Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) Robert Ballanger à lui verser une somme de 17 142,80 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa prise en charge par cet établissement, assortie des intérêts au taux légal ou, à titre subsidiaire, d'ordonner un complément d'expertise.
Par un jugement n° 2117120 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Montreuil a condamné le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à verser, d'une part, à Mme C... la somme totale de 4 925 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'infection nosocomiale contractée lors de son hospitalisation en octobre 2013, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2021, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis la somme de 32 539, 44 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2022, ainsi que la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, et, a mis à la charge de l'établissement hospitalier la somme de 1 500 euros à verser à Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 juin 2023, Mme C..., représentée par Me Patrigeon, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 20 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a limité à la somme de 4 925 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger en réparation des préjudices qu'elle a subis lors de son hospitalisation en octobre 2013 ;
2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à lui verser la somme de 17 142,80 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis lors de son hospitalisation en octobre 2013, assortie des intérêts au taux légal ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le retard dans le diagnostic de rétention urinaire et, par voie de conséquence, le retard dans sa prise en charge, constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger ;
- elle est fondée à solliciter la condamnation du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger du fait de l'infection nosocomiale contractée pendant son hospitalisation en octobre 2013 ;
- elle a subi, à raison de l'infection nosocomiale contractée :
- un déficit fonctionnel temporaire du 24 septembre 2013 au 25 octobre 2013, du 7 au 8 novembre 2013 et du 9 au 15 novembre 2015, dont la réparation doit être évaluée, sur la base d'un coût horaire journalier de 20 euros, soit une somme totale de 820 euros,
- des souffrances, évaluées à 2 sur une échelle de 7 par les experts judiciaires, qui doivent être indemnisées à hauteur de 2 500 euros,
- un déficit fonctionnel permanent de 3 % dont la réparation, eu égard à son âge le jour de la consolidation, doit être évaluée à 3 600 euros ;
- elle a subi, du fait du retard de diagnostic de la rétention urinaire, à raison de la perte de chance d'échapper à l'aggravation de son état de santé :
- un déficit fonctionnel temporaire de 168 jours, dont la réparation doit être évaluée sur la base d'un coût horaire journalier de 20 euros, soit une somme totale de 1 076 euros,
- des souffrances, évaluées à 4 sur une échelle de 7 par les experts judiciaires, qui doivent être indemnisées à hauteur de 12 000 euros,
- un déficit fonctionnel permanent compris entre 10 et 15 % qui, eu égard à son âge le jour de la consolidation, doit être réparé par le versement d'une somme de 21 000 euros ;
- après application d'un taux de perte de chance de 30 %, le montant total de ses préjudices s'élève à 10 222,80 euros.
Par un mémoire enregistré le 11 juillet 2023, la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis, représentée par Me Nemer, demande à la cour de :
1°) confirmer le jugement du 20 avril 2023 du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a condamné le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à lui verser la somme de 32 539,44 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2022 ainsi que la somme de 1 162,00 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
2°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 novembre 2023, le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la simple lecture des transmissions des infirmières fait référence à une diurèse d'un litre le 3 octobre 2013 ; un sondage a été réalisé le 3 octobre 2013 dans l'après-midi, et un nouveau sondage a été réalisé le 4 octobre au matin après la pose d'une sonde ; dans ces conditions, aucun retard fautif de diagnostic de rétention urinaire ne peut être imputé au centre hospitalier ;
- au surplus, cette rétention urinaire n'a été à l'origine que d'un lâchage des sutures du pôle supérieur du rein gauche, à l'origine de l'apparition d'une fistule, laquelle s'est secondairement infectée ; la rétention urinaire n'a donc pas été à l'origine de séquelles différentes de celles liées à l'infection, lesquelles ont été indemnisées par le tribunal ;
