Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 mars 2023 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2315452 du 31 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 février 2024, et un mémoire enregistré le 10 janvier 2025, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme D..., représentée par Me de Seze, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation en ce qu'une demande d'admission exceptionnelle au séjour avait été déposée en complément de sa demande de titre de séjour ;
- le jugement ne répond pas de façon suffisamment motivée au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation dès lors, d'une part, qu'il n'est pas tenu compte de la situation particulière de son enfant, scolarisé en France, et, d'autre part, qu'il n'est pas fait mention de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;
- la situation étant identique, le jugement attaqué méconnaît l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 27 mai 2022, qui a censuré le précédent refus de séjour au motif qu'il était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'illégalité de l'arrêté attaqué :
- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'est pas motivée et ne procède pas d'un examen sérieux de sa situation dès lors qu'elle ne mentionne ni les éléments d'intégration de son fils, scolarisé depuis trois ans et dont les résultats scolaires sont remarquables, ni sa demande de convocation en vue de déposer une demande subsidiaire d'admission exceptionnelle au séjour, dont la préfecture avait pourtant accusé réception le 21 décembre 2022 ; il n'est en outre pas fait état du motif fondant l'annulation, par le tribunal, de l'arrêté lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
- elle méconnaît l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 27 mai 2022 ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit dès lors que la situation prévalant lors des précédents refus de titre de séjour, annulés par le tribunal administratif de Paris, n'a pas évolué dans le sens d'une diminution de l'impact d'une éventuelle interruption du traitement dont bénéficie son fils ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il n'est pas statué sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour déposée le 21 décembre 2022 ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors qu'elle repose sur une décision de refus de titre de séjour elle-même illégale ;
- elle n'est pas suffisamment motivée et ne procède pas d'un examen sérieux de sa situation ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2024, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés et que, notamment, il a examiné la situation de Mme D... au regard du séjour en tant qu'accompagnante d'un enfant dans le cadre du pouvoir discrétionnaire de régularisation.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 14 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Milon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante algérienne, née en 1964, est entrée en France le 16 mai 2018, munie d'un visa de court séjour. Elle a présenté une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour en vue d'accompagner son enfant, bénéficiaire de soins en France. Sa demande a été refusée par un arrêté du préfet de police de Paris en date du 3 juin 2020, qui a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Paris en date du 25 mai 2021. Mme D... a ensuite été mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour valable du 21 juin au 22 décembre 2021. Par un arrêté du 24 décembre 2021, le préfet de police de Paris a rejeté la demande de Mme D... tendant à la prolongation de ce titre de séjour . Par un jugement du 27 mai 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté au motif que celui-ci était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Mme D... a alors, à nouveau, été mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour valable du
21 juin au 20 décembre 2022, dont elle a sollicité la prolongation. Par un arrêté du
30 mars 2023, le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler cet arrêté. Par la présente requête, elle fait appel du jugement du 31 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, Mme D... reproche au jugement attaqué de n'avoir pas fait état de la circonstance, qu'elle a invoquée en première instance, tenant au dépôt, antérieur à l'édiction de l'arrêté attaqué, d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, en complément de sa demande d'admission au séjour en qualité d'accompagnante d'un enfant malade. Elle reproche également au tribunal de n'avoir pas relevé la situation particulière dans laquelle se trouve son enfant, qui est scolarisé en France, alors qu'elle en faisait état au soutien de son moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation. Toutefois, il résulte des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif de Paris, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par Mme D..., a expressément répondu au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation. Dès lors, le tribunal n'a ni omis de statuer sur ce moyen, ni entaché son jugement d'une insuffisance de motivation. Mme D... n'est dès lors pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité à ce titre.
3. En second lieu, Mme D... soutient que le jugement attaqué méconnaît l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 27 mai 2022, qui a annulé le précédent refus opposé à sa demande de titre de séjour au motif que celui-ci était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, une telle méconnaissance de l'autorité de la chose jugée, qui tient au bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité. Le moyen, inopérant en ce qu'il est soulevé au titre de la régularité du jugement, doit donc être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
4. En premier lieu, l'arrêté attaqué mentionne les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique notamment que Mme D... ne remplit pas les conditions fixées par ce texte, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ayant estimé dans son avis du 20 mars 2023 que si l'état de santé de son enfant, H..., nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. L'arrêté précise qu'aucun élément du dossier ne justifie de s'écarter de cet avis et mentionne les éléments ayant trait à la vie familiale de Mme D..., ainsi qu'à sa situation professionnelle. L'arrêté comporte, dès lors, les circonstances de droit et de fait sur lesquelles le préfet de police de Paris s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme D..., sans qu'il puisse lui être reproché de ne pas faire état de l'ensemble des éléments ayant trait à sa situation, en particulier ceux relatifs à la scolarité de son fils. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté doit être écarté.
