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07/02/2025 | FRANCE | N°24PA01289

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 07 février 2025, 24PA01289


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par deux requêtes enregistrées sous les nos 2123346 et 2126818, les sociétés par actions simplifiées (SAS) MK2 Quai de Loire et MK2 Cinémas ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 31 août 2021 par laquelle le directeur général des finances publiques a refusé aux sociétés du groupe auxquelles elles appartiennent, le bénéfice de l'aide " coûts fixes groupe " prévue à l'article 12 du décret du 24 mars 2021 au titre de la période du 1er

janvier au 30 juin 2021, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes enregistrées sous les nos 2123346 et 2126818, les sociétés par actions simplifiées (SAS) MK2 Quai de Loire et MK2 Cinémas ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 31 août 2021 par laquelle le directeur général des finances publiques a refusé aux sociétés du groupe auxquelles elles appartiennent, le bénéfice de l'aide " coûts fixes groupe " prévue à l'article 12 du décret du 24 mars 2021 au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2021, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 2 septembre 2021 et la décision expresse du 29 novembre 2021 rejetant ce même recours.

Par un jugement commun n° 2123346, 2126818 du 6 février 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions des 31 août 2021 et 29 novembre 2021 du directeur général des finances publiques, a enjoint à l'administration de procéder au réexamen, dans un délai d'un mois, de la demande présentée par la société MK2 Quai de Loire pour l'ensemble des sociétés de son groupe, en incluant dans le chiffre d'affaires de référence de la société MK2 Cinémas, celui réalisé de janvier à septembre 2019 par les sociétés MK2 Tolbiac et MK2 Immobilier France dans le cadre de l'exploitation de leur branche d'activité cinématographique, transmise à la société MK2 Cinémas à compter du 1er octobre 2019 en application des traités d'apport d'actifs conclus le 26 juin 2019 et mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par les sociétés requérantes et non compris dans les dépens.

Procédure devant la Cour :

I.- Par une requête n° 24PA01289, enregistrée le 19 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2123346, 2126818 du tribunal administratif de Paris en date du 6 février 2024 en tant qu'il a annulé les décisions du 31 août 2021 et du 29 novembre 2021 du directeur général des finances publiques et mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais liés à l'instance ;

2°) de rejeter les demandes de première instance des société MK2 Quai de Loire et MK2 Cinémas.

Il soutient que :

- les juges de première instance ont entaché leur jugement d'erreurs de droit ;

- les dispositions du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 ne permettent pas la prise en compte du chiffre d'affaires réalisé par les sociétés apporteuses MK2 Tolbiac et MK2 Cinémas, devenue MK2 Immobilier France, dans le calcul du chiffre d'affaires de référence de la société MK2 Cinémas, anciennement MK2 Opérations 2, bénéficiaire des apports d'actifs ;

- ces dispositions ne remettent pas en cause l'établissement du chiffre d'affaires d'une entreprise dans le cadre d'une restructuration telle que la transmission universelle de patrimoine, lequel doit être apprécié au regard d'une seule et même personne juridique, les sociétés apporteuses étant juridiquement distinctes de la société bénéficiaire ; les traités d'apports partiels d'actifs signés le 26 juin 2019 prévoient que ces apports prendront effet le 1er octobre 2019, soit postérieurement à la période de référence et la société MK2 Cinémas anciennement MK2 Opérations 2, n'a pas été subrogée dans les droits des sociétés MK2 Tolbiac et MK2 Cinémas, devenue MK2 Immobilier France ;

- les sociétés apporteuses qui n'avaient réalisé aucun chiffre d'affaires sur la période de référence en 2019, ne pouvaient prétendre au bénéfice de l'aide " coûts fixes groupe ", subordonnée à une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50 % ;

- à défaut de production de l'attestation de l'expert-comptable - chapeau pour le groupe et de la fiche de calcul de l'ensemble des sociétés visées par la demande d'aide, justificatifs exigés à l'article 14 du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021, les sociétés ne pouvaient obtenir le versement de l'aide sollicitée ;

- en l'absence d'illégalité des décisions attaquées, le tribunal ne pouvait mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2024, la société MK2 Les Quais, anciennement dénommée MK2 Quai de Loire, et la société MK2 Cinémas, représentées par la SCP Boutet-Hourdeaux, concluent :

- à titre principal, au rejet de la requête ;