- Mme C... a subi un déficit fonctionnel temporaire en lien exclusif avec l'infection nosocomiale uniquement pendant les périodes comprises entre le 8 et le 25 octobre 2013 et le 9 au 15 novembre 2015 ; la somme de 425 euros allouée par les premiers juges, calculée sur la base d'un taux journalier de 17 euros, est généreuse au regard de la jurisprudence ; elle sera donc confirmée à défaut d'être minorée ;
- les premiers juges ont fait une juste appréciation de l'indemnité due au titre des souffrances endurées par Mme C... en allouant la somme de 1 500 euros ;
- ils ont fait une juste appréciation de l'indemnité due au titre du déficit fonctionnel permanent de Mme C..., évalué par les experts à 3 %, en allouant la somme de 3 600 euros.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... épouse C..., née le 20 novembre 1948, a subi, le 25 septembre 2013, une néphrectomie partielle d'une tumeur bénigne rénale gauche, avec pose de sonde dite " double J ", à l'hôpital privé de la Seine-Saint-Denis. Retournée à son domicile le 1er octobre 2013 après des suites opératoires sans complication, elle a présenté le lendemain, vers 14 heures, des troubles neurologiques et a été hospitalisée en début de soirée au centre hospitalier intercommunal (CHI) Robert Ballanger, où elle avait déjà été prise en charge par le service neurologique, en février 2012, pour une angiopathie amyloïde cérébrale et, en septembre de la même année, pour un hématome temporo-pariétal gauche. Les examens du scanner ont mis en évidence un hématome fronto-pariétal gauche et une récidive de l'hématome pariéto-temporal gauche. Le 3 octobre 2013, vers 13 heures 30, au vu notamment de l'aphasie sévère avec trouble de la compréhension majeur présentés par la patiente, elle a été prise en charge dans l'unité de soins intensifs neuro-vasculaires. A la suite d'une complication septique soupçonnée le 4 octobre en fin de journée, elle a été transférée dans le service de réanimation. Devant l'évolution favorable du sepsis le 7 octobre 2013, elle a été prise en charge par le service de neurologie, avant de retourner à son domicile le 25 octobre 2013. Une fistule urinaire a été ensuite décelée au mois de novembre 2013 et une éventration latérale lombaire gauche a fait l'objet d'une reprise chirurgicale au mois de novembre 2015. Par une ordonnance du 22 mars 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny a ordonné une expertise médicale. Les experts ont remis leur rapport le 5 décembre 2018. Par un courrier du 8 octobre 2021, reçu le 11 octobre suivant, Mme C... a adressé au CHI Robert Ballanger une demande indemnitaire préalable qui a été implicitement rejetée. Par un jugement du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Montreuil a condamné le CHI Robert Ballanger à verser, d'une part, à Mme C... la somme totale de 4 925 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'infection nosocomiale contractée lors de son hospitalisation en octobre 2013, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis la somme de 32 539, 44 euros, ainsi que la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, a mis à la charge du CHI Robert Ballanger la somme de 1 500 euros à verser à Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Mme C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité l'indemnisation de ses préjudices.
Sur la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger :
2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute ".
3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise judiciaire, que lors de son hospitalisation au sein de l'unité de soins intensifs neuro-vasculaires du CHI Robert Ballanger, Mme C... a présenté une rétention aiguë des urines d'origine neurologique dans la journée du 3 octobre 2013. Un sondage aller-retour a été effectué avec une diurèse d'un litre et une sonde urinaire à demeure a été placée, à la suite desquels Mme C... a développé une infection nosocomiale. Si les experts judiciaires soulignent qu'il est difficile de dater précisément le début de l'hyperpression des voies urinaires causée par le globe urinaire, ils indiquent que celle-ci se situe dans les douze heures qui précédent la fin d'après-midi du 3 octobre 2013. Il ressort des mentions des transmissions infirmières du 3 octobre 2013 que les infirmières de l'unité de soins intensifs neuro-vasculaires du CHI Robert Ballanger ont relevé, concernant l'état de santé de Mme C... : " confuse +++ (...). Se lève plusieurs fois pour aller aux WC sans nous appeler. Change mis en cas de fuite. Epoux autorisé à rester tard ce soir avec elle...Cherche à se lever régulièrement. (...) en début de nuit, patiente retrouvée