La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2025 | FRANCE | N°23PA05163

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 21 mai 2025, 23PA05163


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SCI La Licorne a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté n° 21-0396 du 9 août 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a enjoint de faire cesser la mise à disposition à des fins d'habitation du local situé dans les combles au 2ème étage, porte droite, lot n°7 du bâtiment de l'immeuble sis 63 rue Degeyter à Aulnay-sous-Bois, de supprimer les équipements sanitaires et la cuisine au départ des occupants actuels et de reloger ces dern

iers dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêté.



Par un ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI La Licorne a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté n° 21-0396 du 9 août 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a enjoint de faire cesser la mise à disposition à des fins d'habitation du local situé dans les combles au 2ème étage, porte droite, lot n°7 du bâtiment de l'immeuble sis 63 rue Degeyter à Aulnay-sous-Bois, de supprimer les équipements sanitaires et la cuisine au départ des occupants actuels et de reloger ces derniers dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêté.

Par un jugement n° 2111521 du 16 novembre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 décembre 2023 et le 9 janvier 2024, la SCI La Licorne, représentée par Me Morosoli, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 novembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 août 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché de vices de procédure, faute de respect de son caractère contradictoire et en raison de la partialité des agents du service de l'hygiène de la commune ;

- les caractéristiques du local dont elle est propriétaire répondent aux dispositions de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent ;

- la décision contestée est entachée d'erreurs de fait et d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2025, la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 décembre 1980 portant règlement sanitaire départemental ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jayer,

- et les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI La Licorne est propriétaire depuis juin 2019 d'un local aménagé dans les combles, au 2ème étage d'un immeuble situé 63 rue Degeyter à Aulnay-sous-Bois. Par un arrêté du 9 août 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a enjoint d'en faire cesser la mise à disposition à des fins d'habitation, de supprimer les équipements sanitaires et la cuisine au départ de ses occupants et de reloger ces derniers dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêté. La SCI La Licorne relève appel du jugement du 16 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique : " Tout local, installation, bien immeuble ou groupe de locaux, d'installations ou de biens immeubles, vacant ou non, qui constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé, exploité ou utilisé, un danger ou risque pour la santé ou la sécurité physique des personnes est insalubre (...) ". L'article L. 1331-23 du même code applicable à la date du présent arrêt dispose par ailleurs que : " Ne peuvent être mis à disposition aux fins d'habitation, à titre gratuit ou onéreux, les locaux insalubres dont la définition est précisée conformément aux dispositions de l'article L. 1331-22, que constituent les caves, sous-sols, combles, pièces dont la hauteur sous plafond est insuffisante, pièces de vie dépourvues d'ouverture sur l'extérieur ou dépourvues d'éclairement naturel suffisant ou de configuration exiguë, et autres locaux par nature impropres à l'habitation (...) ". D'autre part, selon les articles 24A, 28A, B 34, 41A, B et C du règlement sanitaire départemental (RSD) de la Seine-Saint-Denis, l'une au moins des pièces principales du logement doit avoir une superficie supérieure à 9 m² et les autres pièces d'habitation une surface d'au moins de 7 m², sans que soit prise en compte les parties d'une largeur inférieures à 2 m ; par ailleurs, la hauteur sous plafond doit être de 2,20 m minimum. Il en résulte qu'il est également interdit d'habiter dans les combles et pièces dépourvues d'ouvertures, que l'éclairement naturel au centre des pièces principales doit être suffisant, disposer d'un prospect devant une baie au moins égal à 2 m et que la position de sa surface doit être transparente afin de permettre la vue horizontale vers l'extérieur. Enfin, tout ce qui peut être source d'humidité et de condensation excessive dans un local d'habitation doit être évité, recherché et supprimé dans les plus brefs délais ; le renouvellement et la pénétration de l'air et de la lumière doivent, enfin, y être assurés afin de supprimer les sources de problèmes broncho-pulmonaires, de pathologies allergiques et respiratoires, d'aggravation de l'asthme, d'irritations des muqueuses et des yeux et d'inconfort thermique. Le recours en annulation contre une mise en demeure du préfet de faire cesser la mise à disposition de locaux insalubres et de reloger les occupants est un recours de pleine juridiction. Il appartient par suite au juge qui en est saisi de se prononcer sur le caractère impropre à l'habitation des locaux en cause, en tenant compte de la situation existante à la date à laquelle il statue.