5. En deuxième lieu, d'une part, eu égard à la motivation de l'arrêté rappelée au point précédent, l'absence de mention des éléments afférents à la scolarité du fils de Mme D... ne permet pas d'établir que le préfet n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la demande d'admission au séjour, présentée par l'intéressée, afin d'accompagner son fils, bénéficiaire de soins en France. D'autre part, aucune disposition législative ou règlementaire n'impose aux préfets d'instruire conjointement des demandes successives de titre de séjour présentées sur des fondements différents et d'y statuer par une seule et même décision. Dès lors, il ne peut être reproché au préfet de police de Paris de n'avoir pas statué sur la demande, déposée par Mme D... le 21 décembre 2022, tendant au bénéfice d'une convocation en vue de déposer, à titre subsidiaire, une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Par ailleurs, il ne ressort pas des motifs de l'arrêté attaqué que le préfet de police de Paris aurait entendu statuer sur cette demande d'admission exceptionnelle au séjour. Dès lors, l'absence de mention de cette demande dans l'arrêté attaqué n'établit pas que ce dernier procèderait d'un examen incomplet de la situation de l'intéressée. Enfin, cette preuve n'est pas davantage rapportée par l'absence de mention, dans l'arrêté, du motif fondant l'annulation, par le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 27 mai 2022, du précédent refus opposé à la demande de titre de séjour présentée par l'intéressée, ce jugement étant d'ailleurs, lui-même, mentionné dans l'arrêté. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour procède d'un examen non sérieux de sa situation.
6. En troisième lieu, par son jugement n° 2206197 du 27 mai 2022, irrévocable, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 24 décembre 2021 par lequel le préfet de police de Paris a précédemment refusé à Mme D... la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au motif que celui-ci était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée et celle de son enfant mineur. Il ressort des motifs de ce jugement, qui en constituent le soutien nécessaire, que le tribunal a relevé, au vu des pièces médicales versées au dossier, que le fils de Mme D..., victime de l'explosion d'une mine anti-personnelle en Algérie lui ayant fait perdre l'usage normal de ses membres supérieurs, a subi plusieurs opérations du membre supérieur droit et a été doté d'une prothèse de l'avant-pied droit et que celui-ci pourrait bénéficier d'une reconstruction par allogreffe du coude gauche lorsqu'il sera plus âgé. Le tribunal a, en outre, relevé que la durée des soins envisagés était de deux ans, que ce type de procédure chirurgicale n'est pas disponible en Algérie et que sa réussite dépendra notamment de la qualité du suivi paramédical de l'enfant.
7. L'arrêté attaqué a été pris au regard d'un nouvel avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) le 20 mars 2023 dans le cadre de l'instruction de la demande de Mme D... tendant à la prolongation du titre provisoire de séjour qui lui avait été délivré en exécution du jugement d'annulation rendu par le tribunal administratif de Paris le 27 mai 2022. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté dans la présente instance que le préfet s'est approprié le contenu de cet avis, selon lequel le collège des médecins de l'OFII a estimé que le défaut de prise en charge médicale de l'enfant ne devrait pas entrainer de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Alors qu'il a été rendu près de quinze mois après l'édiction de l'arrêté refusant à Mme D... la délivrance d'un titre de séjour pour accompagner son enfant malade, en réponse à une nouvelle demande, cet avis du collège des médecins de l'OFII doit être regardé comme une circonstance nouvelle de nature à écarter l'autorité de chose jugée s'attachant au précédent jugement d'annulation prononcé par le tribunal administratif de Paris. Par suite, la décision de refus de séjour opposée à Mme D... ne méconnaît pas l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Paris dans son jugement du 27 mai 2022. Pour les mêmes raisons, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté serait entaché d'une erreur de droit dans la mesure où la situation n'aurait pas évolué depuis l'édiction du précédent arrêté, annulé par le tribunal.
8. En quatrième lieu, les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au bénéfice des parents d'enfants mineurs dont l'état de santé répond aux conditions prévues par l'article L. 425-9 du même code, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Cette circonstance ne fait toutefois pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir de régularisation, délivre à un ressortissant algérien une autorisation provisoire de séjour pour l'accompagnement d'un enfant malade. Il est alors loisible au préfet de consulter pour avis le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).
9. Ainsi que l'a relevé le tribunal, le préfet de police de Paris ne pouvait, pour refuser la délivrance d'un titre de séjour à Mme D..., se fonder sur les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non applicables aux ressortissants algériens. Toutefois, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne privant pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, de délivrer à ces ressortissants un certificat de résidence pour l'accompagnement d'un enfant malade, il y a lieu de substituer l'exercice de ce pouvoir à la base légale erronée retenue par le préfet de police de Paris, dès lors que ce dernier dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'un et l'autre cas et que la requérante n'est privée d'aucune garantie.
