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17/03/2022 | FRANCE | N°19TL01834

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 17 mars 2022, 19TL01834


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile de construction vente (SCCV) La Distillerie a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, de condamner la commune de Bassan et l'Etat à lui verser une indemnité de 316 676 euros, majorée des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices imputables selon elle à la délivrance et au transfert qu'elle estime fautifs du permis du 7 juillet 2015 de construire un immeuble de 12 logements sur la parcelle cadastrée section AL n° 144 si

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile de construction vente (SCCV) La Distillerie a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, de condamner la commune de Bassan et l'Etat à lui verser une indemnité de 316 676 euros, majorée des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices imputables selon elle à la délivrance et au transfert qu'elle estime fautifs du permis du 7 juillet 2015 de construire un immeuble de 12 logements sur la parcelle cadastrée section AL n° 144 située 13 chemin de la distillerie à Bassan et, d'autre part, d'annuler les décisions rejetant ses demandes indemnitaires préalables.

Par jugement n° 1703135 du 20 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 avril 2019 sous le n° 19MA01834 à la cour administrative d'appel de Marseille puis sous le n° 190TL01834 à la cour administrative d'appel de Toulouse, la SCCV La Distillerie, représentée par Me Boillot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Bassan et l'Etat à lui verser l'indemnité précitée assortie des intérêts de droit à compter du 13 avril 2017 et de la capitalisation des intérêts ;

3°) d'annuler les décisions rejetant ses demandes indemnitaires préalables ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bassan et de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commune a commis une faute en délivrant le permis de construire du 7 juillet 2015 sans tenir compte des risques d'inondation qui auraient dû être appréciés au regard de tous les éléments d'information dont elle disposait alors et, notamment, des documents préparatoires au plan de prévention des risques d'inondation ;

- la commune a également commis une faute en autorisant le 19 février 2016 le transfert de ce permis de construire ;

- les services de l'Etat ont aussi commis une faute lors de l'instruction du permis de construire du 7 juillet 2015 en ne faisant pas état des risques d'inondation ;

- le préjudice subi en raison de l'impossibilité technique de réaliser le projet compte tenu du classement de la parcelle au plan de prévention en zone rouge où toute nouvelle construction est interdite, s'élève à 316 676 euros, soit 171 000 euros de frais engagés pour ce programme immobilier dont 76 000 euros pour l'acquisition du terrain, et un manque à gagner de 145 676 euros, compte tenu du désengagement de la société anonyme " Un toit pour tous ".

Par un mémoire, enregistré le 13 novembre 2019, la commune de Bassan, représentée par Me Gilliocq, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société requérante d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 24 février 2020, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la SCCV La Distillerie.

Vu le jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Fabien, présidente assesseure ;

- les conclusions de Mme Torelli, rapporteure publique ;

- les observations de Me Boillot représentant la SCCV La Distillerie ;

