Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 9 mars 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et lui a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2307429 du 9 avril 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2024, Mme A..., représentée par Me Pinto, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 avril 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 mars 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à Me Pinto au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve pour elle de renoncer à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
-le jugement méconnaît les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été régulièrement communiquée le 26 juillet 2024 au préfet de la Seine-Saint-Denis, lequel n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris du 5 juin 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laforêt, premier conseiller,
- les observations de Me Pinto, représentant Mme A..., présente à l'audience.
Une note en délibéré, enregistrée le 25 mars 2025, a été présentée pour Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., ressortissante ivoirienne née le 1er janvier 1954, est entrée en dernier lieu en France le 4 juin 2009, selon ses déclarations. Elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour le 3 juin 2021. Par un arrêté du 9 mars 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté cette demande, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et l'a interdite de retour pour une durée de deux années. Mme A... fait appel du jugement du 9 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. D'une part, contrairement à ce que semble soutenir Mme A..., le tribunal administratif n'a pas mis en œuvre les dispositions de l'article R. 612-6 du code de justice administrative, de sorte que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas réputé avoir acquiescé aux faits exposés dans la demande de première instance de la requérante. D'autre part, en se bornant à faire état de l'absence de mémoire en défense du préfet, la requérante ne saurait utilement soutenir que le tribunal aurait excédé son office ou aurait méconnu le principe du contradictoire et l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur le droit à un procès équitable.
Sur la légalité de l'arrêté du 9 mars 2023 :
3. Il ressort de l'arrêté attaqué que le préfet a indiqué que l'intéressée est entrée en France le 4 juin 2009, sous couvert d'un visa de circulation autorisant des courts séjours, portant la mention " ascendant non à charge " et valide jusqu'au 22 octobre 2009, qu'elle s'est maintenue en situation irrégulière sur le territoire français après la date de son expiration et qu'elle a fait le 30 juillet 2018 l'objet d'un arrêté préfectoral de refus de séjour du préfet de la Seine-Saint-Denis, assorti d'une obligation de quitter le territoire français, arrêté dont la légalité a été confirmé par un jugement du 29 mars 2019. Pour refuser d'admettre au séjour Mme A... au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a indiqué que sa situation tant personnelle que professionnelle, ne permet pas, au regard des motifs exceptionnels et/ou humanitaires qu'elle avance, son admission au séjour. Le préfet fait valoir que l'intéressée est célibataire, mère d'un enfant majeur de nationalité française et qu'elle ne justifie d'aucun obstacle l'empêchant de mener, dans son pays d'origine, une vie privée et familiale normale. Le préfet a soumis sa demande à la commission du titre de séjour qui a émis le 17 janvier 2023 un avis défavorable au motif que Mme A... ne présente pas de qualification professionnelle, ne décrit pas de projet professionnel et que par ailleurs, étant mère d'un enfant français majeur, elle indique avoir des liens distants avec cette dernière et que l'ensemble de ces éléments ne démontre pas une intégration ou un projet d'intégration sur le territoire national.
4. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Mme A... indique être entrée en France une première fois en 1971, avoir exercé une activité professionnelle de 1972 à 1983, et avoir bénéficié d'une carte de séjour valable de 3 mars 1981 au 2 mars 1984 mais qu'elle a été contrainte de quitter la France en 1984, sans sa fille, afin de fuir son époux violent. Il ressort des pièces du dossier Mme A... est mère d'une fille de nationalité française née en 1974, de sa relation avec son ex compagnon. Si la requérante est entrée de nouveau en France en 2009 et y réside depuis, il est constant qu'elle n'a pas exercé d'activité professionnelle depuis son retour et elle ne justifie pas des liens entretenus avec sa fille de nationalité française et ses petites-filles nées en 2003 et 2007. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'elle démontrerait une intégration suffisamment forte dans la société française quand bien même elle n'aurait plus d'attaches en Côte d'Ivoire où ses parents sont décédés. Dans ces conditions, et alors que la requérante s'est maintenue à la fin de son visa de court séjour et qu'elle a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, la décision du préfet ne méconnait pas les dispositions de l'article L. 435-1 précité ni ne méconnaît les stipulations de l'article 8 précité et n'est dès lors pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. En dernier lieu, il appartient à la requérante, tant en première instance qu'en appel, d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il suit de là que le juge d'appel n'est pas tenu d'examiner un moyen que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel, sans l'assortir des précisions nécessaires. Si Mme A... indique " sans préjudice des moyens soulevés en première instance auxquels nous nous reportons et demandons à conserver le bénéfice ", elle n'apporte pas les précisions nécessaires pour apprécier le bien-fondé de ceux-ci.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de Mme A... à fin d'injonction ainsi que ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- M. Laforêt, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.
Le rapporteur,
E. Laforêt La présidente,
V. Chevalier-AubertLa greffière,
C. Buot
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA03063