Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 28 juin 2023 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2324812 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juin 2024, M. A... B..., représenté par
Me Mesurolle, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2324812 du 9 janvier 2024 du tribunal administratif de Paris ;
2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 28 juin 2023 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision du 28 juin 2023 par laquelle le préfet de police de Paris l'a obligé à quitter le territoire français ;
5°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 611-3,9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2024, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une décision du 3 juin 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Palis De Koninck,
- et les observations de Me Mesurolle, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant mauritanien né le 30 décembre 1990, est entré en France en juillet 2018 selon ses déclarations. Il a obtenu le 3 décembre 2020, un titre de séjour en qualité d'étranger malade d'une durée de validité de neuf mois. Par un arrêté du 31 janvier 2022, le préfet de police a refusé de procéder au renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire. Par un jugement du 12 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et enjoint à l'administration de réexaminer la demande de M. B.... Par un arrêté du 28 juin 2023, le préfet de police a, de nouveau, refusé de renouveler le titre de séjour de l'intéressé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. M. B... relève appel du jugement du 9 janvier 2024 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté :
En ce qui concerne les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, il ressort de l'arrêté attaqué qu'il vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en mentionnant les articles dont il fait application, et décrit précisément la situation du requérant depuis son entrée sur le territoire français le 22 juillet 2018 selon ses déclarations. Ainsi cet arrêté contient l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquels se fonde le refus de titre litigieux, qui est ainsi suffisamment motivé. Par ailleurs, il ressort des énonciations très précises de cet arrêté que cette décision de refus de séjour a été prise au terme d'un examen de la situation particulière de
M. B.... Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de la situation de ce dernier, manquent en fait.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ".
4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un accès effectif au traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un accès effectif à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 6 février 2023, le collège de médecins de l'OFII a considéré que si l'état de santé du requérant nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ce dernier pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, la Mauritanie. M. B..., qui souffre d'un glaucome sévère, fait valoir tout à la fois qu'il ne pourrait bénéficier dans son pays d'un suivi approprié, que son traitement médicamenteux n'y serait pas disponible, et qu'en tout état de cause il ne pourrait y avoir un accès effectif. Toutefois, comme l'ont relevé les premiers juges, les certificats médicaux produits en première instance datés des 17 juillet 2023, 7 février 2022, 27 septembre 2021, 18 novembre 2020, 10 février 2020, 23 octobre 2019 et 8 juillet 2019 ne comportent aucune mention quant à la disponibilité des soins pour le requérant dans son pays d'origine permettant une prise en charge médicale appropriée à sa pathologie. Le certificat médical qu'il produit pour la première fois en appel, établi par le centre hospitalier national de la République islamique de Mauritanie, sans plus de précision sur son auteur, est rédigé en des termes très généraux et se borne à indiquer que M. B... ne peut pas bénéficier de son traitement et de son suivi en Mauritanie. Le requérant produit également un certificat médical établi, dans des termes tout aussi généraux, par un centre de santé français, daté du 30 septembre 2024, qui précise que l'état de santé de l'intéressé nécessite un suivi tous les six mois et un traitement à vie qui ne sont pas disponibles dans son pays d'origine. S'il produit un échange de courriels avec une entreprise pharmaceutique qui précise que les spécialités " Monoprost " et " Dualkopt " ne sont pas commercialisées en Mauritanie, il ressort au contraire de la liste des médicaments remboursés par la caisse nationale de l'assurance maladie mauritanienne que des médicaments composés des mêmes molécules que ces deux spécialités sont disponibles et prises en charge dans ce pays. Enfin si le requérant soutient qu'il ne disposerait pas d'un accès effectif au traitement nécessaire dans son pays d'origine, à supposer qu'il y soit disponible, il n'en justifie pas par les pièces du dossier. Ainsi, alors que l'accès effectif à un traitement approprié dans le pays d'origine n'implique pas que les soins dans ce pays soient équivalents à ceux offerts en France, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 précité doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. M. B... se prévaut d'une présence en France depuis 2018 ainsi que de son insertion professionnelle et de la reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé. Cependant, il ne se prévaut d'aucun lien personnel suffisamment ancien, stable et intense en France, alors qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales ou personnelles en Mauritanie où résident son épouse et leur enfant. En outre, s'il justifie avoir occupé différents emplois d'agent de service auprès de plusieurs employeurs en 2021 et 2022, cet emploi ne peut être regardé comme stable et pérenne. Dans ces conditions, le préfet de police n'a, en tout état de cause, pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris sa décision en refusant de lui délivrer un titre de séjour. Il n'a pas, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant.
En ce qui concerne les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de la décision litigieuse, selon lesquelles : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". Ce moyen ne peut qu'être écarté.
9. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de M. B... doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté se demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 28 juin 2023. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police de Paris et à l'Office français de l'Immigration et de l'Intégration.
Délibéré après l'audience du 4 février 2025 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Delage, président,
Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,
Mme Mélanie Palis De Koninck, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025.
La rapporteure,
M. PALIS DE KONINCK
Le président,
Ph. DELAGE Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA02779