debout à deux reprises...neurologue de garde appelé à prescrire oralement : Atarax 25 mg+ contention si besoin + acupan fait...A 1 h patiente tachycarde ECG vu par CDG...vers 5h : patiente se dégrade aphasie+ déficit droit... neurologue prévenu... scanner en urgence et fait...patiente en globe vésical...Aller-retour fait diurèse 1 L...ECBU fait... ". En outre, il ressort du compte-rendu d'hospitalisation de Mme C... qu'il est seulement mentionné, pour la journée du 3 octobre 2013, une hospitalisation en neurologie pour un hématome fronto-pariétal gauche et un hématome pariéto-temporal gauche, et qu'à compter du 4 octobre 2013, la patiente a présenté une anurie qui a nécessité la " pose d'une sonde urinaire le 4 octobre, diurèse après la pose de la sonde : 1 000mL, puis de nouveau anurie ". Il ressort de ces documents médicaux, notamment des transmissions infirmières du 3 octobre 2013 retraçant chronologiquement l'évolution de l'état de santé de la patiente et les soins apportés, que le sondage aller-retour vésical n'a pas été effectué le 3 octobre mais a été réalisé le 4 octobre, après 5 heures du matin. Si le 4 octobre 2013, un médecin a porté la mention " à recontrôler cet AM, car la patiente était en globe urinaire et cela peut expliquer l'insuffisance rénale (visiblement 1 000ml récupérer au sondage vésical) ", la date de ce sondage n'est pas précisée et la quantité d'urine correspond à celle du sondage aller-retour effectué le 4 octobre au matin. Dans ces conditions, la réalisation d'un sondage aller-retour dans l'après-midi du 3 octobre 2013 n'est pas établie.
4. Il résulte de l'instruction qu'il est difficile de poser le diagnostic d'une rétention aiguë des urines chez un patient présentant un état de confusion neurologique, notamment dans le cas d'une aphasie majeure comme cela était le cas en l'espèce, l'état d'agitation du patient pouvant résulter des troubles neurologiques. Toutefois, il ressort des transmissions infirmières du 3 octobre 2013 que dans l'après-midi du 3 octobre 2013, Mme C... s'est levée ou a tenté de se lever à plusieurs reprises pour aller aux toilettes. Un tel comportement, quand bien même la patiente était dans un état confus et agité, aurait dû alerter le personnel médical quant à une éventuelle rétention urinaire d'origine neurologique. En outre, il résulte de l'instruction que le mari de Mme C..., dont les déclarations sont constantes depuis 2013 et qui est resté avec son épouse jusqu'à 22 heures, a alerté le personnel soignant sur l'état d'agitation et de souffrance de son épouse qui émettait des cris de douleurs à chaque tentative de miction. Dans ces conditions, le diagnostic de rétention urinaire aiguë aurait dû être posé dès la fin de l'après-midi du 3 octobre 2013. Par suite, le retard d'une douzaine d'heures dans le diagnostic de la pathologie de Mme C... et le retard dans la prise en charge médicale qui en a découlé constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à l'égard de Mme C....
5. En second lieu, aux termes du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Les établissements, services et organismes susmentionnés [organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins] sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. ". Doit être regardée, au sens de l'article L. 1142-1, comme présentant un caractère nosocomial, une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge. Le CHI Robert Ballanger ne conteste pas sa responsabilité au titre des infections nosocomiales à point de départ rénale ou urinaire du fait des sondages urinaires et de la pose d'une sonde, contractées par Mme C..., à compter du 3 octobre 2013.
Sur les préjudices de Mme C... :
6. Il résulte de l'instruction que la rétention aiguë des urines d'origine neurologique présentée par Mme C... a été à l'origine du lâchage des sutures du pôle supérieur du rein gauche mises en place lors de la néphrectomie partielle du 25 septembre 2013 et de l'apparition d'une fistule qui s'est secondairement infectée. Il s'ensuit que les préjudices résultant du retard de diagnostic de la rétention urinaire aiguë et de sa prise en charge ne sont pas distincts de ceux résultant de l'infection nosocomiale, à l'exception des souffrances endurées par Mme C... pendant une douzaine d'heures le 3 octobre 2013 résultant directement et exclusivement du retard dans la prise en charge du globe urinaire.
7. Dans le cas où une infection nosocomiale a compromis les chances d'un patient d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de cette infection et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté mais la perte de chance d'éviter la survenue de ce dommage. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.
8. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, et il n'est pas contesté en appel que l'infection nosocomiale a été à l'origine, par l'intermédiaire de la fistule, d'une infection de la plaie de Mme C... résultant de la néphrectomie partielle subie le 25 septembre 2013, d'une fragilisation de cette plaie et par la suite d'une éventration lombaire, qui a nécessité une reprise chirurgicale le 11 novembre 2015, ensuite contrôlée le 20 juin 2016, et donc de préjudices exclusivement liés à cette infection nosocomiale. Par ailleurs, l'expert a fixé la date de consolidation de l'état de Mme C... résultant de l'infection nosocomiale subie au 11 décembre 2015, un mois après la reprise chirurgicale de l'éventration lombaire.
En ce qui concerne le déficit fonctionnel temporaire :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise judiciaire, que Mme C... a subi un déficit fonctionnel temporaire total, en raison d'hospitalisations, du 24 septembre 2013 au 25 octobre 2013, puis les 7 et 8 novembre 2013 et enfin du 9 au 15 novembre 2015. Toutefois, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, la période du 24 septembre au 1er octobre 2013 correspond à l'hospitalisation de Mme C... à l'hôpital privé de la Seine-Saint-Denis et sa prise en charge par le CHI Robert Ballanger n'a débuté que le 3 octobre 2013. Il s'ensuit que l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire total pour la période du 24 septembre au 2 octobre 2013, à nouveau demandée en appel par Mme C..., ne peut être mise à la charge du CHI Robert Ballanger. En outre, il résulte de l'instruction que pour la période du 3 au 8 octobre 2013, l'hospitalisation de la requérante était justifiée par la prise en charge de sa pathologie neurologique. Dans ces conditions, même si cette période d'hospitalisation a également été marquée par un retard dans le diagnostic de la rétention urinaire aiguë et de sa prise en charge ainsi que par le développement d'un sepsis du 4 au 7 octobre 2013, Mme C... ne peut être indemnisée au titre du déficit fonctionnel temporaire total subi pendant cette période.
10. En revanche, Mme C... a droit à une indemnité au titre du déficit fonctionnel temporaire total subi pendant la période du 8 octobre 2013, date à laquelle elle n'a plus été suivie dans le service de neurologie mais a été prise en charge dans le service d'urologie, pour le traitement de l'infection nosocomiale, au 25 octobre 2013, date de sa sortie de l'hôpital avec une sonde vésicale, soit une période de dix-huit jours. En outre, les experts judiciaires ont retenu les 7 et 8 novembre 2013 pendant lesquels Mme C... a subi la pose d'une nouvelle sonde double J de 28 cm, associée à une sonde vésicale, afin d'assurer la cicatrisation complète de la fistule urinaire, une micro-fistule persistant. Est également en lien direct avec l'infection nosocomiale la période du 9 au 15 novembre 2015, soit sept jours, correspondant à l'hospitalisation due à l'opération de cure d'éventration lombaire, cette éventration résultant de la fragilisation de la cicatrice latérale gauche par l'infection nosocomiale contractée au CHI Robert Ballanger. Enfin, le 3 décembre 2013, Mme C... a été hospitalisée pour le retrait de la sonde JJ. La période à indemniser est donc de vingt-huit jours. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme C... en l'évaluant à 480 euros.
11. En second lieu, il ressort du rapport d'expertise que les experts judiciaires n'ont pas retenu de déficit fonctionnel temporaire partiel, Mme C... étant autonome à sa sortie du CHI Robert Ballanger le 25 octobre 2013. Toutefois, il résulte de l'instruction que Mme C... a supporté, ainsi qu'il a été dit au point 10, une sonde double J associée à une sonde vésicale à compter du 8 novembre 2013, qui a nécessairement limité ses déplacements et ses activités et qui a nécessité des soins infirmiers. Il y a lieu de fixer le taux du déficit fonctionnel temporaire à 15 %. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme C... en l'évaluant, pour la période du 9 novembre 2013 au 2 décembre 2013, veille du retrait de cette sonde, soit vingt-quatre jours, à 200 euros.
