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29/04/2025 | FRANCE | N°24PA02885

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 29 avril 2025, 24PA02885


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 11 mai 2024 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois.



Par un jugement n° 2411722/8 du 30 mai 2024, le magistrat désigné par le présid

ent du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du préfet de police du 11 mai 2024, a enjoint a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 11 mai 2024 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois.

Par un jugement n° 2411722/8 du 30 mai 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du préfet de police du 11 mai 2024, a enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de ce jugement ainsi que de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du même jugement, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2024, le préfet de police demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement du 30 mai 2024 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- le motif d'annulation retenu par le tribunal n'est pas fondé ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Desvigne-Repusseau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux arrêtés distincts du 11 mai 2024, le préfet de police a, d'une part, obligé M. A..., ressortissant ivoirien né en 1978, à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et, d'autre part, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois. Le préfet de police fait appel du jugement n° 2411722/8 du 30 mai 2024 en tant que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé ces arrêtés et lui a enjoint de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour ainsi que de procéder au réexamen de sa situation.

Sur le motif d'annulation retenu en première instance :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré / (...) ". L'article R. 431-5 de ce code dispose que " Si l'étranger séjourne déjà en France, sa demande est présentée dans les délais suivants : / 1° L'étranger qui dispose [d'une carte de séjour temporaire] présente sa demande de titre de séjour entre le cent-vingtième jour et le soixantième jour qui précède l'expiration de ce document de séjour lorsque sa demande porte sur un titre de séjour figurant dans la liste mentionnée à l'article R. 431-2. Lorsque sa demande porte sur un titre de séjour ne figurant pas dans cette liste, il présente sa demande dans le courant des deux mois précédant l'expiration du document dont il est titulaire / (...) ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " L'étranger qui demande (...) le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil / 2° Les documents justifiants de sa nationalité / (...) / La délivrance du premier récépissé et l'intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents / (...) ". Aux termes de l'article R. 431-12 du même code : " L'étranger admis à souscrire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé qui autorise sa présence sur le territoire pour la durée qu'il précise (...) ".

3. Pour obliger M. A... à quitter le territoire français, le préfet de police s'est fondé, en s'appuyant sur les dispositions précitées du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur la circonstance que l'intéressé, dont la carte de séjour temporaire arrivait à expiration le 22 novembre 2023, " [n'avait] pas sollicité [le] renouvellement [de son titre de séjour] dans les délais mentionnés aux articles R. 431-4 et suivants du code [précité] et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ". Si, comme l'a relevé le premier juge, M. A... établit, par les pièces produites en première instance, qu'il a été convoqué le 23 octobre 2023 à la préfecture de police afin de présenter la demande de renouvellement de son titre de séjour, le préfet de police indique cependant pour la première fois en appel, sans être contredit sur ce point en l'absence de mémoire en défense produit par l'intéressé, que ce dernier n'a pas déféré à cette convocation. Du reste, aucune des pièces du dossier ne permet d'établir qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. A... disposait du récépissé mentionné à l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant d'attester qu'il se serait effectivement rendu à la préfecture de police pour demander le renouvellement de son titre de séjour avant le terme prévu à l'article R. 431-5 du même code, ni, à tout le moins, que les services de la préfecture de police lui aurait demandé le cas échéant, après son passage au guichet, de nouvelles pièces afin de compléter l'instruction du dossier de sa demande de titre de séjour. Dans ces conditions, le préfet de police a pu, pour ce motif, légalement faire obligation à M. A... de quitter le territoire français sur le fondement des dispositions précitées du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif tiré de ce que M. A... aurait sollicité le renouvellement de son titre de séjour pour annuler la décision du 11 mai 2024 par laquelle il a obligé l'intéressé à quitter le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour par lesquelles il a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois.

4. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les autres moyens soulevés en première instance :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, par l'arrêté n° 2024-00598 du 7 mai 2024, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2024-271 de la préfecture de Paris le même jour, le préfet de police a donné délégation à Mme C..., attachée d'administration de l'Etat, placée sous la responsabilité de la cheffe du bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière, pour signer tous arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions, en cas d'absence ou d'empêchement des autres délégataires, sans qu'il ressorte des pièces du dossier que ces derniers n'aient pas été absents ou empêchés lorsqu'elle a signé l'arrêté attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".

7. La décision attaquée, qui vise les dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. A..., " titulaire d'un titre de séjour temporaire ou pluriannuel arrivé à expiration le 22 novembre 2023, n'a pas sollicité son renouvellement dans les délais mentionnés aux articles R. 431-4 et suivants du code [précité] et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ". Ainsi, cette décision comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, l'autorité administrative n'étant pas tenue de préciser tous les éléments de la situation d'un ressortissant étranger. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

8. En troisième lieu, il résulte des motifs de la décision attaquée comme des pièces du dossier que le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation de M. A.... Par suite, ce moyen doit être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) ".

10. Indépendamment de l'énumération donnée par les articles L. 611-3 et L. 631-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure d'expulsion, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi ou un accord international prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement.

