation sérieuse et approfondie, aucune évaluation n'avait en outre été préparée. Il résulte également du rapport de l'inspecteur de l'éducation nationale du 7 avril 2015 réalisé au cours d'une séance de technologie devant une classe d'apprentis en première année de certificat d'aptitude professionnelle de boucher que les pratiques pédagogiques mises en œuvre par M. A... présentaient toujours des fragilités ne permettant pas de rendre l'ensemble des apprentis actifs, que des difficultés d'animation ont également été relevées, ainsi que des propos manquant de rigueur disciplinaire. Enfin, l'absence de compréhension et de mise en pratique par M. A... de l'évaluation pour pallier les difficultés d'apprentissage des apprentis a également été relevée. Il résulte par ailleurs de ce dernier rapport que M. A... n'a pas intégré et mis en application les conseils qui lui avaient été donnés lors de l'inspection du 25 novembre 2014 ainsi que par l'accompagnateur qui l'a suivi durant deux mois à raison de deux rencontres au mois de février et mars 2015. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que M. A... n'aurait pas bénéficié d'un encadrement adapté ou qu'il aurait demandé en vain à bénéficier d'une ou plusieurs formations. Au demeurant, la circonstance que plus de 86 % des apprentis formés par l'établissement et ayant présenté le diplôme aient obtenu leur certificat d'aptitude professionnelle n'est pas en elle-même de nature à établir que la commune ait apprécié de manière erronée la valeur professionnelle de l'appelant. Par suite, en prononçant le licenciement de M. A... pour insuffisance professionnelle, le maire de Sète n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation.
6. Il ne résulte pas par ailleurs de l'instruction que le licenciement de M. A... procéderait en réalité des relations conflictuelles qu'il entretiendrait avec la commune.
7. Il résulte de ce qui a été énoncé aux points 4 à 6 que la décision du 7 septembre 2015 portant licenciement de M. A... n'est pas illégale pour un autre motif que celui tiré de son insuffisance de motivation. Le maire de la commune de Sète aurait ainsi pu légalement prendre la même décision au terme d'une procédure régulière, ce qu'il a d'ailleurs fait par arrêté du 9 novembre 2015 suffisamment motivé et devenu définitif. Il ne résulte pas au demeurant de l'instruction que l'insuffisance de motivation de la décision du 7 septembre 2015 ait porté atteinte aux droits de la défense de M. A... ou qu'elle lui ait fait prendre une chance de préparer utilement sa défense.
En ce qui concerne les préjudices :
8. Dès lors, les préjudices que l'appelant soutient avoir subis du fait de l'illégalité de son licenciement, ne peuvent être regardés comme la conséquence du vice dont cette décision était entachée. Ses conclusions à fin d'indemnisation fondées sur l'illégalité fautive de cette décision de licenciement doivent, par suite, être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Sète, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. A... C... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune de Sète au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... versera à la commune de Sète une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Sète.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
Mme Arquié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022.
La rapporteure,
C. Arquié
La présidente,
A. Geslan-Demaret
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19TL05572