Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 29 mars 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour.
Par un jugement n° 2207558 du 21 septembre 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 mars 2024 et le 1er novembre 2024,
M. D..., représenté par Me de Sa-Pallix, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2207558 du tribunal administratif de Melun du 21 septembre 2023 ;
2°) d'annuler la décision du 29 mars 2022 du préfet de Seine-et-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de résident sur le fondement des disposions de l'article L. 424-1, ou une carte portant la mentions " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions des articles L. 423-7, L. 423-8 ou L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé ou une autorisation provisoire de séjour, l'autorisant à travailler ;
4°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, de lui délivrer un récépissé ou une autorisation provisoire de séjour, l'autorisant à travailler, dans un délai de sept jours, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du
10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une omission à statuer ;
- il est entaché d'erreur de droit et d'appréciation ;
Sur la régularité et la légalité de la décision du 29 mars 2022 :
- la décision est entachée de l'incompétence de son signataire ;
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu ;
- elle est entachée d'un vice de procédure tiré de ce que le préfet de la Seine-et-Marne a méconnu les dispositions de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'erreur de fait ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la menace à l'ordre public qu'il représenterait ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 424-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de A... en date du 24 janvier 2024.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2024, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Vinot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant angolais né le 16 aout 1990, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié sur la base du principe de l'unité de famille par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 26 avril 2024, ses parents ayant été reconnus réfugiés à titre principal. Par une décision du 12 janvier 2021 le directeur général de l'OFPRA, constatant que M. D... a été condamné à de multiples reprises, notamment par le tribunal pour enfants de A..., le 21 octobre 2004 pour des faits de violence, port d'arme et extorsion aggravés, le 21 avril 2005 pour des faits de rébellion en réunion, le 17 janvier 2006 pour des faits d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique, le 15 février 2007 pour des faits de violence dans ou aux abords d'un établissement scolaire et détention non autorisée de stupéfiants, le 20 décembre 2007 pour des faits de violence sur agent des chemins de fer, et plus récemment, à trois ans et demi d'emprisonnement par décision de la cour d'appel de Bordeaux du 15 janvier 2014 pour des actes frauduleux accompagnés de violences, et à onze ans de réclusion criminelle par décision du 19 juin 2015 de la cour d'assises de A... pour des faits de viols aggravés, et considérant en conséquence que sa présence sur le territoire national représente une menace grave pour la société française, a mis fin à son statut de réfugié sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables, selon lesquelles " Le statut de réfugié est refusé ou il est mis fin à ce statut lorsque : (...) / 2° La personne concernée a été condamnée en dernier ressort en France (...) soit pour un crime, soit pour un délit (...)puni de dix ans d'emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société française ". Cette décision de l'OFPRA a été confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 19 novembre 2021.
2. M. D..., qui avait sollicité entretemps la délivrance d'un premier titre de séjour de dix ans en qualité de réfugié sur le fondement de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est vu délivrer deux récépissés successifs de demande de carte de séjour valables, respectivement, du 1er juillet au 30 septembre 2021 et du 12 octobre 2021 au 11 janvier 2022. Par une décision du 29 mars 2022, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de carte de résident. M. D... relève appel du jugement du 21 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
4. D'une part, l'allégation de M. D..., selon laquelle les premiers juges auraient entaché le jugement d'omission à statuer n'est pas assortie de précisions permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé. D'autre part, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à la totalité des arguments présentés à l'appui de ses moyens par le requérant, ont indiqué de manière suffisamment précise les motifs pour lesquels ils ont écarté l'ensemble des moyens présentés par M. D....
5. En second lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, M. D... ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que le tribunal aurait entaché son jugement d'erreurs de droit et d'appréciation pour critiquer la régularité du jugement attaqué.
Sur la légalité externe de la décision contestée :
6. En premier lieu, la décision contestée a été signée par M. C... B..., nommé préfet de Seine-et-Marne par un décret du Président de la République du 30 juin 2021, publié au Journal officiel de la République française du 1er juillet 2021 et qui a pris ses fonctions le 19 juillet suivant. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte, faute de justification d'une délégation de compétence régulière consentie à ce dernier par le préfet de Seine-et-Marne, ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
7. En deuxième lieu, la décision contestée précise que M. D... a sollicité la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des dispositions de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne la décision du 12 janvier 2021 par laquelle l'OPFRA lui a retiré la qualité de réfugié ainsi que la décision du 19 novembre 2021 de la CNDA ayant confirmé cette décision. Elle mentionne en outre les condamnations pénales prononcées à l'encontre de l'intéressé, dont elle tire la conclusion selon laquelle, pour l'application des articles L. 412-5 et L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la présence en France de M. D... représente une menace grave pour l'ordre public. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision manque en fait.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union / 2. Ce droit comporte notamment : / a) le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre / (...) ".
9. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que ces dispositions s'adressent non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. A l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu est ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour.
10. En l'espèce, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que M. D... n'aurait pu apporter toutes les précisions qu'il aurait jugé utiles à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, ni qu'il aurait été empêché de faire valoir toute observation complémentaire utile au cours de l'instruction de sa demande. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse aurait été prise en méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale : " I.- Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, aux articles L. 114-1 (...) du code de la sécurité intérieure (...), les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes (...) peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : (...) / 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'État ". Aux termes de l'article R. 79 du même code : " Outre le cas prévus aux 1°, 2° et 4° de l'article 776, le bulletin n° 2 du casier judiciaire est délivré : 1° Aux administrations publiques de l'Etat chargées de la police des étrangers (...) ".
