Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 à 2017.
Par un jugement n° 1909204/3 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 décembre 2022 et 30 juin 2023, M. B..., représenté par Me Belkhodja, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration fiscale ne pouvait se fonder sur les dispositions de l'article L. 155 A du code général des impôts, lesquelles n'ont vocation à s'appliquer que si le prestataire apparent est domicilié ou établi hors de France ;
- la société MGP SI est établie en France ;
- le contrat de sous-traitance qu'elle a conclu avec des sociétés étrangères ne le concerne pas ;
- l'administration fiscale ne démontre pas que les sommes versées par la société MGP SI aux sociétés étrangères correspondent à des prestations de services qu'il a réalisées ;
- il n'avait aucun lien avec les sociétés étrangères ;
- l'activité salariée à temps partiel pour la société MGP SI couvre l'intégralité des prestations facturées à la Société générale ;
- il n'a réalisé aucune prestation pour le compte des sociétés étrangères ;
- il n'a en conséquence pas exercé d'activité occulte.
Par des mémoires en défense enregistrés les 9 mars 2023 et 24 janvier 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à ce que la cour rejette les conclusions de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 6 février 2024 la clôture d'instruction a été fixée au 22 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Perroy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la société MGP SI et d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. B..., qui exerce la profession de consultant informatique, l'administration fiscale a estimé que ce dernier avait effectué des prestations de services informatiques non déclarées au titre des années 2014 à 2017. Par une proposition de rectification du 11 décembre 2018, l'administration l'a informé de son intention de réintégrer à son revenu imposable, sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts et dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, le montant des prestations facturées par deux sociétés étrangères, les sociétés " AC Capital Management Limited " et " International Contractors Club Europe Limited ", à la société MGP SI en qualité de sous-traitantes de cette société, dès lors que M. B... devait être regardé comme ayant réalisé ces prestations de services. Les rectifications en cause ont été effectuées selon la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales, l'administration ayant considéré que M. B... avait exercé une activité occulte au sens de l'article L. 169 de ce livre. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti en conséquence au titre des années 2014 à 2017.
2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 155 A du code général des impôts : " Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : / - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; / - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A ". Les prestations dont la rémunération est ainsi susceptible d'être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.
3. Il résulte de l'instruction que les prestations de services informatiques rendues à la Société générale par la société MGP SI ont été sous-traitées aux sociétés " AC Capital Management Limited " et " International Contractors Club Europe Limited ", respectivement établies au Royaume-Uni et en Irlande, et facturées à la société MGP SI, située en France, pour des montants respectifs de 133 352 euros et de 70 564 euros au cours des années 2014 à 2017. Il résulte également de l'instruction et notamment des factures émises par les deux sociétés étrangères, désignant l'intéressé comme consultant informatique, des factures émises par la société MGP SI à l'intention de la Société générale, qui désignent également l'intéressé, et des comptes rendus d'activité faisant apparaître les périodes travaillées par M. B..., que ces prestations ont été matériellement effectuées par ce dernier. Les rémunérations litigieuses étant celles versées par la société MGP SI aux sociétés étrangères et facturées par ces dernières, M. B... ne saurait utilement faire valoir que la société MGP SI est établie en France et que le régime de l'article 155 A du code général des impôts n'a vocation à s'appliquer que si le prestataire apparent est domicilié ou établi hors de France. M. B... fait valoir qu'il était salarié de la société MGP SI et que les contrats signés par celle-ci avec les sociétés étrangères avec lesquelles il n'a aucune relation ne saurait lui être opposés. Toutefois, il ne développe, alors qu'il est le seul en mesure de le faire, aucune argumentation permettant à la cour de constater que ses contrats de travail, recouvraient, eu égard à la période concernée par ces contrats et aux nombres d'heures de travail qu'ils prévoient, soit 43 jours par an environ sur la période courant de juillet 2013 à 2015, l'ensemble des prestations qu'il a assurées dans le cadre de sa mission pour la Société générale, facturées par les sociétés étrangères et refacturées par la société MGP SI à la Société générale. Au contraire, il résulte de l'instruction que les contrats de travail produits au dossier liant M. B... à la société MGP SI portent sur une durée de travail très inférieure au contrat liant cette société à la Société générale, alors que ce contrat ne prévoyait un accès aux locaux que du seul M. B.... Il résulte également de l'instruction que les sommes versées par la Société générale ne sauraient en raison de leur importance, rémunérer les seules interventions de M. B... concernées par les contrats de travail produits au dossier. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant que les sommes versées par la société MGP SI aux sociétés étrangères correspondent à des prestations de services effectivement réalisées par M. B... et étaient par suite taxables en tant que rémunération de ces prestations sur le fondement des dispositions précitées de l'article 155 A du code général des impôts.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte (...) ". Dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.
5. Eu égard à ce qui a été dit au point 3, le service a pu à bon droit considérer que M. B... a effectué des prestations de services informatiques qui ne relevaient pas du contrat de travail dont l'intéressé était titulaire et qui entraient dans le champ de l'article 92 du code général des impôts au cours des années 2014 à 2017. Il est constant que cette activité n'a pas été déclarée au centre de formalités des entreprises, ni au greffe du tribunal de commerce, ni à l'administration fiscale, et n'a donné lieu à aucune déclaration de bénéfices non commerciaux dans les délais légaux pour les années en litige. En outre, M. B... n'établit pas avoir commis une erreur justifiant de ne pas s'être acquitté de ses obligations déclaratives. Dans ces conditions, le droit de reprise de l'administration s'exerçait jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'en l'absence de l'existence d'une activité occulte, l'administration ne pouvait pas faire application des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre en charge de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Magnard, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2024.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLa présidente,
S. VIDAL
La greffière,
C. ABDI-OUAMRANE
La République mande et ordonne au ministre en charge de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA0545902