11. M. A... soutient qu'à la date de l'arrêté attaqué, il était en situation de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si l'intéressé a déclaré, lors de son audition par les services de police le 11 mai 2024, alors qu'il était placé en garde à vue depuis la veille, qu'il est " malade des poumons " et qu'il doit " prendre un traitement ", cette allégation n'est toutefois assortie d'aucune pièce médicale pour en attester, alors que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, un médecin de l'unité médico-judiciaire de Paris-Nord a estimé, au terme d'un examen médical du requérant, que l'état de santé de ce dernier était compatible avec une garde à vue dans les locaux de la police, et que, d'autre part, ce médecin lui a seulement prescrit un anxiolytique. En outre, et en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier, ni n'est d'ailleurs allégué, que M. A... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié à la pathologie qu'il invoque dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

13. Si M. A... soutient qu'il est arrivé en France en mai 2008 et qu'il y demeure depuis lors sans discontinuer, il n'en justifie pas suffisamment par les pièces produites en première instance. Par ailleurs, le requérant a déclaré, lors de son audition par les services de police, qu'il est célibataire et sans charge de famille en France, et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine. Dans ces conditions, outre qu'il ne justifie d'aucune insertion particulière dans la société française, la décision attaquée n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

14. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 11 et 13, le préfet de police n'a pas entaché la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. A....

En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

15. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public / (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 de ce code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / 3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français / (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) [ou] qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".

16. En premier lieu, il résulte de ce qui est jugé aux points 5 à 14 que M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

17. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

18. En troisième lieu, la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, l'autorité administrative n'étant pas tenue de préciser tous les éléments de la situation d'un ressortissant étranger. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

19. En quatrième lieu, il résulte des motifs de la décision attaquée comme des pièces du dossier que le préfet de police n'a pas entaché l'arrêté attaqué d'un défaut d'examen de la situation de M. A.... Par suite, ce moyen doit être écarté.

20. En dernier lieu, pour refuser d'octroyer à M. A... un délai de départ volontaire, le préfet de police s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé constitue par son comportement une menace pour l'ordre public, qu'il s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement, qu'il a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où il ne peut présenter de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ni ne justifie d'une résidence effective et permanente. Ainsi, le préfet de police a fondé sa décision sur les dispositions combinées des 1° et 3° de l'article L. 612-2 et des 3°, 4° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, ainsi qu'il est jugé au point 3, que M. A... s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement, le préfet de police a pu légalement fonder sa décision, pour ce seul motif, sur les dispositions combinées du 3° de l'article L. 612-2 et du 3° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le préfet de police ne peut être regardé comme ayant commis une erreur dans l'appréciation du risque que M. A... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français attaquée, ni comme ayant commis une erreur dans l'appréciation de la menace pour l'ordre public que son comportement représenterait. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

21. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays (...) à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ".

22. Il résulte de ce qui est jugé aux points 5 à 14 que M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

23. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision fixant le pays de destination doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

24. En troisième lieu, la décision attaquée par laquelle le préfet de police fixe le pays de destination énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde dès lors qu'elle vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle précise la nationalité ivoirienne de M. A.... Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

25. En quatrième lieu, il résulte des motifs de la décision attaquée comme des pièces du dossier que le préfet de police n'a pas entaché l'arrêté attaqué d'un défaut d'examen de la situation de M. A.... Par suite, ce moyen doit être écarté.

26. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

27. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, les moyens tirés de ce que, en raison de l'état de santé de M. A..., la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation du requérant, doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois :

28. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 612-10 de ce code : " " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français / (...) ".

29. Il ressort des termes mêmes des dispositions citées au point précédent que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

30. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

31. En premier lieu, il résulte de ce qui est jugé aux points 5 à 14 que M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

32. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

33. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a prononcé à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois au motif que, d'une part, alors qu'il a déclaré être entré en France en 2008, l'intéressé est célibataire et sans charge de famille en France et que, d'autre part, sa présence sur le territoire français représente une menace pour l'ordre public dès lors que son comportement a été signalé par les services de police le 10 mai 2024 pour des faits d'acquisition, d'offre, de cession, de détention et d'usage de stupéfiants. Le préfet de police, qui a ainsi rappelé les dispositions applicables à la situation de M. A... et exposé de façon précise les circonstances de fait qu'il a retenues pour prononcer sa décision d'interdiction de retour, a suffisamment motivé cette décision au regard des exigences posées par les dispositions citées au point 28. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.

34. En quatrième lieu, il résulte des motifs de la décision attaquée comme des pièces du dossier que le préfet de police n'a pas entaché l'arrêté attaqué d'un défaut d'examen de la situation de M. A.... Par suite, ce moyen doit être écarté.

35. En dernier lieu, même s'il ressort des pièces du dossier que le requérant a contesté, lors de son audition par les services de police, la matérialité des faits qui lui sont reprochés au point 33, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois serait entachée d'une erreur d'appréciation de sa situation, peut être écarté pour les seuls motifs exposés aux points 11 et 13.

36. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés à l'origine du litige. Par suite, il y a lieu d'annuler les articles 1er et 2 du jugement attaqué et de rejeter, dans cette mesure, la demande de M. A... présentée devant le tribunal administratif de Paris.

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2411722/8 du 30 mai 2024 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris auxquelles il a été fait droit en première instance sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.

Le rapporteur,

M. Desvigne-RepusseauLa présidente,

V. Chevalier-Aubert

La greffière,

C. Buot

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA02885


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02885
Date de la décision : 29/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-29;24pa02885 ?
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