12. Il ressort des pièces du dossier que la décision contestée est fondée, notamment, sur l'appréciation faite par le préfet de Seine-et-Marne de la menace à l'ordre public que constitue la présence en France de M. D... au regard des condamnations, décidées le 15 janvier 2014 par la cour d'appel de Bordeaux et le 19 juin 2015 par la cour d'assises de A..., et figurant au bulletin n° 2 de son casier judiciaire. Les dispositions de l'article R. 79 du code de procédure pénale citées ci-dessus, qui ajoutent aux cas de délivrance du bulletin judiciaire prévus par l'article 776 du code de procédure pénale, auquel elles renvoient explicitement, conféraient au préfet de Seine-et-Marne, chargé de la police des étrangers dans son département, le droit de demander la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire de M. D..., ainsi qu'il l'a fait avant de prendre sa décision. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale, qui régissent le droit de consulter le fichier du traitement des antécédents judiciaires (TAJ), et non la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire, doit être écarté comme inopérant.
13. En cinquième lieu, le préfet de Seine-et-Marne a, pour prendre la décision contestée, statué sur la demande qui lui avait été présentée par M. D.... Dès lors, ce dernier ne saurait utilement soutenir que cette décision aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, selon lesquelles "Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ".
Sur la légalité interne de la décision contestée :
14. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier des termes mêmes de la décision contestée, que le préfet de Seine-et-Marne a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. D... avant de refuser de lui délivrer la carte de résident dont ce dernier avait demandé la délivrance en qualité de réfugié, sur le fondement de L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A cet égard, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le préfet n'aurait pas procédé à l'examen de sa situation au regard de son droit à se voir délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou une carte de séjour en qualité de père d'un enfant français, dès lors que les pièces qu'il produit ne justifient pas qu'il aurait présenté une demande à cette fin.
15. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-et-Marne aurait entaché la décision contestée d'une erreur de fait n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il ne peut, ainsi, qu'être écarté.
16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la qualité de réfugié a été reconnue en application du livre V se voit délivrer une carte de résident d'une durée de dix ans. ". Aux termes de L. 412-5 de ce code : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident (...)" résident de longue durée-UE " ". Aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ". Eu égard à la multiplicité et à l'extrême gravité des faits pour lesquels il a été condamné, et sans qu'il puisse en minorer la portée en soulignant les regrets qu'il a exprimés ou en faisant état de ce qu'il n'a commis aucun acte susceptible de recevoir une qualification pénale depuis le 30 octobre 2011, dès lors qu'il ne conteste pas qu'il était maintenu en détention depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée, comme le premier juge l'a relevé, et ne justifie d'aucune période significative au cours de laquelle il se serait abstenu de commettre de tels actes quand il était en liberté, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de Seine-et Marne aurait commis une erreur d'appréciation de la menace à l'ordre public que constitue sa présence en France en refusant de lui délivrer une carte de résident sur le fondement de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en outre, et en tout état de cause, qu'à la date de la décision contestée il avait été mis fin à son statut de réfugié par la décision de l'OFPRA du 12 janvier 2021 confirmée par la CNDA le 19 novembre 2021, ainsi que le préfet l'a précisé dans les motifs de la décision contestée.
17. En quatrième lieu, M. D..., qui ne justifie pas avoir présenté une demande de carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ne peut dès lors utilement soutenir que la décision contestée méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas allégué, que M. D... se serait vu délivrer une carte de résident antérieurement à l'édiction de la décision contestée. Par suite, il ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions de l'article
L. 424-6 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, dans leur rédaction alors applicable, selon lesquelles " Lorsqu'il est mis fin au statut de réfugié par décision définitive de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice ou lorsque l'étranger renonce à ce statut, la carte de résident prévue aux articles L. 424-1 et L. 424-3 est retirée. L'autorité administrative statue sur le droit au séjour des intéressés à un autre titre dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat. La carte de résident ne peut être retirée en application du premier alinéa quand l'étranger est en situation régulière depuis au moins cinq ans. ".
19. En sixième lieu, aux termes de l'article de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". M. D... soutient qu'il réside en France depuis 2002, et se prévaut de la présence sur le territoire national de sa compagne et de son enfant de nationalité française, ainsi que de celle de sa mère et de plusieurs frères. Il ajoute qu'il maîtrise la langue française et s'efforce de travailler à sa réinsertion. Cependant, M. D..., alors qu'il était âgé de trente-deux ans à la date de la décision et était détenu en détention depuis plus de dix ans à cette date, ne peut être regardé comme justifiant d'une insertion dans la société française, et ne justifie pas davantage de l'intensité et de la stabilité de liens qu'il aurait entretenus avec son enfant, né le 10 juin 2012, et avec la mère de celui-ci. Dans ces conditions, et compte tenu au surplus de la gravité des faits pour lesquels il a été condamné et de la circonstance que la décision contestée n'a pas pour effet d'éloigner le requérant vers son pays d'origine, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
20. En septième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
21. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée M. D... était détenu en détention depuis plus de dix ans, et que son enfant, né le 10 juin 2012, a été hébergé, pris en charge et élevé par sa mère, quand bien même le requérant aurait participé à son entretien financier dans la faible mesure rendue possible par son incarcération. Dans ces conditions, et alors que la décision contestée n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant du territoire,
M. D... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-et-Marne aurait méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en refusant de lui délivrer une carte de résident.
22. En dernier lieu, dans les circonstances exposées aux points précédents, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. D....
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 mars 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Par suite, ses conclusions à fins d'annulation doivent être rejetées de même que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Delage, président de chambre,
- Mme Vinot, présidente honoraire,
- Mme Julliard, présidente assesseure.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mai 2025.
La rapporteure,
H. VINOTLe président,
Ph. DELAGE
La greffière,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA01209 2