Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 11 octobre 2021 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride.
Par un jugement n° 2123260/4-2 du 25 septembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Petit, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 septembre 2023 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision mentionnée ci-dessus du 11 octobre 2021 ;
3°) d'enjoindre au directeur de l'OFPRA de réexaminer sa demande dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision litigieuse est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen de sa situation;
- ladite décision est entachée d'erreur d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 582-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2024, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, représenté par Me Laymond, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... B... sont infondés, outre que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant.
Un mémoire a été déposé pour M. A... B... le 14 septembre 2024, postérieurement à la clôture automatique de l'instruction, intervenue trois jours francs avant la date de l'audience conformément à l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de New-York du 28 septembre 1954 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès ;
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Petit, representant M. C... A... B....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A... B..., entré en France en 2015, selon ses déclarations, a sollicité le 15 janvier 2020, la reconnaissance de la qualité d'apatride auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Sa demande a été rejetée le 11 octobre 2021 par le directeur général de l'OFPRA. Par un jugement du 25 septembre 2023, dont M. A... B... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, la décision litigieuse du 11 octobre 2021 par laquelle l'OFPRA a refusé à M. A... B... la qualité d'apatride énonce les motifs de droit et les circonstances de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit donc être écarté. Dès lors qu'il ne ressort ni de cette motivation ni des autres pièces du dossier que l'OFPRA ne se serait pas livré à un examen complet de la situation de l'intéressé, le moyen tiré du défaut de cet examen doit également être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1er de l'article 1er de la convention de New York du 28 septembre 1954 : " Aux fins de la présente Convention, le terme " apatride " désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation (...) ". Aux termes de l'article L. 812-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La qualité d'apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l'article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux apatrides en vertu de cette convention ". Aux termes de l'article L. 812-2 du même code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides reconnaît la qualité d'apatride aux personnes remplissant les conditions mentionnées à l'article L. 812-1, au terme d'une procédure définie par décret en Conseil d'Etat ". La reconnaissance de la qualité d'apatride implique d'établir que l'Etat susceptible de regarder une personne comme son ressortissant par application de sa législation ne le considère pas comme tel.
4. Pour rejeter la demande de reconnaissance de la qualité d'apatride de M. A... B..., né le 25 décembre 1994, dans les campements de réfugiés sahraouis en Algérie, de deux parents d'origine sahraouie, et qui a été reconnu apatride par les autorités espagnoles en 2009, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé avait déclaré une filiation avec un ressortissant marocain, mais qu'il n'avait accompli aucune action pour se voir reconnaître cette nationalité à laquelle il avait pourtant droit.
5. D'une part, si le requérant se prévaut du fait que son statut d'apatride a été reconnu en Espagne, il n'invoque aucun texte international, ni de droit interne, législatif ou réglementaire, prévoyant que la reconnaissance d'un tel statut par un Etat s'impose aux Etats tiers.
6. D'autre part, la seule circonstance que le Sahara occidental est un territoire inscrit sur la liste des territoires non autonomes au sens de l'article 73 de la Charte des Nations Unies ne suffit pas à faire regarder les personnes d'origine sahraouie comme apatrides au sens de l'article 1er de cette convention.
7. Enfin, aux termes de l'article 6 du code de la nationalité marocaine : " Est marocain l'enfant né d'un père marocain ou d'une mère marocaine ". Il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., au cours de l'entretien réalisé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 août 2020 dans le cadre de l'instruction de sa demande, a indiqué que son père, qui avait quitté les camps de réfugiés pour le Sahara occidental vers 2008-2009, alors que l'intéressé était encore mineur, détient la nationalité marocaine. Or, le requérant ne justifie pas avoir mené des démarches sérieuses, suivies et adéquates auprès des autorités marocaines à la date de la décision attaquée, les demandes des 20 novembre 2023 et 7 janvier 2024 dont se prévaut le requérant en appel, postérieures à celle-ci, étant en tout état de cause sans incidence sur sa légalité.
8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté.
9. En troisième et dernier lieu, la décision qui attribue ou refuse d'attribuer la qualité d'apatride n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de conférer ou de retirer au demandeur le droit de séjourner en France. Par suite, M. A... B... ne peut utilement se prévaloir de ce que la décision attaquée aurait porté à son droit de mener une vie familiale normale une atteinte de nature à méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce moyen doit donc être écarté comme inopérant.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées ainsi que celles présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2024.
Le rapporteur,
D. PAGES
La présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA04850