Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du
16 janvier 2024 par lequel le préfet de police a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2403462 du 24 avril 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 mai et 19 novembre 2024, M. B..., représenté par la SELARL Levy Avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 16 janvier 2024 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police ou à tout autre préfet compétent de lui délivrer une convocation pour le réexamen de sa situation administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- la décision de refus de séjour est intervenue en méconnaissance de son droit à être entendu ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa situation ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 7 b) de l'accord franco-algérien du 27 septembre 1968 dès lors qu'il dispose d'un pouvoir de régularisation lui permettant d'attribuer un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas l'ensemble des conditions pour l'obtenir, et il a retenu à tort qu'il constituait une menace à l'ordre public ;
- la décision refusant de l'admettre au séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Saint-Macary a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 28 juin 1983, est entré irrégulièrement en France le 23 décembre 2016 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission au séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article 7 b) de l'accord franco-algérien du
27 décembre 1968. Par un arrêté du 16 janvier 2024, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions :
2. La décision de refus de séjour en litige mentionne les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, et, en particulier, les motifs pour lesquels le préfet de police a estimé que M. B... ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article 7 b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et présentait une menace à l'ordre public. Elle est, par suite, suffisamment motivée. Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation de quitter le territoire français qui accompagne un refus de titre de séjour n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celui-ci.
Sur le refus de séjour :
3. En premier lieu, lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche volontaire, ne saurait ignorer que cette demande est susceptible de faire l'objet d'un refus sans avoir été préalablement convoqué par les services du préfet à un entretien. Par ailleurs, l'étranger peut produire, à l'appui de sa demande et à tout moment de la procédure d'instruction, toutes observations écrites et tous éléments complémentaires susceptibles de venir à son soutien, au besoin en faisant état de nouveaux éléments. Il en découle que M. B... n'a pas été privé de son droit d'être entendu préalablement à la décision refusant de l'admettre au séjour, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union.
4. En deuxième lieu, il ressort des termes de la décision contestée que le préfet de police a procédé à un examen sérieux de la situation de M. B... au regard de sa situation professionnelle et familiale et de son comportement.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 7 b de l'accord franco-algérien du
27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi [ministre chargé des travailleurs immigrés], un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ".
6. D'une part, M. B... ne conteste pas le motif de la décision de refus de séjour contestée tiré de ce qu'il ne remplit pas les conditions pour obtenir, de plein droit, la délivrance d'un certificat de résidence en application des stipulations précitées.
7. D'autre part, bien que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, qui régit de manière complète les conditions d'admission au séjour en France des ressortissants algériens, ne prévoie pas de modalités d'admission exceptionnelle au séjour semblables à celles prévues par l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un préfet peut délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
8. M. B... produit des fiches de paie montrant qu'il a travaillé pour deux sociétés d'intérim du mois d'avril 2019 au mois de mars 2022 en qualité de cariste. La décision contestée mentionne par ailleurs qu'il bénéficie depuis le 14 février 2022 d'un contrat de travail à durée indéterminée pour exercer la fonction de réceptionniste-cariste au sein de la société " La Normandie à Paris ". Il ne justifie toutefois pas de sa présence en France avant 2019, n'y fait état d'aucune attache d'une particulière intensité, et ne conteste pas avoir travaillé sous couvert d'une fausse nationalité et ne pas avoir respecté l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet le 25 novembre 2020, ce qui relativise l'intégration dans la société française dont il se prévaut. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre à titre exceptionnel au séjour.
9. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. Au regard de ce qui a été dit au point 8, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de M. B..., contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, doivent également, par voie de conséquence, être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Doumergue, présidente de chambre,
M. Mantz, premier conseiller,
Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2025.
La rapporteure,
M. SAINT-MACARY
La présidente,
M. DOUMERGUE
La greffière,
A. GASPARYAN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 24PA02316