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14/11/2024 | FRANCE | N°23PA02984

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 14 novembre 2024, 23PA02984


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme D... et F... B..., M. E... B... et M. C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris, par trois requêtes distinctes, de prononcer la décharge, en droits, intérêts de retard et majoration, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de prélèvements sociaux, ainsi que de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus pour M. et Mme D... B..., auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.



Par un jugement n°s

2013154, 2013160, 2013161/1-2 du 9 mai 2023 le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et F... B..., M. E... B... et M. C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris, par trois requêtes distinctes, de prononcer la décharge, en droits, intérêts de retard et majoration, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de prélèvements sociaux, ainsi que de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus pour M. et Mme D... B..., auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.

Par un jugement n°s 2013154, 2013160, 2013161/1-2 du 9 mai 2023 le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

I° - Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 7 juillet 2023 et le 8 août 2024 sous le n° 23PA02984 M. E... B..., représenté par Me Le Tacon, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 2013154, 2013160, 2013161/1-2 du 9 mai 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la cession d'actions de la société DNCA et Cie qu'il a réalisée en 2015 remplit l'ensemble des conditions pour bénéficier de l'abattement de 85 % prévu au 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts dès lors que l'apport, en 2011, de titres de DNCA Finances à DNCA et Cie constitue une simple opération intercalaire, qui a bénéficié du sursis d'imposition ;

- le principe de neutralité des opérations intercalaires énoncé par l'article 8 de la directive n° 2009/133 dite " Fusion " du 19 octobre 2009 s'oppose à ce que la condition de petite et moyenne entreprise posée par le 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts soit appréciée à la date de cette opération intercalaire.

Par deux mémoires en défense enregistré les 11 et 25 mars 2024 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II° - Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 7 juillet 2023 et le 8 août 2024 sous le n° 23PA02985 M. et Mme D... et F... B..., représentés par Me Le Tacon, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 2013154, 2013160, 2013161/1-2 du 9 mai 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de prélèvements sociaux, ainsi que de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la cession d'actions de la société DNCA et Cie qu'ils ont réalisée en 2015 remplit l'ensemble des conditions pour bénéficier de l'abattement de 85 % prévu au 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts dès lors que l'apport, en 2011, de titres de DNCA Finances à DNCA et Cie constitue une simple opération intercalaire, qui a bénéficié du sursis d'imposition ;

- le principe de neutralité des opérations intercalaires énoncé par l'article 8 de la directive n° 2009/133 dite " Fusion " du 19 octobre 2009 s'oppose à ce que la condition de petite et moyenne entreprise posée par le 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts soit appréciée à la date de cette opération intercalaire.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 11 et 25 mars 2024 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

III° - Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 7 juillet 2023 et le 8 août 2024 sous le n° 23PA02986 M. C... B..., représenté par Me Le Tacon, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 2013154, 2013160, 2013161/1-2 du 9 mai 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la cession d'actions de la société DNCA et Cie qu'il a réalisée en 2015 remplit l'ensemble des conditions pour bénéficier de l'abattement de 85 % prévu au 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts dès lors que l'apport, en 2011, de titres de DNCA Finances à DNCA et Cie constitue une simple opération intercalaire, qui a bénéficié du sursis d'imposition ;

- le principe de neutralité des opérations intercalaires énoncé par l'article 8 de la directive n° 2009/133 dite " Fusion " du 19 octobre 2009 s'oppose à ce que la condition de petite et moyenne entreprise posée par le 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts soit appréciée à la date de cette opération intercalaire.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 11 et 25 mars 2024 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Zerilli pour MM. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... ont créé en 2000 la société de gestion d'actifs DNCA Finance. En 2011, dans le cadre d'une opération de rachat avec effet de levier réalisée par le fonds d'investissement américain qui était devenu actionnaire majoritaire de cette société, ils ont apporté leurs titres de la société DNCA Finance ainsi que les titres démembrés de cette même société dont la nue-propriété appartenait à leurs enfants, A.... E... et C... B..., à la holding DNCA et Cie, spécialement constituée en 2011 pour cette opération. En 2015, M. et Mme B... et leurs deux enfants ont cédé les actions de la société DNCA et Cie qu'ils détenaient et appliqué à l'ensemble des plus-values ainsi réalisées, dans leurs déclarations de revenus au titre de cette année, l'abattement renforcé de 85 % pour durée de détention prévu au 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts alors en vigueur. Par des propositions de rectification du 6 mars 2018, l'administration fiscale a mis à la charge de M. et Mme B... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre de l'année 2015, et à la charge de MM. E... et C... B..., chacun, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de la même année, en appliquant aux plus-values qu'ils avaient réalisées en 2015 l'abattement de droit commun de 65 % prévu au b) du 1 ter de l'article 150-0 D du code général des impôts. MM. D..., E... et C... et Mme F... B... relèvent appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées n°s 23PA02984, 23PA02985 et 23PA02986 étant dirigées contre le même jugement et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. Aux termes du b) du 1 ter de l'article 150-0 D du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige, l'abattement applicable aux gains nets résultant de la cession à titre onéreux ou retirés du rachat d'actions, de parts de sociétés ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts est égal à : " 65 % du montant des gains nets ou des distributions lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession ou de la distribution ". Le 1 quater du même article dispose que : " A.- Par dérogation au 1 ter, lorsque les conditions prévues au B sont remplies, les gains nets sont réduits d'un abattement égal à : (...) / 3° 85 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession. / B.- L'abattement mentionné au A s'applique : / 1° Lorsque la société émettrice des droits cédés respecte l'ensemble des conditions suivantes : / a) Elle est créée depuis moins de dix ans et n'est pas issue d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes. Cette condition s'apprécie à la date de souscription ou d'acquisition des droits cédés ; / b) Elle répond à la définition prévue au e du 2° du I de l'article 199 terdecies-0 A. Cette condition est appréciée à la date de clôture du dernier exercice précédant la date de souscription ou d'acquisition de ces droits ou, à défaut d'exercice clos, à la date du premier exercice clos suivant la date de souscription ou d'acquisition de ces droits ; (...) / Lorsque la société émettrice des droits cédés est une société holding animatrice, au sens du dernier alinéa du VI quater du même article 199 terdecies-0 A, le respect des conditions mentionnées au présent 1° s'apprécie au niveau de la société émettrice et de chacune des sociétés dans laquelle elle détient des participations ". Le e du 2° du I de l'article 199 terdecies-0 A dispose que : " La société doit être une petite et moyenne entreprise qui satisfait à la définition des petites et moyennes entreprises qui figure à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie) ", l'article 2 de l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 disposant que : " La catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (PME) est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions EUR ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions EUR ".

