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04/10/2024 | FRANCE | N°23PA03481

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 4ème chambre, 04 octobre 2024, 23PA03481


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.



Par un jugement n° 2207853 du 17 juillet 2023,

le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2207853 du 17 juillet 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 31 juillet 2023, 27 octobre 2023,

18 juin 2024 et 2 juillet 2024, M. B..., représenté par Me Boudjellal, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le moyen qu'il avait soulevé en première instance relatif à la convention internationale des droits de l'enfant visait tant l'article 23 que l'article 3-1 de cette dernière.

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance du titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen, tant au regard de sa situation personnelle que professionnelle ;

- la menace à l'ordre public que représenterait son comportement n'étant pas établie, ce motif est entaché d'une erreur de fait ainsi que d'une erreur d'appréciation ;

- le motif lié à la référence au fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) est entaché d'irrégularité ;

- la décision méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la menace à l'ordre public que représenterait son comportement n'est pas établie et ce motif est entaché d'une erreur de fait ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 18 juin 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au

22 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Mantz a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B..., ressortissant algérien né le 3 septembre 1988, a sollicité, le 23 juillet 2021, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 14 avril 2022, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... relève appel du jugement du 17 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En soutenant dans sa requête que, " le tribunal (n')a examiné le moyen de forme qu'au regard de l'article 23 de la C.I.D.E (convention internationale des droits de l'enfant) (...) mais le moyen visait également l'article 3-1 de la même convention lequel peut être directement invoqué par les particuliers ", M. B... doit être regardé comme invoquant le moyen tiré du défaut de réponse à ce moyen. Il résulte toutefois de la lecture du jugement que les premiers juges se sont bien prononcés, aux points 2 et 3 de celui-ci, sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. L'arrêté en litige qui vise les dispositions légales applicables, en particulier l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, précise que M. B... a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour et retient que ce dernier ne justifie pas pouvoir bénéficier à ce titre d'un titre de séjour mention " salarié " ou d'une mesure de régularisation sur le fondement de l'accord franco-algérien modifié, que ce soit sur le plan familial ou professionnel. Il mentionne également les raisons pour lesquelles la décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Cet arrêté qui rappelle les dispositions de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au refus de délivrance d'un titre de séjour en raison de la menace à l'ordre public que constitue la présence en France d'un étranger, mentionne, d'une part, les deux condamnations prononcées à l'encontre de M. B... en 2017 et 2019 et les délits à l'origine des peines infligées et, d'autre part, la circonstance que l'intéressé est connu au fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) pour vol simple du 7 novembre 2019 au 3 décembre 2019. Enfin, le préfet précise que l'intéressé, dont le comportement constitue, selon lui, une menace à l'ordre public, peut se voir refuser pour ce motif la délivrance d'un titre de séjour. L'arrêté attaqué répond ainsi aux exigences de motivation posées l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

5. En second lieu, la motivation de la décision de refus de séjour telle que précisée au point 4 ne révèle aucun défaut d'examen particulier de la situation personnelle et professionnelle de M. B....

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".

7. La menace pour l'ordre public s'apprécie au regard de l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant le comportement personnel de l'étranger en cause. Il n'est donc ni nécessaire, ni suffisant que le demandeur ait fait l'objet de condamnations pénales. L'existence de celles-ci constitue cependant un élément d'appréciation au même titre que d'autres éléments tels que la nature, l'ancienneté ou la gravité des faits reprochés à la personne ou encore son comportement habituel.

8. Pour refuser, au titre de son pouvoir de régularisation exceptionnel, l'admission au séjour de M. B..., le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé, d'une part, sur l'absence d'éléments suffisamment probants de nature à justifier de sa présence " réelle et continue " sur le territoire français depuis son arrivée en France le 17 juin 2014, d'autre part, sur l'absence d'intensité, d'ancienneté et de stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, en outre, sur l'absence d'une insertion socio-professionnelle effective et suffisamment stable et, enfin, sur la circonstance que son comportement constituerait une menace pour l'ordre public. Il ressort de l'arrêté attaqué que, s'agissant de ce dernier motif, le préfet a indiqué que M. B... a fait l'objet de deux condamnations par le tribunal correctionnel de Bobigny, la première par jugement du

3 avril 2017 à une amende de 450 euros pour conduite de véhicule sous l'empire d'un état alcoolique et conduite d'un véhicule sans permis, et la seconde par jugement du 6 décembre 2019 à huit mois d'emprisonnement pour recel habituel de bien provenant d'un vol. Le préfet a en outre fait valoir que l'appelant était " connu au fichier du traitement des antécédents judiciaires pour vol simple du 7 novembre 2019 au 3 décembre 2019 ". Toutefois, les faits ayant entraîné les deux condamnations précitées, malgré leur gravité, ainsi que ceux inscrits dans les extraits du fichier TAJ sur lesquels le préfet s'est fondé qui, s'ils permettent de constater que le requérant a été entendu par des services d'enquête pour de tels faits, ne permettent pas, en revanche, d'établir que les infractions considérées auraient, à l'issue de l'enquête, été jugées suffisamment caractérisées pour donner lieu à des poursuites voire à des condamnations pénales, ne sont pas suffisants à caractériser la menace à l'ordre public au sens des dispositions précitées de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que représenterait actuellement la présence en France de M. B.... Par suite, ce dernier est fondé à soutenir que ce motif est entaché d'une erreur d'appréciation.

