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16/10/2024 | FRANCE | N°22PA05417

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 16 octobre 2024, 22PA05417


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 27 septembre 2019 par laquelle le directeur adjoint, chargé des ressources humaines, du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges a prononcé son licenciement pour faute et à la condamnation du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 100 703,84 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis r

sultant de la décision du 27 septembre 2019 .



Par un jugement n° 1910543...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 27 septembre 2019 par laquelle le directeur adjoint, chargé des ressources humaines, du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges a prononcé son licenciement pour faute et à la condamnation du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 100 703,84 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis résultant de la décision du 27 septembre 2019 .

Par un jugement n° 1910543 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Melun a annulé la décision du 27 septembre 2019 par laquelle le directeur des ressources humaines du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges a prononcé le licenciement pour faute de M. C... à compter du 1er octobre 2019, a mis à la charge du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ainsi que les conclusions du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour:

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2022, M. C..., représenté par Me Gayat, demande à la Cour:

1°) d'annuler ce jugement du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 116 172,08 euros en réparation des préjudices subis résultant de la décision de licenciement prise à son encontre ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires car la décision de licenciement pour faute n'est pas justifiée au fond, faute d'avoir commis des fautes disciplinaires ;

- les griefs qui lui sont imputés, à les supposer établis, relèveraient de l'insuffisance professionnelle et non de la faute disciplinaire ;

- il a subi un préjudice financier de perte de rémunérations s'élevant à la somme de 73 978,52 euros

- il a subi un préjudice financier de perte de droits à la retraite s'élevant à la somme de 22 193,56 euros;

- il a subi un préjudice moral devant être réparé à hauteur de la somme de 20 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2023, le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges, représenté par Me Cochereau, conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que:

- la requête est irrecevable pour défaut de motivation en appel ;

- les moyens soulevés par M. C... sont infondés ;

- à titre subsidiaire, le préjudice financier devrait être limité à la somme de 20 196 euros.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 31 mars 2023, M. C... maintient ses conclusions par les mêmes moyens et en soutenant en outre que sa requête est recevable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

- l'arrêté du 2 mai 2005 relatif aux missions, à l'emploi et à la qualification du personnel permanent des services de sécurité incendie des établissements recevant du public et des immeubles de grande hauteur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,

- les observations de Me Rollin pour M. C...,

- et les observations de Me Agnoletti pour le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a été recruté en contrat à durée indéterminée en qualité de technicien supérieur hospitalier principal pour exercer les fonctions de chef du service de la sécurité incendie du centre hospitalier intercommunal (CHI) de Villeneuve-Saint-Georges à compter du 15 décembre 2008. La commission communale de sécurité a, le 7 novembre 2018, établi un procès-verbal de visite de la crèche de l'établissement de santé et émis un avis favorable à la poursuite de son activité et demandé la réalisation de certaines prescriptions. Par arrêté du 29 novembre 2018, le maire de la commune de Villeneuve-Saint-Georges a autorisé la poursuite de l'activité. En revanche, la sous-commission départementale pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique a, le 20 novembre 2018, rendu un avis défavorable à la poursuite de l'occupation de l'immeuble de grande hauteur (IGH) compte tenu des anomalies constatées. Au vu du rapport établi le 13 décembre 2018 par la directrice en charge de la direction des travaux et de la stratégie relevant plusieurs manquements de M. C... dans le suivi de la sécurité incendie de la crèche et de l'IGH mais également dans l'exercice de ses fonctions managériales, le directeur des ressources humaines l'a informé, le 6 février 2019, de l'ouverture d'une procédure disciplinaire. Par décision du 27 septembre 2019, le directeur des ressources humaines du CHI de Villeneuve-Saint-Georges a prononcé le licenciement de M. C... pour faute à compter du 1er octobre 2019. Ce dernier a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler cette décision et de condamner le CHI de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 100 703,84 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de cette décision. Par un jugement du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Melun a annulé, pour insuffisance de motivation, la décision du 27 septembre 2019, a mis à la charge du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ainsi que les conclusions du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges :

2. Contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, la requête de M. C... comporte bien une motivation spécifique en appel. La fin de non-recevoir susvisée doit donc être écartée.

