Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 15 décembre 2020 par laquelle la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Île-de-France (CCIR) a prononcé son licenciement.
Par un jugement n° 2103089/2-2 du 26 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 août 2023, M. A..., représenté par Me Bellanger, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Paris du 26 juin 2023 ;
2°) d'annuler la décision de la CCIR du 15 décembre 2020 mentionnée ci-dessus ;
3°) d'enjoindre à la CCIR de le réintégrer dans un emploi équivalent à celui qu'il occupait avant son licenciement, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la CCIR une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures exigées à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- la décision attaquée est entachée de vices de procédure au regard de l'article D. 712-11-2 du code de commerce ; l'entretien du 3 décembre 2020 s'est tenu en dehors du délai de quinze jours, prévu à cet article ; en s'abstenant de répondre au courrier du 1er octobre 2020, il n'a pas refusé la proposition qui lui avait été faite ; il n'a pas disposé d'éléments d'information suffisants au cours de l'entretien préalable au licenciement ; au cours de l'entretien, il n'a pas refusé la proposition qui lui avait été faite ; le compte rendu de l'entretien ne lui a été communiqué que postérieurement à son licenciement ; il a ainsi été porté atteinte aux garanties dont il devait disposer ;
- la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'article 6.2.4.2 du statut du personnel administratif des CCI, en l'absence de consultation de la commission paritaire régionale ;
- la décision attaquée est illégale en conséquence de l'illégalité de la délibération du 16 juillet 2020 de l'assemblée générale de la CCIR sur le fondement de laquelle elle a été prise, au regard des articles L. 710-1, L. 251-1 et suivants, L. 712-11-1 et D. 712-11-2 du code de commerce ;
- la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'article L. 712-11-1 du code de commerce, et repose sur une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2023, la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Île-de-France, représentée par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 14 mars 2024, M. A... conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens.
Il soutient en outre que la décision attaquée est entachée d'erreur de fait, en ce qu'elle se fonde à tort sur la circonstance qu'il aurait refusé la proposition qui lui avait été faite.
Par une ordonnance du 18 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952, et le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,
- les observations de Me Tastard, pour M. A...,
- et les observations de Me Uzan-Sarano, pour la CCIR.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 28 mai 2020, l'assemblée générale de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Île-de-France (CCIR) a procédé à la création du groupement d'intérêt économique (GIE) de la CCIR, dont les adhérents sont la CCIR, certaines de ses filiales et tout autre établissement public souhaitant bénéficier des offres de service de ce GIE, afin, notamment, de lui transférer les " fonctions support " de ses adhérents. Le 16 juillet 2020, l'assemblée générale de la CCIR a adopté une délibération relative à l'évolution de l'organisation de ses fonctions support et au transfert au GIE de ses activités correspondant à ses fonctions support, le 1er janvier 2021. M. A... qui occupait alors en tant qu'agent public, le poste de directeur adjoint au sein de la direction du patrimoine et de l'immobilier de la CCIR, s'est vu transmettre, par un courrier daté du 1er octobre 2020, une proposition de contrat de travail de droit privé en vue de devenir salarié du GIE à compter du 1er janvier 2021. Estimant que M. A... avait refusé cette proposition, la CCIR l'a, après un entretien le 3 décembre 2020, informé, par un courrier du 15 décembre 2020, de son licenciement avec effet au 31 mars 2021, au terme d'un préavis de trois mois. M. A... fait appel du jugement du 26 juin 2023 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué, transmise à la Cour en application de l'article R. 741-10 du code de justice administrative, comporte la signature du président de la formation de jugement, de la rapporteure et de la greffière. Ainsi, le moyen tiré de l'absence des signatures requises manque en fait.