9. Cependant, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, si M. B... soutient résider de manière continue en France depuis 2014, les pièces qu'il produit au soutien de cette allégation sont insuffisantes à établir sa résidence continue en France depuis cette date, notamment au titre des années 2016 à 2018. Il en résulte que sa résidence continue en France ne saurait être établie, au plus tôt, qu'à compter de l'année 2019, soit depuis environ trois ans à la date de la décision attaquée. Par suite, le requérant ne saurait se prévaloir d'une durée de présence en France significative. D'autre part, s'il invoque une vie familiale avec

Mme A... D..., compatriote avec laquelle il a eu un enfant né le 8 mai 2016 à Paris 10ème, la seule attestation de concubinage rédigée par cette dernière et lui-même le

3 novembre 2020, faisant état d'une vie maritale depuis février 2020, ne saurait suffire à l'établir dès lors que M. B... ne produit, sur la période concernée, aucun courrier portant son nom et celui de Mme D... adressé à son domicile de Pierrefitte-sur-Seine, ni, au demeurant, aucune pièce propre de Mme D... portant cette même adresse. Dans ces conditions,

M. B... ne saurait se prévaloir d'un concubinage depuis 2020 avec Mme D..., dont il a d'ailleurs divorcé le 29 août 2017 en Algérie, ainsi qu'il résulte de la mention marginale portée sur son acte de naissance du 3 mars 2021. Enfin, si M. B... fait valoir qu'il travaille en qualité de déménageur, initialement sous contrat de travail à durée déterminée puis à durée indéterminée à compter du 2 novembre 2019, avec la société de déménagement J.M.H., cette activité professionnelle, d'une durée d'environ deux ans et demi à la date de la décision attaquée et pour laquelle il n'invoque aucune qualification particulière, ne saurait suffire à caractériser une insertion socio-professionnelle ancienne et suffisamment stable. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, si le motif tiré de la menace à l'ordre public n'est pas établi, ainsi qu'il a été dit au point 8, les autres motifs qui ont fondé le rejet de la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. B..., à savoir l'absence d'éléments suffisamment probants de nature à justifier d'une résidence continue sur le territoire français depuis 2014, l'absence d'intensité, d'ancienneté et de stabilité de ses liens personnels et familiaux en France et l'absence d'une insertion socio-professionnelle effective et suffisamment stable sont, quant à eux, établis. Or il résulte des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision de rejet s'il ne s'était fondé que sur ces derniers motifs valides. Par suite, le moyen tiré de ce que la menace à l'ordre public que représente le comportement de M. B... serait insuffisamment caractérisée, s'il est fondé, reste en tout état de cause sans incidence sur la décision de rejet de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.

10. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

11. M. B... soutient que la décision contestée porterait atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant. Toutefois, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 9, le requérant ne justifie pas d'une vie commune avec la mère de son enfant, il ne justifie pas non plus d'une résidence commune avec ce dernier, la seule production d'un certificat de scolarité, en date du

28 mai 2021, portant l'adresse du domicile du requérant étant insuffisante à l'établir. En outre, le requérant ne produit aucune pièce de nature à établir qu'il entretiendrait des relations régulières avec cet enfant. Dans ces conditions, la décision contestée, qui n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de M. B..., n'a pas méconnu les stipulations précitées.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

12. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ".

13. Pour prononcer à l'encontre de M. B... une obligation de quitter le territoire français, le préfet s'est fondé à bon droit sur les dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant à l'autorité administrative de prendre une telle mesure à l'encontre d'un étranger qui a fait l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour.

14. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

15. M. B..., qui ne fait état d'aucun argument distinct de ceux exposés ci-dessus au point 9, tenant à la durée de son séjour en France, aux attaches familiales dont il dispose sur le territoire français et à son intégration professionnelle, ne démontre pas, pour les motifs précédemment évoqués, que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. En outre, et compte tenu des condamnations mentionnées au point 8 dont il a fait l'objet, le requérant ne saurait se prévaloir d'une quelconque insertion en France. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6-5 de l'accord franco-algérien, ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, M. B... ne peut utilement soutenir que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse faire l'objet d'une mesure d'éloignement.

16. En second lieu, pour les mêmes motifs exposés au point 11, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

17. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-7 du même code, dans sa rédaction applicable : " Lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative édicte une interdiction de retour. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-8 de ce code, également dans sa rédaction applicable : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Et aux termes de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

18. Pour prendre à l'encontre de M. B... une décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, le préfet de la Seine-Saint-Denis a effectué, ainsi qu'il l'indique dans son arrêté, un " examen d'ensemble " de sa situation au regard des critères mentionnés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, le motif, qui fait partie de ces critères, relatif à la menace pour l'ordre public que représenterait la présence de M. B... sur le territoire français est, ainsi qu'il a été dit au point 8, erroné. Or il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision, tant sur le principe que sur la durée de l'interdiction de retour, s'il s'était fondé uniquement sur les motifs correspondant aux autres critères. Dès lors, M. B... est fondé à soutenir que cette décision est entachée d'une erreur dans l'appréciation de sa situation. Il y a lieu, par conséquent, d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 en ce qu'il a fixé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

19. Le présent arrêt n'impliquant pas que le préfet délivre à M. B... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou procède au réexamen de sa situation, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

20. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er: Le jugement n° 2207853 du 17 juillet 2023 du tribunal administratif de Montreuil est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 14 avril 2022 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Article 2 : L'arrêté du 14 avril 2022 du préfet de la Seine-Saint-Denis est annulé en ce qu'il fait interdiction de retour à M. B... sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bruston, présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2024.

Le rapporteur,

P. MANTZ

La présidente,

S. BRUSTON

La greffière,

A. GASPARYANLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA03481


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03481
Date de la décision : 04/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRUSTON
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : BOUDJELLAL

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-04;23pa03481 ?
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