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30/05/2025 | FRANCE | N°23PA03812

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 4ème chambre, 30 mai 2025, 23PA03812


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 14 juin 2022 par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) a refusé de lui reconnaitre la qualité de combattant.



Par un jugement n° 2215343/6-2 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et d

es mémoires, enregistrés le 22 août 2023, le 16 octobre 2023, le 6 décembre 2023, le 2 avril 2024 et le 17 mai 2024, M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 14 juin 2022 par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) a refusé de lui reconnaitre la qualité de combattant.

Par un jugement n° 2215343/6-2 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 août 2023, le 16 octobre 2023, le 6 décembre 2023, le 2 avril 2024 et le 17 mai 2024, M. C..., représenté par Me Legrand, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 14 juin 2022 de l'ONAC-VG ;

3°) d'enjoindre à l'ONAC-VG de lui reconnaître la qualité de combattant et de lui délivrer la carte de combattant, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'ONAC-VG une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou à lui verser directement à défaut d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision de l'ONAC-VG est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que la Commission nationale de la carte du combattant était irrégulièrement composée ;

- la décision méconnaît les articles L. 311-1, R. 311-9 et R. 311-13 du code des pensions militaires et des victimes de guerre et est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il établit avoir appartenu à une unité de l'armée française pendant plus de quatre mois.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 novembre 2023 et le 29 avril 2024, l'ONAC-VG conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 août 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 16 septembre 2024.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- l'arrêté du 5 novembre 2012 portant organisation du service historique de la défense,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bruston,

- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,

- et les observations de Me Alemany substituant Me Legrand, représentant M. C..., et de Me Rouland, représentant l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant algérien né le 24 mars 1944 à Batna, a sollicité auprès de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) la reconnaissance de la qualité de combattant. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 14 juin 2022 par laquelle la directrice générale de l'ONAC-VG a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de cette qualité.

Sur le bien-fondé de la demande :

2. Aux termes de l'article L. 311-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ont vocation à la qualité de combattant les militaires des armées françaises qui ont participé à la guerre 1939-1945, aux guerres d'Indochine et de Corée, à la guerre d'Algérie et aux combats en Tunisie et au Maroc, les membres des forces supplétives françaises, les personnes civiles qui, en vertu des décisions des autorités françaises, ont participé aux opérations au sein d'unités françaises, ainsi que les Français ayant pris une part effective aux combats aux côtés de l'armée républicaine espagnole durant la guerre civile. / La reconnaissance de la qualité de combattant dans les conditions prévues par le présent chapitre donne lieu à l'attribution de la carte du combattant. ". L'article R. 311-9 du même code dispose : " I. - Sont considérés comme combattants les militaires des armées françaises, les personnes civiles qui, en vertu des décisions des autorités françaises, ont participé aux opérations au sein d'unités françaises et les membres des forces supplétives françaises mentionnés au II qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord jusqu'au 2 juillet 1962 inclus : (...) 3° En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / II. - Sont considérées comme combattants au sens du I les personnes : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une des formations supplétives énumérées par décret et assimilées à une unité combattante ;/ 2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; (...) ". Selon l'article R. 311-13 de ce code : " Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre des pays mentionnés au I de l'article R. 311-9 est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au 2° du II du même article, y compris lorsque ces services se sont poursuivis au-delà du 2 juillet 1962 dès lors qu'ils n'ont connu aucune interruption. ".

3. Il résulte des dispositions citées au point précédent, d'une part, que sont considérés comme combattants, pour les opérations effectuées en Algérie entre le 31 octobre 1954 et le 2 juillet 1962 inclus, notamment les personnes ayant appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation assimilée à une unité combattante et, d'autre part, que pour une personne ayant servi en Algérie, une durée de quatre mois de services dans ce pays est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat requises.

4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'attestation du docteur A..., directeur départemental de la santé par intérim, du 31 août 1962, produite par M. C... et dont l'authenticité n'est pas sérieusement contestée, que l'intéressé a travaillé en qualité d'aide-soignant auprès de l'assistance médicale gratuite (AMG) de la cité Chikki à compter de septembre 1961, alors qu'il était âgé de 17 ans, soit durant une période supérieure à quatre mois. Il ressort également des pièces du dossier, en particulier d'un rapport du capitaine D..., chef de la section administrative spécialisée (SAS) de Bouakal, du 12 mars 1962, conservé par le service des archives historiques de la défense à Vincennes, que l'AMG de la cité Chikki, installée au sein des locaux de la SAS de Bouakal, à Batna, était placée " sous la direction et responsabilité d'un docteur militaire, avec à son service des infirmières municipales ". Dès lors, l'AMG de la cité Chikhi, dépendant de la SAS de Bouaka, sous commandement militaire, devait être considérée comme faisant partie d'une unité de l'armée française en 1961. M. C... remplit ainsi, contrairement aux motifs de la décision contestée, la condition de services et de durée posée par les dispositions précitées du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre lui ouvrant droit à la reconnaissance de la qualité de combattant.

5. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Compte tenu du motif qui a été retenu pour annuler la décision refusant à M. C... la qualité de combattant, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que la qualité de combattant soit reconnue à M. C... et que la carte du combattant soit attribuée à ce dernier. Dès lors, il y a lieu de prescrire à l'ONAC-VG de délivrer à l'intéressé la carte du combattant dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais de l'instance :

7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Legrand, avocat du requérant, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de ces dispositions. Les conclusions présentées par l'ONAC-VG au titre des frais de l'instance ne peuvent, en revanche, qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2215343/6-2 du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Paris et la décision du 14 juin 2022 de l'ONAC-VG sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à l'ONAC-VG de délivrer une carte de combattant à M. C... dans le délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Legrand la somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Les conclusions de l'ONAC-VG présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B... C... et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre.

Délibéré après l'audience du 9 mai 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Doumergue, présidente,

Mme Bruston, présidente assesseure,

Mme Saint-Macary, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2025.

La rapporteure,

S. BRUSTON

La présidente,

M. DOUMERGUE

La greffière,

E. FERNANDO

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA03812 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03812
Date de la décision : 30/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: Mme Servane BRUSTON
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : SCP MATUCHANSKY- POUPOT - VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-30;23pa03812 ?
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