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
3. Aux termes de l'article L. 712-11-1 du code de commerce : " Sans préjudice des dispositions législatives particulières, lorsqu'une personne de droit privé ou de droit public reprend tout ou partie de l'activité d'une chambre de commerce et d'industrie, quelle que soit la qualification juridique de la transformation de ladite activité, elle propose aux agents de droit public employés par cette chambre pour l'exercice de cette activité un contrat de droit privé ou un engagement de droit public. / Le contrat de travail ou l'engagement proposé reprend les éléments essentiels du contrat ou de l'engagement dont l'agent de droit public est titulaire, en particulier ceux qui concernent la rémunération. Les services accomplis au sein de la chambre de commerce et d'industrie sont assimilés à des services accomplis au sein de la personne privée ou publique d'accueil. / En cas de refus de l'agent public d'accepter le contrat ou l'engagement, la chambre de commerce et d'industrie employeur applique, selon des modalités prévues par décret, les dispositions relatives à la rupture de la relation de travail prévues par le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie mentionné à l'article 1er de la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers. " Aux termes de l'article D. 712-11-2 du même code : " Le repreneur de tout ou partie de l'activité d'une chambre de commerce et d'industrie informe simultanément chaque agent de droit public concerné et la chambre de commerce et d'industrie qui l'emploie de sa proposition de contrat de droit privé ou d'engagement de droit public prévue à l'article L. 712-11-1 par lettre recommandée avec avis de réception. / Dans un délai maximum d'un mois à compter de la notification de ce courrier, l'agent concerné notifie simultanément sa réponse par courrier recommandé avec avis de réception à la chambre de commerce et d'industrie qui l'emploie et au repreneur. / En cas de refus de l'engagement ou du contrat proposé, sans préjudice des dispositions particulières de l'article 33 bis du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie mentionné à l'article 1er de la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers, relatif au licenciement d'un délégué syndical ou d'un représentant du personnel, et dans le respect des principes relatifs aux droits de la défense, la chambre de commerce et d'industrie concernée convoque l'agent public pour un entretien, dans un délai maximum de quinze jours ouvrés après la réception de son courrier / (...). / Sans préjudice des propositions de reclassement qui peuvent lui être adressées par la chambre de commerce et d'industrie qui l'emploie, si l'agent confirme son refus d'accepter le contrat ou l'engagement, la chambre de commerce et d'industrie notifie, au moins deux jours ouvrés après l'entretien, le licenciement de l'agent pour refus de transfert, par courrier recommandé avec avis de réception (...) ".
4. En premier lieu, il est constant que M. A... s'est abstenu de répondre au courrier du 1er octobre 2020 lui transmettant une proposition de contrat de travail, qui se référait aux dispositions citées ci-dessus des articles L. 712-11-1 et D. 712-11-2 du code de commerce, et précisait expressément qu'en cas de refus ou d'absence de réponse avant le 9 novembre 2020, il serait convoqué pour un entretien dans un délai maximum de quinze jours. S'il soutient devant la Cour, contrairement à ce qu'il avait affirmé devant le tribunal administratif, qu'en s'abstenant de répondre au courrier du 1er octobre 2020, il n'aurait pas refusé la proposition qui lui avait été faite, la lettre du 19 novembre 2020 le convoquant à l'entretien du 3 décembre suivant, se référait également aux dispositions citées ci-dessus de l'article L. 712-11-1 du code de commerce, et énonçait expressément : " dans le prolongement de votre refus du contrat de travail proposé par le GIE CCIR Paris Ile-de-France, j'ai le regret de vous informer qu'une mesure de licenciement est envisagée à votre égard ". Or, il n'a pas contesté la réalité de son refus après avoir reçu cette lettre. Il n'est donc pas fondé à soutenir qu'en l'absence de refus de sa part, la décision attaquée serait entachée d'un vice de procédure.
5. En deuxième lieu, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. En l'espèce, contrairement à ce que soutient M. A..., la circonstance que le délai de quinze jours, imparti à la CCIR pour organiser un entretien avec lui, a été dépassé, n'a pu, compte tenu des termes de la lettre du 19 novembre 2020, citée ci-dessus, le convoquant à l'entretien du 3 décembre suivant, l'induire en erreur sur l'objet de cet entretien. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance l'aurait privé d'une garantie. Le moyen tiré d'un vice de procédure pour ce motif, doit donc être écarté.
6. En troisième lieu, si M. A... soutient n'avoir pas disposé d'éléments d'information suffisants pour confirmer son refus au cours de l'entretien qui s'est tenu le 3 décembre 2020 en " visioconférence ", il ressort du compte-rendu de cet entretien qu'il a pu faire part de ses interrogations à son interlocutrice sur la proratisation des jours d'ancienneté en début d'année, ainsi que sur les modalités d'utilisation de son compte épargne-temps. S'il soutient que ce compte-rendu serait incomplet et ne retracerait pas certaines autres interrogations qu'il aurait exprimées, notamment sur le poste qui lui était proposé, l'attestation de la personne qui l'a accompagné, est insuffisante pour l'établir. Ainsi, même si son interlocutrice n'a pas été en mesure de lui répondre à propos de la proratisation des jours d'ancienneté en début d'année et des modalités d'utilisation de son compte épargne-temps, le moyen qu'il tire d'un vice de procédure, faute d'avoir disposé d'informations suffisantes, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, la circonstance, alléguée par M. A..., que le compte rendu de l'entretien du 3 décembre 2020 ne lui aurait été communiqué que le 28 décembre 2020, soit postérieurement à son licenciement intervenu le 15 décembre précédent, est sans incidence sur la régularité de la décision attaquée, aucun délai n'étant prévu pour la communication de ce compte-rendu.
