Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office.
Par un jugement n° 2309612 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 8 février 2024, Mme B..., représentée par Me Saligari, demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
2°) d'annuler le jugement n° 2309612 du 9 janvier 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;
3°) d'annuler les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 6 juillet 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil la somme de 1 500 euros au titre des articles L 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, à défaut d'admission à l'aide juridictionnelle, de lui verser cette somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une décision du 27 mai 2024, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de Mme B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Jayer a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante égyptienne née le 25 janvier 1972, est entrée en France selon ses déclarations en mars 2016. Le 11 avril 2022, elle a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 6 juillet 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Mme B... relève appel du jugement du 9 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Le bureau d'aide juridictionnelle ayant statué sur sa demande, les conclusions de Mme B... tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions contestées :
3. Il y a lieu d'écarter les moyens tirés du défaut de motivation des décisions contenues dans l'arrêté contesté et du défaut d'examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée, déjà soulevés en première instance et au soutien desquels la requérante ne présente en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau, pour les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par les premiers juges au point 4 de leur jugement.
En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14,L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Enfin, aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
5. Mme B... expose qu'elle vit, sans interruption, sur le territoire national depuis son entrée, en mars 2016, avec son conjoint et leurs trois filles, respectivement nées en 2016, 2019 et 2021, qui y sont scolarisées. Toutefois, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, en dépit de la durée de sa présence en France attestée par les pièces du dossier, la requérante ne justifie d'aucune insertion particulière dans la société française en se bornant à produire une promesse d'embauche datée du 30 janvier 2023. Si son époux, également ressortissant égyptien, qui a déposé une demande de titre de séjour en cours d'examen, est titulaire d'un récépissé l'autorisant à séjourner en France jusqu'en décembre 2023, Mme B... n'établit pas davantage que ce dernier qui a déclaré pour seuls revenus 15 000 euros en 2020, justifierait d'une insertion particulière dans la société française, notamment professionnelle. Enfin, la circonstance que ses enfants, dont l'aînée était seulement dans sa septième année à la date de la décision contestée, soient nés et scolarisés en France ne lui confère par elle-même aucun droit au séjour. La requérante qui a vécu jusqu'à l'âge trente-quatre ans dans son pays d'origine, s'y est mariée avec un compatriote et dont les parents vivent toujours en Egypte, ne justifie ainsi d'aucune circonstance faisant obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans ce pays. Par conséquent, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, serait contraire aux dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En second lieu, aux termes de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :
8 En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 7 qu'aucun des moyens soulevés à l'encontre de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme B... n'est fondé. Cette dernière ne peut dès lors se prévaloir de l'illégalité de cette décision. Le moyen tiré, par voie de conséquence, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour doit ainsi être écarté.
9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés aux points 5 et 7, les décisions litigieuses, qui n'ont pas pour conséquence une séparation durable de la cellule familiale, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée familiale de l'intéressée et garanti par l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'aux droits consacrés par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation des décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 6 juillet 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire de Mme B....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2024.
La rapporteure,
M-D. JAYERLa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA00607