4. Les dispositions précitées du B du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts prévoient, d'une part, que lorsque la société émettrice des droits cédés est une société holding animatrice de groupe, la condition, à laquelle est notamment subordonné le bénéfice de l'abattement renforcé, tenant à ce que la société en cause réponde à la définition des micro, petites et moyennes entreprises (PME), s'applique à la fois à la société holding émettrice et à chacune des sociétés dans laquelle elle détient des participations et, d'autre part, que le respect de cette condition s'apprécie à la date de clôture du dernier exercice précédant la date de souscription ou d'acquisition des droits cédés ou, à défaut d'exercice clos, à la date du premier exercice clos suivant la date de souscription ou d'acquisition de ces droits.

5. Il résulte des mêmes dispositions, et sans qu'il soit besoin de se référer aux travaux parlementaires, que lorsque les droits cédés sont des parts d'une société holding animatrice de groupe reçues par le contribuable en rémunération de l'apport de titres d'une autre société, le respect de la condition tenant à ce que les sociétés dont la société holding détient les participations, notamment celle dont les titres lui ont été apportés par le contribuable, répondent à la définition des PME, s'apprécie à la date de l'opération d'échange. Est à cet égard sans incidence la circonstance qu'en vertu des dispositions de l'article 150-0 B du code général des impôts, l'opération d'échange en cause n'ait donné lieu à aucune taxation immédiate, celle-ci n'intervenant, en application du 9 de l'article 150-0 D du même code, que lors de la vente ultérieure des titres de la société holding reçus en échange, le gain net étant alors calculé à partir du prix d'acquisition des titres remis à l'échange. Si le 1 quinquies du même article précise qu'en cas de vente ultérieure d'actions, parts, droits ou titres reçus à l'occasion d'opérations mentionnées à l'article 150-0 B, la durée de détention est décomptée à partir de la date de souscription ou d'acquisition des actions, parts, droits ou titres qui ont été remis à l'échange soit, en l'espèce, le 18 décembre 2003, cette circonstance est également sans incidence sur la détermination de la qualité de PME de la société dont les titres sont cédés, la société DNCA et Cie, et de celle de sa filiale, la société DNCA Finance, cette qualité devant, en l'espèce, s'apprécier en 2010 pour la filiale, en vertu du b) du B du 1 quater de l'article 150-0 D du code précité, les dispositions invoquées par les requérants ne portant, quant à elles, que sur la seule détermination de la durée de détention des actions, parts, droits ou titres cédés.

6. Or, en l'espèce, il est constant que la société holding émettrice DNCA et Cie dont la cession des droits en 2015, par les requérants, a donné lieu aux plus-values en litige, avait reçu des titres de la société DNCA Finance, sa filiale, apportés par les requérants qui, en échange, se sont vu attribuer, le 28 juillet 2011, des actions de la société DNCA et Cie, société émettrice des droits cédés en cause. Il est tout aussi constant qu'à la date de clôture de son dernier exercice précédant cet échange, soit le 31 décembre 2010, la société DNCA Finance, dont le bilan annuel s'établissait à 58 141 519 euros et le chiffre d'affaires à 91 986 864 euros, n'entrait pas dans la catégorie des PME. En conséquence, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'opération de cession des titres de DNCA et Cie à laquelle ils ont procédé en 2015 ne remplissait pas l'ensemble des conditions posées par les dispositions précitées de l'article 150-0 D du code général des impôts leur permettant de bénéficier, pour l'imposition des plus-value retirées de ladite cession, de l'abattement renforcé de 85 %.

7. Pour contester les impositions en litige, les requérants ne peuvent par ailleurs pas utilement invoquer le principe de neutralité fiscale des opérations d'échange énoncé par l'article 8 de la directive 90/434/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 sur les fusions, dès lors que ce principe est, par lui-même, sans incidence sur les modalités de détermination de la qualité de PME des sociétés émettrices des titres cédés et, s'il y a lieu, de leurs filiales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que MM. D..., E... et C... et Mme F... B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. E... B..., de M. et Mme D... B... et de M. C... B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à M. et Mme D... B..., à M. C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur chargé de la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2024.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. MONGIS La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 23PA02984, 23PA02985, 23PA02986


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02984
Date de la décision : 14/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL DELSOL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-14;23pa02984 ?
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