Sur la responsabilité du centre hospitalier :

3. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour apprécier à ce titre l'existence d'un lien de causalité entre les préjudices subis par l'agent et l'illégalité commise par l'administration, le juge peut rechercher si, compte tenu des fautes commises par l'agent et de la nature de l'illégalité entachant la sanction, la même sanction, ou une sanction emportant les mêmes effets, aurait pu être légalement prise par l'administration. Le juge n'est, en revanche, jamais tenu, pour apprécier l'existence ou l'étendue des préjudices qui présentent un lien direct de causalité avec l'illégalité de la sanction, de rechercher la sanction qui aurait pu être légalement prise par l'administration.

4. Les premiers juges ont estimé que la faute commise par le centre hospitalier en prenant cette décision, entachée d'une insuffisante motivation, n'est pas à l'origine directe des préjudices dont M. C... demande réparation dès lors qu'une même décision de licenciement pour faute disciplinaire aurait pu être prise du fait des manquements de ce dernier en matière de suivi de sécurité tant dans l'établissement de santé lui-même, qui est un immeuble de grande hauteur vulnérable au feu, que de la crèche de l'établissement, les manquements dans sa pratique managériale n'étant en revanche pas établis.

5. En premier lieu, il convient de confirmer les premiers juges sur ce dernier point par adoption des motifs retenus à bon droit au point 14 du jugement attaqué alors que le centre hospitalier n'apporte dans son mémoire en défense aucun élément probant de nature à les infirmer.

6. En second lieu, il résulte de l'instruction que le CHI de Villeneuve-Saint-Georges reproche à M. C... des manquements graves en matière de suivi sécurité incendie de l'IGH et des manquements répétés en matière de suivi sécurité incendie de la crèche de l'établissement de santé tels qu'ils ont été précisés dans le rapport établi le 13 décembre 2018 par la directrice en charge de la direction des travaux et de la stratégie et le rapport disciplinaire du 1er février 2019. Ces manquements sont établis, comme l'a jugé à juste titre le tribunal aux points 12 et 13 du jugement attaqué, M. C... n'apportant pas d'éléments probants de nature à les infirmer dans la présente requête d'appel. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que ces manquements seraient dus à des négligences du requérant. Dès lors, ces griefs étaient de nature à caractériser seulement une insuffisance professionnelle et non des fautes disciplinaires de M. C..., le rapport susvisé du 13 décembre 2018 invoquant d'ailleurs l'insuffisance professionnelle de l'intéressé. Le requérant est donc fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'une décision motivée de licenciement pour faute disciplinaire aurait pu être légalement prise à son encontre.

Sur les préjudices :

7. En premier lieu, le requérant évoque une perte de rémunérations. Toutefois, dès lors qu'il pouvait légalement faire l'objet d'un licenciement pour insuffisance professionnelle, il ne justifie pas d'un tel préjudice en lien avec son éviction du service.

8. En deuxième lieu, le requérant invoque un préjudice financier lié à la perte de droits à la retraite. Toutefois, l'article 2 de l'arrêté du 26 décembre 2022 portant réintégration de l'intéressé, en exécution du jugement attaqué, dispose que les droits à pensions et à cotisations sociales de l'agent sont rétablis à compter du 1er octobre 2019. Ce préjudice n'est donc pas établi.

9. En dernier lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par le requérant du fait de la décision litigieuse en condamnant le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser une somme de 2 500 euros.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions indemnitaires en ce qui concerne la somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral, le surplus de ses conclusions indemnitaires devant être rejeté.

Sur les frais du litige :

11. D'une part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens. D'autre part il y a lieu de rejeter les conclusions du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges est condamné à verser la somme de 2 500 euros à M. C....

Article 2 : Le jugement n° 1910543 du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Melun est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges versera une somme de 1 500 euros à M. C... au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges présentées au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente de chambre,

- M. B..., president assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 octobre 2024 .

Le rapporteur,

D. PAGES

La présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de l'accès aux soins en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA05417


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05417
Date de la décision : 16/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : JDS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-16;22pa05417 ?
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