- et les observations de Me Becquerort représentant la commune de Bassan.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 juillet 2015 pris au nom de la commune, le maire de Bassan a délivré à M. A... le permis de construire un immeuble de douze logements en R+1 et R+2, le rez-de-chaussée étant réservé au stationnement de véhicules, sur une parcelle de 895 m², cadastrée section AL n° 144, située 13 chemin de la Distillerie et bordée par le ruisseau de la Rendoise, Ce permis était assorti de prescriptions relatives au risque d'inondation qualifié de moyen. M. A... déposait le 16 octobre 2015 une demande de permis de construire modificatif prévoyant notamment l'aménagement de logements en rez-de-chaussée et la création d'un second bâtiment à usage de garages. Par un second arrêté du 20 janvier 2016, le maire de Bassan a, en se fondant sur l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et le risque d'inondation, refusé de délivrer ce permis de construire modificatif, le projet ayant donné lieu le 21 décembre 2015 à un avis défavorable du service Eau et nature de la direction départementale des territoires et de la mer de l'Hérault. Cet avis relevait que si la parcelle était classée en aléa modéré par le plan de prévention du risque inondation en cours d'élaboration, l'aléa devait être requalifié de fort, le terrain se situant, selon le plan topographique fourni au dossier, à une altitude moyenne de 78 m, variant entre 77,30 m et 80,26 m et étant susceptible d'être recouvert par une hauteur d'eau en crue centennale comprise entre 1,25 m et 2 m, la cote des plus hautes eaux (PHE) ayant été estimée à 79,25 m. Le 20 janvier 2016, la SCCV La Distillerie, qui avait acquis par acte du 22 décembre 2015 cette parcelle de la société coopérative agricole de distillation Les Vignerons de Bassan, demandait le transfert du permis de construire initial qui était autorisé par arrêté du maire de Bassan du 19 février 2016. Enfin, par arrêté du 26 mai 2016, le préfet de l'Hérault approuvait le plan de prévention du risque inondation qui classe la parcelle au sein d'une zone rouge d'aléa fort où sont interdites les constructions nouvelles. La requête de la SCCV La Distillerie à l'encontre de cet arrêté en tant qu'il procède à ce classement a été rejetée par jugement n° 1606398 du tribunal administratif de Montpellier le 5 juin 2018. Par le jugement n° 1703135 du 20 février 2019 dont la SCCV La Distillerie fait appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation de l'Etat et de la commune de Bassan à lui verser une indemnité de 316 676 euros, majorée des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices imputables selon elle à la délivrance et au transfert qu'elle estime fautifs du permis de construire du 7 juillet 2015 et, d'autre part, d'annuler les décisions rejetant ses demandes indemnitaires préalables.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. La société requérante se prévaut de l'étude réalisée en mars 2012 par la société Egis Eau à la demande du préfet de l'Hérault dans le cadre de l'élaboration du plan de prévention du risque inondation pour soutenir que les services instructeurs et le maire de Bassan étaient en mesure de connaître l'ampleur de l'aléa d'inondation dès la délivrance du permis de construire initial. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que les cotes topographiques du terrain étaient précisées sur les plans fournis à l'appui de la demande initiale de permis de construire et si l'étude précitée mentionnait en pages 44 et 45 des risques de débordements de la Rendoise dans le secteur du chemin de la distillerie en faisant état de cotes PHE variant entre 69,21 m et 81,91 m entre les nœuds P 109 et P 118, et notamment d'une cote de 79,06 au P 116, il ne ressort pas de la lecture des 47 pages de cette étude produites par la société requérante qu'elle permettait de localiser avec exactitude le P 116 et d'identifier celui-ci comme englobant la parcelle cadastrée section AL n° 144. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le maire de Bassan et, en tout état de cause, les services de l'Etat auraient commis une faute à l'occasion de la délivrance le 7 juillet 2015 du permis de construire un immeuble de douze logements en R+1 et R+2 sur cette parcelle qui n'était alors classée qu'en zone d'aléa modéré au plan de prévention en cours d'élaboration.

3. La société requérante n'établit pas plus que le maire de Bassan et les services de l'Etat auraient commis une faute en autorisant le 19 février 2016 le transfert du permis initial qu'elle avait sollicité à son profit, un tel transfert n'étant subordonné qu'aux conditions que le permis initial soit toujours en cours de validité et que son titulaire soit d'accord sur le transfert, conditions dont il n'est pas contesté qu'elles étaient remplies en l'espèce.

4. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la SCCV La Distillerie demande sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat et de la commune de Bassan qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions du même article, de mettre à la charge de la société requérante le versement à la commune de Bassan d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion du litige.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SCCV La Distillerie est rejetée.

Article 2 : La SCCV La Distillerie versera une somme de 1 500 euros à la commune de Bassan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile de construction vente La Distillerie, à la commune de Bassan et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Barthez, président de chambre,

Mme Fabien, présidente assesseure,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.

La rapporteure,

M. Fabien

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion du territoire et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19TL01834


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19TL01834
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-05-01 Responsabilité de la puissance publique. - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. - Services de l'urbanisme. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Mathilde FABIEN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SCP N. BEDEL DE BUZAREINGUES G. BOILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-03-17;19tl01834 ?
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