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19/06/2025 | FRANCE | N°23PA02972

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 19 juin 2025, 23PA02972


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) FNPI a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt pour investissements réalisés en Corse prévu par l'article 244 quater E du code général des impôts pour un montant de 410 614 euros au titre de l'année 2014, majoré des intérêts de retard au taux légal.



Par un jugement n° 2014258/1-2 du 9 mai 2023 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
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Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 6 juill...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) FNPI a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt pour investissements réalisés en Corse prévu par l'article 244 quater E du code général des impôts pour un montant de 410 614 euros au titre de l'année 2014, majoré des intérêts de retard au taux légal.

Par un jugement n° 2014258/1-2 du 9 mai 2023 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 6 juillet 2023 et le 26 juillet 2024, la SARL FNPI, représentée par Me Colin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2014258/1-2 du 9 mai 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt pour investissements réalisés en Corse prévu par l'article 244 quater E du code général des impôts pour un montant de 410 614 euros au titre de l'année 2014, majoré des intérêts de retard au taux légal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour avoir omis de statuer sur le moyen tiré de l'invocation de la jurisprudence, sur le moyen tiré de la règle prétorienne permettant les régularisations et sur le moyen tiré de ce qu'elle n'avait choisi aucune option lors de sa déclaration ;

- il a insuffisamment motivé sa réponse aux moyens soulevés ;

- sa réclamation a été valablement formée le 13 décembre 2017 par un cabinet comptable disposant d'un mandat régulier ;

- l'article 49 septies WB de l'annexe III au code général des impôts ne fait pas obstacle à une réclamation contentieuse visant à régulariser sa situation au terme du délai prévu pour accomplir la formalité déclarative ;

- l'article 244 quater E du code général des impôts ne prévoit aucun délai de forclusion ;

- elle n'a sollicité le bénéfice d'aucun dispositif dans sa déclaration de résultat et ne pouvait donc être regardée comme ayant formulé une option ;

- elle remplissait les conditions pour bénéficier du crédit d'impôt compte tenu de son activité para-hôtelière et de sa connaissance de l'achèvement des travaux à compter du 1er février 2014.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 avril 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable dès lors que la réclamation était tardive ;

- l'activité exercée par la requérante n'est pas éligible au crédit d'impôt de l'article 244 quater E du code général des impôts ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société FNPI, qui exerce une activité de location de terrains et autres biens immobiliers, a sollicité, par une réclamation du 13 décembre 2017, la restitution d'un crédit d'impôt auquel elle estimait avoir droit au titre de l'année 2014 à raison d'investissements réalisés et exploités en Corse pour un montant de 410 614 euros, en application de l'article 244 quater E du code général des impôts. L'administration fiscale a rejeté cette demande le 9 juillet 2020. La société FNPI relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de ce crédit d'impôt.

Sur la régularité du jugement :

2. Le tribunal, qui n'est pas tenu de répondre à tous les arguments avancés au soutien d'un moyen, tels que l'invocation de la jurisprudence, de la règle prétorienne permettant les régularisations et de ce que la requérante n'avait choisi aucune option lors de sa déclaration, a suffisamment répondu au moyen, soulevé par la requérante et tiré de ce que sa réclamation du 13 décembre 2017 n'était pas tardive, dans ses points 3 et 5. La requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé ni qu'il aurait omis de statuer sur certains moyens.

Sur le droit à restitution d'un crédit d'impôt :

3. Aux termes de l'article 244 quater E du code général des impôts : " 1° Les petites et moyennes entreprises relevant d'un régime réel d'imposition peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des investissements, autres que de remplacement, financés sans aide publique pour 25 % au moins de leur montant, réalisés (...) et exploités en Corse pour les besoins d'une activité industrielle, commerciale, artisanale, libérale ou agricole (...). / 3° Le crédit d'impôt prévu au 1° est égal à 20 % du prix de revient hors taxes (...) : / a. Des biens d'équipement amortissables selon le mode dégressif en vertu des 1 et 2 de l'article 39 A (...) / b. Des biens, agencements et installations visés au a pris en location, au cours de la période visée au 1°, auprès d'une société de crédit-bail (...) II. - Les dispositions du présent article s'appliquent sur option de l'entreprise à compter du premier jour de l'exercice ou de l'année au titre duquel elle est exercée. Cette option emporte renonciation au bénéfice des régimes prévus aux articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 quindecies, 44 sexdecies et 44 septdecies. Elle est irrévocable. (...) ". L'article 49 septies WB de l'annexe III à ce même précise que : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater E du code général des impôts, les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés déposent auprès du comptable de la direction générale des finances publiques du lieu d'imposition défini à l'article 218 A du code précité une déclaration spéciale avec le relevé de solde mentionné à l'article 360 de l'exercice ou de la période d'imposition en cours lors de la réalisation de l'investissement. (...) / L'option prévue au premier alinéa du II de l'article 244 quater E précité est réputée exercée au moment du dépôt de la déclaration spéciale mentionnée au premier alinéa au titre du premier exercice ou de la première période d'imposition au cours de laquelle un investissement éligible au crédit d'impôt pour investissement en Corse est réalisé ". Enfin, aux termes de l'article 360 de ladite annexe : " La liquidation de l'impôts sur les sociétés mentionnées au 2 de l'article 1668 du code général des impôts est réalisée par le redevable et détaillée sur un relevé de solde dont le modèle est fourni par l'administration, daté et signé de la partie versante et indiquant la nature du versement, son échéance, les éléments de liquidation, ainsi que la désignation et l'adresse du principal établissement de l'entreprise. (...) ", l'article 360 bis de la même annexe disposant que : " (...) Le dépôt du relevé de solde est effectué au plus tard le 15 du quatrième mois qui suit la clôture de l'exercice ou, si aucun exercice n'est clos en cours d'année, le 15 mai de l'année suivante ".

