Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... Bourdin a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler son évaluation " à 360° " pour l'année 2019, notifiée le 17 juin 2019, ainsi que la décision du 4 octobre 2019, par laquelle le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a rejeté sa demande tendant à la révision de cette évaluation.
Par un jugement n° 1926273/6-3, 2013753/6-3 du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 mai 2022, Mme Bourdin, représentée par Me Baïta, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Paris du 10 mars 2022 ;
2°) d'annuler son évaluation à 360° pour l'année 2019, notifiée le 17 juin 2019, ainsi que la décision du 4 octobre 2019, par laquelle le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a rejeté sa demande tendant à la révision de cette évaluation ;
3°) en tant que de besoin, d'enjoindre au ministre de l'Europe et des affaires étrangères de procéder à la communication des pièces anonymisées de la procédure d'évaluation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif aurait dû enjoindre au ministre de produire les pièces anonymisées de la procédure d'évaluation ;
- il n'est pas établi que le panel des " évaluateurs-collaborateurs " était régulièrement composé, et qu'il était représentatif ;
- l'évaluation en litige n'est pas cohérente par rapport à ses précédentes évaluations, qui permettent de justifier de ses mérites professionnels ;
- elle est démentie par plusieurs attestations établies par d'anciens collaborateurs ou par d'autres personnes ayant travaillé avec elle, qui témoignent également de ses mérites ;
- ainsi, il n'est pas établi que la synthèse opérée par les évaluateurs était représentative de la compilation des questionnaires anonymisés.
Par quatre mémoires en défense, enregistrés le 30 octobre et le 27 décembre 2023, et les 25 juillet et 12 septembre 2024, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par trois mémoires en réplique, enregistrés le 1er décembre 2023, et les 25 juin et 10 septembre 2024, Mme Bourdin conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens.
Elle précise ne pas contester la régularité du jugement du tribunal administratif.
Par une ordonnance du 12 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- l'arrêté du 26 décembre 2011 relatif à l'évaluation d'agents d'encadrement supérieur relevant du ministère des affaires étrangères ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Baïta, pour Mme Bourdin.
Considérant ce qui suit :
1. Mme Bourdin, conseillère des affaires étrangères hors classe, a été nommée en tant qu'ambassadrice auprès de la République populaire du Bangladesh par décret du 26 octobre 2017. Elle a, au début de l'année 2019, fait l'objet d'une évaluation " à 360° " conformément aux dispositions de l'arrêté du 26 décembre 2011 relatif à l'évaluation d'agents d'encadrement supérieur relevant du ministère des affaires étrangères. La synthèse opérée par le collège des évaluateurs centraux lui a été notifiée le 17 juin 2019. Par une lettre en date du 16 août 2019, elle a demandé la révision de cette évaluation. Sa demande a été rejetée par une décision du 4 octobre 2019. Par un jugement du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de son évaluation et de la décision du 4 octobre 2019. Elle fait appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 26 décembre 2011 relatif à l'évaluation d'agents d'encadrement supérieur relevant du ministère des affaires étrangères : " L'évaluation à 360° constitue l'un des éléments permettant au ministre des affaires étrangères d'apprécier les capacités de l'agent évalué à exercer des emplois de haute responsabilité à l'administration centrale du ministère et dans les missions diplomatiques et les postes consulaires. Elle vise en particulier à évaluer les capacités de l'agent à animer et diriger une équipe, à coordonner l'ensemble des services placés sous son autorité, à assurer la bonne gestion des moyens de l'Etat et à faire preuve de dynamisme et de sens de l'initiative. " Aux termes de l'article 4 de cet arrêté : " Le ministre des affaires étrangères est chargé de l'évaluation des agents (...) / Il est assisté dans cette tâche par cinq évaluateurs centraux nommés par arrêté du ministre des affaires étrangères. Ces évaluateurs proposent au ministre les critères sur lesquels repose le dispositif d'évaluation à 360° et mettent en œuvre ce dispositif. A ce titre, ils préparent, au vu des critères validés par le ministre, le questionnaire mentionné à l'article 5 et établissent pour chaque agent une synthèse de son évaluation à 360°. Ils adressent chaque année au ministre des affaires étrangères un rapport sur la mise en œuvre du dispositif d'évaluation. " Aux termes de son article 5 : " L'évaluation à 360° est effectuée sur la base d'un questionnaire anonyme et sécurisé qui est rempli par : / - l'agent concerné qui procède à son auto-évaluation ; / - des responsables de service avec lesquels l'agent évalué est en relation directe de travail, que ces responsables soient en fonctions à l'administration centrale ou dans des missions diplomatiques et des postes consulaires ; / - des collaborateurs directs de l'agent évalué. " Aux termes de son article 6 : " Une compilation des réponses au questionnaire rempli conformément à l'article 5 est réalisée de façon automatisée et transmise par voie informatique aux évaluateurs centraux. / Sur la base de cette compilation, les évaluateurs centraux établissent pour chaque agent évalué à 360° une synthèse comportant une évaluation générale de l'agent ainsi, éventuellement, que des recommandations. / Cette synthèse est adressée au ministre des affaires étrangères. / Elle est communiquée à l'agent évalué. / Après communication de cette synthèse, l'agent évalué peut demander à s'entretenir avec les évaluateurs centraux. / A l'issue de la communication de la synthèse et, le cas échéant, de l'entretien, l'agent évalué peut formuler par écrit des observations sur son évaluation à 360°, lesquelles sont communiquées au ministre et conservées dans son dossier individuel. "
3. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme Bourdin, les attestations établies par le chef du détachement de sécurité de l'ambassade et par le directeur de l'Alliance française de Chittagong n'établissent pas qu'ils n'auraient pas été invités à répondre au questionnaire prévu à l'article 5 de l'arrêté du 26 décembre 2011, cité ci-dessus. En se bornant à faire état de ces attestations et des divergences qui séparent les réponses des responsables de service et celles de ses collaborateurs directs, et à soutenir que l'ambassade comptait vingt-et-un collaborateurs, alors que seuls onze d'entre eux ont effectivement choisi de répondre au questionnaire, Mme Bourdin ne démontre pas que certains de ses collaborateurs ou d'autres évaluateurs auraient été empêchés d'y répondre.
4. En deuxième lieu, en faisant état de certaines de ses évaluations antérieures à l'évaluation à 360° en litige, et en se référant aux attestations établies par certains de ses collaborateurs, par des diplomates étrangers, par des représentants d'organisations internationales, par des dirigeants associatifs, par des chefs d'entreprise et par diverses autres personnalités ayant travaillé avec elle, Mme Bourdin n'établit pas que la synthèse établie par les évaluateurs centraux, prévue à l'article 6 de l'arrêté du 26 décembre 2011, cité ci-dessus, n'aurait pas été établie sur la base de la compilation des réponses aux questionnaires. Cette synthèse et le commentaire qui l'accompagne, ne peuvent d'ailleurs être regardés comme ne résumant pas fidèlement ces mêmes réponses.
5. En troisième lieu, à supposer que Mme Bourdin ait entendu faire valoir ce moyen, ni ses évaluations antérieures à l'évaluation à 360° en litige, ni les attestations mentionnées ci-dessus ne démontrent que l'évaluation à 360° en litige reposerait sur une erreur manifeste d'appréciation.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme Bourdin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme Bourdin est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... Bourdin et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Délibéré après l'audience du 2 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Bonifacj, présidente de chambre,
M. Niollet, président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 octobre 2024.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLa présidente,
J. BONIFACJLa greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°22PA02179