- à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint au premier ministre d'opérer les rectifications nécessaires au décret n° 2010-310 du 24 mars 2021 modifié par le décret n° 2021-625 du 20 mai 2021 afin de permettre aux sociétés ayant repris, par voie d'apport partiel d'actifs, l'exploitation de l'activité antérieurement exercée par la ou les sociétés apporteuses, de bénéficier du dispositif d'aide " coûts fixes ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les moyens soulevés par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ne sont pas fondés ;

- si la Cour devait annuler le jugement contesté, elle devrait, à titre subsidiaire, se prononcer sur le moyen tiré de l'illégalité du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 dans la mesure où ces dispositions portent atteinte au principe d'égalité de traitement entre les entreprises, en s'abstenant de prévoir le cas des sociétés dont l'activité a démarré au cours de la période de référence par voie d'apport d'actifs.

II.- Par une requête n° 24PA01290, enregistrée le 19 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2123346, 2126818 du tribunal administratif de Paris en date du 6 février 2024 en tant qu'il a annulé les décisions du 31 août 2021 et du 29 novembre 2021 du directeur général des finances publiques et mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais liés à l'instance ;

2°) de rejeter les demandes de première instance des société MK2 Quai de Loire et MK2 Cinémas.

Il soutient que :

- les juges de première instance ont entaché leur jugement d'erreurs de droit ;

- les dispositions du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 ne permettent pas la prise en compte du chiffre d'affaires réalisé par les sociétés apporteuses MK2 Tolbiac et MK2 Cinémas, devenue MK2 Immobilier France, dans le calcul du chiffre d'affaires de référence de la société MK2 Cinémas, anciennement MK2 Opérations 2, bénéficiaire des apports d'actifs ;

- ces dispositions ne remettent pas en cause l'établissement du chiffre d'affaires d'une entreprise dans le cadre d'une restructuration telle que la transmission universelle de patrimoine, lequel doit être apprécié au regard d'une seule et même personne juridique, les sociétés apporteuses étant juridiquement distinctes de la société bénéficiaire ; les traités d'apports partiels d'actifs signés le 26 juin 2019 prévoient que ces apports prendront effet le 1er octobre 2019, soit postérieurement à la période de référence et la société MK2 Cinémas anciennement MK2 Opérations 2, n'a pas été subrogée dans les droits des sociétés MK2 Tolbiac et MK2 Cinémas, devenue MK2 Immobilier France ;

- les sociétés apporteuses qui n'avaient réalisé aucun chiffre d'affaires sur la période de référence en 2019, ne pouvaient prétendre au bénéfice de l'aide " coûts fixes groupe ", subordonnée à une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50 % ;

- à défaut de production de l'attestation de l'expert-comptable - chapeau pour le groupe et de la fiche de calcul de l'ensemble des sociétés visées par la demande d'aide, justificatifs exigés à l'article 14 du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021, les sociétés ne pouvaient obtenir le versement de l'aide sollicitée ;

- en l'absence d'illégalité des décisions attaquées, le tribunal ne pouvait mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2024, la société MK2 Les Quais, anciennement dénommée MK2 Quai de Loire, et la société MK2 Cinémas, représentées par la SCP Boutet-Hourdeaux, concluent :

- à titre principal, au rejet de la requête ;

- à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint au premier ministre d'opérer les rectifications nécessaires au décret n° 2010-310 du 24 mars 2021 modifié par le décret n° 2021-625 du 20 mai 2021 afin de permettre aux sociétés ayant repris, par voie d'apport partiel d'actifs, l'exploitation de l'activité antérieurement exercée par la ou les sociétés apporteuses, de bénéficier du dispositif d'aide " coûts fixes ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les moyens soulevés par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ne sont pas fondés ;

- si la Cour devait annuler le jugement contesté, elle devrait, à titre subsidiaire, se prononcer sur le moyen tiré de l'illégalité du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 dans la mesure où ces dispositions portent atteinte au principe d'égalité de traitement entre les entreprises, en s'abstenant de prévoir le cas des sociétés dont l'activité a démarré au cours de la période de référence par voie d'apport d'actifs.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code civil ;

- l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 ;

- le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 ;

- le décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 modifié ;

- le décret n° 2021-1086 du 16 août 2021 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Hourdeaux représentant les sociétés MK2 Cinémas et MK2 Les Quais.