4. Les dispositions qui prévoient que le bénéfice d'un avantage fiscal est demandé par voie déclarative n'ont, en principe, pas pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, sauf si la loi a prévu que l'absence de demande dans le délai de déclaration entraîne la déchéance du droit à cet avantage, ou lorsqu'elle offre au contribuable une option entre différentes modalités d'imposition dont la mise en œuvre impose nécessairement qu'elle soit exercée dans un délai déterminé.

5. Il résulte des dispositions combinées de l'article 244 quater E du code général des impôts et des articles 49 septies WB, 360 et 360 bis de l'annexe III à ce code, d'une part, que le bénéfice du crédit d'impôt pour investissements en Corse dépend d'une option irrévocable dont la mise en œuvre doit être exercée par le dépôt d'une déclaration spéciale en même temps que le relevé de solde d'impôt sur les sociétés, soit au plus tard le 15 mai de l'année qui suit la clôture de l'exercice au titre duquel le crédit d'impôt est sollicité, et d'autre part que l'exercice de cette option emporte renonciation au bénéfice de différents régimes d'exonération d'impôt dont peuvent bénéficier les entreprises exerçant leur activité en Corse, listés par l'article 244 quater E. En conséquence, et même si ces dispositions législatives et réglementaires n'ont pas prévu que l'absence de demande dans le délai de déclaration entraînait la déchéance du droit à cet avantage, dès lors qu'elles offrent au contribuable une option entre différentes modalités d'imposition dont la mise en œuvre impose nécessairement que cette option fiscale soit exercée dans un délai déterminé, le défaut de dépôt de la déclaration spéciale dans le délai imparti ne peut faire l'objet d'une régularisation dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales.

6. En l'espèce la société civile d'attribution Les Trois Cœurs Sperone, dans laquelle la société FNPI détenait 30 parts sur 100, a construit sur un terrain à bâtir situé en Corse trois villas avec piscine et les dépenses de construction ont été financées par les fonds apportés par ses trois associés, dont la société FNPI, à hauteur de leurs droits dans le capital. A l'achèvement des travaux de construction, la société civile d'attribution Les Trois Cœurs Sperone a été dissoute et la société FNPI est devenue propriétaire d'une des trois villas par acte de dissolution-partage du 16 septembre 2014. La requérante a déposé le 13 décembre 2017 une réclamation demandant, en application des dispositions précitées du code général des impôts, le remboursement d'un crédit d'impôt auquel elle estimait avoir droit à raison des investissements réalisés, à l'occasion de cette opération de construction, au titre de l'année 2014 pour un montant de 410 614 euros. L'administration fiscale a rejeté cette demande le 9 juillet 2020 au motif que cette réclamation avait été déposée tardivement.

7. Il résulte de ce qui est jugé au point 5 que pour bénéficier du crédit d'impôt sollicité au titre de l'année 2014, la société FNPI aurait dû, compte tenu de la date de clôture de son exercice, exercer l'option prévue par l'article 244 quater E avant le 15 mai 2015. Or, il est constant que, lors du dépôt de sa déclaration de résultats pour 2014, le 24 avril 2015, la requérante n'a pas joint la déclaration spéciale mentionnée à l'article 49 septies WB de l'annexe III au code général des impôts et n'avait donc pas pas opté pour le crédit d'impôt prévu par l'article 244 quater E du même code. Dans ces conditions, en l'absence d'option dans les délais prévus par les dispositions précitées, l'administration était fondée à rejeter la demande de restitution présentée par la société FNPI le 13 décembre 2017.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense, que la société FNPI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société FNPI est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société FNPI et à la ministre chargée des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Zeudmi-Sahraoui, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juin 2025.

La rapporteure,

P. HamonLa présidente,

V. Chevalier-Aubert

La greffière,

C. Buot La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA02972


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02972
Date de la décision : 19/06/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : COTAX CABINET D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-19;23pa02972 ?
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