12. La requérante sollicite une indemnité pour les périodes du 26 octobre au 6 novembre 2013 et du 4 décembre 2013 au 24 mars 2014, reprenant ainsi les périodes retenues par le docteur A..., urologue, sapiteur dans le cadre de l'expertise diligentée par son assureur. Toutefois, il ressort du rapport d'expertise judiciaire que Mme C..., bien que porteuse d'une sonde vésicale du 26 octobre au 6 novembre 2013, était autonome à la marche. Enfin, s'agissant de la période du 4 décembre 2013 au 24 mars 2014, il ne résulte pas de l'instruction que Mme C... aurait subi un déficit fonctionnel temporaire partiel, ni en tout état de cause, qu'il résulterait de la faute commise par le CHI Robert Ballanger ou de l'infection nosocomiale contractée en octobre 2013. Dans ces conditions, s'agissant de ces périodes, Mme C... n'est pas fondée à solliciter une indemnité au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel.
13. Il résulte des points 9 à 12 que la somme de 425 euros allouée par les premiers juges au titre du déficit fonctionnel temporaire doit être portée à 680 euros.
En ce qui concerne les souffrances endurées :
14. Il résulte de l'instruction que le 3 octobre 2013, Mme C... a souffert d'importantes douleurs lors des tentatives de miction du fait de la rétention urinaire aiguë, qui a été diagnostiquée et prise en charge avec une douzaine d'heures de retard. En outre, les experts judiciaires ont évalué à 4 sur une échelle de 7 les souffrances endurées par Mme C... du fait de l'infection nosocomiale, dont les premiers symptômes sont apparus le 4 octobre 2013, et qui a notamment nécessité la pose de plusieurs sondes vésicales, le retrait de la dernière sonde ayant eu lieu le 3 décembre 2013. Il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des souffrances endurées par la requérante en portant la somme de 1 500 euros allouée par les premiers juges à 3 000 euros.
En ce qui concerne le déficit fonctionnel permanent :
15. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise judiciaire, que l'infection nosocomiale, en provoquant une infection de la paroi rétrograde du rein vers la peau par la fistule, a eu pour conséquence une éventration latérale lombaire gauche qui a fait l'objet d'une reprise chirurgicale le 10 novembre 2015. Cette reprise chirurgicale a engendré pour la requérante des douleurs permanentes imposant un traitement par antalgiques. Les experts judiciaires ont évalué le taux du déficit fonctionnel permanent de l'intéressée à 3 %. Eu égard à l'âge de la requérante au 11 décembre 2015, date de consolidation des conséquences de l'infection nosocomiale subie, à savoir 67 ans, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 3 000 euros.
16. En se fondant sur le rapport du docteur A..., la requérante soutient également que la fonction rénale s'est progressivement dégradée du fait de l'infection nosocomiale et que cette dégradation est à l'origine d'un déficit fonctionnel permanent qui doit être fixé à 10 ou 15 %. Il ressort toutefois de ce rapport qu'une néphrectomie partielle entraîne, en dehors de toute complication, une perte néphronique de l'ordre de 10 % en moyenne, que le taux de créatininémie de Mme C... était normal le 24 octobre 2013, c'est-à-dire à la sortie du CHI Robert Ballanger et que les résultats de l'examen de tomodensitométrie abdominale, pelvienne du 4 septembre 2015 ne montrent pas d'anomalies. Dans ces conditions, le lien de causalité entre l'infection nosocomiale et le préjudice invoqué par Mme C... n'est pas établi.
17. Il résulte des points 8 à 16 que le montant que le CHI Robert Ballanger doit être condamné à verser à Mme C... doit être porté à la somme de 6 680 euros.
Sur les frais liés à l'instance :
18. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge du CHI Robert Ballanger la somme de 1 500 euros à verser à Mme C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHI Robert Ballanger la somme sollicitée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis sur le fondement des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La somme que le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger a été condamné à verser à Mme C... par l'article 1er du jugement du 20 avril 2023 du tribunal administratif de Montreuil est portée à la somme de 6 680 euros.
Article 2 : Le jugement du 20 avril 2023 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger versera à Mme C... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse C..., au centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Menasseyre, présidente de chambre,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.
La rapporteure,
V. Larsonnier La présidente,
A. Menasseyre
La greffière,
N. Couty
La République mande et ordonne la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA02735 2