Considérant ce qui suit :

1. La société MK2 Quai de Loire a déposé le 22 juillet 2021 une demande d'aide " coûts fixes groupe " sur le fondement des dispositions de l'article 12 du décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 modifié, au nom de l'ensemble des entreprises du groupe auquel elle appartient, soit les sociétés MK2 Quai de Loire, MK2 AetE, MK2 Cinémas et YWF pour la période courant du 1er janvier au 30 juin 2021. Sa demande a été rejetée par une décision du 31 août 2021, confirmée sur recours gracieux par une décision expresse du 29 novembre 2021. Par les présentes requêtes, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la Cour d'annuler le jugement n° 2123346, 2126818 en date du 6 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé ces deux décisions et mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. Les requêtes enregistrées sous les nos 24PA01289 et 24PA01290, présentées par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, tendent à l'annulation du même jugement du 6 février 2024 du tribunal administratif de Paris, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. D'une part, l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 a institué un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. En application de l'article 3 de cette ordonnance, le décret du 30 mars 2020 a fixé le champ d'application du dispositif et les conditions d'éligibilité aux aides allouées par ce fonds. Aux termes de l'article 12 du décret du 24 mars 2021 instituant une aide visant à compenser les coûts fixes non couverts des entreprises dont l'activité est particulièrement affectée par l'épidémie de covid-19 : " Par dérogation aux dispositions du 1° du I de l'article 1er, les entreprises mentionnées à l'article 1er du décret du 30 mars 2020 susvisé peuvent bénéficier, au titre de la période allant du 1er janvier 2021 au 31 août 2021, d'une aide complémentaire destinée à compenser leurs coûts fixes non couverts par les contributions aux bénéfices, lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes au jour de la demande : / 1° (...) elles appartiennent à un groupe dont au moins une entreprise a obtenu un versement du fonds de solidarité au moins l'un des mois de l'une des périodes éligibles, et dont les autres entreprises n'ont pu obtenir le versement du fonds de solidarité pour le mois considéré, en raison de la contrainte liée au plafond mensuel de 200 000 euros au niveau du groupe prévue aux articles 3-19, 3-22 et suivants du décret du 30 mars 2020 (....) / 2° Elles remplissent, au titre de l'un des mois de l'une des périodes éligibles, les conditions prévues selon le mois concerné par les articles 3-19,3-22 et suivants du décret du 30 mars 2020 précité, mais n'ont pu obtenir le versement du fonds de solidarité pour le mois considéré en raison de la contrainte liée au plafond mensuel de 200 000 euros au niveau du groupe prévu auxdits articles (...) ". Aux termes de l'article 13 de ce décret : " I.- L'aide versée aux entreprises mentionnées à l'article 12 prend la forme d'une subvention unique correspondant à la somme des aides dues à chaque entreprise éligible faisant partie d'un groupe pour une, deux, trois ou quatre périodes éligibles mentionnées au troisième alinéa du II de l'article 1er ou pour la période de huit mois mentionnée à l'article 7 (...) ". Les articles 3-19, 3-22, 3-24, 3-26 et 3-28 du décret du 30 mars 2020 relatifs aux aides qui peuvent être accordées aux entreprises au titre des mois de janvier à août 2021, définissent la perte de chiffre d'affaires comme la différence entre, d'une part, le chiffre d'affaires réalisé au cours du mois au titre duquel l'aide est sollicitée et, d'autre part, le chiffre d'affaires de référence défini comme le chiffre d'affaires réalisé au cours du même mois en 2019 ou le chiffre d'affaires mensuel moyen de l'année 2019, si cette option est plus favorable à l'entreprise. Il ressort de ces mêmes dispositions que, pour l'attribution de l'aide, les seuils d'effectifs et les plafonds d'aide sont appréciés au niveau du groupe formé entre plusieurs entreprises.

4. D'autre part, aux termes de l'article 1844-5 du code civil : " (...) En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties si la société en offre et si elles sont jugées suffisantes. La transmission du patrimoine n'est réalisée et il n'y a disparition de la personne morale qu'à l'issue du délai d'opposition ou, le cas échéant, lorsque l'opposition a été rejetée en première instance ou que le remboursement des créances a été effectué ou les garanties constituées (...) ".