10. Ainsi qu'il a été dit au point 7 du présent arrêt, il ressort des motifs de l'arrêté attaqué que le préfet de police de Paris a estimé, en prenant en compte l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII, le 20 mars 2023, que si l'état de santé du fils de Mme D..., F... A..., nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge n'est pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'enfant peut voyager sans risque. Il ressort certes des certificats établis les 22 février 2023 et 11 juillet 2023 par le Professeur C..., chirurgien orthopédique de l'hôpital Robert Debré, ainsi que du compte-rendu de consultation établi le 23 février 2023 par le Dr G..., médecin en charge du suivi de l'enfant au sein de l'espace pédiatrique Alice Blum-Ribes du groupe " UGECAM " que la prothèse mise en place au niveau du membre inférieur gauche de l'enfant nécessite une surveillance en milieu spécialisé et un renouvellement en fonction de la croissance de l'enfant, et que ce dernier bénéficie d'un suivi kinésithérapeutique, à raison d'une séance hebdomadaire. Ces documents confirment par ailleurs qu'une intervention chirurgicale est à prévoir en fin de croissance au niveau du coude gauche afin de " rétablir une meilleure fonction ". Toutefois, ni ces documents, ni le certificat établi le 26 janvier 2024 par le Dr C..., selon lequel l'intervention au niveau du coude pourrait avoir lieu dans les deux ans, ni les certificats établis par le médecin traitant de l'enfant, selon lesquels l'accès aux soins spécialisés serait difficile en Algérie, ne sont de nature à remettre en cause l'avis, émis par le collège de médecins de l'OFII quant au fait que l'absence de prise en charge de l'état de santé de l'enfant n'est pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, et alors même que l'enfant de Mme D... demeure handicapé dans ses gestes de la vie quotidienne et fait preuve, dans le cadre de sa scolarité, adaptée en France, d'un investissement remarqué par ses enseignants, la décision refusant à Mme D..., au titre du pouvoir de régularisation dont dispose le préfet, la délivrance d'un titre de séjour en vue d'accompagner son fils dans son parcours de soins ne peut être regardée comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. En cinquième lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, aucune disposition législative ou règlementaire n'impose aux préfets d'instruire conjointement des demandes successives de titre de séjour présentées sur des fondements différents et d'y statuer par une seule et même décision. Dès lors et en tout état de cause, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de droit, faute pour le préfet d'avoir statué sur sa demande, déposée le 21 décembre 2022, d'admission exceptionnelle au séjour.
12. En sixième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
13. Il ressort des motifs, non contestés, de l'arrêté attaqué, que l'époux et les neuf autres enfants de Mme D... vivent en Algérie, où celle-ci a vécu jusqu'à son arrivée en France en 2018, en vue de permettre à son fils F... A... de bénéficier de soins. Mme D... fait valoir que sa présence est indispensable auprès de son fils dans les gestes de la vie quotidienne. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le maintien en France du jeune F... A... n'est plus rendu nécessaire par la prise en charge de son état de santé. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la scolarité du jeune garçon, inscrit en classe de seconde à la date de l'arrêté attaqué, ne pourrait se poursuivre en Algérie. Dès lors, la décision attaquée portant refus de délivrance d'un titre de séjour à Mme D... ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette décision. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.
14. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
15. Il résulte de ce qui a été dit au point 13 du présent arrêt que le maintien en France du jeune F... A... n'est plus rendu nécessaire par la prise en charge de son état de santé. Dès lors, la décision refusant à Mme D... la délivrance d'un titre de séjour ne fait pas obstacle à ce qu'elle puisse, après leur retour commun en Algérie, accompagner son fils dans les actes de la vie quotidienne. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
16. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable au présent litige : " La décision portant de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3°de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ". En application de ces dispositions, l'obligation de quitter le territoire français, qui vise le 3° de l'article L. 611-1, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte en fait de celle de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, dès lors que celle-ci est suffisamment motivée ainsi qu'il a été précisé au point 4 du présent arrêt. L'arrêté indique, en outre, les éléments au vu desquels le préfet a estimé qu'il n'était pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
17. En deuxième lieu, compte tenu de ce qui été dit au point 5 du présent arrêt, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressée doit être écarté.
18. En troisième lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 4 à 15 du présent arrêt, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
19. En quatrième lieu, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés, pour les motifs énoncés aux points 10, 13 et 15 du présent arrêt.
20. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Mme D... n'assortit le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations d'aucune précision permettant au tribunal d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, ce moyen doit être écarté.
21. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.
Délibéré après l'audience du 20 février 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barthez, président,
- Mme Milon, présidente assesseure,
- Mme Lellig, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la cour, le 14 mars 2025.
La rapporteure,
A. MILONLe président,
A. BARTHEZ
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA00570 2