3. En premier lieu, les moyens tirés de vices de procédures entachant la décision contestée pour méconnaissance de son caractère contradictoire et manquement aux règles d'impartialité doivent être écartés par adoption des motifs retenus par le premier juge aux points 4 et 5 et de son jugement.

4. En deuxième lieu, la circonstance, au demeurant non établie au vu des pièces produites, que le local concerné disposerait d'un volume habitable supérieur à 20 mètres cubes conformément aux dispositions, régissant les seuls rapports entre les propriétaires bailleurs et les locataires, de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent, est sans incidence sur l'appréciation de son habitabilité au sens des dispositions précitées du code de la santé publique.

5. En dernier lieu, si un local ne saurait être qualifié d'impropre par nature à l'habitation au seul motif qu'il méconnaîtrait l'une des prescriptions du règlement sanitaire départemental applicable, lequel n'a pas pour objet de définir les modalités d'application des dispositions de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique, il appartient toutefois à l'administration, pour apprécier si tel est le cas, de prendre en compte toutes les caractéristiques de celui-ci, notamment celles qui méconnaissent les prescriptions de ce règlement.

6. En l'espèce, il résulte de l'instruction, notamment du rapport de visite du 29 juin 2021 de l'inspecteur assermenté de salubrité du service communal d'hygiène et de santé de la ville d'Aulnay-sous-Bois, que le logement en cause, d'une superficie totale de 24,9 m², ne dispose que d'une surface habitable de 15,4 m² sous hauteur de plafond supérieure à 2,20 m ; que la surface de la pièce principale, mansardée et en partie occupée par le coin cuisine, n'est que de 7,8 m² sous cette même hauteur et que la largeur de l'unique chambre, de type " couloir ", est inférieure à 2 m, sa surface de 6,7 m² sous une hauteur sous plafond de 2,20 m. A... résulte par ailleurs de ce même rapport que la configuration et le positionnement de la fenêtre de la pièce principale ne permettent pas que cette pièce soit munie d'une baie donnant sur un espace libre, ce qui empêche les occupants d'avoir une vue horizontale sur l'extérieur et qu'enfin, faute d'être suffisamment isolé au niveau thermique et doté d'un système de ventilation efficace et permanent, le local est affecté de problèmes d'infiltrations d'eau, d'humidité, contient des moisissures. Si la SCI La Licorne soutient que la suppression d'une cloison entre la pièce de vie et la chambre permettrait de rendre le local propre à l'habitation, elle n'établit pas que cela remédierait au caractère structurellement inhabitable des lieux, ne justifie en tout état de cause pas avoir procédé à cette destruction. Dans ces conditions, et sans qu'ait d'incidence la circonstance que le local soit désormais inoccupé, compte tenu de sa nature et des désordres constatés, c'est sans commettre d'erreurs de fait ni d'erreur d'appréciation que le préfet de la Seine-Saint-Denis a considéré qu'il était insalubre et a, par suite, enjoint à la SCI La Licorne de faire cesser sa mise à disposition à des fins d'habitation, de supprimer les équipements sanitaires et la cuisine au départ de ses occupants et de reloger ces derniers.

7. Il résulte de ce qui précède que la SCI La Licorne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 août 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI La Licorne est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI La Licorne et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 6 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mai 2025.

La rapporteure,

M-D. JAYERLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

A. LOUNIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA05163


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05163
Date de la décision : 21/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : MOROSOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-21;23pa05163 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award