5. En premier lieu, il ressort des pièces des dossiers que la société MK2 Opérations 2, ultérieurement renommée MK2 Cinémas, a, dans le cadre d'une réorganisation des sociétés du groupe MK2, bénéficié d'apports partiels d'actifs des sociétés MK2 Tolbiac et MK2 Cinémas, elle-même renommée MK2 Immobilier France. Ces apports ont été réalisés par la conclusion de traités le 26 juin 2019 avec effet au 1er octobre 2019. Les sociétés apporteuses ont transmis à la société MK2 Cinémas l'ensemble des éléments d'actif et de passif compris dans leur patrimoine composant la branche relative aux activités d'exploitation de salles de cinéma. La réalisation de ces apports, que les parties ont placés sous le régime juridique des scissions prévu aux articles L. 236-16 à L. 236-21 du code de commerce, impliquait donc la transmission universelle du patrimoine de cette branche d'activité à la société MK2 Cinémas au 1er octobre 2019. Eu égard aux effets d'une transmission universelle de patrimoine et contrairement à ce que soutient le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, la société MK2 Cinémas, alors dénommée MK2 Opération 2, en tant que société absorbante, ne peut être considérée comme distincte des sociétés absorbées et doit être regardée comme ayant poursuivi l'activité d'exploitation de salles de cinéma des sociétés MK2 Tolbiac et MK2 Immobilier France, alors dénommée MK2 Cinémas. Dans ces conditions, eu égard à l'objectif des décrets du 30 mars 2020 et du 24 mars 2021, qui tendent respectivement à compenser, au profit des entreprises éligibles, les conséquences d'une variation à la baisse d'au moins 50 % de leur chiffre d'affaires à raison de la survenue de l'épidémie de covid-19 et à couvrir les coûts fixes non couverts par les contributions aux bénéfices de ces entreprises, l'appréciation de l'évolution de la situation économique de l'entreprise demanderesse, par comparaison à la période de référence précédant la survenue de cette épidémie, implique de tenir compte, dans le calcul de l'aide demandée, du périmètre de son exploitation, incluant le cas échéant les entreprises qu'elle a absorbées par voie de transmission universelle de patrimoine au cours de la période séparant la période de référence à retenir pour le calcul de l'aide de la période au titre de laquelle l'aide est demandée. La société MK2 Cinémas était par suite fondée à retenir comme chiffre d'affaires de référence, au sens des articles 3-19, 3-22, 3-24, 3-26 et 3-28 du décret du 30 mars 2020 susvisé, applicables aux demandes d'aides formées au titre des mois de janvier à juin 2021, les chiffres d'affaires réalisés par les deux sociétés apporteuses dans le cadre de l'exploitation de la branche d'activité transférée.

6. En second lieu, si le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique soutient qu'à défaut de production des justificatifs exigés à l'article 14 du décret du 24 mars 2021 susvisé, la société ne pouvait obtenir le versement de l'aide sollicitée, il n'établit par aucune pièce justificative la non-conformité à ces dispositions des documents présentés. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces versées aux dossiers que l'attestation de l'expert-comptable de la société, établie le 16 juillet 2021 à partir d'un formulaire type " demande d'aide " coûts fixes " - attestation expert-comptable " mis à disposition sur le site du ministère de l'économie, ne comporterait pas l'ensemble des informations nécessaires à l'examen des demandes présentées par la société. Par ailleurs et contrairement à ce que soutient l'administration, cette attestation contient la mention prétendument manquante de l'engagement de l'expert-comptable se rapportant à l'exactitude des données présentées et au calcul des éléments demandés. En revanche, l'article 1er du décret du 24 mars 2021 conditionne l'attribution de l'aide demandée notamment à une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50 % durant la période éligible. Il est constant que la société YWF appartenant au groupe n'a généré aucun chiffre d'affaires au cours de la période de référence en 2019. Si cette circonstance était le cas échéant de nature à justifier le refus partiel par l'administration de l'attribution de l'aide sollicitée à concurrence de celle qui aurait été due à la société YWF si elle avait rempli cette condition, elle ne permet cependant pas de justifier le rejet de la demande d'aide dans son intégralité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé les décisions des 31 août 2021 et 29 novembre 2021 et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais liés aux instances :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme totale de 2 000 euros au titre des frais liés aux instances et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes nos 24PA01289 et 24PA01290 du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sont rejetées.

Article 2 : L'Etat versera aux sociétés MK2 Quai de Loire et MK2 Cinémas une somme totale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et aux sociétés MK2 Quai de Loire et MK2 Cinémas.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Lemaire, président,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 7 février 2025.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

O. LEMAIRE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 24PA01289, 24PA01290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01289
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAIRE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SCP BOUTET - HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-07;24pa01289 ?
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