Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 par lequel le préfet de police a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.
Par un jugement n° 2326757 du 24 avril 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et une enregistrés les 23 mai et 25 juin 2024, Mme A..., représentée par Me Cabot, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 19 juin 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et de lui délivrer dans tous les cas, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Cabot sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que son avocate renonce au bénéficie de la part contributive de l'Etat.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il est entaché d'insuffisance de motivation et d'omission à statuer ;
- la décision de refus de séjour méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2025, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Saint-Macary a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante camerounaise née le 25 novembre 1984, est entrée en France le 11 mars 2020 selon ses déclarations. Elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 19 juin 2023, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ne ressort pas du dossier de première instance que Mme A... aurait soulevé, dans ses écritures, le moyen tiré de ce que la décision refusant de l'admettre au séjour méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en ne visant pas ce moyen et en n'y répondant pas.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".
4. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une extrême gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, elle pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est atteinte du VIH et suivait, à la date de la décision contestée, un traitement à base des médicaments Truvada et Isentress, dont elle n'allègue pas, devant la Cour, l'indisponibilité dans son pays d'origine. Au surplus, les pièces produites en première instance relatives, pour l'une, à la situation dans le seul district de Meyomessala, pour l'autre, à l'existence d'un risque de rupture du traitement en cas de retour dans son pays d'origine, sans que cette affirmation ne soit assortie d'aucun motif, ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'OFII sur la disponibilité d'un traitement dans son pays d'origine, pas plus que la circonstance qu'une rupture d'approvisionnement aurait eu lieu en 2019 en raison de l'absence de paiement dans les délais, par le Cameroun, de sa contribution au Fonds mondial. Il ressort en outre des pièces du dossier que les traitements antiviraux sont gratuits au Cameroun dans les hôpitaux. Si Mme A... soutient avoir dû changer de traitement, postérieurement à la décision contestée, en raison des effets secondaires de ce traitement, elle ne justifie pas de la réalité de ces effets indésirables. Par ailleurs, la circonstance que depuis l'édiction de la décision contestée, elle bénéficie d'un nouveau traitement, à base de Biktarvy, qui serait davantage compatible avec son projet de grossesse et que l'une des composantes ne serait pas disponible au Cameroun est sans incidence sur la légalité de cette décision. Enfin, si la requérante soutient que les personnes séropositives font l'objet de discriminations au Cameroun, le rapport des Nations Unies de 2002 dont elle se prévaut est ancien, et il ne ressort pas de la note de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 11 février 2020 relative à la discrimination des personnes séropositives que ces personnes ne pourraient, en raison de leur stigmatisation, accéder de manière effective à un traitement. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant d'admettre Mme A... au séjour.
5. En second lieu, si Mme A... déclare, dans sa requête, qu'elle démontrera, à l'occasion d'un mémoire complémentaire, que la décision refusant de l'admettre au séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte, dans son mémoire complémentaire, aucun élément en ce sens. Il ressort au demeurant des pièces du dossier que l'intéressée, qui ne se prévaut d'aucune attache en France ni d'aucune insertion, y est entrée récemment, à l'âge de 35 ans. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 19 juin 2023. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 9 mai 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Doumergue, présidente de chambre,
M. Mantz, premier conseiller,
Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2025.
La rapporteure,
M. SAINT-MACARY
La présidente,
M. DOUMERGUE
La greffière,
E. FERNANDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA02306