8. En dernier lieu, le moyen tiré d'un vice au regard de l'article 6.2.4.2 du statut du personnel administratif des chambre de commerce et d'industrie, en l'absence de consultation de la commission paritaire régionale, doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
9. En premier lieu, ni les dispositions citées ci-dessus des articles L. 712-11-1 et D. 712-11-2 du code de commerce, ni celles de l'article L. 710-1 de ce code, relatives aux missions des chambres de commerce et d'industrie, ni encore celles des articles L. 251-1 et suivants du même code, relatives aux groupements d'intérêt économique, ne font obstacle au transfert des fonctions supports au titre des activités susceptibles d'être reprises par une personne morale distincte de la CCIR, et à ce que cette dernière puisse exercer un contrôle sur la personne morale repreneuse. Les moyens tirés par la voie de l'exception, de l'illégalité de la délibération du 16 juillet 2020 doivent donc être écartés.
10. En deuxième lieu, il ressort du compte-rendu de l'entretien du 3 décembre 2020 que, contrairement à ce que soutient M. A..., il a alors expressément confirmé " qu'il n'a pas répondu à la proposition de contrat qui lui a été faite en octobre dernier et qu'il n'accepte pas ce contrat. Il refuse le transfert vers le GIE ". L'attestation de son accompagnatrice et la circonstance qu'il avait postulé à un emploi au sein du GIE en juillet 2020, sont insuffisantes pour remettre en cause les énonciations de ce compte-rendu. Le moyen tiré d'une erreur de fait doit donc être écarté.
11. En troisième lieu, si M. A... soutient que le contrat de travail qui lui a été proposé, ne prévoyait pas les modalités d'utilisation des jours de congés épargnés sur son compte épargne-temps (CET), il résulte des termes mêmes des stipulations de l'article 8 de ce contrat que, dans l'attente d'un accord collectif qui instituerait un CET au sein du GIE et qui couvrirait l'ensemble de ses salariés, le salarié conserve les droits détenus sur son CET au jour de son transfert, et qu'il peut les utiliser dans les conditions alors en vigueur. Il résulte en outre du préambule de ce contrat que les " droits détenus sur le compte épargne temps au sein de la CCIR, tels qu'arrêtés à la date du 31 décembre 2020, ainsi que leurs conditions d'utilisation qui y étaient en vigueur " étaient maintenus. Dans ces conditions, et même si son article 8 réservait l'hypothèse d'un accord collectif instituant un CET au sein du GIE, M. A... n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que ce contrat ne reprenait pas les modalités d'utilisation de son CET. S'il fait également allusion à l'absence de maintien du régime d'indemnisation du licenciement pour suppression de poste prévu à l'article 35-2 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, au-delà du 1er janvier 2023, selon la décision unilatérale de l'employeur prévue par le contrat de travail qui lui a été proposé, il n'assortit son argumentation sur ce point d'aucune précision particulière, alors que l'article 12.5.2.1 de cette décision garantit en cas de licenciement pour motif économique après cette date, le montant de l'indemnité de licenciement due en cas de refus du contrat de travail. Enfin, si M. A... soutient que ce contrat ne décrit pas assez précisément les fonctions susceptibles de lui être confiées, son article 1er désigne tant le poste en question que sa classification, les autres informations ayant vocation à figurer dans la fiche de poste et non dans le contrat lui-même. Le compte-rendu de l'entretien du 3 décembre 2020, dont il n'établit pas le caractère incomplet, ne fait d'ailleurs pas apparaitre qu'il aurait posé des questions sur ce poste. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le contrat de travail qui lui a été proposé, ne reprendrait pas les éléments essentiels de son engagement de droit public auprès de la CCIR. Les moyens tirés de l'irrégularité de ce contrat au regard de l'article L. 712-11-1 du code de commerce et d'une erreur d'appréciation, doivent donc être écartés.
12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CCIR qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la CCIR sur le fondement de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la CCIR, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de la région Paris Île-de-France.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Bonifacj, présidente de chambre,
M. Niollet, président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mars 2025.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA03834